cause you make me feel like i'm so alone (carlisle)

Quelques jours auparavant, ses pieds touchaient le sol australien après six mois d'absence, ses yeux redécouvraient les couleurs qui bâtissaient la ville et pour la première fois depuis son accident, elle ne se baladait pas le cœur lourd d'un chagrin trop écrasant. Grace revenait avec le sentiment d'avoir accompli quelque chose de bien et d'en avoir fait assez. Doucement, ses habitudes revenaient et d'autres s'en créaient, même appartement mais nouveau boulot. Des mois avant son départ elle avait préparée ce moment où elle n'allait plus être qu'une simple dealeuse, ce n'était pas qu'une couverture, mais simplement un départ qu'elle voulait prendre pour ne plus être celle qui ne faisait rien aux yeux des autres. Ses premiers jours étaient étranges ayant plutôt l'habitude de se retrouver dans des endroits malfamés de la ville à distribuer à ceux en manque ce qu'ils voulaient contre plusieurs billets, les personnes qui entraient dans la fleuristerie étaient l'opposé de son deuxième job, ici le calme qui régnait, parfois même la solitude et ça lui rappelait l'époque où elle était religieuse, ce Monde était plus sain pour elle. Les compositions florales faisaient vivre la pièce de par leurs centaines de teintes, le parfum des multiples plantes embaumait l'endroit et pas un bruit pour la déranger lors de sa pause, même si celle-ci pouvait être interrompue par n'importe qui entrant dans la salle étant donné que sa patronne était absente pour quelques petites heures et qu'elle se retrouvait seule. Dans le magasin, une nouvelle silhouette se dessinait et lorsque leur regard entrait en contact automatiquement ses lèvres s'étiraient, faisant remonter ses pommettes. « Bonjour, je peux vous ... » Sa voix se paralysait laissant ses mots bloqués dans sa gorge. Sans réellement se contrôler, elle retourner presque se cacher derrière les bouquets. Grace ne s'attendait pas à voir ce visage après plusieurs années sans nouvelles, la seule chose qu'ils étaient de leur amitié n'était qu'un poignard planté tout droit dans le cœur de la châtaine qui s'était sentie trahie et délaissée. Si le pardon était ce qu'elle avait apprise à toutes les personnes qui lui avaient demander conseil, Grace n'avait jamais réellement pardonné Carlisle de l'avoir délaissé pour d'autres sûrement plus intéressants. « Si … Si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à m'appeler. » Lançait-elle dans un timbre de voix presque étouffé alors que ses yeux tournaient dans le vide pour ne pas le regarder.

Il préférait se dire qu’il n’avait pas fait exprès, que c’était purement un hasard s’il avait voulu acheter des fleurs pour son restaurant, chez ce fleuriste. En réalité, lorsqu’il était passé devant l’autre jour, il avait aperçu Grace à l’intérieur. Il s’était arrêté un instant, son cœur s’est serré, puis il est reparti en se promettant de revenir, pas seulement pour acheter quelques bouquets. Aujourd’hui il avait le temps, il était prêt. Il fallait qu’il se fasse pardonner, après toutes ses années. Petit à petit il entamait son chemin vers le pardon, en allant voir un à par un toutes les personnes qu’il avait déçu ou blessé durant sa vie. On peut dire qu’il y en a quelques unes car avant de devenir un homme calme adapte du yoga et des bons petits plats, il était un gamin un peu con, comme beaucoup, qui ne se rendait pas vraiment compte du mal qu’il pouvait faire parfois. Grace fait partie de ses gens à qui il a fait du mal et il s’en veut. Il n’a pas vu depuis des années, il a préféré oublier peu à peu son existence plutôt que de se rappeler qu’il avait fini par l’abandonner sans raison.
Prenant son courage à deux mains, il entra dans la magasin et aussitôt des odeurs agréables de fleurs et de plantes l’assaillirent. Le genre d’odeurs apaisantes et douces, pas vraiment en accord avec la situation. La jeune femme commença par le saluer comme un client lambda avant de le regarder. Elle se stoppa et Carlisle sentit sa gorge se nouer légèrement puis elle se reprit et continua en lui disant que s’il avait besoin d’aide, elle était disponible. Il prit une grande inspiration pour se détendre et entamer la discussion dans de bonnes conditions. Il attrapa une fleur qu’il fit glisser entre ses doigts en réfléchissant aux mots exactes qu’il allait lui dire, il ne voulait pas la blesser davantage. Finalement il s’approcha d’elle, la fleur toujours dans sa main « Grace je...les fleurs sont vraiment très belles... » Il se déçut lui même de ne pas avoir su faire mieux que cette pauvre phrase. Ses épaules tombèrent puis il se reprit. « Je sais que ça va te paraître con que je vienne comme ça mais...je sais que ça fait des années mais je m’en veux d’avoir été con. »

Sa voix remplissait l'espace, prenant le souffle de la jeune femme qui se laissait submerger par des souvenirs qu'elle avait laissés s'échapper des années auparavant. Les belles images étaient nombreuses, mais ce qui lui revenait à l'esprit est ce qu'elle s'est dit lorsqu'elle s'était retrouvée seule, abandonnée par le seul être sur qui elle comptait. Ce sentiment de vide qui l'avait parcouru en le voyant avec d'autres, mieux qu'elle. Grace avait rempli ce vide par de la tristesse et de la colère, sans pour autant n'en parler à personne. Parce qu'elle n'avait plus personne. Peut-être que s'il était parti c'était de sa faute, elle s'en était même convaincue, elle n'avait pas été à la hauteur, elle n'était pas l'amie qu'il méritait. Sa mémoire n'avait jamais réussie à effacer son visage, il avait été trop important pour elle. Elle avait simplement accepté le départ de son camarade, se jurant simplement de ne plus donner autant d'importance à quelqu'un. Chose qu'elle n'avait encore pas respecté, parce qu'elle avait donné sa confiance à tellement de personnes et que chacune d'entre elles avaient apporté une marque à son cœur, parfois même de sa faute, de ses pensées qui ne s'harmonisaient pas. Grace s'espérait fondre dans son camouflage, caché derrière des compositions florales, elle voulait croire qu'il s'en irait sans chercher à croiser son regard, qu'ils n'échangeraient que des banalités. Mais elle entendait ses pas s'avancer dans la fleuristerie. À l'entente de son prénom, un rire s'évadait sans qu'elle ne puisse le contrôler, si ses jambes voulaient s'enfuir pour ne pas avoir à le confronter, ses yeux ne pouvaient s'enlever de son visage qu'elle redécouvrait. Les mots restaient bloqués dans sa gorge, elle ne parvenait même pas à me remercier. Ses paroles laissaient croire que sa présence n'était pas un hasard et une chaleur étrange l'embaumait, ses pommettes se retroussaient laissant deviner un léger sourire qu'elle tentait de contrôler. « … Je ne sais pas quoi te dire. » Grace avait eu des années pour s'imaginer des retrouvailles, lui trouver que lui dire pour ne pas subir ce silence qu'elle laissait, mais elle ne l'avait jamais fait parce qu'elle pensait ne jamais le revoir. Ou peut-être qu'elle ne voulait plus le revoir. « Si ta conscience est soulagée, tu peux partir. » Peinait-elle à dire de sa voix timide. Ses pupilles se détournaient, parce que lui parler de cette manière était quelque chose de nouveau. En soit, il n'y avait rien d'insultant, mais elle n'avait jamais repoussé une présence face à lui et encore moins la sienne. « Avec le temps, j'ai compris que tu n'étais pas si différent des autres et que j'étais une tâche. Je peux pas t'en vouloir de m'avoir laissé. » Ses mains commençaient à s'occuper avec les fleurs qui se sublimaient à côté d'eux. Comme pour évacuer son stress. « Mais … en réalité je t'en veux et plus ressentir ça. Alors s'il te plaît, va t-en. » Qu’il parte maintenant ou plus tard ne changera pas grand-chose, rien qu’en le voyant, elle savait son cœur déjà condamné.

Il ne s’attendait pas à un bon accueil de sa part, comme de toutes les personnes qu’il a trahi durant son enfance, adolescence et même après. Aujourd’hui, avec le recul et sa nouvelle manière de voir les choses, il se demande comment il a pu se montrer si superficiel, hautain et méchant avec tous ces gens. Les laissant tomber pour d’autres comme avec Grace ou juste partant sans donner aucune nouvelle. Il n’avait pas d’attaches, allant vers les gens les mieux vus pour se faire bien voir. Pourtant il adorait Grace et ils ont passé de très bons moments tous les deux. Mais un jour il s’est dit qu’elle n’était pas assez populaire et que s’il voulait grimper socialement à l’école, il devait aller vers d’autres gens et l’oublier, quitte à ce que ses nouveaux amis soient moins bien. C’est très con, mais Carlisle a été très con. Aujourd’hui il est plus sage et il tente de se rattraper. Mais il récolte ce qu’il a semé, il mérite qu’elle lui en veuille, c’est normal. « J’ai pas dit ça pour me sentir mieux mais parce que je le pense. » C’est sûrement ce que disent tous ceux qui veulent se donner bonne conscience. La réflexion suivante de la jeune femme le fait se sentir encore plus mal. Il se dit qu’à cause de ce qu’il a fait il y a des années, elle manque de confiance en elle. Il n’en est sûrement pas le seul responsable. Pourtant comme avec Effy, il a l’impression que tout est de sa faute. Il faudrait sans doute qu’il parte s’enfermer dans une grotte pour ne plus faire souffrir les gens. Il se rassure en se disant qu’il n’est plus le même, qu’il a changé et qu’il veut seulement se racheter, qu’elle sache qu’il est différent. « Je t’ai toujours adoré, tu es une personne géniale, vraiment. C’est juste que j’me disais que fallait que j’sois avec des gens populaires pour je sais pas trop quelle raison. » Il ne voulait pas qu’elle pense que ça soit à cause d’elle. Oui elle n’était pas populaire et alors ? Les personnes populaires à l’école primaire ou après sont souvent ceux qui ne finissent pas le mieux. Ce sont les oubliés qui réussissent pour une partie et qui avec l’âge deviennent les plus appréciés. Elle lui demandait de partir. Carlisle regarda la porte. Il ne pouvait pas partir comme ça. Il ne pense pas vraiment à arranger les choses mais plus à oublier le passé pour revenir sur de bonnes bases. « J’ai changé Grace, vraiment et en mieux, enfin j’espère. C’était pas juste des paroles en l’air crois-moi. Il s’est passé un truc dans ma vie...un truc grave et depuis j’suis plus pareil, j’ai vraiment envie d’être quelqu’un de bien. » Il était sincère. Elle ne le croirait sans doute pas s’il lui disait qu’il fait du yoga et de la méditation tous les matins et qu’il se lève aux aurores.