Avec Pocahontas ... Au détour de la rivière ! (Maliyan)

Tu savais trop bien ce que c’était que de perdre quelqu’un, de perdre tous tes repères d’un seul coup et de ne plus savoir vers qui ou vers quoi te tourner pour respirer à nouveau. T’avais perdu l’amour, toi aussi, ça faisait six ans maintenant de cela mais la douleur était quand même bien là, dès que tes souvenirs décidaient de te replonger dans ces images-là. Marlee, la mère de tes deux magnifiques enfants, vous avez quitté tous les trois alors que Miro n’avait que deux ans. Tourmentée par ses propres démons, elle avait fini par lever les voiles en espérant sans doute que les vents la délivrent. T’avais aucune idée de si elle allait bien, maintenant. De si elle avait trouvé le bonheur. Elle n’avait jamais cherché à renouer avec vous, pas même avec ses propres enfants. Elle n’était peut-être même plus de ce monde et t’en avais aucune idée. Contrairement à elle, toi, t’avais aucun moyen de la retrouver. Elle avait juste disparue, un soir de janvier, ne laissant aucune trace mis à part dans vos mémoires à tous les trois. Alors quand t’avais su qu’une de tes amies, Zelda, venait de se faire laisser par son amoureux, t’avais tout de suite voulu être là pour elle. Vous n’étiez pourtant pas les plus grands amis du monde, vous ne vous connaissiez que depuis quelques semaines, même, mais pour toi ce n’était pas une raison de ne pas se montrer à l’écoute. Tu lui avais donc proposé, par sms, de sortir avec toi prendre l’air et par prendre l’air, tu ne voulais pas dire un verre sur une terrasse. Tu parlais du réel grand air, de la vraie nature qui l’aiderait peut-être à se retrouver, à se recentrer. Pour toi, ça fonctionnait à tous les coups, en tout cas. En ce beau samedi ensoleillé, donc, tu retrouvas Zelda à Grays Bay, où votre périple débuterait. T’arquas un sourcil en la regardant, un sourire aux lèvres. « T’avais besoin de changement ? » Demandas-tu en t’approchant d’elle et en prenant une mèche de ses cheveux bruns entre tes doigts. Puis, tu répondis enfin à la question qu’elle t’avait posée. « Une petite réunion avec la nature et le silence. Ça obligera les voix dans ta tête à se taire, à s’apaiser, tu vas voir. » Dis-tu en posant un index sur le côté de sa tête. T’étais tactile, t’avais pas vraiment peur de la proximité avec l’autre.

Tu esquissas un sourire lorsque Zelda mentionna que sa nouvelle couleur de cheveux avait été faite sur un coup de tête. Tu hochas la tête. « C’est un coup de tête qui te donne un bien joli changement de tête. » Plaisantas-tu, pour le jeu de mots, mais tout à fait sérieux pour le compliment. Tu laissas tes doigts s’ouvrir afin de redonner sa liberté à la mèche brune de la demoiselle, avant de laisser retomber ton bras le long de ton corps. Zelda en profita pour s’attacher les cheveux et tu en fis de même. Tu portais généralement tes cheveux libres, mais lorsqu’il était question de faire du sport, tu préférais avoir le visage dégagé. Tu attachas donc ta sauvage crinière en un chignon négligé avant d’apprendre à Zelda un avant-goût du planning de la journée, sans oublier que c’était dans le but de taire les voix dans sa tête. Elle fit comme si tu n’avais pas mis le doigt exactement à la bonne place. Tu t’en foutais, tu ne cherchais pas forcément à la faire parler. « C’est que t’es pressée … ! On peut y aller, oui. » Tu lui souris avant de lui emboiter le pas vers les deux kayaks déposés sur la plage, que tu avais loués au centre nautique pour la journée. « Je t’ai pris une ceinture de sécurité, au cas où. » Parce que toi, forcément, tu n’en avais pas. T’étais téméraire, un peu irresponsable, aussi. Ça faisait partie de toi et tu ne remettais jamais trop en question là-dessus. Un jour il t’arriverait peut-être quelque chose et on te dirait je te l’avais bien dit mais il serait alors trop tard. Tu attrapais ta pagaie, puis celle de Zelda que tu lui tendis. « On n’en a pas pour très longtemps, une quinze de minutes, je pense. » Plutôt trente, mais la notion du temps, ce n’était pas vraiment ton fort.

Un large sourire se dessina sur ton visage alors que Zelda te disait qu’elle allait croire que tu la draguais, si tu continuais. Tes yeux riaient tout autant, plissés et brillants comme ils étaient. Rien à voir avec ce look dur et sauvage que tu pouvais avoir aux premiers abords. « Ce serait si mal que ça ? » Répondis-tu, parce que de temps en temps, ça pouvait remonter le moral de se faire apprécier de la sorte. Un peu de flirt n’équivalait pas à une demande en mariage, et quelques compliments ne signifiaient pas forcément non plus qu’on cherchait à séduire l’autre. Ses cheveux étaient jolis, comme ça, tu ne voyais pas pourquoi tu te retiendrais de le lui dire. Tu attachas finalement tes cheveux, ton élastique entre tes lèvres pincées pendant que tu joignais ta crinière en un chignon négligé. Tu ne le sortis d’entre tes lèvres qu’au moment de répondre à Zelda et d’attacher tes cheveux, du même coup. Tu souris à son compliment. « C’est gentil. Mais c’est toujours moi qui aurai le meilleur chignon, parce que toi, tes cheveux, ils sont toujours trop propres. » Tu haussas les épaules avec un rire. Tes cheveux à toi paraissaient toujours un peu malpropres, parce que tu ne les lavais pas à tous les jours et parce qu’ils séchaient toujours avec le sel marin qui restait dedans, après que t’aies fait de la plongée pendant des heures. Bref, vous rejoignirent les deux kayaks posés sur la plage, et tu tendis sa ceinture de sécurité à Zelda. Toi, tu t’en passerais. « Ce serait légèrement dommage. » Qu’elle se noie. Devant tes yeux. Mais tu ne laisserais jamais cela arriver, ce que tu lui fis comprendre. « Le kayak n’est pas renversant, alors même si tes jambes te font mal ou lâche, tu ne devrais pas chavirer. Et puis si c’était le cas, je ne serai pas bien loin, et on ne sera pas bien loin des rives. » Alors tu sauterais à l’eau pour la soutenir et la traîner jusqu’aux rochers. Tu ne voyais aucunement le danger dans l’excursion que vous vous apprêtiez à faire. Mais quand Zelda saurait que l’activité principale allait requérir toute la force de ses jambes … T’allais devoir sortir tes meilleurs arguments ! Pour le moment toutefois, la nouvelle brunette nageait encore en plein mystère alors que vous vous installiez dans vos kayaks mis à l’eau. Tu avais déposé ton sac de sport entre tes jambes, celui qui contenait tout ton équipement. « Toi, vas-y d’abord. Comme ça, je garde un œil sur toi. Je te dirigerai. » T’avais pas écouté ses options restreintes, tu préférais qu’elle ouvre le bal pour que tu puisses la surveiller en tout temps. La jeune femme commença alors à pagayer, et tu la suivis d’assez prêt, réduisant la puissance de tes coups de pagaie lorsque tu prenais trop de vitesse.

Elle fuyait ton regard, elle était mal à l’aise, par ta faute. Ça n’avait jamais été ton intention et, en entendant ses paroles, tu écartas ta main de ses cheveux afin de lui redonner sa complète liberté, à Zelda. Tu hochas doucement la tête, faisant même un pas derrière, parce que t’avais eu l’impression d’être dans sa bulle et tu comprenais bien qu’elle avait besoin d’espace. Tu n’étais aucunement vexé par ses propos, au contraire, tu étais content qu’elle se soit sentie assez à l’aise pour t’en faire part. Au moins, maintenant que t’étais au courant, tu pouvais la respecter dans ce dont elle avait besoin. « Euh, ouais, excuse-moi. Je voulais pas te mettre mal à l’aise. J’vais arrêter. » Tu esquissas un faible sourire. Au moins, elle était là avec toi, alors qu’elle n’en avait pas vraiment envie. Ça voulait au moins dire que pour toi, elle faisait des efforts. T’aurais peut-être préféré qu’elle s’écoute et se respecte, pour le coup, mais maintenant que vous étiez tous les deux sur la plage et que l’équipement était loué, tu te dis que t’essaierais de lui changer les idées. « T’auras toute ta soirée pour t’enfermer chez toi dans un plaid, c’est promis. Et puis, dès que t’en as marre, dès que t’as besoin de rentrer, tu me dis. Enfin, essaie d’avertir une quinzaine de minutes à l’avance, le temps qu’on fasse le chemin inverse … » Dis-tu avec un doux rire. Le moment de vous attacher les cheveux vint et après ta remarque sur le fait que ses cheveux étaient trop propres pour réussir ce genre de chignon à la perfection, tu souris à sa réponse. « Jamais devant moi en tout cas. » Ce n’était pas de la drague, tu ne faisais que constater les faits. T’insinuerais jamais qu’elle se mettait jolie pour toi, de toute façon. Tu ne te donnais pas autant d’importance. Bref, tu te dirigeas vers les kayaks avec elle, lui tendant sa ceinture de sécurité qu’elle enfila sans protester. Après l’avoir rassurée un minimum, tu mis les deux kayaks à l’eau, et tu commenças à pagayer en arrière d’elle, lentement mais sûrement. Une dizaine de minutes passa, pendant lesquelles vous regardiez autour de vous, l’infini de l’océan d’un côté, et les hautes falaises de l’autre. C’était magnifique, calme et paisible, oui. « Profites-en. Ça ne va pas durer. » Une lumière de malice traversa ton regard. Vous arrivâtes enfin à la crique qui formait une sorte de toute petite baie déserte, avec les parois rocheuses qui entouraient le cercle d’eau, un simple passage vous offrant une ouverture pour passer avec vos kayaks. « On y est. C’est ici que la vraie aventure commence. » Dis-tu en pagayant un peu plus puissamment jusqu’à ce que ton kayak atteigne le sable de la plage de sable blanc.

Tu souris lorsqu’elle s’excusa en se justifiant par le fait qu’elle était spontanée. « J’aurais jamais deviné. » Avais-tu répondu sans perdre ton léger sourire moqueur. Tu lui donnais peut-être la distance qu’elle avait demandé, mais tu ne cesserais quand même pas d’être toi-même. Tout comme elle restait elle-même, malgré son cœur meurtri. « Et c’est tout à fait compréhensible, alors t’as pas besoin de t’excuser ou de te justifier. Merci de m’avoir dit, en fait. J’préfère que tu me préviennes plutôt que j’te mette mal à l’aise et que tu gardes ça en dedans. C’est important pour moi. » Expliquas-tu, pour qu’elle comprenne bien qu’elle n’était pas dans le tort, qu’elle n’avait rien fait de mal. C’était toi, en fait, qui avait mal agit en t’immisçant dans sa bulle alors que tu n’y avais pas été invité. Tu ne culpabilisais pas plus que ça par contre, parce que tu savais tes intentions bonnes, et Zelda aussi. Heureusement, la jeune femme retrouva assez rapidement son optimisme que tu lui connaissais si bien, alors qu’elle affirma qu’elle s’amuserait sans doute. « J’y compte bien ! » Après tout, tu ne la sortais pas en plein air pour qu’elle s’ennuie et qu’elle rumine ses idées noires. « Ce serait un véritable privilège de te voir les cheveux gras, Zelda. » Lâchas-tu presque solennellement avant de rire. Puis, vint le temps de passer aux choses sérieuses pour vous deux. Tu te dirigeas vers les kayaks, suivi de la jolie rouquine, et une fois tous les deux à l’eau, tu la laissais ouvrir le bal sans trop t’éloigner derrière. Connaissant sa maladresse, un accident était si vite arrivé. Contre toute attente, elle géra assez bien cette première activité et arriva même à apprécier la beauté et la quiétude du moment. Ça ne durerait pas, ça, et tu ne t’empêchas pas de le lui faire remarquer. « Je sais exactement à quel Disney tu fais référence et please, don’t. » Les sauvages, les sauvages, c’était toi, ça. Toi et ta famille, ton peuple que t’avais laissé derrière. Il avait beau être question d’amérindiens dans ce film, les représentations étaient plutôt similaires. Bref, alors que Zelda fonçait vers l’aventure en pagayant rapidement sur l’eau tumultueuse qui vous menait à l’intérieur de la crique, tu la suivis avec tes coups de rame puissants, afin de la rattraper et de la guider jusqu’à la petite plage de sable blanc complètement déserte. Les grands rochers s’élevaient autour de vous, formant de hautes falaises. Tu tiras ton kayak sur quelques mètres sur le sable, et tu fis de même avec celui de la rouquine, t’assurant que l’eau ne les emporterait pas. Vous seriez plutôt mal pris. « Alors avant que tu m’engueules pour le choix d’activité, j’tiens juste à dire que c’est la meilleure façon pour toi de voir la force que tes jambes ont pu reprendre … » Dis-tu tout en sortant les cordes d’escalade de ton sac traîné avec toi dans le kayak.

Tu serais toujours là pour ceux qui comptent pour toi. Tu savais ce que c’était que de te sentir abandonné, rejeté, tu l’avais vécu à deux reprises mais de manières brutales. La première fois, c’est ta communauté toute entière qui t’avait tourné le dos alors que ta seule erreur était d’avoir été mis au monde. Ça avait été toi, l’erreur, à leurs yeux. Pourtant, t’avais grandi avec eux sur la réserve, t’étais comme eux, si ce n’était que de la couleur légèrement plus pâle de ta peau qui n’avait pourtant jamais dérangée jusque-là. Puis, la deuxième fois, c’était quand la femme que t’aimais, la mère de tes enfants, avait écouté la voix de ses démons dans sa tête et avait décidé de quitter la ville, de quitter votre vie, à Lowa, Miro et toi. Sans plus jamais donner de nouvelles. Sans laisser une quelconque trace à suivre pour la retrouver. Alors ouais, Mali, le sentiment d’être lâché dans le vide, tu connaissais assez bien ça. Tu n’avais pas vraiment envie que Zelda se sente tout aussi délaissée. Alors t’étais là. Vous étiez finalement arrivés à la crique où tu avais laissé les kayaks dans le sable, éloignés de l’eau, et tu avais présenté à la belle rousse la prochaine activité, l’escalade. « T’as survécu aux vagues de la mer, tu survivras bien à un peu de hauteur. » C’est ce que tu appelais un peu de hauteur ? Les falaises s’élevaient bien hautes au-dessus de vos têtes. Tu ne comptais pas faire de Zelda une experte aujourd’hui, alors tu ne vous imaginais pas atteindre le sommet. D’autant plus que toi, tu resterais au sol, pour tenir les cordes auxquelles la vie de Zelda s’accrocherait. « On a tout notre temps, alors tu prends les pauses quand tu veux. Et bien sûr que je te rattraperai, c’est à ça que les cordes servent. » Dis-tu en brandissant celles-ci devant toi, un sourire aux lèvres. « Je peux t’installer le harnais, ou tu sais comment faire ? » Lui demandais-je en sortant ce qui s’attachait autour des hanches et autour de chaque cuisse, avec le crochet à l’avant du corps.

Tu souris face à la moue que Zelda fit en regardant les harnais. C’est vrai qu’au premier regard, quand on n’avait pas trop l’habitude, ça ressemblait juste à une étrange culotte avec un peu trop de prises, dont le crochet à l’avant. Tu hochas la tête. « Bien sûr. Écarte juste un peu les jambes. » Tu retins un léger sourire amusé par tes propres paroles, tu ne voulais pas créer le même malaise qu’avant de quitter Gray’s Bay. En même temps, c’est vrai que t’avais besoin qu’elle écarte un peu les pieds pour que tu puisses passer le harnais et le remonter bien serré autour d’elle. Tu t’exécutas, à genoux face à elle, avant de te relever en frottant tes deux mains ensemble pour enlever le sable qui s’y était retrouvé pendant que tu tenais en équilibre. « C’est normal si ça semble un peu inconfortable. Tu t’y habitueras. » Et, surtout, elle aurait bien d’autres choses en tête que ce qui lui remontait dans l’entre-jambe. La hauteur, la force, la peur, l’adrénaline. Remplacer l’inconfort par un autre inconfort. « Je reviens, je dois aller attacher la corde en haut pour que tu puisses monter ensuite. Je fais ça vite. » Tu passas le tas de corde par-dessus ton épaule et, de ton simple corps, tu te hissas jusqu’au haut de la falaise, qui en réalité n’était pas si haute face à ce que tu avais pu monter auparavant. Tu attachas fermement la corde d’un nœud infaillible et tu redescendis en rappel, avec la corde qu’il te restait et qui te servirait à retenir Zelda lors de sa montée. Une fois en bas, une dizaine de minutes plus tard, tu reviens vers Zelda et attache la corde à son harnais pour qu’elle puisse entreprendre ce défi face à elle-même. Tu la conseillas brièvement sur les meilleures méthodes à adopter, et tu la laissas débuter l’ascension. Toi, tu restais en bas, bien attentif aux signaux de la rouquine au cas où tu devrais amortir une éventuelle chute, ce qui sembla sur le point d’arriver quand une des jambes de Zelda sembla lâcher. Elle se reprit d’elle-même, malgré ton intervention avec la corde. « Tout va bien ? » Lui crias-tu, ce à quoi elle répondit qu’elle voulait descendre. « Zelda ! Regarde en haut de toi ! T’y es presque ! Quelques mètres et t’es au sommet, quelques mètres et t’auras accompli ce que tu croyais impossible y’a quinze minutes ! Si tu me le redemandes une deuxième fois, promis je te fais descendre, mais prends au moins conscience de ce que t’as été capable de faire ! You can do it. You can do anything. » Continua-t-il à crier, espérant que le vent porterait ses paroles jusqu’à elle.