On enterre la hache de guerre

Nouvelle année... J'étais du genre à prendre de bonnes résolutions et en femme droite que j'étais, généralement je les tenais. Mais pour cette année je n'avais rien décidé, mis à part suivre la même ligne de conduite de celle que je m'étais imposé l'année dernière. Le nouvel an 2019 je l'avais passé à Varsovie en compagnie de cousins et de quelques amis, la soirée avait été festive et joyeuse, pour une fois que je ne travaillais pas. C'était lors de cette soirée que j'avais pris la décision de rentrer à Bowen. Le nouvel an 2020 avait été bien plus calme, j'avais travaillé d'arrache pied durant des jours à la pâtisserie, j'étais épuisée alors nous avions fait un dîner très simple simplement Romy, Blanche et moi, toutes les trois à la maison et je m'étais couchée peu après le feu d'artifice, rien d'extraordinaire. Pour cette nouvelle année je voulais essayer de me sentir enfin à l'aise dans cette ville où je me sentais encore si étrangère et plus que tout, je souhaitais que les boutiques Imogen redressent réellement la barre, j'espérais ne plus avoir à me soucier de tous les ennuies administratifs et financiers pour ne me concentrer que sur ma passion. J'étais en bonne voie, j'avais remonté l'une des boutiques en quelques mois et même s'il y avait encore du travail pour la dernière, c'était encourageant, les clients commençaient à revenir, j'avais trouvé du personnel motivé et sérieux. Le seul point négatif qu'il restait c'était mon entente avec Jake. C'était encore tendu entre nous mais je ne lâchais pas, j'espérais sincèrement qu'on finirait par retrouver notre complicité passée. On l'avait entrevue, brièvement lors d'une journée totalement folle où il m'avait appelé en catastrophe à cause de l'absence d'un de ses pâtissiers. J'avais terminé mes préparations pour ma boutique le plus rapidement possible, délégué ce que je pouvais et j'étais partie l'aider sans me poser de questions. Nous avions travaillé comme des malades ce jour là, sans trop réfléchir, sans beaucoup se parler non plus mais tout s'était bien fini et j'étais rentrée chez moi sereine. Depuis nous n'en avions jamais reparlé et jamais non plus nous n'avions revécu de moments pareil. La tradition dans les boutiques Imogen voulait que nous nous souhaitions la bonne année en dehors des cuisines et que nous discutions, les différents responsables et moi de notre objectif pour l'année à venir. Ce serait assez rapide, puisque les deux seuls responsables à la barre c'était Jake et moi et, à moins qu'il me surprenne avec des idées nouvelles, je ne pensais pas que nous aillons grand chose à nous dire, mais le rendez-vous était pris. J'étais arrivée avant lui mais j'attendais devant la porte, après tout nous étions chez lui et je ne voulais pas refaire la même erreur que lors de mon retour et qu'il m'avait surpris dans les cuisines. Salut Jake ! Il s'avançait pour me faire la bise et j'accueilli ce geste avec le sourire bien que je sois un peu surprise. Très bonne année à toi aussi. On entrait dans la boutique vide, il allumait quelques lumières discrètes et nous nous installions à une table pas trop en vitrine pour éviter d'attirer d'éventuels curieux. Fut une époque ou ces réunions se faisaient dans mon bureau, derrière, mais ce bureau n'était plus mien alors autant faire à sa façon. Je souris, mi-amusée, mi-gênée par sa question. Si par recharger les batteries tu veux dire redoubler de travail alors oui... on peut dire ça ! Je ne m'étais pas arrêtée, mon travail c'était mon exutoire, mes cuisines le seul endroit où je me sentais bien alors pas question de prendre du repos. Et toi, tu as pris quelques jours de congés ? Ta famille n'est pas ici, j'imagine que tu manques à tes proches en cette période. Je n'encourageais jamais mes équipes à être comme moi, chacun avait sa vie, sa famille, ses loisirs, si Jake voulait prendre des vacances je ne pouvais que l'y encourager.

Oui, sûrement que nous allions souhaiter la bonne année à tellement de monde qu'à la fin on ne saurait plus à qui on l'aurait dit, toujours avec le sourire "et la santé surtout", oui, la santé, c'était bien beau. Même si je ne m'écoutais pas beaucoup. Je dormais toujours aussi mal, trouvant refuge dans des petites pilules dont j'avais pris la mauvaise habitude de me gaver pour calmer mon anxiété, ce n'était pas une solution mais des solutions je n'en avais pas. J'ai pris le premier janvier, je devais aider une amie pour son déménagement. Quelle idée de déménager le premier jour de l'année ! C'est vrai que sur ce coup Blanche n'avait pas été très maline, ce jour là nous n'avions trouvé aucune paire de bras masculine pour nous aider à porter les meubles lourds, tout le monde était en famille ou comatait dans son lit, alors autant dire qu'on avait galéré. Je lui demandais si lui avait pu profiter de sa famille et en effet il avait vu ses parents. C'est bien. Je me souviens de l'année où ton père nous avait aidé pour les livraisons de Noël parce qu'on n'avait personne, ils sont charmants. Je gardais un très bon souvenir des parents de Jake et puis c'était à ce Noël là que j'avais réalisé qu'il serait la meilleure personne pour me seconder voir même me remplacer. Non, les filles sont bien plus fêtardes que moi ! Elles étaient en soirée je ne sais où. J'étais avec Romy et Blanche tout simplement. Devenir maman ça avait changé pas mal de choses aussi, je ne faisais plus autant la fête qu'avant, voir même plus du tout. Je savais que j'aurais pu laisser ma fille à mes parents et suivre mes sœurs qui m'auraient volontiers entraîné dans leurs folles nuits, mais je n'en avais pas envie. Oui, elle m'a parlé de cette histoire de bateau à Halloween, tu étais dessus ? En même temps l'histoire avait fait la une des journaux, de quoi avoir peur de remonter sur un bateau après ça. Non, je n'ai pas grand chose à dire en fait. Les chiffres des fêtes ont été excellents, même dans les boutiques qui vivotent, c'est encourageant. Ici le chiffre a explosé, c'est très positif. Tu avais quelque chose à dire toi ? J'avais bien envie d'aborder un sujet, mais j'avais un peu peur de sa réaction et j'attendais de voir s'il avait des demandes ou des envies lui aussi.

Tu lui as demandé parce qu'on n'avait pas le choix et il nous a rendu un sacré service ! Souvent les circonstances de notre métier nous amenaient à improviser, ce n'était pas idéal, ça chamboulait parfois tous les plans et en même temps ça faisait aussi partie du job, savoir se débrouiller en toute situation. J'aimais les coups de feu, les périodes chargées comme les fêtes de fin d'année, la st Valentin ou la saison des mariages, c'était animé et joyeux, c'était la course mais on savait au moins pourquoi on se levait chaque matin. Et ça me rendait fière de faire ce métier tous les jours. Oui je sais, mais tu connais mes sœurs, quand elles m'entraînent quelque part je ne peux plus répondre de moi ! Je les aimais, mes soeurettes et on avait passé des soirées folles ensemble, c'était des souvenirs mémorables, mais en ce moment je n'avais pas envie de ce genre de vie et je ne voulais pas le gâcher leur joie, la vie continuait, surtout pour elles. Non elle ne m'en a pas parlé... ou je n'ai pas retenu. Tu sais, Pippa et ses fêtes... j'espère que vous avez passé un bon moment, avant l'accident. Je me moquais bien que Jake s'entende avec ma cadette, enfin ça me faisait plaisir, ils avaient toujours eu un bon contact tous les deux, c'était juste que Pippa ne me disait pas toujours tout et il valait mieux pour ne pas que je m'inquiète trop. Fut une époque où elle fréquentait un monde peu fréquentable et il l'avait mené jusqu'en cure de désintox alors je préférais largement qu'elle fasse une soirée avec Jake qu'avec ces autres là. Nous entrions doucement dans le vif du sujet, chacun exposant ce dont il avait envie pour cette nouvelle année et sans surprise ce n'était pas révolutionnaire. C'est ça oui, les idées viendront d'elles-mêmes. Je pensais recommencer les cupcakes dans des déclinaisons de roses pour la st Valentin, ça fonctionnait bien à l'époque, en faire quelques coffrets pour le jour-même et pour tout le week-end suivant comme ça tombe un vendredi. Je hochais la tête positivement. J'avais licencié deux personnes sur la grande place en fin d'année, une des vendeuses volait dans la caisse, je l'ai prise en flagrant délit et le pâtissier brûlait toutes les viennoiseries. Mais je pense qu'on est stables à présent, c'est une bonne chose oui. D'où toute l'importance d'avoir des salariés de confiance, je l'avais toujours dit. Jake, j'aimerai qu'on retravaille ensemble toi et moi. Pas tout le temps, on a chacun nos boutiques. Mais de temps en temps. Je me redressais un peu plus dans ma chaise, un peu nerveuse quant à cette demande. C'était vraiment chouette, cette journée qu'on a passé l'autre fois. Et on forme une bonne équipe tous les deux, ça me manque.

Pourquoi ce serait si étrange qu'on ne se dise pas tout, mes sœurs et moi ? On avait beau être proches et bien s'entendre, on ne vivait pas ensemble non plus, chacune avait sa vie et il y avait certaines choses que l'on n'avait pas envie de se raconter. Moi je n'étais pas fière de mon comportement depuis mon retour à Bowen, j'étais revenue pour retrouver mes proches, mais je ne trouvais pas ma place, je trouvais qu'ils en faisaient trop, qu'on me surprotégeait, alors je passais ma vie au travail et j'évitais autant que je le pouvais les repas de famille, ce n'était pas vraiment quelque chose dont je me vantais. Quant à Pippa, qu'est ce que j'en savais, peut-être qu'elle avait un coup de cœur pour Jake et qu'elle n'osait pas me l'avouer ou bien peut-être que cette soirée était banale pour elle, comme toutes les autres, à faire la fête et à s'amuser et elle avait bien raison. Jake avait raison, on avait beau dire tout ce qu'on voulait sur la saint Valentin et son côté commercial, ça profitait évidemment à notre commerce et à notre chiffre d'affaire. On vendait des petites douceurs pour que les amoureux se fassent plaisir. Et plus c'était rose, coloré, en forme de cœur ou que sais-je, plus ça se vendait. Mon produit phare avait toujours été le cupcake à la rose, rien à voir avec cette journée, juste que c'était un peu ma spécialité, ma marque de fabrique, ce jour là je mettais le paquet, colorant, pétales de roses comestibles, paillettes et même une année un topping en forme de licorne, une folie, ils s'étaient tous arrachés. Il était évident que le succès de mes créations me motivait alors je mettais le paquet. Oui, les clients sont toujours au rendez-vous. Je suis aussi en négociation avec le Maire pour donner un cours de macarons avec des couples ce jour là, je n'aurai rien de prévu alors je pense que je vais accepter. En fonction de ses conditions, il est difficile en affaires. Mais je ne m'inquiétais pas trop, j'avais déjà fait des événements avec lui tout s'était toujours bien passé et c'était une pub supplémentaire pour nos affaire. Non. Je n'ai pas porté plainte, elle a reconnu les faits, en même temps je l'ai prise la main dans le sac. Elle est partie sans indemnités, je ne voulais pas d'ennuies et il valait mieux qu'elle n'en ait pas non plus. Mais qu'elle n'espère pas mes recommandations auprès de futurs employeurs. Concernant le pâtissier... à priori c'est de ma faute, enfin celle du four, qu'il n'arrivais pas à prendre en main. Je pense surtout que c'était un imbécile qui ne faisait pas attention à son travail. Tu me connais j'exige l'excellence et le sérieux alors je suis bien mieux sans lui. A ma question sa réponse ne me surprit pas tellement, même si j'étais évidemment un peu déçue. Je lui tendais une perche, une main pour qu'il la prenne, pour enterrer réellement la hache de guerre et essayer de retrouver la complicité qu'on avait à une époque. Mais visiblement il ne cherchait pas la même chose que moi. Je baissais les yeux sur mes doigts qui jouaient nerveusement les uns avec les autres. Non, tu as raison, à quoi bon se forcer si tu n'en as pas envie. Je soupirais doucement. Je trouva ça dommage, juste, qu'on ait perdu cette complicité... je sais que c'est sûrement de ma faute. Enfin, c'est pas grave, ce n'est qu'un job après tout, tant qu'on fait ce qu'on a à faire et que tout fonctionne bien.

Je ne pensais pas que ce que je prévoyais avec le maire puisse déranger Jake, ce n'était en rien une façon de lui faire de l'ombre s'il pensait ça. Simplement, le maire me connaissait bien depuis le temps, je m'étais débrouillée seule pour négocier avec lui pour mon premier local, celui que Jake occupait actuellement, j'étais jeune à l'époque et je n'étais pas la seule sur l'affaire, mais j'avais su lui prouver que j'en voulais peut-être plus que les autres et il fallait croire que ça lui avait plu. Depuis on entretenait une bonne relation, il me respectait et moi je n'étais jamais contre lui proposer ma participation pour différents événements. Je savais que Jake aimait également animer des ateliers, il avait ce côté pédagogue en lui. Du moins avant que je quitte Bowen il en prévoyait toujours quelques-uns dans l'année, ça ne devait pas avoir changé. Oui, il veut miser sur le côté romantique et les activités de couple dans pleins de domaines différents. Ce n'est pas vraiment le fait qu'il accepte que je viennes, c'est surtout à quel prix il voudra bien me payer, c'est toujours le même problème au fond. Moi je ne comptais pas me dégager de salaire pour cette intervention, mais je ne devais pas non plus travailler à perte pour toute la marchandise avancée, on voyait tous les deux notre avantage et lui n'était pas le dernier en négociation, mais il savait que j'avais du répondant. J'étais du même avis que Jake concernant cette fille que j'avais pris à voler, mais je ne pouvais pas non plus l'empêcher de travailler ailleurs, je haussais alors les épaules, un peu désabusée. Elle est jeune... de toute façon si elle fait ça ailleurs ça finira par se savoir et elle va se griller elle-même toutes ses chances, c'est très simple. J'aimais sa façon de penser, on avait la même à ce niveau là, lui non plus ne laissait rien passer et c'est pourquoi je lui donnais ma confiance les yeux fermés.  j’acquiesçais alors à ce qu'il disait sûrement que ce pâtissier que j'avais congédier se foutait de tout, oui. On finissait enfin par parler de ce dont j'avais envie et visiblement il ne partageait pas ce souhait. Je me heurtais encore à un mur, un peu moins haut qu'avant, mais il ne souhaitait clairement pas reprendre notre façon de travailler d'avant. Je n'insistais pas, à quoi bon, il ne fallait peut-être simplement pas forcer les choses, peut-être que ça viendrait naturellement, un jour. Ou peut-être pas, mais je n'y pouvais rien à un moment. Oui, c'est le principal. Il tentait de revenir un peu vers moi, comme s'il comprenait que j'étais déçue, c'était un premier pas, lui qui était si fermé il n'y avait pas si longtemps de ça. On verra, tu as raison. Clairement on n'allait pas se prendre une bière au bar d'à côté en sortant. En même temps nous ne l'avions jamais fait alors... Bon je crois qu'on s'est tout dit alors. Cette réunion touchait sûrement à sa fin, j'en étais la première déçue, j'espérais une meilleure issue. Mais au moins on ne s'était pas hurlé dessus, il y avait de l'amélioration.

Je n'avais pas placé énormément d'espoirs dans cette réunion mais ce serait mentir que de dire que je n'étais pas déçue. Jake ne semblait pas très emballé à l'idée de partager avec moi et même si nous trouvions de quoi parler, parce qu'il y avait toujours à dire concernant une entreprise, ce n'était pas avec un grand entrain. Il avait perdu l'habitude de collaborer avec quelqu'un, lui qui avait travaillé tout seul durant deux ans, se contentant de mes quelques appels ou messages, assez brefs, quand je n'étais pas carrément aux abonnés absents. C'est vrai que je n'avais pas aidé et il fallait avouer qu'il s'était débrouillé comme un chef, lui qui n'avait jamais signé pour être à la tête de plusieurs boutiques. Pourtant j'étais bel et bien de retour et même si ce n'était pas la grande forme pour l'instant, je faisais tout ce que je pouvais pour redresser la barre des magasins qui se cassaient la figure, c'était ce qui mangeait toute mon énergie, pour le reste j'essayais de m'amuser au maximum dans mes créations pour retrouver le positif de ce métier que j'aimais tant. On parlait de la saint Valentin, c'était toujours une bonne visibilité pour l'entreprise et aussi l'occasion de s'amuser dans des créations loufoques qui plaisaient aux romantiques amoureux. Tout ce que fait le Maire a généralement du succès, c'est le roi de la communication. Je ne m'inquiète pas. Je ne cachais pas mon admiration pour cet homme qui dynamisait notre petite bourgade depuis des années déjà. Jake semblait outré par le comportement de mon ex salariée, moi j'en étais presque blasée, peut-être parce que j'avais des problèmes plus graves à gérer, j'en avais vu d'autres. Je souris doucement à son attention. Soit elle n'en a pas conscience, soit elle joue avec le feu, il y a des personnes que ça excite. J'en sais rien. En tant que femme droite et honnête ça me dépassait toujours, mais certaines personnes aimaient vivre dangereusement. Bon mon idée suivante, finalement la plus importante pour moi lors de cette réunion, fit un véritable flop auprès de l'intéresser, il se moquait pas mal de travailler avec moi, voir même, moins il me voyait mieux il se portait. C'était blessant, je ne mentirais pas, ça me mettait un coup au moral, moi l'éternelle optimiste qui perdait pourtant pas mal d'espoirs en ce moment, j'avais du mal à cacher ma déception. Mais on passait à autre chose, du moins moi je tentais de mettre fin à cette entrevue. Pourtant Jake, qui au départ n'avait rien à me dire, soit disant, semblait avoir finalement retrouvé des sujets de conversation. J'étais prête à me lever, je biaisais alors un regard curieux sur lui pour l'écouter me parler des fournisseurs, renégociation de contrat. Je souris malgré moi. Tu es allé à bonne école, Rockhold, on dirait moi. J'attrapais les quelques feuilles qu'il avait mis sur la table, des commandes, des tarifs, il faisait les choses bien, je n'avais pas fait attention. Le coût de la matière première augmente tous les ans également. Tu as déjà renégocié les contrats durant mon absence ? Ca ne coûte rien de demander au moins un petit geste. Même des cadeaux pour les clients, ils raffolent de ça. Les yeux rivés sur les papiers je regardais distraitement les chiffres danser devant moi. Je ne t'ai jamais dit merci je crois. Je veux dire, pour tout ce que tu fais depuis que tu es avec moi et surtout depuis que je suis partie. Tu as abattu un travail colossal. Je n'avais pas besoin de le lui dire, il le savait, ce n'était pas de la fausse reconnaissance non plus pour retrouver notre complicité perdue, celle-là je venais de m’asseoir dessus. Mais il était juste bon de dire les choses sincèrement quelques fois.

Les premiers sujets étaient clos, de toute façon c'était surtout histoire de faire la conversation, en vérité je n'étais pas certaine que cette réunion serve réellement à quoi que ce soit. Finalement Jake et moi faisions nos affaires un peu chacun de notre côté, on faisait tourner nos boutiques comme bon nous semblait, dans l'esprit global que j'avais voulu initialement pour Imogen, il le respectait, c'était déjà beaucoup en fait. Je ne voyais plus bien ce quo'n avait à se dire, mais lui n'avait pas encore fini. Alors on continuait et j'étai surprise du point qu'il abordait, jamais je n'aurais cru qu'il pense à ce genre de chose, comme quoi, gérer sa propre maison ça changeait un homme. Il n'était plus un pâtissier parmi les autres, il devenait petit à petit un vrai chef d'entreprise et ça me faisait plaisir. C'était pas une critique, je ne suis pas un tel dragon ! Enfin je pensais... j'étais ce genre de cheffe douce et conciliante avec assez de caractère pour faire passer ce que j'avais à dire. J'exigeais l'excellence de la part de nos pâtissiers, il le savait, j'étais un peu plus souple avec les vendeurs même si le sourire et l'accueil était primordiaux, sans compter mon intransigeance sur la propreté, on n'était pas dans une porcherie et je savais le répéter si besoin. Et concernant la gestion de mon business, j'étais redoutable avec les fournisseurs, même si ça, c'était avant, je ne l'avais pas encore fait depuis mon retour, mais j'imaginais que ça ne se perdait pas avec le temps. Tu as raison Jake, il faut qu'on revoie les contrats si ça n'a pas été fait en deux ans, au moins pour remettre les choses à plat. Je souriais poliment à sa réflexion. Pas de la farine, non. Je sortais mon trousseau de clés de mon sac et lui montrais un joli porte-clé en forme de cup-cake. Ce genre de cadeaux là, ou bien des petits chocolats individuels qu'on glisserait dans les sacs de commandes. Ce n'est pas grand chose, c'est un peu de pub pour eux et ça fait plaisir aux consommateurs, c'est une petite attention. Il fallait être lucide, les budgets étaient serrés pour tout le monde et ce genre de cadeaux se faisaient moins qu'avant mais qui sait, on pouvait en avoir peut-être un peu. Je finis par le remercier pour un peu tout. Si j'étais une employeur assez reconnaissante, si je n'hésitais jamais à encourager mes équipes ou à leur offrir de partir plus tôt si besoin, à les laisser partir avec des invendus quand les salariés voulaient, je n'étais pas toujours généreuse en remerciements, il fallait l'avouer. Souvent parce que j'étais trop occupée à penser à tout. Pourtant, concernant Jake, c'était largement mérité. Il semblait surpris, oserais-je dire qu'il avait du mal à croire en la sincérité de mes mots ? Je grimaçais. Si si, je suis consciente que je t'en ai demandé beaucoup et qu'après je t'ai laissé seul à bord. Même si je n'ai jamais douté de tes compétences c'est important que je te le dise. Il saluait son équipe, il avait raison. J'espère qu'après la saint Valentin, si on a réussi à faire un chiffre assez conséquent, je pourrais offrir un dîner à toutes les équipes, comme je le faisais avant pour fêter la nouvelle année. On verra. Annushka est toujours avec toi ? Je n'avais pas encore eu l'occasion de revoir la jeune femme depuis mon retour.