le coup de la panne ? un classique -r.

Tu devais passer au centre commerciale pour récupérer une pièce dans une autre horlogerie de la ville pour récupérer des pièces qu'ils avaient en stock et dont ils voulaient bien vous dépanner. Un échange de bons procédés, ça marchait vraiment bien entre vous. Arrivée sur place, tu décidais de ne pas monter les trois étages à pied, surtout que les marches "design" c'était de la merde pour les grimper. Tu montais alors dans l'ascenseur très peu peuplé. Pendant qu'il montait tranquillement, tu fermais les yeux pour te mettre à murmurer une chanson que tu avais en tête depuis le début de la journée. Une chanson que tu n'avais pas eu l'impression d'entendre depuis très longtemps. Il y eu une secousse, un bruit étrange et puis plus rien. L'ascenseur ne bougeait plus. Tu ouvrais à nouveau les yeux, était-ce l'arrivée ? Les portes ne s'ouvraient pas et vous étiez coincés un peu après le second étage. Avec toi, il ne restait qu'un seul homme que tu ne semblais pas connaître. De toute façon même si c'était le cas tu ne t'en souviendrais pas. Tu n'avais qu'une liste de nom sans queue ni tête dans ton calepin. Une liste de nom qui te déprimait à mesure qu'elle s'allongeait. Une liste de nom sans la moindre idée des traits de visages qui se cachent derrière chacun. A mesure que ta situation durait dans le temps, tu commençais à perdre espoir pour que ça change bientôt. Tu te disais que ça allait durer toute ta vie. Comme cette coupure d'ailleurs. « Je crois qu'on va être coincés là pour un bon moment. » Ce n'était pas la première fois que ça t'arrivait mais pourtant, tu n'étais toujours pas rassurée à l'idée d'être coincée dans un espace si confiné. Et encore, tu avais de la chance, il n'y avait que lui, du coup tu ne souffrirais pas de claustrophobie à cause du monde.

L’ascenseur ne bougeait plus. Vous aviez passé le premier étage et vous deviez être à la moitié du second. Vous ne pouviez même pas essayer de forcer les portes en espérant avoir les portes du second étage. Il aurait pu avoir assez de force pour les ouvrir. C'était bien pensé. Il s'avançait alors pour appuyer à plusieurs reprises sur le bouton d'urgence. Tu te demandais bien pourquoi il existait parce qu'à chaque fois qu'un ascenseur tombait en panne, il ne repartait pas avant plusieurs heures. Comme si c'était rare et que le problème était difficile à trouver. Et pourtant, ça arrivait si souvent qu'ils pourraient être plus efficaces.  « Ça ne s.. » Tu t'arrêtais net de parler. Il s'était retourné vers toi et tu avais vu la deuxième moitié de son visage. Beaucoup moins harmonieuse que celle que tu avais pu voir jusque là. Son visage semblait être en charpie et tu n'avais pas pu masquer ta surprise en le découvrant. « Pardon. » Tu baissais doucement le regard. Vu son visage, ça devait être son quotidien, tout le monde ne pouvait pas le trouver beau et passer outre son physique. Ou alors les autres devaient être plus doués que toi pour cacher leur stupeur. Toi en tout cas, tu ne pouvais pas. Et si lui allait se souvenir de toi, tu savais que demain, il ne représenterait plus rien dans ton esprit. « Vous devez avoir l'habitude mais ça fait vraiment peur. » Tu allais sûrement passer pour une méchante personne qui accorde beaucoup d'importance à l'apparence physique. Ce n'était pas le cas mais ce n'était pas aujourd'hui qu'il allait le découvrir. Tu relevais alors le visage pour le regarder à nouveau et tu fus encore surprise. C'était vraiment moche mais tu l'oubliais assez vite si tu ne le regardais pas.

Il t'annonçait qu'il avait l'habitude mais qu'on ne lui présentait pas les choses de cette façon. Tu te demandais s'il avait plus le drôle à des hurlements de peur ou alors à des méchancetés sur l'apparence qu'il avait. Les deux devaient être aux coudes à coudes. Tu ne réagissais pas par méchanceté. Tu ne le connaissais pas, tu ne savais pas ce qu'il avait vécu pour en arriver là. Tu ne jugeais pas sans raison, mais tu avais un sentiment de peur en toi et tu avais assez de mal à le contrôler. Les préjugés essayant de se frayer un chemin pour gagner ton esprit et créer un sentiment de paranoïa. Il n'allait rien t'arriver de mal dans cet ascenseur. « Les gens arrivent vraiment à avoir du tact ? A ne pas réagir ? » Tu voulais bien savoir comment ils faisaient. Ça pourrait t'aider dans la vie, surtout que tu étais le genre de personne assez sensible et qu'un rien pouvait te faire ressentir quelque chose que tu finissais toujours par exprimer aux autres. Tu ne pouvais pas te cacher dans tes émotions. Tu étais grillée à cent mètres lorsqu'un garçon te plaisait un peu trop. « Ont-ils répondu ne serait-ce qu'une fois ? » demandais-tu simplement, lassée de le voir appuyer sur le bouton comme si ça allait fonctionner. Des grésillements se faisaient entendre, suivi d'une voix masculine un peu roque. Sûrement à cause de l'ascenseur ça. Il annonçait qu'un technicien était déjà sur place et qu'il allait le régler le problème. Selon ses estimations, il ne vous restait que dix minutes à attendre. Maximum. Mais tu imaginais déjà ce temps se multiplier par deux, voire même trois. « Il faut croire que c'est notre jour de chance. » Cette fois-ci c'était plus du sarcasme qu'autre chose.

Tu avais fini par demander si certains arrivaient à ne pas réagir. Sa réponse ne se faisait pas attendre. Assez rapide, au tout début et un peu plus longue juste après. Il t'expliquait qu'en général on ne lui disait pas de façon aussi cash qu'il faisait peur à voir. C'était peut-être un problème pour toi, tu avais très peu de mal à cacher ce que tu avais à dire. Au moins ça t'évitait les situations avec les non-dits sauf si l'autre en face souhaitait ne pas te répondre. « Je pense qu'il y a vraiment des gens pour qui le physique ne compte pas mais ça va jusqu'à un certain point, à un moment, on est quand même tous un poil superficiel. » Tu n'allais pas le cacher. Tu te trouvais joli et tu n'étais pas contre l'idée de sortir avec quelqu'un qui n'avait pas le physique d'un top modèle ou d'un acteur mais il y avait des limites. On avait tous des préférences, des physiques plus ou moins appréciés, tu étais même certaine que pour lui aussi ça devait être le cas. Mais peut-être que ça, tu allais le garder pour toi. Tu n'étais pas non plus stupide au point de t'attirer les foudres du jeune homme. « C'est pas bête comme raisonnement. » Après tout ce n'était pas en croisant les bras et en ne faisant rien que le problème allait s'arranger. Bien au contraire, c'était le meilleur moyen pour rester coincée pour le reste de ta journée. Au moins grâce à son acharnement, quelqu'un avait eu le mérite de vous répondre. « Je suis assez optimiste d'habitude mais là j'reconnais que je n'arrive pas à le trouver ! » Peut-être que tu t'étais levée du pied gauche, tu ne savais pas vraiment. Tu haussais simplement les épaules sans savoir quoi dire de plus. Ça pouvait t'arriver à toi aussi. Et quand on connaissait le temps moyen d'attente dans un ascenseur, tu ne pouvais simplement pas l'être. « On verra bien pour maintenant, on a rien à faire si ce n'est attendre. » C'était un constat, dont il pouvait bien se passer après tout. Mais tu n'avais pas ta langue dans ta poche.

Tu l'écoutais te donner sa version des personnes usant de cette phrase. Tu étais assez d'accord avec lui, ainsi qu'une personne assez joli peut en user par manque de confiance en elle. En tout cas, ce n'était pas ton cas. Mais tu n'étais pas pourtant désagréable. Tu savais bien l'image que tu devais dégager dans ces moments-là, tu n'y pouvais rien si tu étais un brin superficielle lorsqu'il s'agissait des hommes pour quelque chose en rapport avec l'amour. « Oui mais c'est effectivement plus craignos. » Et de ce fait beaucoup moins crédible. Tu n'étais pas contre te faire draguer et voir un garçon essayer de te faire la cour mais ce n'était pas pour autant que tu te laissais avoir. Encore moins avec ce genre d'approche. Tu sentais un once d'hypocrisie chez ces personnes et la seule chose que tu avais envie de faire c'était de fuir. Tu ne répondais rien sur l'optimisme. Avec ce que tu vivais, si tu n'en avais pas, tu ne serais pas capable d'avancer. Et il y a longtemps que tu aurais fini à l'asile, devenue folle à force d'avoir l'impression de vivre qu'une seule journée pour le reste de ton existence. Incapable de tisser de beaux et grands souvenirs. L'impression d'être réduite à néant pour le restant de tes jours. « Faut pas être optimiste et vous croyez au retour du karma ? » Tu n'osais pas le demander mais tu pensais que c'était une référence à se propre histoire. Après tout tu ne le connaissais pas et tu semblais l'avoir déjà un cherché avec ta réaction. Tu ne voulais pas non plus t'attirer ses foudres. Tu tentais même de retenir ton rire à sa question, tu ne pensais pas qu'il te poserait une telle question. Faut croire que tu te trompais en ce qui le concernait. « J'étais venue chercher des pièces pour mon travail. Et toi ? » demandais-tu de la même façon que lui. En tout cas, tu avais essayé du mieux que possible. Ce n'était pas quelque chose de très réussi. Tant pis, tu ferais avec. Tu lui laissais le temps de répondre avant de faire un aveu. « J'admets que me lancer dans des banalités sans grande conviction c'est pas ce que je préfère. » Tu allais devoir rester encore un moment avec lui et tu ne pouvais pas t'empêcher d'être un peu trop honnête.

Tu avais mal compris. Vu sa réponse, il était loin d'y croire. Il avait même un avis bien arrêté là-dessus. Un avis que tu ne partageais pas de toute évidence. Dire que les autres sont faibles parce qu'ils n'arrivaient pas à faire quelque chose, ça avait le don de te faire sortir de tes gonds. Tu n'allais pas lui sauter au cou, ni lui hurler dessus. Tu allais lui répondre avec calme, mais d'un ton un peu sec, fallait bien lui faire entendre ton mécontentement. « C'est vrai que la réalité est toujours facile à encaisser. Ce sont des mécanismes de défense. Vous, en réagissant avec de la colère, par exemple. » Tu ne voulais pas jouer les psys, tu étais loin d'être parfaite. Tu remarquais juste une pointe d'hypocrisie chez lui. Du moins, de ce que tu semblais comprendre de lui. Peut-être que tu te trompais sur toute la ligne. Mais son agressivité lié à son physique, tu avais du mal. Il voulait sûrement montrer qu'il ne fallait pas le chercher sous peine d'avoir des ennuis. C'était bien le genre à prendre la mouche rapidement. Tu essayerais déjà de l'éviter depuis le début. Tu avais un franc-parler qui pouvait en froisser plus d'un. Il fallait que tu te contrôle. Tu hochais la tête avant de lui dire que tu n'y arrivais pas vraiment. L'ascenseur ne bougeait pas d'un pouce, ça n'allait pas être pour tout de suite. « Peut-être que si vous étiez moins sur la défensive, ça pourrait se faire. » Tu avais rétorqué avec un fin sourire. Lui était peut-être défiguré mais il n'était pas le seul à souffrir dans cet ascenseur. Ce n'était pas parce que ça ne se voyait pas, mais toi aussi tu avais une vie compliqué et tout le monde ne comprenait pas. Il avait probablement plus de remarques que toi, mais ce n'était pas un concours.

Tu ne savais pas si c'était le genre de personne un peu borné comme tu pouvais l'être. Tu aimais bien avoir le dernier mot, tu aimais bien exposé tes idées quand tu sentais que tu pouvais le faire. C'était un peu tendu avec lui parce que tu avais le sentiment qu'il pouvait te sauter à la gorge à tout moment mais tu n'avais pas ta langue dans ta poche alors ça partirait sûrement en cacahuètes. « Il y a différent degré de colère, tu sais, tu peux ne pas être au summum mais moi ce que je vois, c'est de la colère. » Tu avais fini par le tutoyer, lui donnant encore une fois ton ressenti sur la situation. Tu avais été un peu froide avec lui et il t'avait répondu avec ce que tu estimait être de la sincérité. Vu la figure qu'il avait maintenant, tu te doutais bien que sa réalité à lui ne devait pas être évidente. Surtout quand il tombait sur des personnes comme toi, voire pire. Tu n'étais pas non plus très méchante. « J'ai dit que ça m'faisait étrange de parler banalité quand juste avant je me suis sentie agressée, j'y peux rien si je change pas de sentiments en deux secondes. » Tu ne savais pas faire, tu ne savais pas simplement passer à autre chose. C'était moins compliqué pour toi maintenant parce que perdre la mémoire chaque jour te faisait oublier les petites rancunes que tu avais eus la veille. Mais là tu ne pouvais pas oublier, tu ne pouvais pas simplement arrêter d'être ce que tu étais. « J'avais bien dit que ça prendrait plus de temps. » Après tout ce n'était pas eux qui étaient enfermé là-dedans, pas eux qui se retrouvaient à avoir une discussion un peu tendu avec un parfait inconnu. Tu t'approchais du bouton pour appuyer dessus mais rien ne semblait se produire.

De toute évidence, il n'appréciait pas ta réponse. Il te demandait rapidement si tu étais psy et si tu essayais de faire une analyse de son comportement. Tu étirais un sourire sur ton visage, en secouant doucement la tête. C'était une question légitime. « Il faut avoir un diplôme en psychologie pour faire des hypothèses ? » demandais-tu simplement en haussant les épaules. Tu avais le droit de t'exprimer et de donner ton avis, le droit de parler. C'était bien ça après tout, la liberté. Elle ne plaisait pas toujours, et par moment tu te disais que tu aurais mieux faire de te taire. Tu lui aurais sûrement donné l'impression de ne pas parler parce que tu as peur de son physique. Il n'était pas très beau à voir, tu ne pouvais pas dire le contraire mais au-delà de la surprise tu ne t'arrêtais pas toujours à ça. Mais en plus d'être moche, tu le trouvais assez virulent. « Il y a une différence entre être agressée et se sentir agressée, pas physiquement certes, mais verbalement oui. Et ça n'a rien à voir avec ton visage. T'as eu un accident, la vie ne t'as pas gâté toi non plus mais faut arrêter de croire que c'est à cause de ton physique, tu te discrimines tout seul. » Cette fois c'était une affirmation. Tu n'allais pas le laisser dire des choses qui n'étaient pas vraie. C'est sûr qu'en pensant de cette façon, il devait souvent avoir l'impression que tout le monde le dévisageait et qu'on devait penser que du mal de lui. Tu ne pouvais pas dire que c'est le cas de tout le monde, il y aurait toujours des cons pour juger au premier regard. Mais il ne fallait pas pour autant mettre tout le monde dans le même panier. « On peut espérer qu'il va se passer quelque chose, c'est bien pour ça que tu l'as spammé tout à l'heure. » Et puis ce n'était pas parce qu'il l'avait quelques secondes avant toi, que tu ne pouvais pas le faire à ton tour.