the point of arrival (bessie)

La vie fait parfois drôlement les choses. Si Elmo avait toujours eu un sentiment d’appartenance à l’Italie, et une famille aimante qui s’y trouvait, le jeune homme avait, à l’aube de sa majorité, décidé de tout laisser derrière pour aller vivre une grande aventure. Trop longtemps couvé, trop souvent protégé ou réprimandé, il avait eu besoin de voler de ses propres ailes et ce, bien loin du nid familial. Sa mère avait eu le cœur brisé d’apprendre qu’il désirait partir étudier à l’étranger et ce, pour toute la durée de ses études, mais la décision revenait à Elmo, au final. C’était lui qui paierait pour tout : son billet, ses cours universitaires, son appartement, sa nourriture, tout. En quittant la maison, il quittait aussi la facilité. Entrer dans le monde adulte, ce n’était pas qu’une question d’âge, c’était aussi une question de responsabilités. C’était en tout cas le discours qu’il avait tenu devant ses parents afin de les convaincre. Ils avaient finalement accepté de le laisser aller, ne voyant cette expérience que comme un simple chapitre à une histoire qui se poursuivrait ensuite en Italie à nouveau. Pour Elmo, ça n’était pas aussi clair que cela, mais il verrait bien. L’important était de convaincre sa famille, à ce moment précis, et pour le reste, seul le temps lui dirait la route à poursuivre. En 2016, donc, au mois d’octobre, Elmo avait quitté ses proches à l’aéroport après des larmes et des larmes de la part de certains – d’Elmo aussi, même s’il ne l’avouerait jamais aux autres n’en ayant pas été témoins. Il embarquait pour un vol direct entre Naples et Brisbane. Une fois son passeport et ses billets vérifiés, le jeune adulte se dirigea vers le fond de l’allée gauche, où se trouvait son siège dans les dernières rangées de la zone économie. Une jeune femme était assise au bord de l’allée alors que son banc était au milieu des trois bancs. Il esquissa un sourire. « Excusez-moi, je crois que je suis assis à côté de vous. » Dit-il doucement, ne voulant pas impoliment se frayer un chemin par-dessus ses jambes.

La jeune femme assise à la place à côté de la sienne se leva, et Elmo lui rendit son sourire, incapable de ne pas le faire de toute façon, face à celui de cette demoiselle. Bordel, si les italiennes étaient aussi belles, pourquoi diable quittait-il son pays ? « Merci ! » Lança-t-il en se frayant un chemin jusqu’à son banc malgré ses grandes jambes qui ne rentraient plus vraiment, une fois assis. Il n’avait pas le luxe de se payer une classe supérieure, Elmo, alors ce serait un vol des plus inconfortables. Par chance, il avait cette jeune femme à ses côtés qui pourraient peut-être occuper toutes ses pensées, si elle daignait lui parler à nouveau. Après tout, du haut de ses dix-huit ans, l’italien avait l’air d’un enfant face à cette femme visiblement un peu plus mature en âge que lui. Une fois Elmo assis, la brunette reprit également sa place et se tourna vers lui pour lui tendre la main. Terminant de poser son sac entre ses jambes, légèrement poussé sous le banc devant lui, l’étudiant se redressa et attrapa sa main, qu’il serra doucement. « Elmo, heureux de faire ta connaissance. J’peux te tutoyer, right ? J’suis peut-être plus jeune mais … tu m’as pas l’air en âge d’être appelée madame, je me trompe ? » Demanda-t-il sur un ton léger, technique comme une autre pour apprendre l’âge qu’elle avait et s’il avait peut-être une mince chance avec elle, aussi.

Elmo eut un rire franc en entendant les menaces de Bessie, s’il avait osé l’appeler madame. Il leva les deux mains en l’air, à la hauteur de son torse, comme pour montrer qu’il ne se rendrait pas coupable de cette vilaine faute. « Heureusement pour toi que l’avion n’a pas encore décollé, alors. À moins que tu sois parachutiste. » Il esquissa un sourire avant de comprendre des propos de la jeune femme qu’elle avait à peiné passé les vingt-cinq ans. Bon, ça leur faisait au moins sept années de différence mais si elle, ça ne la dérangeait pas, ce ne serait certainement pas Elmo qui dirait quoi que ce soit ! Il était peut-être en train de se faire des idées, aussi. Certes, le flirt était dans l’air mais ça ne signifiait pas pour autant que cette drague aboutirait à quoi que ce soit. Elle était joueuse, il était joueur, seul le temps dirait où ça les conduirait. « Oui c’est bon, t’as encore pas mal d’années devant toi avant qu’on t’appelle madame. » Le regard d’Elmo se posa sur la lèvre inférieure de sa voisine de siège, parce qu’elle la mordillait tout légèrement. Un sourire niais se dessina sur ses lèvres. Bordel, ce qu’elle était belle. Son attention fut redirigée vers son regard lorsqu’elle lui demanda ce qui l’amenait sur ce vol. « Je ne vais rejoindre personne, en fait. Je me suis inscrit pour un bac à l’université de Bowen alors je vais faire mes études en Australie et après, je verrai, je reviendrai peut-être en Italie. Ça dépendra de ce qui se passera d’ici-là … » Que l’inconnu, au fond, l’attendait. « Et toi ? » S’intéressa-t-il.

Pas une parachutiste, noté. Il rit. Il ne doutait pas une seule seconde que Bessie n’en était pas moins sportive. Elle avait le physique pour et on voyait bien qu’elle faisait attention à son corps, à moins qu’elle ait vraiment une génétique de feu. En tout cas, peu importe son âge elle avait l’air bien jeune, avec une peau lisse qui avait l’air tellement douce, des cheveux soyeux soigneusement coupés, des lèvres pulpeuses qu’elle mordillait pas si innocemment que ça … Arrête, Elmo, tu vas bander au beau milieu de l’avion. Le jeune homme parla finalement de la raison de sa venue en Australie, soit les études. Avec la plus grande surprise, il apprit que la brunette se rendait elle aussi à Bowen, et qu’elle s’était inscrite au campus universitaire de la ville. Exactement comme lui. Un rire étonné s’échappa d’entre ses lèvres. « C’est pas vrai … ! » Il savait que le monde pouvait être petit, mais à ce point ? « Je vais en soins infirmiers. Si tu me dis que toi aussi, je soupçonne un complot. » Fit-il remarquer avec un rire. C’est à ce moment que l’indicatif lumineux apparut au-dessus de leur tête, les obligeant à attacher leurs ceintures. Elmo s’exécuta, constatant avec embarras qu’il s’était effectivement laissé un peu trop exciter par sa voisine de siège. Il la regarda du coin de l’œil, gêné, espérant qu’elle ne remarquerait pas ce début d’érection. Dommage qu’au décollage, les tablettes devaient être remontées. Ça aurait été une bonne façon de se cacher un peu.

Elmo haussa les sourcils en apprenant que la jeune femme se dirigeait vers le droit. Certes, il n’aurait pas à crier au complot, mais il devenait tout d’un coup bien plus intimidé encore. Non seulement elle était canon, mais en plus de ça elle était intelligente. De quoi faire chavirer tous les cœurs, et raviver encore plus cette flamme qui brûlait dans le bas ventre d’Elmo. « Wow. Qu’est-ce qui t’intéresse dans le droit australien ? Le côté civil ou plutôt le côté criminel ? Ou alors tu cherches justement à te spécialiser en droit international ? » Après tout, dans le monde, les lois différaient d’un pays à un autre, d’un régime à un autre. Dans les Santavenere, il y avait un paquet d’avocats, alors Elmo avait plus ou moins baigné là-dedans bien malgré lui. Le voyant lumineux s’alluma et c’est à ce moment que l’italien remarqua tout l’effet que Bessie lui faisait. Comble de malheur – ou pas, vu ce qui s’en venait -, l’italienne le remarqua aussi. L’avion commençait à avancer sur la piste de décollage et les doigts de la jeune femme, eux, s’avançaient sensuellement jusqu’à la cuisse d’Elmo. Il lui jeta un regard surpris, puis regarda à sa gauche afin de vérifier que personne dans l’allée voisine ne remarquait ce qui se tramait sous leurs yeux. Un sourire de satisfaction et de plaisir se dessina sur les lèvres de l’homme, et encore plus en écoutant les paroles murmurées à son oreille. « Je pense que ce sera mon vol d’avion le plus agréable, à vie … et j’en ai fait quelques-uns. » Murmura-t-il à son tour en penchant légèrement la tête vers Bessie, avant qu’un discret soupir de plaisir ne s’échappe d’entre ses lèvres.

Elle avait de l’ambition, cette fille. Beaucoup plus qu’Elmo. Elle avait des plans pour ses études et une motivation à les poursuivre plus loin encore. L’italien, lui, avait choisi un domaine un peu par défaut, même si aider les autres avait toujours été important pour lui, c’aurait pu être dans à peu près n’importe quel domaine. Elmo n’était pas doué dans quelque chose précisément, hormis le sport ou la musique. Des domaines qui, selon ses parents, ne lui assureraient pas un avenir assez stable. Il avait donc choisi ses études universitaires parce qu’il ne pouvait suivre ses passions. Bessie, elle, semblait animée par le droit criminel. « Wow. Ça fait combien d’années d’études encore devant toi, ça, alors ? » Demanda-t-il. « Je suis clairement pas assez motivé, à côté de toi. » Il rit. Puis, la main de la belle italienne se fit rapidement plus baladeuse une fois que l’avion commença à rouler sur la piste, puis à décoller. Avant d’aller trop loin, elle proposa de continuer le tout dans la cabine du fond, une fois la ceinture lumineuse éteinte, ce qui signifierait qu’ils pourraient se lever. Elmo hocha la tête, un sourire aux lèvres. « Totally. » Répondit-il, regardant les nuages apparaître à travers le hublot. Putain, pouvaient-ils stabiliser l’avion plus vite, qu’ils y aillent ? Le jeune homme se pencha en attendant vers son sac à dos, duquel il sortit son portefeuille. Il en sortit un préservatif. Ce n’était pas le meilleur endroit où mettre ses condoms mais ça, il n’était pas assez bien informé le pour le savoir. Il glissa le préservatif dans la poche avant de son pantalon, jetant un coup d’œil complice à Bessie, espérant ne pas avoir mal interprété ses intentions. Puis, le voyant lumineux s’éteint enfin. « J’y vais et tu me rejoins ? » Proposa-t-il.