failure's no success at all, unless it leads to you (joan)

J'avais beau être né en Australie, n'avoir quitté Bowen que pour aller dans un autre coin du pays et donc ne jamais renier mes racines, je devais avouer que la passion du surf ne coulait pas dans mes veines. Pas comme la plupart des jeunes de mon âge qui passaient tout leur temps libre à pourchasser les plus belles vagues des côtes. Bowen était d'ailleurs situé dans un endroit de choix pour les amateurs de ce sport et pourtant, je n'avais jamais vraiment été attiré par la chose. Peut-être parce que par le passé, le sport n'avait jamais trop été ma tasse de thé, et que j'avais préféré me mettre à quelque chose d'un peu plus simple lorsque je m'y étais enfin intéressé. Peu importe, dans tous les cas, aujourd'hui était le grand jour. Le jour où je m'en prendrais plein la gueule d'eau salée. J'avais une planche de surf louée au centre nautique dressée à côté de moi, que je tenais légèrement appuyée sur mon épaule droite, et j'écoutais les directives de l'instructeur qui s'adressait au petit groupe dont je faisais parti. Quelle idée, je ne connaissais même pas quelqu'un autour de moi. J'aurais pu essayer de convaincre un ami au moins, de se joindre avec moi, mais non. J'avais préféré affronter la mer une première fois seul. Question de ne pas me foutre la honte et donner des histoires à raconter aux autres. Le genre de truc dont Jeff me parlerait encore à Noël dans dix ans ! Comme de fait, dès que nous quittâmes le sable de la plage pour aller nous pratiquer sur de vraies vagues, même si assez petites, je n'arrivai qu'à peine à tenir plus de cinq secondes sur le surf avant de me laisser tomber d'un côté ou de l'autre du surf. Le torse en premier dans l'eau, le dos qui claque contre la surface, la tête qui manque de se fracasser contre la planche, name it, je sentais ma fin s'approcher. Autant ma mort que mon abandon face à cette activité, en fait. C'est ainsi que, après une trentaine de minutes d'essais mais surtout d'échecs, je sortis de l'eau sans demander mon reste. Je rebroussai chemin jusqu'à l'endroit où nous avions laissé quelques effets personnels, et je plantai mon surf dans le sable. Je croisai le regard d'une jeune femme qui avait un léger sourire en coin, ou alors c'était mon imagination mêlée à ma honte qui me jouaient des tours. « J'imagine que j'viens de donner un magnifique spectacle, pas vrai ? » Dis-je en riant, visiblement en manque de dignité.

Je ne m’étais pas trompé, la jeune femme était bel et bien en train de regarder le véritable fiasco dont nous avions tous fait preuve, cet après-midi, en tentant d’affronter les vagues. Il va sans dire que c’était plutôt elles qui nous avait combattus, abattus. Je n’avais plus aucune énergie et je sentais déjà que mon réveil demain matin serait ponctué de gémissements de souffrance en raison des ecchymoses ou des douleurs musculaires. Étant typiquement le genre à baisser les bras assez rapidement, je me doutais fort bien qu’aujourd’hui était la toute première mais aussi la toute première fois que j’essaierais de me mettre au surf. Je trouverais bien autre chose à expérimenter, à la place. Ça se voyait, dans ma manière de me traîner dans le sable et de planter la planche à mes côtés, que ma motivation s’était totalement envolée. Mon orgueil m’ayant claqué la porte au nez, je n’avais pas hésité à m’adresser à cette femme au sourire moqueur au coin des lèvres, parce que je méritais certainement qu’on se moque un peu de moi. Et au fond, avec mon propre sourire de découragement, je m’humiliais aussi volontiers. C’est vrai. Elle ne tentait même pas de me rassurer, elle était sans scrupule ! Je ris avec elle, avant qu’elle ne reprenne la parole. « Dans cent ans, peut-être, oui ! » Ajoutais-je à la blague. Tenir plus de vingt secondes me semblait actuellement être le défi le plus insurmontable de mon existence. Trois secondes aurait été un objectif plus raisonnable. « Écoute, libre à toi d’essayer un jour mais j’te préviens, si tu n’as pas d’équilibre, les vagues auront ta peau ! » Et, comme pour confirmer mes propos qui n’étaient pas que figurés, je lui montrai mon dos et mon torse qui avait pris une couleur rougeâtre en raison de l’impact de mes chutes sur la surface de l’eau. « J’m’appelle Concho. » Dis-je en passant ma serviette dans mes cheveux d’une main, et en lui tendant l’autre main amicalement alors qu’elle était toujours assise.