stalking time (lys)

Ça fait maintenant un moment que tu suis de loin une nana. Tu commences à te prendre toi même pour une folle. En réalité, c'est simplement parce que t'as entendue des rumeurs sur elle et un des mecs que tu t'es tapé. Non pas que t'es encore des vues sur lui. En revanche, ta meilleure amie oui et, en bonne meilleure amie qui se respecte, tu veux le mieux pour elle. T'as besoin de savoir si il se fou de sa gueule, pour savoir si justement, tu dois aller lui péter la gueule ou non. Du coup tu l'as repérer dans une boutique y'a quelques minutes et t'as bien envie de faire ta fouine mais tu sais pas trop comment t'y prendre. Alors que la jeune brune s'arrête sur un banc tu en profites pour sortir une clope et faire mine de chercher ton feu. Tu te rapproches alors de la jeune femme. Dis moi, t'aurais pas un feu par hasard ? demande-tu le plus gentiment possible. La gentillesse n'étant pas ton fort. Toi, tu préfères de loin le rentre dedans. En plus, elle n'avait pas vraiment l'air d'une fumeuse, mais c'était un moyen comme un autre d'engager la conversation. Elle ressemblait plutôt à une gentille fille sainte nitouche. Peut être que l'italien se foutait de la gueule des deux, tu n'en savais trop rien en réalité.

J’aimais ces après-midi tranquilles, où je n’avais aucun cours à donner au lycée, ni rien de particulier de prévu. En général, j’en profitai pour sortir un peu en ville, et cette fois-ci, je m’étais décidée pour aller flâner un peu en librairie. Je n’avais pas compté le temps passé parmi les étalages de livres puisque, dans tous les cas, je n’étais absolument pas pressée. Je n’avais aucun impératif et n’était pas contrainte par le temps. Cela me faisait du bien, cela avait ce petit côté relaxant qui collait un sourire sur mon visage sans raison apparente. Je tombai sur un roman, d’une autrice que je venais de découvrir, et le plaçai aussitôt au dessus de la pile que j’avais dans les bras. Le chant d’Achille par Madeline Miller promettait d’être une lecture aussi agréable que l’avait été Circé, j’avais hâte de retrouver la plume de la romancière. Après la librairie, je passai au café et commandé un chocolat chaud infusé avec de la cardamome et un tout petit peu de cannelle, puis vins m’asseoir sur un banc, face à la plage. Moins d’une minute plus tard, une jeune femme m’accosta pour me demander du feu. Je lui souris, puis plissai le nez.
— Oh, je suis désolée, mais je ne fume pas vraiment.
J’allais lui conseiller de demandé à l’homme assis sur le banc d’accoter quand une illumination me traversa.
— Oh mais…attendez, fis-je en plongeant le nez dans mon sac à main pour en retirer une boite d’allumettes, j’ai…ça. Ca ira ?
Cela pouvait paraître bizarre pour une non-fumeuse d’avoir ce genre de chose à portée de main, sauf bien sûr lorsqu’on avait coutume de se joindre à ces petits feux de camps qu’il y avait souvent au bord de la plage.

L'amitié peut vraiment te faire, faire des choses étranges parfois. Surtout pour Sasha, elle à presque toujours été la pour toi, et c'est vrai que tu lui rends l'appareil, à ta façon du moins. C'est pour ça que tu te retrouves à espionner une meuf que du ne connait que sur des rumeurs. Finalement, t'as technique d'approche n'était pas si foireuse. C'est pas grave. dis-tu en haussant les épaules. Evidemment, qu'elle ne fumait pas. Elle n'avait pas la tête à ça. Ton regard se reposa cependant sur elle, lorsqu'elle te dit d'attendre. Tu hochas la tête en souriant malgré toi, quand elle te tendit une boite d'allumette. Niquel, merci. répondis-tu en prenant la boite avant de venir craquer l'allumette pour allumer ta clope. C'était rare, quand tu ne fumais que du tabac, mais, parfois, tu n'avais pas trop le choix. Tu tiras sur ta clope en savourant cette latte avant de reporter ton attention sur la jeune femme. Tu lis quoi ? demandas-tu en pointant du menton le livre dans le sac de la jeune femme, t'en avais strictement rien à foutre putain. T'aimais pas lire, ni l'odeur des livres et tu détestais ce genre de conversation ennuyante, mais il fallait bien que t'en saches plus sur elle. Pour arriver à la fameuse conversation de l'italien qui joue visiblement sur plusieurs tableaux.

Je regardai la jeune femme allumer sa cigarette à l’aide d’une allumette, ce que je ne pus m’empêcher de trouver insolite, et en même temps très authentique. Cela me rappelait les cow-boys dans les Westerns que mon père dévorait quand j’étais gamine. L’image me fit sourire. Je rangeai la boite dans mon sac après que la jeune femme me l’eut rendu puis me focalisai à nouveau sur elle lorsqu’elle sembla s’intéresser au livre que je venais d’acheter. Rare étaient ceux qui entamaient une conversation en s’intéressant à mes lectures, beaucoup de gens – malheureusement – trouvait cela barbant. Et j’étais bien placé pour le savoir avec mon job à mi-temps au lycée de Bowen en tant que prof de littérature. Heureusement pour moi, c’était un sujet et une passion que je partageais avec Azriel. Nous échangions très souvent sur nos découvertes littéraires, même si nos goûts étaient différents. Passée la surprise, je souris à la jeune femme.
— C’est un roman sur…la relation entre Achille et Patrocle, depuis leur enfance jusqu’à la Guerre de Troie. J’ai déjà lu un roman de cette autrice, sur la déesse Circé, j’ai trouvé ça passionnant. Vous…vous aimez lire ?

Tu hochas la tête alors qu'elle te parlait de son livre dont tu te foutais royalement, tu ne comprenais même pas la moitié des choses qu'elle te disait. Tu ne t'étais jamais intéressé à tout ça et avec ce qui c'était passé dans ta vie dans tes années scolaires, tu avais complètement décroché assez rapidement. Tu grimaças. J't'avoue que non, j'déteste lire. Enfin, c'est peut être un grand mot détester mais, j'ai pas la patience. dis-tu en haussant les épaules. Même avec l'entraînement de Vassili, t'étais pas douée pour mentir longtemps alors autant être honnête plutôt que de t'enfoncer dans une conversation qui allait complètement te perdre. J'ai l'impression de t'avoir déjà vu quelque part. dis-tu en t’asseyant à côté d'elle. On a peut être des connaissances en commun ? T'es d'ici ? demandas-tu, curieuse. Autre technique pour arriver à ce que tu voulais savoir. C'était drôle dans le fond, de connaître son existence par des rumeurs alors qu'elle ne connait pas la tienne. Enfin, toute personne originaire de Bowen à entendu aux infos l'histoire de l'ado tuant son père qui allait la violer pour la millième fois de sa triste vie. Mais, les infos c'est comme tout. D'abord on en parle beaucoup et puis après, tout disparaît dans l'oublie. Si seulement c'était aussi simple avec les souvenirs.

Je souris devant l’aveu de la jeune femme. J’avais entendu ce discours si souvent, comme tous ceux qui aimaient lire probablement. Lire, à mon sens, n’était pas réellement une question de patience, mais d’envie tout simplement. Je n’étais pas de celles qui cherchaient à mettre des livres entre toutes les mains ; bien sûr, pour moi, c’était un vrai plaisir et plus je pouvais le partager, mieux c’était, mais je respectais aussi ceux qui n’étaient pas attirés par cette activité. C’était très personnel, en effet. Quand la jeune femme m’avoua qu’elle pensait m’avoir déjà vu quelque part, je me mis à fouiller dans ma mémoire. Je n’avais pas le sentiment de la connaître, non. Mais je n’étais pas très physionomiste non plus…
— J’ai grandi à Bowen, et j’y ai passé toute ma scolarité, déclarai-je, peut-être qu’on s’est déjà croisé ? Ou peut-être que nous avons des connaissances en commun, effectivement, ça n’est pas impossible.

Tu étais pas une tête à l'école, tu n'en avais jamais été une. Alors un rat de bibliothèque, encore moins. Tu ne jugeais pas ceux qui l'étaient, loin de là. Peut être que tu ne serais pas l'épave que tu étais aujourd'hui si tu t'étais accroché à l'école. Mais, la négativité avait été plus simple à suivre. La drogue était plus attirante, elle rendait tes douleurs moins vives et t'avais totalement déraillé. Mais ça, c'était une autre histoire. Actuellement tu ramais surtout pour chercher un sujet de conversation devant une meuf que tu ne connaissais ni d'Eve, ni d'Adam. Parce que t'avais appris que c'était la soit disant meilleure amie de l'autre mec qui tourne autour de ta meilleure amie à toi, que tu connais bien et que tu trouves ça louche. Ouais, j'suis d'ici aussi mais j'ai vite mis fin à ma scolarité moi. dis-tu en haussant les épaules et en tirant sur ta clope. Tu vas souvent au Hendrix ? On s'est peut être déjà croisé là bas. C'est vrai que tu sortais souvent en soirée, mais t'étais pas si souvent que ça la bas en réalité. Tu t'étais juste dis que c'était une autre solution de te rapprocher un peu plus de ta cible. Les barmans sont sympa. ajoutais-tu en souriant. Tu en savais quelque chose puisque quand tu mettais encore les pieds là bas, t'avais finis dans le pieux d'un. Depuis, tu n'y était pas vraiment retourner, c'était pas trop ton truc de tourner autour de mec avec qui t'as déjà couché. Enfin, en général mais encore moins quand ta meilleure amie avait des vues dessus.

La jeune femme était effectivement de Bowen. Cela ne m’étonnait pas vraiment, il me semblait bien l’avoir déjà vu quelque part. Nous vivions dans une petite ville après tout, il était facile de recroiser les mêmes têtes. Quand elle me parla du Hendrix, mon sourire s’agrandit. Je connaissais bien ce bar en effet et le fréquentais plus que je n’osais l’avouer sans doute.
— Oui, c’est possible. Les barmans sont cools oui, l’un des d’eux est mon meilleur ami en fait !
Azriel était un peu plus que ça en réalité, mais c’était le titre le plus approprié. Celui que nous utilisions tous les deux, comme un générique. C’était plus facile que d’expliquer notre relation à tout le monde, ce dont nous n’avions pas nécessairement envie d’ailleurs puis qu’elle ne regardait que nous.
— Azriel, italien, brun aux yeux marron...(je ris) oui...enfin, ils le sont tous les deux en fait ahah...mais Az n'a pas d'accent si ça peut te le resituer.

Tu te demandais si Lys finirait par te griller. Tu n'étais pas une pro et jamais tu n'aurais pu faire carrière dans le cinéma un jour. Mais c'était plus fort que toi. Sasha, c'était toute ta vie cette fille et tu ne pouvais pas imaginer qu'on lui brise le cœur encore une fois. D'ailleurs, pour le moment, tout ce que tu avais entendu se confirmait dans cette conversation. Tu l'écoutas en souriant, hochant la tête. Je connais Az, je vois très bien lequel c'est. dis-tu en souriant. Enfin, tu le connaissais surtout dans vos draps respectifs, mais ça c'était un détail dont tu n'avais aucune envie de parler. C'est juste ton meilleur ami, ou y'a plus ? demandas-tu, curieuse. Tu étais presque à deux doigts d'en savoir un peu plus et tu n'attendais que ça. Non parce qu'on dirait que y'a des étoiles dans tes yeux quand tu en parles. rajoutas-tu en riant doucement. En même temps, il était peut être peu probable qu'elle se confie à une inconnue. Mais au fond, t'avais toujours un petit espoir. Au plus profond de ta conscience, ça te faisais chier qu'elle est l'air si gentille. Tu espérais que ce ne soit qu'une grosse conne et tu n'aurais aucun scrupule à cracher ton venin. Mais elle n'en avait même pas l'apparence. Toi en revanche, c'était un peu l'inverse. Au fond, peut être que Lys n'avait aucune idée de l'existence de Sasha ou alors peut être qu'elle souffrait, elle aussi.

Ma relation avec Az, en effet, était un peu spéciale. Aux yeux des autres en tout cas. Pour nous, cela coulait de sources, nous avions fonctionné comme cela depuis notre rencontre. Cela faisait presque huit ans, maintenant. Azriel était mon meilleur ami, mon amant parfois, et si les moments passés dans ses bras me ressourçaient plus qu’il n’était possible de le décrire, là n’était pas le ciment de notre relation. L’affection que nous avions l’un pour l’autre allait bien au delà du sexe. Azriel était mon confident, cela à qui je pouvais tout dire sans craindre qu’il me juge. Je l’admirais aussi pour ses qualités, son talent. Azriel était indispensable à ma vie, comme une clef de voute qui me permettait de rester debout. Mais ça, bien sûr, je le gardais pour moi. Cela ne regardait personne d’autre. Sibyl n’était évidemment pas la première personne à me faire remarquer que mon visage changeait quand je parlais de l’italien. C’était vrai, sans doute. Je ne m’en rendais pas vraiment compte.
— Il est très important pour moi, oui. Mais…pourquoi ces questions ? Il…t’intéresse ?
La jeune femme nourrissait vraisemblablement un intérêt pour mon meilleur ami. Rien d’étonnant. Az était beau garçon, travaillait dans un bar, ce qui avait tendance à lui attirer les regards de la gente féminine. Peut-être Sibyl avait-elle flashé sur lui.

Tu ne pu t'empêcher de rire à cette question. Excuse moi. dis-tu en secouant la tête. Non t'inquiète, je l'ai déjà essayé. Tu avais un peu honte de balancer ça comme ça, mais c'est la seule façon de faire que tu connaissais. Tu soupiras, au fond, peut être qu'elle méritait de connaitre la vérité. Elle n'avait pas l'air si méchante et ça te faisais de la peine. Ok, bon je vais peut être passer pour une folle mais c'est pas grave. Tu finis par prendre une grande inspiration avant de te lancer. Ma meilleure amie, Sasha, ne voit que par lui et franchement si il lui brise le cœur, je lui brise les couilles. affirmas-tu. J'ai entendu des rumeurs comme quoi vous étiez plus que des amis et il fallait que j'enquête, pour le bien de ma copine, tu comprends ? demandas-tu d'une petite vois comme pour te rassurer toi même. Comme l'aurais fait une enfant qui venait de se faire prendre entrain de faire des bêtises. Sauf que je suis une mauvaise actrice, une mauvaise menteuse et que tu aurais finis par me griller de toute façon. avouas-tu en haussant les épaules. Mais Sasha elle n'y est pour rien, si elle savait que j'étais là elle me tuerait. dis-tu en riant.

L’expression de Sibyl me fit lâcher un petit rire. Elle avait « essayé » Azriel. Comme une paire de chaussure. Elle avait sorti ça avec un tel naturel, comme si les mots sortaient de sa bouche, sans le moindre filtre. Malgré tout, je quittai mon expression joyeuse assez rapidement lorsque la jeune femme fit preuve d’encore plus de franchise. Elle m’expliqua la vrai raison de notre conversation, nous ne nous étions pas rencontrées par hasard, elle me cherchait. Elle voulait savoir ce qu’il y avait exactement entre Az et moi, parce que sa meilleure amie, Sasha, avait des vues sur lui. Sibyl voulait s’assurer qu’elle n’ait pas le cœur brisé. Un rire nerveux s’échappa de mes lèvres. Je ne savais pas quoi dire, j’étais sans voix.
— T’es sérieuse ? finis-je par articuler.
Cela me paraissait insensée, qu’on enquête sur moi pour savoir ce qu’il y avait exactement entre mon meilleur ami et moi. Je détestais qu’on cherche à s’immiscer dans ma vie privée comme ça. Je me sentais mise à nue, cela me mettait mal à l’aise.
— Azriel n’est pas le genre de garçon qui…enfin, il n’envisage pas le couple comme tous le monde. Si ta copine le connaît, elle sait sans doute ça, et ça n’engage qu’elle. Mais Azriel est un type bien, vraiment vraiment bien. S’il brise le cœur de quelqu’un, il ne le fait pas avec plaisir…
Je rangeai mon livre dans mon sac, pour m’occuper les mains puis me passer un main dans les cheveux. Azriel ne m’avait pas parlé de cette Sasha. Pas encore. Pourquoi.
— Ils se fréquentent depuis combien de temps ?

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