I know exactly where the times goes, and how the ticking in my mind slows (athéna)

Je souris en l’écoutant, elle était adorable. Mon cœur était tout d’un coup plus léger alors qu’il avait été tellement lourd à traîner ces derniers mois. Elle me faisait du bien, elle m’apaisait, Athéna. Si ce baiser me faisait sentir coupable à quelque part, il me faisait aussi sentir terriblement bien. Parce qu’elle me faisait redécouvrir des sensations que je pensais évanouies avec le temps, que je pensais ne plus être capable de ressentir. Ce cœur qui se débat, ces papillons qui s’envolent, ces joues enflammées de gêne et d’envie. « C’est pas à moi de le savoir. » Constatais-je en riant. La conversation s’arrêta là, de toute façon je ne cherchais pas à ce qu’elle soit plus directe que ça dans ses propos, je ne voulais pas qu’on se lance des fleurs sur un premier baiser. Ça gâcherait le moment de vouloir trop en faire, de vouloir trop le souligner. Coupant court à cette proximité qui m’enivrait un peu trop, je proposai de passer aux bains froids, ce qu’on fit. Je rentrai d’un coup dans l’eau, sans préparation pour mon pauvre corps qui passait de chaud à glacial en l’espace de quelques secondes. Évidemment, face à ce changement de température radical, je sursautai de surprise en remontant à la surface, me dépêchant à sortir de l’eau pour aller me couvrir. Athéna, elle, riait sans relâche. Puis, avec toute la douceur que je lui connaissais, elle rentra à son tour dans l’eau mais étape par étape. Je m’approchai d’elle, m’asseyant au bord du bain froid pour n’y tremper que mes pieds – c’était largement suffisant, déjà. Athéna, elle, y resta un moment encore, me taquinant sur mes méthodes peu efficaces. « Comment j’devais savoir, moi ? C’pas comme s’ils faisaient des instructions pour ce genre de parcours bizarre ! » Je tournai la tête vers la pancarte qui se trouvait juste à côté des escaliers pénétrant dans l’eau. Il y avait même des petites images qui venaient avec les avertissements. Je me raclai la gorge. « Baaah, ils devraient les mettre plus en évidence. » Je levai les yeux au ciel en riant, faussement irrité par la situation. J’aimais bien exagérer les situations. Je proposai finalement à Athéna de tester les hamacs, honnêtement sans arrière-pensée – si ce n’était que d’en partager un avec elle – et malgré tout, la rouquine rougit sur toute la surface de son visage. Nous étions visiblement de retour à la case départ ; ce baiser, je n’avais aucune idée de sa signification. Avions-nous franchi une étape ? Pouvions-nous nous montrer un peu plus tactile ? Étions-nous … quelque chose ? Je n’en avais aucune idée, on avait beau avoir dit qu’on verrait où ça nous mènerait, là, j’avais seulement l’impression que nous n’étions nulle part. C’était un sentiment étrange. Je suivis Athéna jusqu’aux hamacs, tentant de capturer son regard mais ses yeux verts étaient rivés sur le sol. Puis, elle s’assit sur l’un des hamacs, m’observant. Donc … c’était à moi de faire le moveou de reculer ? Je la dévisageai un moment, tentant de lire à travers son regard, savoir ce qu’elle, elle voulait, mais j’étais incapable de la déchiffrer. Je me décidai finalement à m’approcher, les pas hésitants, avant de me joindre à elle sur le même hamac, assis. Nos fesses touchaient presque par terre, maintenant, à cause du poids mal réparti. Je ris. « Ok. C’était peut-être pas une bonne idée. Peut-être que … peut-être que si on se couchait, on aurait un peu moins l’impression d’être en train de défoncer le truc. Ou alors … j’peux tout simplement aller dans l’autre hamac plus loin, aussi. » Avançais-je.

Un boulet, qu’elle disait. J’étais un boulet. Ça m’arracha un rire, alors qu’Athéna décrivait mon habitude de foncer tête baissée sans me poser de questions. J’étais naïf et impulsif, c’est vrai. Pas très responsable non plus. En fait, j’étais encore un enfant dans un corps d’adulte, peut-être parce que justement j’avais un peu inversé l’ordre dans ma vie. J’étais devenu adulte trop tôt avec toutes les responsabilités que ma mère m’avait laissées en étant elle-même incapable de les accomplir. Puis, en vieillissant, en me libérant, j’avais renoué avec cette enfance volée en me permettant de ne jamais laisser qui que ce soit me dicter ma façon d’être. Au final, peut-être que ça avait fait en sorte que je m’étais un peu égaré du droit chemin, à en voir les dernières années de ma vie, mais étrangement, j’en venais à me dire que rien n’arrivait pour rien. « Yolo. J’ai pas le temps de m’arrêter pour lire une pancarte ! » Avais-je simplement répondu, en riant, ne me prenant pas vraiment au sérieux. Bien sûr que je n’étais pas aussi téméraire et imprudent dans toutes circonstances, sauf que là, on parlait bien juste d’un bain d’eau froide. Mon corps avait peut-être sursauté sur le coup, mais il s’en remettait déjà, maintenant que j’étais emmitouflé dans mon peignoir. Et puis, sous ce chaud soleil de midi, je ne mettrais pas de temps à mourir de chaleur à nouveau. Avant toute chose, je proposai à Athéna d’aller nous reposer un peu dans les hamacs. Nous avions une journée complète ici, aussi bien en profiter pour tester toutes les installations possibles de la place. Et puis, nous avions encore bien des moments d’incertitudes et de malaises à vivre … Comme celui-là, durant lequel je regardais Athéna de loin, sans savoir si je devais m’installer dans le même hamac qu’elle ou non. Quand je me décidai enfin à le faire, je regrettai bien vite ma décision en voyant que mon poids menaçait de faire briser les cordes du hamac. « J’ai déjà perdu 40 livres, il faut pas trop m’en demander non plus. » Dis-je en riant légèrement, un peu gêné, parce que c’était vrai. Le gros Concho du lycée refaisait surface, mais cette fois, c’était sans doute ma musculature qui faisait autant pencher la balance. Athéna s’allongea finalement dans le hamac, tapotant la place juste à côté d’elle. Je la regardai, le souffle coupé, avant qu’elle ne me sorte de mes pensées avec une réplique propre à elle. « Non j’attendais de voir si l’araignée à côté de toi allait se tasser sur toi, pour me laisser la place. » Sentant la panique monter en elle, je ris avant de poser ma main sur son poignet. « Je rigole ! Je rigole ! Y’a pas d’araignée. » Je m’allongeai finalement à ses côtés, nos visages à la même hauteur, si près l’un de l’autre. Dans un hamac du genre, impossible que nos corps ne soient pas lovés l’un contre l’autre. Je plongeai mon regard dans le sien, un sourire au visage. « T’es tellement belle. » Dis-je dans un murmure.  

J’avais essayé, du plus fort que je pouvais, que mon malaise ne paraisse pas, mais je n’avais jamais été très doué pour cacher ce que je ressentais. Les émotions se lisaient sur mon visage comme si elles étaient écrites noir sur blanc sur la page d’un livre ouvert. Je souris en baissant légèrement le visage, avant de me tourner vers Athéna après qu’elle eut, à nouveau, déposé ses lèvres contre ma joue. Cette douceur qui émanait d’elle me revirait le cœur à l’envers. « T’en fais pas, c’est rien. C’est juste que … c’est le combat d’une vie, pour moi, ça. » Mon poids, cet incontrôlable poids qui jouait au yo-yo depuis que j’étais gamin. Et même si depuis que j’étais entré dans la vingtaine, j’avais trouvé un certain équilibre qui m’avait permis d’atteindre un corps qui me convenait, je savais que ce n’était pas gagné pour autant, et que toute ma vie sans doute j’allais devoir marcher sur cette ligne, cette fine ligne dont les écarts étaient impardonnables, parfois. Athéna se coucha finalement, me sommant de la rejoindre, malgré mon air perdu et hésitant. Je lui fis finalement la blague de l’araignée, un classique, mais qui réussissait à tous les coups. Je ris, à voir son expression outrée. Mon rire redoubla de force quand elle me dit qu’elle me détestait et ne me parlerait plus. « C’est tant mieux, les gens vont enfin arrêter de nous dévisager parce qu’on parle trop. » Me moquais-je, avant de m’allonger à ses côtés. Puis, alors que nos corps se touchaient ainsi, et que nos visages retrouvèrent une proximité si intime, je plongeai mon regard dans le sien avant de lui dire à quel point je la trouvais belle. Et les mots ne rendaient même pas justice à sa beauté. « Non, c’est pas compliqué, surtout quand c’est pour éviter que tu me fasses la gueule plus longtemps. » Dis-je, le regard brillant de malice. « Je rigole. Je le pense vraiment. » Elle me remercia et, alors que le silence se réinstallait, j’avançai à nouveau mon visage vers le sien et déposai mes lèvres sur les siennes. Le moment était propice et j’en avais eu envie. Je me foutais de ne pas savoir où ça nous menait.  

Elle n’avait pas à s’en faire autant, Athéna, ce n’était réellement pas grand-chose. Si elle s’était moquée de moi, si elle avait partie de ces gens qui m’avaient pointé du doigt pendant toute mon adolescence rien que pour des kilos en trop, alors l’histoire serait différente. Mais son commentaire à elle ne se voulait pas méchant et, surtout, elle ignorait tout du chemin que j’avais eu à parcourir pour en arriver à ce corps. Je ne pourrais franchement pas lui en vouloir pour ça ; je ne pourrais pas lui en vouloir pour bien des choses, tout compte fait. « J’suis pas mal à l’aise. » Dis-je en esquissant un sourire, le regard brillant, voulant vraiment qu’elle arrête de s’en faire autant. « T’as vraiment pas à t’excuser. » Puis, comme pour lui montrer que je n’étais pas du tout fâché et que j’avais encore le cœur à la rigolade, comme toujours, je lui fis cette blague de l’araignée. Drôle de façon de vouloir lui remonter le moral, sans doute, mais c’était ce que je connaissais de mieux : l’humour, même – et surtout – l’humour stupide et immature. Au moins, je savais me rattraper, aussi, par exemple en complimentait la jeune femme sur sa beauté désarmante. Je ne mentais pas, malgré ce que je pouvais lui laisser croire. Je ris, amusé. « Si t’es encore plus vexée, va falloir que j’te fasse encore plus de compliments. T’essaieras pas de faire en sorte que j’te lance des fleurs, Solenta ? » J’esquissai un sourire. Puis, quand je lui dis que je le pensais réellement, la rouquine répliqua mais je ne l’écoutais même plus. Je voulais juste la faire taire, vraiment, mais pour une seule raison : qu’elle m’embrasse à nouveau. Ça ne faisait pas si longtemps et pourtant ça me manquait déjà. Je fermai les yeux en sentant mes lèvres se poser sur les siennes, et je posai ma main sur sa hanche alors que la sienne se posait sur ma joue. Nos corps se cherchèrent un peu plus encore alors que je laissais ma passion se déchaîner un peu plus que précédemment, sans trop en faire. Lorsque je me détachai, je posai mon front sur le sien. Je soupirai. « J’aimerais que cette journée ne se termine jamais. Qu’on n’ait pas à retourner à la réalité. » Parce que j’ignorais ce qu’elle était, cette réalité.   

HJ:

Je levai les mains dans les airs, capitulant face à ce faux-problème que je pouvais volontiers laisser derrière nous. Un fin sourire se dessina sur mon visage. « D’accord, d’accord. Excuses acceptées. » Je laissai mes mains retomber sur mes cuisses, toujours assis dans le hamac, tête tournée vers Athéna. Je trouvai de toute façon une toute autre manière de lui faire comprendre que son commentaire ne m’avait pas atteint plus que ça. Pas au point de me faire perdre mon sens de l’humour douteux, en tout cas. Elle, elle ne sembla pas la trouver drôle tout de suite, ma petite mise en scène, mais je ne m’en voulus pas davantage. Contrairement à elle qui s’était confondue en excuses, moi, je n’avais même pas remarqué avoir touché une corde sensible. Je n’étais sans doute pas assez en contact avec le non-verbal des autres. Je me couchai enfin à ses côtés, ne faisant pas durer plus longtemps cette attente pendant laquelle j’étais sans doute le plus impatient des deux. Je la complimentai, subjugué par sa beauté, la seule pensée qui m’était venue était de lui déclarer à quel point elle était belle, justement. Son regard émeraude si prêt du mien, j’avais l’impression de me plonger dans une forêt enchantée où je perdrais sans doute mon chemin si j’y restais trop longtemps. Mes lèvres retrouvèrent les siennes pour la troisième fois aujourd’hui, et j’avais comme ce mince espoir qu’il n’y en aurait pas de dernière, même si je savais fort bien que la réalité nous rattraperait dès que cette escapade tirerait à sa fin. D’ailleurs, Athéna regarda l’heure et constata qu’il se faisait tard. Je soupirai en harmonie avec elle. « Tu veux qu’on retourne aux vestiaires et qu’on se prépare à partir ? » J’aurais certainement passé plus de temps ici, à allonger les heures en sa compagnie, mais peut-être avait-elle d’autres plans pour la fin de cette journée, et la soirée à venir. Nous n’avions pas profité du petit bistro et des cocktails de notre forfait, mais il était vrai que le temps avait passé trop vite et que les grains de sable du sablier nous échappaient. Je ne réalisais pas encore que ce n’était pas le cas que pour aujourd’hui, mais bien pour toute notre histoire.  

J’eus un léger sourire lorsqu’Athéna me dit qu’elle ne pouvait pas me laisser seul ici, que je devais rentrer à un moment ou à un autre. Rentrer où, et pour qui ? Je me rendais compte qu’être seul était plus difficile que ce que je pensais. J’avais passé les dernières années de ma vie en couple, avec des personnes toutes plus différentes les unes que les autres, mais qui ne me laissaient jamais cet amer goût de solitude. Cette journée auprès d’Athéna tirait bien trop vite à sa fin et je savais déjà que sa chevelure de feu hanterait ma nuit, ses mèches se mêlant à celles d’une autre qui habitait mon cœur et mes pensées. Je soupirai doucement. « T’en fais pas, je comprends. J’aurais le même sentiment d’urgence si je ne savais pas que Gamborlim était entre de bonnes mains aujourd’hui avec Tahlia … » Lui assurais-je en pensant à mon carlin des plus idiots, quand il s’y mettait. J’attrapai alors sa main malgré mon manque d’enthousiasme, et je me relevai du hamac pour la suivre jusqu’aux vestiaires. Elle sentit sans doute cette réticence face à l’idée de partir et de quitter ce moment magique que nous avions partagé, parce qu’elle me proposa de venir chez elle et d’aller manger dehors. Je m’arrêtai pour la regarder avec un sourire. « T’es pas obligée, tu sais. D’vouloir prolonger ça. J’suis un grand garçon, je trouverai bien le moyen d’animer un peu cette fin de journée. » J’esquissai un faible sourire. Je ne voulais pas qu’elle se sente coupable de devoir partir, mais si elle réitérait son offre, je ne refuserais pas une seconde fois. La rouquine m’embrassa alors sur la joue – le décompte des baisers sur la joue versus ceux sur les lèvres était trop disproportionné à mon goût – et me remercia pour cette journée. « C’est vrai. C’était une belle journée. Merci. » Ni l’un ni l’autre n’avait eu à débourser pour, en plus, alors nous ne pouvions que nous remercier pour notre présence. « On s’attend à la sortie ? » Demandai-je avant de m’éclipser à mon tour. Je retournai à la réception remettre tous les biens prêtés, avant de me diriger vers la sortie où j’attendis Athéna.

J’esquissai un sourire. « C’est sûr qu’à côté de Torock, Gamborlim est un ange. » Il était surtout le plus grand des paresseux. J’avais vu le husky d’Athéna à quelques reprises, et il avait pas mal plus d’énergie à revendre. Je me doutais bien que Tahlia n’accepterait pas aussi facilement de garder un œil sur mon chien s’il était aussi téméraire. La jeune femme me proposa alors de la suivre chez elle, de poursuivre cette journée hors des murs du spa, ce qui me faisait plaisir et semait la confusion en moi, tout en même temps. Parce que cette journée presque idyllique avait ce quelque chose de magique que j’attribuais au contexte relaxant de l’endroit, mais si nous poursuivions le moment chez Athéna, alors nous nous aventurions encore plus sur ce terrain glissant. Et qui sait ce que la pente nous réservait … Je tentai alors de savoir si Athéna le proposait par politesse, par obligation, ou par réel envie. Je ne voulais pas me lancer aveuglément, mais je ne voulais pas non plus la quitter. J’avais le cœur sur une bascule. « Je te crois. » Dis-je alors qu’elle m’assura qu’elle en avait envie. Puis, elle réitéra son offre, un simple murmure à mon oreille qui suffit à éveiller tous mes sens, et quand je rouvris les yeux, elle s’était éclipsée dans les vestiaires. Je fis de même, la retrouvant quelques minutes plus tard à la sortie du Yoga Space. Je relevai la tête vers elle avec un sourire. « Je viens. Ce serait trop dommage que cette journée se termine maintenant. » Et, surtout, je n’avais aucune envie de retrouver ma réalité. Je suivis donc Athéna jusqu’à chez elle, où cette zone floue et ambiguë continua à se dessiner sous nos faits, nos gestes et nos paroles. Je n’avais aucune idée de ce que nous étions en train de faire, mais ça ne m’importait pas, pas pour ce soir. Demain matin, j’affronterais les conséquences. 

TERMINÉ