¡Pinche perra te voy a matar! [ft. Chuck]

Une nuit rapidement écourtée, un travail à vous aspirer toute votre énergie vitale, un boulot à finir à des heures de malade parfois; dix heures du soir, ce n'est pas une vie pour certains, pour d'autres ce n'est qu'une routine. Sacoche à l'épaule, mains dans les poches, chemise légèrement déboutonnée, les saisons passant, nous sommes bien obligés de nous fringuer en conditions. Une marche ferme voire même rapide, pressé de rentrer à l'appartement pour me poser le temps de quelques minutes. Un regard qui balaie les gens aux alentours, ce dernier s'arrête sur un homme à l'allure de détraqué qui vient dans ma direction. Mes paupières s'abaissent rapidement avant de les réouvrir, gardant un oeil sur l'homme en question. Un soupir. Je crois que je ne vais pas pouvoir y échapper. Un regard finalement en coin lorsqu'il arrive à ma hauteur, je tente de poursuivre ma marche mais je sais d'avance que c'est en vain. "Je n'ai pas le temps et encore moins d'argent sur moi." lui dis-je en ayant plus de luminosité sur sa dégaine d'ananas.

Sur ce coup, il marque un point. Je ne lui ai rien demandé mais c'était peut-être seulement un pressentiment. Des mecs ou même des femmes qui vont à la rencontre d'autres personnes pour tenter de refourguer de la merde, il y en a à la pelle. Un haussement de sourcils, ce genre qui veut tout dire mais surtout qu'on est désespéré par la personne, je lâche un soupir sans même lui répondre, ce dernier ayant déjà repris la parole. Un roulement d'yeux. Voilà de quoi je parle. Ce genre de mecs dont on ne peut pas se fier. On peut bien s'entendre avec eux et encore, je ne vois même pas pourquoi on chercherait à les accoster si ce n'est pour se défoncer. "Tu m'en diras tant. Qu'est-ce que je voudrais de ta personne?" lui demandais-je, cette face toujours aussi blasée qui me colle à la peau. "Je ne fume pas, je ne bois pas et je ne me drogue pas donc que pourrais-tu me proposer?" Une simple question. Au pire, il décampera. Un pas en avant prêt à reprendre ma route, deux types en plein milieu de la rue qui discutent, ça peut avoir l'air suspect et je n'ai pas envie de rentrer dans des histoires qui ne me concernent en rien.

Une conversation -si on peut appeler ça comme ça- qui commence à tourner en rond. Je fronce les sourcils, ne sachant si je dois me moquer de lui en répondant d'une manière complètement idiote ou si je dois mettre fin à ce numéro au plus vite. Je soupire, le regarde presque peiné. C'est vrai que dans le fond, il ne m'a rien fait ce pauvre garçon mais je ne saurais dire pourquoi j'ai mis les points sur les i dès notre premier contact. Un pressentiment je présume. Je n'ai pas le temps de rétorquer quoi que ce soit qu'une voiture de flics vient se rapprocher doucement de nous avant de baisser leur vitre. Un roulement d'yeux. Bordel, dans quoi j'ai mis les pieds encore? Un regard pas vraiment sympathique en leur direction avant de soupirer, l'un d'eux vient sortir de la voiture. "Vous pouvez passer votre chemin, il n'y a rien à voir ici." soufflais-je. Une réponse qui n'a pas l'air de lui plaire au point de faire sortir son coéquipier de la bagnole. "Mais c'est qu'il est assez énervé le jeune. Il veut peut-être venir nous expliquer ce qu'il ne va pas?" Je le zyeute de haut en bas, pas besoin de répondre, mon mépris en disant long. Son collègue se rapproche, donnant un coup de menton vers le junkie en face de moi. "Putain." lâchais-je sans réellement m'en rendre compte, détournant par la même occasion le regard tout en sachant pertinemment ce qu'ils ont en tête. Il ne fut pas longtemps avant qu'on ne se fasse embarqué pour je ne sais raison, des doutes sur cet être bouclé probablement, en pleine nuit. Nous je n'étais pas là pour toper, allez leur faire comprendre. La grille se referme après nous avoir poussé à l'intérieur, s'étant pris quelques remarques de ma part à ces gestes. Je m'assoie sur ce qui nous sert de banc. Je savais que je n'aurais jamais dû l'aborder mais je sentais que si je ne le faisais pas, c'est lui qui allait prendre le pas. "Tu as un profil type d'un mec qui se drogue avec tout ce qui se passe. Tente d'être plus soigné pour effacer ces soupçons ou ces idées par rapport à ton faciès." dis-je à mon compagnon de garde à vue sans même lui lancer un seul regard. Ce n'est pas dit méchamment, c'est juste un simple conseil. Vu mon allure, on aurait jamais dit que je dealais à tout va à l'époque et pourtant.

J'hausse les épaules à l'entente de son parcours avant de soupirer. Il a beau être clean comme il le prétend, il n'est pas rare de voir ces personnes en cure de désintoxication replonger. Il suffit d'une fois, d'une seule et unique fois et toutes ces semaines et années sur le droit chemin s'effondre. A-t-il assez de mental pour s'y tenir? "Tu replongeras à un moment donné." lui dis-je, sans arrière pensée, un simple constat en voyant sa personnage. "On t'a forcé à arrêter ou c'est ta propre décision?" Je suis simplement curieux et vu qu'on doit passer le temps, autant bien le faire. Un petit rictus vient se dessiner sur mes lèvres lorsqu'il m'envoie un pic. "Il est vrai mais ce n'est pas non plus une raison de nous embarquer. Ce n'est pas comme si je les avais insulté." rétorquais-je avant qu'il ne se mette à chialer sur le premier flic qu'il entraperçoit à travers les barreaux. "Ils en n'ont rien à faire. Ils vont juste nous cuisiner sur tout et n'importe quoi histoire de passer le temps et de dire qu'ils ont fait quelque chose de productif de leur journée." lui dis-je à la fin de son discours sur Carteret premier du nom bien qu'il ne me répondra pas forcément. Ce type est borné et clairement pas dans le bon sens du terme. Oui c'est l'hôpital qui se fout de la charité et alors? Et voilà qu'il se met à hurler le nom d'une femme. Je soupire de désespoir. Est-ce qu'on a le droit de frapper les autres personnes qui sont dans la même cellule que nous? Je me racle la gorge avant de me mettre à crier à mon tour. "Vous allez faire quelque chose ou je m'en charge?" Ils se tournent en notre direction mais n'agissent pas. Un soufflement, je secoue légèrement la tête tout en levant les yeux au ciel. Demi-tour, je passe derrière le bouclé et attrape sa tête fortement pour venir l'assommer sur les barreaux. "De rien!" m'exclamais-je en direction des flics. "Ouais merci." qu'ils me répondent. Il ne sera pas non plus dans le coma mais au moins il ne nous fera pas chier pendant une petite demi-heure, peut-être un peu moins. Je le rattrape et le traîne sur les bancs, n'allant pas le laisser s'écraser sur ce sol. A l'opposé du jeune homme, je viens recroqueviller mes jambes sur le banc tout en gardant un oeil sur lui, attendant qu'il se réveille. "C'est bon tu es calmé maintenant?" lui demandais-je d'une voix assez sereine. J'avale ma salive tout en continuant de l'observer. "Est-ce que par hasard tu aurais sur toi quelque chose en métal et assez fin?" Ne sait-on jamais. "Je ne parle pas de seringue huh." lui dis-je en esquissant un sourire narquois. C'est juste pour le faire chier. Je me doute bien qu'il n'a pas ce genre d'accessoire sur lui.

Spoiler: