It's a great way to meet new friends (Jackson)

Quand on débarque dans une nouvelle ville, on a tendance à chercher les coins où les gens se rassemblent. Pour Sarah, le Starbucks semblait être une bonne alternative. Une atmosphère chaleureuse se dégageait de cet endroit, même si elle ne comprenait pas trop ce concept de payer cinq dollars pour un café que l'on pouvait faire soi-même, si on s'en donnait le temps. Du temps... malheureusement, cela semblait être le grand manque de cette génération qui regardait sans cesse l'heure et qui finissait par oublier les fondamentaux. Installée à une table, un frappuccino à côté d'elle, la jeune femme observait les gens qui entraient, sortaient, se disant à peine bonjour, sans même se regarder. Encore un fait qu'elle ne comprenait pas, un de plus sur une liste bien conséquente. Elle ramena une mèche de cheveux qui s'était échappée de son chignon fait à la va-vite et réajusta son chemisier. Comment voulait-elle paraître pour une personne normale alors qu'elle avait l'impression d'être sans cesse déguisée ? Elle n'avait pas l'habitude de ces cols en V qui montraient un peu sa peau, elle n'avait pas l'habitude de laisser ses cheveux tels quels, sans être cachés par ces coiffes. Elle avait l'impression d'être anormale, alors qu'en réalité, elle se fondait dans la masse.

Après avoir tourné les pages de sa revue sans grand entrain, elle estima qu'il était temps de rentrer chez elle. Un soupir s'échappa de ses lèvres rosées alors qu'elle se dirigea vers la sortie. Mais ses yeux noisette s'arrêtèrent sur un jeune homme, installé à une table près de la sortie. Concentré, il semblait faire un semblant de dessin sur une tablette. C'était officiellement du design web, mais allez l'expliquer à cette jeune femme qui ne connaissait rien à la technologie. Son regard devait être insistant puisque le jeune homme finit par lever la tête et lui adresser un regard interrogateur. Gênée, Sarah répliqua : "Je suis désolée, je regardais simplement ce que vous étiez en train de faire." Se doutant que cela ne devait pas être courant, elle reprit tout aussi vite : "ça a l'air très intéressant ! Cela consiste en quoi ?"

Une fois de plus, tu avais du travail en retard. Tu avais promis à un ami à toi de l'aider dans la création de son site internet et surtout celui de son logo. Mais tu faisais ça lorsque tu avais du temps, entre deux contrats ou lors de tes pauses. Là, tu t'étais dirigé vers le Starbucks pour te poser un peu et pouvoir profiter de la fin de ton après-midi. Zoé était de garde, et tu étais malheureusement seul pour la soirée, car même ta colocataire avait des choses de prévu pour la soirée. Elle n'était donc pas à la maison. Nevermind. Tu avais commandé un capuccino, comme à ton habitude dans son enseigne. Ils te connaissent à force, car tu es toujours le mec qui prend toujours la même chose et tu ne changes pas d'avis. Même si tu restes à buguer 15 ans sur la carte et les suggestions, tu finis par commander le même produit, ce qui fait toujours rire le barista. Une fois ta boisson récupérée, tu te posais à une table et tu sortais ta tablette graphique afin de trouver une idée, un dessin pour le logo de ton ami. Pendant une bonne heure, tu n'avais pas levé les yeux de ta tablette, à vouloir toujours quelque chose de mieux et à te prendre la tête pour avoir la perfection. Lorsque tu levais les yeux, une jeune femme observait gentiment ce que tu faisais et tu lui lanças un regard interrogateur, sans être méchant évidemment. Elle s'expliqua de suite, dès qu'elle observa ton regard. « Oh ce n'est rien, je suis dessus depuis quelques jours mais je n'y arrive pas, donc je suis perdu dans mes pensées » répondis-tu avec un petit sourire aux lèvres. Elle semblait totalement intriguée, comme si elle n'avait jamais vu ça de toute sa vie. Pourtant, on en voit partout maintenant, des tablettes et des gens s'acharner sur leur travail. « Je suis web designer, je cherche un logo pour le site internet d'un ami, répondis-tu toujours en souriant. Vous voulez que je vous montre ? J'ai besoin d'autres avis que le mien » ajoutas-tu avec un léger rire. L'avis de quelqu'un d'autre pouvait toujours être mieux que d'avoir seulement le tien.

On avait souvent dit à Sarah qu'elle était trop curieuse, que c'était un défaut sur lequel il fallait travailler. Sa mère lui avait dit cela, puis son père et son enseignante. Même Andrew lui avait lâché cela au-détour d'une conversation, mais il avait sorti son sourire qui laissait voir sa légère fossette, et Sarah avait compris qu'il était le seul à aimer sa curiosité. Cet homme avait tout aimé chez elle, tout comme elle avait tout aimé de lui. Et maintenant, elle se trouvait à des kilomètres de lui, plus seule que jamais, dans un monde qui ne l'intéressait pas. Ou presque. Ce que faisait cet homme, attablé à cette table, avait fini par attirer son attention, par éveiller cette curiosité que l'on avait tant dénigré autrefois. Sarah s'était arrêtée et l'avait observé, avec un peu trop d'insistance puisque l'homme avait fini par relever la tête. Ne connaissant pas vraiment les codes de cette société, elle s'était directement excusée. Mais le sourire qu'il afficha rassura Sarah qui lui adressa, à son tour, un sourire. « L'inspiration ne vient pas ? » répondit-elle doucement. C'était le risque quand on se bloquait sur quelque chose. Le jeune homme finit par lui expliquer ce qu'il était et ce qu'il faisait. Sarah le regardait sans trop comprendre. Webdesigner ? C'était un métier, ça ? « Vous dessinez donc pour les sites internet ? » Il allait sûrement la prendre pour une ermite sortie de sa grotte, mais au fond, c'était bien cela. Elle avait le corps d'une jeune femme et l'âme d'une personne sortie des années 20. Et encore... Alors quand le jeune homme lui demanda si elle voulait qu'il lui montre ce qu'il faisait, Sarah garda son sourire sur les lèvres : « Ce serait avec plaisir, oui. » Plus petite, elle avait passé des heures et des heures à dessiner, cachant ses talents de dessinatrice à son entourage. Alors, elle ne pouvait qu'être curieuse concernant les nouvelles façons de créer quelque chose. Elle se rapprocha un peu et posa son regard sur le jeune homme, toujours souriante : « Je m'appelle Sarah. Et vous ? » Se présenter était quand même un bon commencement.