it's probably not the good moment. - Noah

edwin ∞ noah

Noah n’était pas au mieux de sa forme en ce moment. En plus de s’être tapé une bouteille de laxatif et des piments forts deux jours auparavant - merci Elmo et leurs idées à la con - il retournait en boucle sa dispute avec Maliyan. Cet homme, si gentil, qui semblait vouloir jouer le rôle d’un père auprès de lui. Ca ne partait pas d’une mauvaise intention, et Noah avait énormément besoin de cette relation. Mais il n’arrivait pas à le vivre sereinement, effrayé à l’idée qu’on l’abandonne une nouvelle fois. Il ne s’était pas encore excusé pour son comportement odieux envers lui et les mots un peu trop forts… Il ne savait pas s’il allait le faire. Il avait juste besoin de réfléchir, et aujourd’hui de s’aérer la tête. Du coup il était sorti faire un tour. Cette fois, ni skate ni musique pour le déconcentrer.
C’est sûrement pour ça qu’on l’aborda d’ailleurs. Quand il avait son casque, les gens n’osaient pas trop. Il regarda l’homme qui se présentait à lui et sourit. Même s’il n’était pas spécialement de bonne humeur, il n’avait aucune raison de l’envoyer péter. Noah restait un garçon bien élevé, malgré sa crise d’adolescence. « Merde j’suis hyper nul pour donner des indications… Mais c’est pas très loin, je crois voir où c’est, je peux vous accompagner ? J’ai rien à faire de plus ! » Il ne fumait pas mais il passait souvent devant. Il regarda sa main un instant puis la serra. « Moi c’est Noah. Du coup… bah appelez-moi Noah ! » Il commença à marcher après s’être assuré que l’inconnu le suivait. Il aurait au moins fait une bonne action dans sa journée !

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Noah faisait plutôt son âge, c’est-à-dire jeune. Pour autant, dans les bars et les boîtes quand il y allait, personne ne remarquait que sa carte d’identité était fausse. Comme quoi, ces gens-là n’avaient pas inventé l’eau chaude ! Enfin, ça l’arrangeait bien lui, de pouvoir aller dans les lieux interdits aux mineurs. Il sourit à la remarque de l’autre homme sur le fait qu’il ne travaillait pas dans son lycée, et qu’il ne le dénoncerait donc pas. « Je sais que je sèche pas mal mais pour une fois je n’ai vraiment pas cours ! » affirma-t-il avec le sourire, avant d’espérer que ce ne soit pas un ami de sa mère. Ce serait quand même con, elle n’était pas censée savoir qu’il séchait. Encore moins qu’il séchait pas mal. « Grimes, pourquoi ? » On ne lui demandait pas souvent son nom. D’ailleurs, on ne demandait que rarement son nom à un inconnu dans la rue. Noah fronça les sourcils, sans trop se poser de questions non plus. Peut-être que c’était juste une habitude d’Edwin. Peut-être qu’il connaissait du monde ici, comme il y avait vécu, et qu’il trouvait à Noah un air de famille avec une de ses anciennes connaissances. Ils arrivèrent devant le tabac et Edwin proposa de lui offrir un verre, sûrement pour le remercier du temps qu’il avait pris pour lui. Noah se mettait aussi à sa place, ce n’était pas évident de débarquer dans une ville qu’on pensait connaître et qu’au final, on ne reconnaît plus. Alors comme il n’avait rien d’autre à faire de particulier, il accepta. Il ne prenait aucun risque, c’était un lieu public. Pas comme quand il avait suivi Hans, l’inconnu du cabaret, sur sa moto… Ca, c’était en effet de l’inconscience. « Si vous voulez oui. » Le type lui faisait un peu pitié, à vrai dire. Il ne devait plus connaître personne. Bon, ce n’était pas un adolescent de dix-sept ans qui deviendrait son ami, mais il pouvait au moins accepter ce verre. Cela dit ça n’irait pas plus loin, pas question de prendre un numéro ou quoique ce soit d’autre, là ce serait trop bizarre !

Après qu’Edwin eut acheté son ticket de loterie, ils se posèrent en terrasse dans un petit café à côté. Il lui semblait que le plus âgé le regardait un peu de travers, alors il sortit son portable pour regarder son visage dans la vitre. « J’ai quelque chose sur le visage ? » Sinon pourquoi Edwin le regarderait comme ça ?

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Ce qu’il voulait faire dans la vie ? Vaste question. Noah se décourageait assez facilement au niveau des études. Et toutes les professions intéressantes nécessitaient qu’on se bouge un minimum le cul. Alors… Il ne savait pas trop quoi faire. Il était bien conscient qu’il n’avait qu’une chance sur 1000 de devenir un youtubeur connu, il lui fallait forcément un plan B. Ou même C. Il fit alors une grimace. « Euh ouais je suis plutôt du côté des paumés aussi… J’aime bien la vidéo, et les animaux. Mais j’ai pas trop envie de faire cinq ans d’étude pour devenir véto ou je sais pas quoi... J’ai envie d’être rapidement dans la vie active. » Sauf qu’il rêvait un peu trop Noah. Il allait avoir du mal à trouver quelque chose qui lui plaisait sans étude. M’enfin, il avait encore le temps d’y réfléchir pas vrai ? Il n’avait que dix-sept ans ! « Nan c’est bon j’ai rien à faire. Pis comme ça si vous gagnez à la loterie, vous partagerez peut-être avec moi ! » qu’il dit avec un sourire. Après tout, sans lui il n’aurait pas trouvé le tabac non ?

A peine s’étaient-ils assis que l’homme lui parla de sa mère. Noah fronça les sourcils. Apparemment, il la connaissait. Et ça semblait être quelqu’un d’important pour elle. A ce moment-là il ne fit pas du tout le rapprochement, simplement parce qu’il s’était mis en tête qu’il ne verrait jamais son père, surtout pas d’une façon aussi nulle. Peut-être aussi qu’il refusait de voir la vérité en face à cet instant. « Oui, Ella c’est ma mère. Vous la connaissez ? »

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Le type en face de lui, c’était son père. Quand Noah comprit, il se ferma totalement. Son visage ne montra plus le moindre sourire et son regard se fit très noir. Sous la table, son poing se serra avec tant de force qu’il aurait pu s’en faire péter les jointures. Il l’écouta sans l’écouter. Tout ce qu’il voulait, c’était lui balancer sa haine à la figure. Il s’était souvent imaginé retrouver son père. Il avait imaginé des retrouvailles, à l’époque où il y croyait encore. Et clairement, ça n’avait jamais été aussi pourri. Dans un bar, à simplement lui dire “ hey je suis ton père aime-moi “. Ok, ce n’était pas ça qu’il avait dit, mais ça y ressemblait pour Noah. Il le laissa toutefois aller au bout de ses explications - explications qui l’énervaient encore plus. « Va te faire foutre Edwin. » Paternel ou pas, il méritait cette insulte. Et c’était avec plaisir qu’elle sortait de la bouche de Noah. Il se releva, ne pouvant pas passer une minute de plus assis à cette table. « T’es pas mon père, tu l’as jamais été. T’as abandonné ma mère, tu m’as abandonné et tu oses te pointer comme une fleur ?! Tu t’attendais à quoi ?! On n’a pas besoin de ton aide ! On s’en sort très bien sans toi ! T’as pas intérêt à la recontacter, j’te jure. Elle a pas besoin de ça dans sa vie, elle a pas besoin de toi. Et moi non plus. » Bien sûr qu’il avait besoin d’un père. Mais pas d’un père qui faisait si peu de manières pour se présenter à lui après dix-sept ans d’absence. Il s’imaginait ces retrouvailles tellement différemment…
Dans le café, tout le monde les regardait. Mais Noah s’en fichait de taper un scandale, au contraire. « C’est bien, maintenant tout le monde saura que t’es un connard. M’approche même pas. » Et sur ces mots très agréables à l’oreille, il quitta le café. Trop d’émotions. Ses jambes tremblaient. A un tel point qu’elles finirent par ne plus le porter. Il dût s’asseoir sur un trottoir à côté, tremblant de partout. Il était en colère. Et triste. Et tant de choses à la fois.

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Mais non, Noah ne ferait pas marche arrière. Il ne retournerait pas vers l’homme qu’il ne considérait pas comme un père, au risque d’être encore plus grossier avec lui. Il ne s’excuserait pas non plus des mots forts qu’il avait eus, car il les pensait. Chacun d’eux. Noah n’avait jamais été dans un état d’énervement pareil, il en chialerait presque. Il tremblait comme une feuille assis sur le trottoir, à prier pour être dans un mauvais rêve. Oui, il avait souhaité rencontrer son père. Il voulait savoir ce qu’il était devenu, pourquoi il était parti, s’il avait d’autres enfants. Mais il pensait mériter bien plus de respect que ce qu’Edwin lui offrait aujourd’hui. A savoir : de pauvres mots dans un bar pourri. Alors non, il n’attendait pas de lui qu’il se ramène dans un hélicoptère avec une tonne de cadeaux, non. Mais il y avait des façons de dire, des façons de faire, et ce n’était clairement pas la bonne.
Il lui fallut du temps pour calmer sa crise d’angoisse. Finalement, il parvint à sortir son téléphone et le premier numéro qu’il put composer fut instinctivement celui de Maliyan. Ils ne s’étaient plus parlés depuis leur dispute mais il avait besoin de lui. Malheureusement, il tomba sur la boîte vocale. « Ma… Maliyan… J’ai besoin de te voir… Vite... J’suis pas bien… Mon père… Mon père est à Bowen… » Il ne parvint pas à en dire plus. Il raccrocha alors, les yeux rivés sur son téléphone en espérant pour que Mali appelle.

Il détestait ce type. Et il ne voulait pas qu’il s’approche de sa mère. Mais il le ferait tôt ou tard, et Ella saurait l’envoyer chier à ce moment-là. Elle avait toujours eu du caractère, sa mère. Quand il put, il se releva enfin et commença à marcher, assez vite pour s’éloigner de cet endroit. Il ne voulait plus le voir, c’était catégorique.