friends are the family we choose (bella)

Je me souviens que quand j'étais petite, j'adorais Noël. J'étais toujours impatiente qu'on se retrouve tous ensemble, en famille, et surtout impatiente d'ouvrir mes cadeaux, même si j'ai été très déçue quand j'ai appris que le Père Noël n'existait pas. Aujourd'hui, j'ai un peu gardé mon âme d'enfant et j'aime toujours cette période des fêtes de fin d'année, mais beaucoup de choses ont changé depuis quelques années et la magie de Noël s'est peu à peu estompée. Il y a l'absence de Nevaeh qui fait que notre famille n'est jamais vraiment au complet, et la maladie de mon frère, qui fait que l'ambiance n'est plus la même qu'avant. Cette année encore, ça a été difficile parce que même si tout le monde fait semblant, on sait tous que ça ne sera plus jamais comme avant. Je suis donc assez soulagée que ce soit terminé. Aujourd'hui, je sonne à la porte de l'appartement de Bella, une bouteille de vin dans chaque main que je brandis lorsqu'elle ouvre la porte. « Ça te dit un Noël 2.0 avec moi et ce merveilleux breuvage ? » Je ris doucement et passe le pas de la porte lorsqu'elle m'invite à entrer. Je ne la connais pas depuis très longtemps, mais j'ai trouvé ça normal de venir la voir pendant les fêtes, pour passer du temps avec elle. Sans le savoir, depuis quelques mois, elle m'apporte beaucoup de soutien. C'est comme un courant d'air frais et agréable dans ma vie morose et ce que j'aime dans notre relation, c'est que l'on a pas besoin de parler de nos problèmes pour se soutenir mutuellement. Tout le monde en a, des problèmes, on le sait, donc on se contente de se changer les idées sans forcément avoir à entrer dans les détails. C'est simple et apaisant. Je pose mes affaires ainsi que les deux bouteilles sur la table et me tourne vers mon amie. « Alors, le Père Noël a été sympa avec toi, j'espère ? » je lui demande, sourire aux lèvres, curieuse de savoir si son Noël s'est bien passé.

Elle a trop mangé. Et trop bu. Si bien qu'elle pouvait apercevoir une rondeur s'accentuer sur son ventre quand elle regardait son reflet dans le miroir plein pied près de la porte d'entrée. Ça lui faisait mal, ça lui donnait envie de gerber, elle avait sans doute pris un ou deux kilos de trop après le soir du réveillon. Certains lui diraient que c'est normal, à ce temps-ci de l'année tout le monde prend un peu de graisse, tout le monde prend un peu de rondeur. Mais pour Bella, c'était encore douloureux. Parce qu'elle avait encore cette difficulté à cesser de contrôler les portions qu'elle ingérait, les calories qu'elle se donnait le droit de prendre. Certaines périodes étaient plus difficiles que d'autres quand il était question de son trouble alimentaire. Les périodes de stress n'en demeuraient pas moins les plus ardues. C'était ce que les Fêtes lui inspiraient. Famille, dîners, fatigue. Et s'ajoutait à ça, le départ d'Elmo pour sa famille, ce qu'elle croyait être deux semaines sans le voir, sans avoir de nouvelles de son amant secret. Et bien qu'elle ne l'avouait pas, sans quoi elle se trahissait, il lui manquait. Il lui manquait terriblement. Et ce, même si les festivités dans sa famille étaient assez chargées. Ses parents, Costaricains traditionnels même loin de leur pays natal, prenaient à coeur les célébrations de Noël. Et Noël, chez les Garcia, c'était le 24, le 25 et le 26 décembre. Trois jours intensifs de coma de nourriture. En ce 27 décembre, jour de repos après le réveillon en famille, Bella était affairée sur le canapé, les cheveux ramassés dans un chignon négligé, seule sa frange toujours bien lissée était coiffée pour donner à son air décontracté un certain glam qu'elle seule connaissait, quand vers les coups de dix-neuf heures quelqu'un toqua à la porte de son appartement. Bella se leva, curieuse, replaçant les grands anneaux dorés qui pendaient de ses oreilles, tirant un peu sur son t-shirt croptop pour lui donner de l'espace pour rentrer le ventre, impossible de laisser l'invitée surprise s'immiscer dans sa prise de poids post réveillon, et jeta un coup rapide à l'oeil magique de la porte d'entrée. Sans attendre, elle ouvrit cette dernière, un grand sourire qui s'afficha sur ses lèvres peintes d'un gloss transparent. Rutowski!, lança-t-elle d'un air enjoué que seule la brune pouvait lui décrocher alors que son invitée surprise lui montrait le contenu de ses mains. Le sourire de Bella se transforma, espiègle cette fois. Comment résister à ces deux merveilles du monde? Toi et du vin, le parfait mariage. C'était un peu leur tradition, depuis qu'elles se connaissaient, de faire la fête, peu importe où et avec qui. Elles ne se connaissaient pas depuis des lustres, mais rapidement, elles s'étaient liées d'une amitié forte. Aller, entre, je nous sors deux verres et l'ouvre-bouteille. Ce qu'elle chercha dans les armoires, elle qui avait la mauvaise habitude de ne pas ranger l'ouvre-bouteille au même endroit chaque fois qu'elle s'en servait. Tout en cherchant, elle répondit à la question de son amie en tentant de cacher son mensonge. Assez, oui. Les Garcia ont tendance à se faire beaucoup de cadeaux. Mais il lui manquait tout de même quelque chose, une partie de son coeur qui s'était envolée pour Sorrento. Comment s'est passé Noël de ton côté?, demanda-t-elle alors qu'elle retournait vers Adelaïde, deux verres et un outil de torture en métal qu'elle planta dans la première bouteille de vin pour les servir.  

Parfois, il suffit d'une rencontre spéciale pour réussir à trouver le courage de remonter la pente. Cette pente que j'essaye de monter depuis quelques mois et qui me demande un effort tout particulier. Ma rencontre avec Bella représente tout ce dont j'avais besoin. Elle est jeune, mais ce n'est pas du tout un frein à notre lien qui se tisse un peu plus au fil des jours. C'est de la nouveauté, de la jeunesse, et ça me fait du bien. Je sais que dès que j'ai envie de sortir, elle sera là pour m'accompagner. On aime faire la fête toutes les deux, on ne s'ennuie jamais lorsqu'on sort toutes les deux. Je me rends chez elle aujourd'hui comme je me rendrais chez une sœur, pour passer un petit moment en cette période de fêtes qui sont synonyme de partage. Un sourire illumine mon visage lorsqu'elle ouvre la porte et prononce mon nom, elle est tout aussi contente de me voir que moi je le suis de la voir. J'entre dans l'appartement tout sourire avec mes deux bouteilles de vin et lui demande comment s'est passé son Noël. Apparemment, cette fête a une signification particulière dans sa famille. Chez les Rutkowski aussi, je dois dire, mais chez nous Noël ne s'étend pas sur toute une semaine comme dans certaines familles. « C'était bien. » dis-je en hochant la tête. « Ça s'est passé tranquillement. Maintenant il faudrait que je me repose avant la soirée de Nouvel an qui sera... plus mouvementée je pense. » J'étouffe un rire. Il faudrait surtout que je repose mon foie en fait, mais c'est mal parti puisque la brune nous sert un verre de vin à chacune. « Mon coloc' bosse au Hendrix et ils préparent une soirée pour le 31. T'auras qu'à passer si t'as rien de prévu. » Je lui adresse un sourire. Je serai ravie de terminer l'année et de commencer la nouvelle à ses côtés. A moins qu'elle ait prévu d'autres choses, auquel cas je suis certaine qu'on aura l'occasion de commencer l'année en beauté un peu plus tard. Après tout, on a jamais vraiment besoin d'un prétexte pour faire la fête.

Il y a de ces gens, parfois, qui sont mis sur notre chemin pour une raison particulière. Adelaïde, c'était cette personne, pour Bella. Non pas parce que Bella avait eu besoin d'elle pour se sortir d'une épreuve quelconque, mais bien pour l'inverse. Quand elles s'étaient rencontrées, elle l'avait senti fragile. Elle ne savait pas encore très bien pourquoi, elle le savait un peu, entendu par les branches, une histoire d'accident au travail, mais Bella n'avait pas cherché à aller plus loin dans les détails. Ça viendrait. Plus tard. Quand Adelaïde le voudrait. Pour l'instant, Bella pensait les maux. Et c'était bien suffisant. Il fallait dire que cette amitié allait dans les deux sens, la brune se doutait bien qu'au moment où elle vivrait une grande épreuve, son amie serait là pour la divertir, au même titre qu'elle le faisait avec elle aujourd'hui. Elles sortaient, extériorisaient leur côté fêtarde ensemble, à deux. Parfois Holly se joignait à elles, mais la plupart du temps elle ne faisait qu'être spectatrice, n'aimant pas les grandes fêtes. Et c'était bien aussi. Parce qu'avec sa meilleure amie, Bella partageait autre chose d'unique qui leur était propre à elles. En allant chercher deux coupes à la cuisine, Bella en profita pour renvoyer la question à son amie, comment s'était passé leur Noël respectif. Ah ouais, les Rutkowski ne sont pas de grands fêtards?, demanda-t-elle en riant. Adelaïde était peut-être l'oiseau noir, l'oiseau de nuit, l'intrus de leur famille, au fond. La belle lui parla ensuite du Nouvel An qui s'annonçait plus mouvementé. Bella hocha la tête à la proposition de son amie. J'y serai, si je n'ai rien d'autre. Pour l'instant, je ne sais pas encore ce que je ferai. Parce qu'elle avait un plan fou dans la tête, un plan qui était presque impossible à réaliser. C'était faux, elle savait très bien ce qu'elle ferait, mais elle ne pouvait pas en parler. Même Holly n'était pas encore au courant. Dans quatre jours, elle serait dans un autre continent, dans un autre pays, dans un autre monde. Bella passa une coupe de vin à son amie, lui sourit avant de trinquer. Joyeux Noël, chantonna-t-elle. Alors, raconte-moi, ça ressemblera à quoi cette fête au Hendrix? Qui y sera? T'as déjà des hypothèses de potins? C'était du Bella tout craché, déjà à chercher les drames alors que la fête n'avait pas encore eu lieu.