suddenly i see ∞ ft. adelaïde

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suddenly i see...
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@adelaïde rutkowski & @aura luciano

L’odeur d’osso bucco emplissait la cuisine, alors que je remuai mon plat. La viande avait bien mijoté, ma nonna, de là où elle était, pouvait être fière de moi, je maitrisai désormais parfaitement sa recette. Je tapai ma cuillère en bois sur le rebord de ma cocotte pour faire couler l’excédent de sauce, refermai le couvercle et baissai le feu, histoire de garder mon plat au chaud sans risquer une sur-cuisson. J’attrapai ensuite un tire-bouchon pour ouvrir le vin rouge que j’avais acheté, cela n’était ni un italien, ni un français mais cela ferait à peu près l’affaire. Enzo n’était pas là pour le goûter de toute façon, nous n’aurions donc pas à subir son nez froncé. J’aimais mon frère, mais ce soir, je me réjouissais de son absence, parce que j’avais envie d’être seule avec mon amie. Ade ne devait plus tarder maintenant, cela faisait dix minutes que je lui avais envoyer par sms l’adresse du nouvel appartement dans lequel mon frère et moi avions emménager. Je me sentais un peu anxieuse et à la fois complètement excitée à l’idée de voir Ade. Elle me plaisait un peu, je crois. Depuis que j’avais franchi le pas avec Bessie, depuis qu’elle m’avait fait ouvrir la boite de Pandore, je voyais les choses un peu différemment d’avant. J’avais toujours trouvé Adélaïde très jolie, et sympa, drôle, intéressante, mais je ne l’avais jamais regardé avec d’autres yeux que ceux d’une amie…jusqu’à maintenant. Perdue dans mes pensée, je faillis ne pas entendre la sonnette. Je sursautai légèrement, puis courais jusqu’à l’interphone.
— Hey ! fis-je d’une voix plus enjouée que je ne l’aurais voulu, je t’ouvre. C’est au troisième !

Je reste un moment à fixer l'écran de mon téléphone ouvert sur la conversation avec Aura. Une soirée entre filles, il ne m'en fallait pas plus pour trouver le courage d'aller me préparer pour sortir. Pourtant, ma soirée était déjà toute tracée : j'allais la passer affalée sur le canapé, commander à manger et regarder une série Netflix en attendant que Fede rentre du travail. Mais Aura a su me convaincre d'aller la rejoindre chez elle. Enfin, elle n'a pas vraiment eu besoin d'arguments, en fait. Je l'aime bien Aura, et faut dire que cohabiter avec quelqu'un ça crée forcément des liens. J'adore Fede, j'étais sûre que les autres membres de sa famille étaient des perles comme lui et je ne me suis pas trompée. Je prends une douche rapide, enfile des vêtements propres et si en général je n'aurais même pas pris le temps de me regarder dans le miroir, je me surprends à le faire et même à arranger mes cheveux, histoire d'être un minimum présentable. J'attrape une bouteille de vin dans la cuisine pour ne pas arriver les mains vides et me mets en route vers l'adresse qu'Aura m'a donné par sms. Une fois arrivée, j'appuie sur la sonnette, impatiente. Mon amie m'ouvre en m'indiquant que c'est au troisième et je monte les marches deux à deux pour enfin arriver devant la porte ouverte où l'italienne m'attend. « Buonasera. » dis-je en souriant avec un accent très approximatif. J'embrasse sa joue et entre dans l'appartement en regardant autour de moi. « L'installation s'est bien passée ? » je demande en posant mes affaires. Je lui tend la bouteille de vin. « Je savais pas trop quoi ramener et je sais que le vin c'est une valeur sûre, alors... » Je hausse les épaules. « Ça sent hyper bon, Enzo ne sait pas ce qu'il loupe. » finis-je par dire avant de rire doucement. En même temps, il m'en faut peu, à moi. Je suis une piètre cuisinière alors je trouve tout bon quand c'est pas moi qui cuisine.

Aussitôt que j’eus remis le combiné de l’interphone sur sa base, de petits papillons imaginaires se mirent à voleter dans mon ventre. C’était étrange, cette petite sensation soudaine à l’approche d’Adelaïde, c’était même très nouveau. Elle devait probablement être en train de monter les escaliers et j’avais hâte autant que je me sentais intimidée de la recevoir chez moi. Je connaissais la colocataire de mon grand frère depuis quelques temps maintenant, ce n’etait pas la première fois que nous nous voyons, et puis, effectivement, Enzo et moi venons de passer dix jours sur leur canapé, cela resserrait les liens. Je m’étais toujours bien entendu avec la jolie maître-nageuse, nous avions des points communs, une certaine affinité aussi…malgré tout, je devais admettre que mon regard sur elle était différent de celui que je portais sur une simple amie. Cette impression se confirma lorsque je l’entendis toquer à ma porte et que je lui ouvris. Adelaïde était belle, vraiment belle. Je l’avais remarqué depuis longtemps, mais ce soir, cela me sautait littéralement aux yeux. Son accent, par ailleurs, fit naitre de doux frissons le long de ma colonne vertébrale lorsqu’elle me souhaita le bonsoir en italien.
— Buonasera, souris-je en me décalant pour la laisser entrer dans l’appartement.
Le baiser sur la joue me troubla. Sérieux, Aura ? T’as pas douze ans…, fit la voix d’Enzo dans ma tête. Mais elle sentait si bon. Adelaïde. Les effluves de son parfum voletaient dans l’air, me faisant perdre le fil de ma pensée, qui peinait déjà à rester sensé.
— Euh, le…le…l’aménagement ? eus-je du mal à articuler, ça s’est bien passé ! On a racheté la plupart de nos meubles. Ce n’est pas encore parfait, mais je compte bien faire de cet appart un petit nid douillet.
J’aimais assez la décoration et Enzo me laissait le champ libre, il se fichait un peu de tout ça lui. Il était peu à la maison de toute manière. Adelaïde me tendit une bouteille de vin qu’elle avait rapportée ; j’en profitai pour la serrer dans mes bras. C’était sans doute too much, je ne pus m’en empêcher.
— Il fallait pas ! m’écriai-je, c’est parfait. J’en ai déjà ouvert une, mais on pourra boire celle-ci juste après…
Deux bouteilles de vin, à deux ? Sérieux ? Sachant que je ne tenais absolument pas l’alcool…mauvaise idée. Malgré tout, j’avais bien besoin de me détendre un peu, où était le mal. Nous étions dans un environnement parfaitement safe, juste elle et moi. Je m’éloignai d’Adelaïde, à contre-cœur, et déposai la bouteille sur le comptoir de la cuisine ouverte. Je tirai deux verres à eau du placard, nous n’avions pas encore toute notre vaisselle et c’était tout ce que j’avais à offrir. J’attrapai le vin que j’avais ouvert plus tôt et nous en servis un peu à chacune.
— Oh, crois-moi, Enzo sait parfaitement ce qu’il loupe, rigolai-je en tendant un verre à la belle brune.
En plus de l’osso bucco qu’il adorait, je savais que mon frère jumeau trouvait Adelaïde à son gout, pour l’avoir déjà vu trainer ses yeux lubriques sur elle.
— Alla salute ! entonnai-je en levant mon vin vers mon invitée, ça me fait vraiment plaisir que tu sois venue…

Lorsqu'Aura ouvre la porte et se retrouve face à moi, je la trouve encore plus rayonnante que toutes les autres fois. Il m'est déjà arrivé plusieurs fois de me surprendre à regarder les femmes, sans parler de mon tout premier baiser avec une femme lors de la soirée du Nouvel an, mais Aura a quelque chose de plus que les autres. C'est le genre de femme qui captive votre regard et vous envoûte pour que vous ne la quittiez plus des yeux. Le regard que je porte sur elle est loin d'être celui que je porterais à une simple amie, pour autant je n'ai jamais tenté quoi que ce soit avec elle. Sûrement parce que c'est la sœur de Fede et que je le considère comme mon propre frère, peut-être parce que j'appréhende un peu, aussi. Les hommes sont ma zone de confort et j'ai déjà assez de mal avec eux pour m'aventurer dans ce genre de choses avec une femme. Pourtant, je dois avouer que l'italienne ne me laisse pas indifférente mais j'ignore si c'est le cas de son côté aussi. J'entre donc dans l'appartement et lui demande si l'installation s'est bien passée. « Tant mieux, j'espère que vous vous plairez ici mais j'en doute pas, c'est un petit coin de paradis. » Je lui souris avant de lui tendre la bouteille de vin que j'ai apportée. Son étreinte me surprend agréablement et je la serre dans mes bras à mon tour. Sa remarque sur le vin me fait sourire. « Je rêve ou tu veux me soûler ? » dis-je avec un faux air suspicieux. « Attention, je suis intenable quand je bois trop. » Je laisse échapper un rire. Deux bouteilles de vin à deux, c'est assez pour que je me retrouve avec la tête qui tourne. L'odeur de l'osso bucco vient chatouiller mes narines et je ris lorsqu'elle me répond qu'au contraire, Enzo sait ce qu'il rate ce soir. Je prends le verre qu'elle me tend avec un large sourire et le lève pour trinquer avec elle. « Cheers ! » Je fais doucement tinter mon verre contre le sien avant de boire une gorgée de vin. « Je suis contente que tu m'aies invitée. » je réponds sans la quitter des yeux. Elle est vraiment belle. Je le savais déjà, mais c'est comme si ce soir, je m'en rendais encore plus compte.

« Coin de paradis » était exactement les mots que j’employais aussi pour décrire cet appartement que nous avions déniché avec Enzo. Je le trouvais parfait ! Et, entre autre, il compensait le manque que j’avais parfois de Florence. L’emplacement était top, nous avions une vue à la fois sur le port et à la fois sur la rue, selon les pièces et les angles. Quand à l’agencement, je ne pouvais rêver mieux.
— J’ai flashé sur cet appart, avouai-je à Adelaïde, ma chambre est à l’opposée de celle de d’Enzo, et je pense que tu dois deviner sans mal pourquoi ça me plait autant.
Je pouffai. Adelaïde était la seule personne sur terre à savoir ce que cela faisait de vivre avec un frère Luciano, dont le « tableau de chasse », comme ils l’appelaient, était complété très régulièrement. Nous passâmes en cuisine où je nous servis du vin puis nous trinquâmes. Je ne pouvais toujours pas m’empêcher de détailler Adelaïde, chez qui je décelais un éclat spécial ce soir, comme une étincelle dans son regard que je n’avais jamais remarqué avant. J’étais troublée, par elle, et avais un peu de mal à le cacher. Nos verres tintèrent l’un contre l’autre, comme pour faire diversion. Je collai alors un sourire sur mon visage.
— Je…
Reprends toi. Respire. Ca va aller.
— Je me suis dis que ce serait chouette qu’on ait une soirée toutes les deux, sans les garçons. On les aime, hein…mais j’avoue que ça me plait assez d’être seule avec toi.