(#33) i wish you could forgive me -r.

Pendant le trajet qui te séparait encore de l'Australie, tu avais essayé de faire un joli discours dans ta tête mais tout te semblait minable. Existait-il vraiment des excuses quand on part six mois sans donner la moindre nouvelle ? Non. Tu ne savais pas vraiment ce que tu pouvais dire, tu pouvais lui exposer les raisons pour lesquelles tu avais fait ce que tu avais fait mais serait-ce suffisant ? Probablement pas. Tu n'avais pas simplement quitté la ville, tu étais restée silencieuse pendant six mois. On ne pouvait pas dire non plus qu'on s'était inquiété pour toi, tu avais reçu quelques messages de tes parents, de Jaeden et c'était tout. Tes amis les plus proches ne semblaient pas soucieux plus que cela. Il ne t'en restait déjà pas beaucoup avant de partir, tu avais maintenant le sentiment d'être seule au monde. Enfin pas vraiment, il y avait toujours Aaron, un pack de bière et une balade en moto, voilà tout ce dont tu avais besoin. Peut-être un peu de repos aussi, le décalage horaire allait être un peu rude mais tu avais passé le reste du vol à dormir.

A l'aéroport, tu hélais un taxi pour qu'il t'amène à bonne destination, tu demandais à rentrer chez toi histoire de prendre une douche, de changer tes vêtements, tu avais besoin de te sentir plus présentable. Après quoi, tu appelais un nouveau taxi pour te rendre quelque part en particulier. Le garage d'Aaron, on était en début d'après-midi, s'il y avait bien un endroit où tu espérais le trouver, c'était chez lui, à bricoler comme un forcené. Une fois devant chez lui, tu ne pouvais t'empêcher de repenser à cette fois, où tu avais fini cachée derrière un buisson ne voulant pas le déranger face à la mère de Cosima. C'était d'ailleurs ce jour là qu'il t'avait parlé de sa fille plus en détail, pour la première fois. C'était aussi ce jour là que votre relation avait connu un vrai tournant, il était devenu ton ami. Tu ne pouvais t'empêcher d'esquisser un sourire, surtout quand tu repensais à la première fois que tu l'avais vu, prête à lui rentrer dedans parce que tu pensais qu'il te reluquait sans vergogne. Tu l'avais vraiment mal jugé ce jour-là. A mesure que ton fauteuil s'approchait de la porte d'entrée, tu avais le coeur qui se serrait, tu étais fébrile à l'idée de le revoir. « Aaron ? » Pas de réponse, pourtant, il te semblait bien entendre du bruit à l'intérieur. Tu n'allais pas essayer d'ouvrir la porte sans même essayer la sonnette d'abord. Ton doigt se posa contre le bouton et tu attendais quelques secondes avant de le retirer. Plus un bruit cette fois. « Y a quelqu'un ? J'ai entendu du bruit, tu es là ? » demandais-tu, soucieuse. Tu lui avais envoyé un message le matin et tu n'avais toujours pas eu de réponse. Tu ne pouvais pas savoir s'il l'avait lu ou non, mais tu trouvais ça étrange. A te demander si tu n'étais pas folle ou s'il ne se faisait pas cambrioler du coup.

Toujours devant la porte d'entrée, tu commençais à te demander si le bruit que tu avais entendu ne venait pas de ton esprit puisque personne ne donnait de réponse. Pourtant, tu n'arrivais pas à te dire que c'était simplement le fruit de ton imagination. Mais si Aaron n'était pas chez lui, qui était là ? Tu n'en avais pas la moindre idée, tu avais quitté la ville pendant six mois, ça pourrait être Cosima ou alors Judith. Mais la dernière fois que tu avais vu les deux femmes, elles semblaient contentes de te voir. Peut-être parce que c'était le jour où Aaron avait retrouvé connaissance. Sinon c'était quelqu'un qui ne te connaissait pas et qui ne voulait pas prendre le risque d'ouvrir la porte, mais tu avais beaucoup de mal à imaginer que ça puisse être une femme. Ses relations avec les personnes de ton sexe à toi avaient toujours été un peu compliqué même s'il s'entendait bien avec Freja et toi. Et puis il y avait eu Erin aussi. Tu te rappelais à quel point elle était importante pour lui et tu n'avais pas vraiment su être présente pour l'épauler dans cette terrible épreuve. Voilà donc quel genre d'amie tu étais pour lui. « Si vous essayez de cambrioler la maison de mon ami, sachez que j'ai appelé la police ! » criais-tu en pensant que ça pourrait dissuadé n'importe qui se trouvant là. C'était aussi un risque pour toi, parce que tu ne l'avais absolument pas fait mais pouvait-il vraiment le savoir ? Tu espérais juste que personne n'avait l'oreille collé à la porte. Tu finis par reculer un peu, rester juste derrière la porte n'était peut-être pas une grande idée. Tu pouvais peut-être aller voir par l'entrée du garage, si elle était ouverte, tu pourrais vraiment appeler la police. A moins que ce soit Aaron qui se cache chez lui, mais si c'était le cas, tu étais bien loin de comprendre les raisons qui le poussaient à agir ainsi. Tu décidais d'attendre encore un petit moment avant de bouger jeter un coup d’œil de l'autre côté, gardant ton téléphone dans la main au cas où.

Ta menace semblait avoir fonctionné puisque tu n'entendais plus un bruit. Mais s'il y avait eu du bruit, c'est qu'il y avait quelqu'un dans la maison, autrement ça aurait été digne d'un bon film bien surnaturel avec des objets qui se bougent et se cassent tout seul, assez improbable quand on est dans le monde réel. Au cinéma ça passe bien, mais c'est tout. Puis la musique dans le garage se fait entendre, tu avais déjà commencé à t'y rendre pour y jeter un coup d'oeil, ayant vraiment du mal à comprendre ce qui était en train de se jouer sous tes yeux. Avait-il un apprenti ou un partenaire ? Tu pouvais affirmer que non lorsqu'il se retrouva face à toi, t'annonçant que personne n'essayait de le cambrioler. Tu te sentais rassuré de l'apprendre mais en même temps, déstabilisé par le comportement qu'il avait. Tu avais beaucoup fréquenté Aaron, tu avais bien compris qu'il avait une certaine réticence envers les femmes et tu l'avais déjà vu se mettre en colère, notamment contre la mère de Cosima. Mais là, il était encore différent, tu le trouvais fuyant. « Pardon, je ne pensais pas te déranger.. » ajoutais-tu doucement, mais il ne t'avait probablement pas entendu puisqu'il avait fait demi-tour, disparaissant dans son garage. Tu ne savais pas si tu devais le suivre ou rester planter là. Tu n'arrivais vraiment pas à comprendre ce qu'il se passait. Peut-être qu'il avait une mauvaise journée ou peut-être qu'il s'était passé quelque chose d'important pendant ton absence. Tu ne pouvais pas en avoir la moindre idée, tu n'avais pas pris le temps de parler à qui que ce soit pour avoir un peu des news, tu avais filé ici sans trop réfléchir plus. Tu pousses alors ton fauteuil jusqu'à l'entrée de son garage et parle fort pour te faire entendre malgré le bruit de la musique. « Si tu es occupé, tu pouvais me le dire, je peux repasser une autre fois. » Ou peut-être pas, tu ne savais pas quel mouche le piquait mais tu sentais bien que tu n'étais pas la bienvenue, en tout cas, pas aujourd'hui. Il t'en voulait sûrement d'être partie sans le prévenir mais tu n'avais pas pensé que ça aurait pu l'affecter autant que ça.

S'il y a bien une chose à laquelle tu ne t'attendais pas, c'était à une telle explosion de la part d'Aaron. Et pourtant, tu l'avais déjà vu se mettre en colère, tu sentais bien qu'il ne se laisser pas aller avec toi comme il s'était laissé aller avec la mère de Cosima. Tu ne t'en étais pas doutée une seule seconde, certes, tu avais pris tes affaires et tu étais partie quasiment du jour pour le lendemain, mais même tes parents n'étaient pas au courant de ton projet, tu avais demandé s'ils pouvaient garder Jasper un petit moment sans jamais être très claire sur le temps de ton absence. Toi-même tu ne le savais pas. Tu avais fini par vouloir rentrer mais ça aurait pu arriver bien plus tôt ou bien plus tard. Tu ne pouvais savoir que ce que tu avais vécu après tout. Il te reprochait d'être partie sans un mot juste après sa proposition. Effectivement, le timing avait été mauvais sur le coup, tu ne t'attendais pas à ce qu'il te propose de vivre chez lui, lui qui luttait absolument pour fuir les femmes. Et pourtant quand tu faisais le compte, il y en avait au moins eu 5 qu'il côtoyait ou avait côtoyé sur cette dernière année. Tu l'écoutais, l'air surprise, sans dire un mot, le laissant alors sortir tout ce qu'il avait à te dire. Tu ne bougeais pas d'un iota et tu le regardais faire des allers-retours vers le frigo à bière et la moto qu'il bricolait. Sans même te regarder une seule fois. « Très sincèrement, je suis désolée Aaron, je ne pensais pas que tu le vivrais de cette façon. Je vais te laisser. » ajoutais-tu doucement, brisant le silence qui s'était installé. S'il bossait, en tout cas, il était plutôt silencieux, ce qui te paraissait suspicieux. Tu posais mes mains le long de tes roues et tu commençais à faire une manœuvre de recul. Discuter en étant en colère n'était jamais une bonne chose, tu l'avais toi-même appris par le passé, si tu avais quelque chose à faire pour lui, c'était de le laisser respirer, de prendre du recul sur ce qu'il ressentait. A mesure que tu t'éloignais de son garage, ton cœur ne cessait de se serrer.