#24 - i am an ally and i am a friend (freja)

Son retour était ponctué de redécouvertes, d'une adaptation à la vie de tous ceux qu'elle avait laissés derrière qu'il fallait apprendre à conjuguer, apprendre à accepter. Il fallait accepter que les autres n'eussent pas cessé de vivre, qu'ils eussent avancé au même titre que Nevaeh l'avait fait. Et de toutes les personnes qui avaient balisé la vie de la brune, l'une d'entre elles activait sa curiosité L'une d'entre elles dont elle avait entendu parlé, ici et là, de gens qui se sentaient obligés de commenter sa vie à la journaliste sous prétexte qu'elle avait été importante pour son frère : Freja. Nevaeh n'était pas au courant de toutes les vérités, mais on lui avait laissé sous-entendre que la désigner d'intérieur fréquentait un homme, un qui ne portait pas le nom de Rutkowski, un qui n'était pas son frère. On racontait même qu'elle l'affichait sur les réseaux sociaux, qu'elle ne s'en cachait pas. Nevaeh pouvait imaginer comment son frère se sentait face à une telle trahison, c'était le seul mot qui lui venait à l'esprit pour décrire le revirement de situation qui était tombé sur eux. Nevaeh n'avait pas de compte instagram, de page Facebook ou même de snapchap à son actif, elle s'était seulement nourrie des dires des autres pour justifier sa visite surprise à Freja, amie et presque belle-soeur, dans ce qui était son ancien appartement. La brune le découvrait à l'instant, elle qui ne savait pas que la belle protégée de Woody venait à peine d'être propriétaire d'une propriété. Ses anciens colocataires indiquèrent à Nevaeh l'adresse de la nouvelle demeure de son amie, où elle se rendit sans attendre. Elle toqua et lorsque Freja lui répondit, Nevaeh afficha un doux sourire sur ses lèvres. « Comme ça on achète une maison et on n’avise pas sa copine de sa nouvelle adresse ? », fit-elle surtout en blague, histoire de détendre l'atmosphère avant de poser les réelles questions qui lui brûlaient les lèvres.

Même si tu as des bureaux dans le centre de Bowen, quand tu en as l'occasion, tu préfères travailler de chez toi. Et maintenant que tu as ta propre maison, c'est encore plus plaisant. Tu es dans ton petit bureau que tu as aménagé selon tes goûts et dans lequel tu te sens bien, quand la sonnerie de la porte d'entrée retentit ce qui provoque les aboiements de Wilo. Tu fronces légèrement les sourcils, n'attendant personne. Après avoir traversé la maison, tu ouvres la porte et découvres une brune que tu n'avais plus vue depuis un long moment. Nevaeh. Un large sourire orne tes lèvres quand tes yeux plongent dans les siens. « Pour ma défense, ça ne fait que trois mois que je vis ici. » Tu sais pertinemment que Nevaeh ne t'en veut pas mais si tu avais su qu'elle prévoyait de revenir à Bowen, évidemment que tu l'aurais avertie de ton changement d'adresse. « C'est bon de te voir. » Dis-tu en la serrant brièvement dans tes bras avant de refermer la porte d'entrée derrière elle. « Bienvenue chez moi. J'te fais faire le tour du propriétaire avant que tu ne me racontes tout sur ton retour ? » Demandes-tu, toujours tout sourire. C'est souvent ce qu'on te demande en premier, de découvrir ta maison, alors autant le faire tout de suite pour être tranquille par la suite et avoir tout le loisir de rattraper le temps perdu. Tu ne sais pas vraiment si Nevaeh a été mise au courant des dernières nouvelles concernant Woody et toi mais il ne fait nul doute qu'elle ne va pas apprécier d'apprendre que tu as mis un frein à votre relation. Tu espères néanmoins qu'elle comprendra tes raisons et ne jugera pas ta décision malgré qu'il s'agisse de son frère.

Devant la porte de la maison, Nevaeh observa la demeure un instant avant de toquer. Elle était belle, grande, la journaliste reconnaissait bien la personnalité de son amie dans le choix de la demeure, le cachet qu'elle avait et la personnalité qu'elle laissait transposer en étaient de bons indicateurs. Pressée, elle enclencha la sonnette d'entrée, la cloche retentit laissant un raisonnement s'entendre jusqu'à l'extérieure de la propriété, suivi rapidement d'une porte qui s'ouvrait et d'une Freja le sourire radieux qui respirait la sérénité. Et ça lui faisait bien. Elle était rayonnante, Freja. Bien plus que Nevaeh l'était, elle. Elle s'efforça tout de même de poser un doux sourire sur son visage. Freja se défendit, justifiant son silence par les maigres trois mois qui faisaient fit de son emménagement. Nevaeh transforma son sourire en un rire doux, secouant la tête. « C'est rien, vraiment », lui assura-t-elle. Personne n'aurait pu deviner son retour. Lorsqu'elle était partie, l'année précédente, elle n'avait pas laissé croire à ses proches qu'ils pourraient être surpris par un retour outre, peut-être, les petites visites sporadiques qu'elle avait eu l'occasion de faire. Dans les derniers six mois, d'ailleurs, ces visites s'étaient faites rares, voire même presque nulles. Elle n'avait pas eu le courage de venir, de poser un faux sourire sur son visage, de feindre que tout allait pour le mieux à New York ou pire encore d'avouer qu'elle avait fait la pire erreur de sa vie en suivant un homme qui n'en valait pas même la peine. Freja s'avança, suite à leurs plaisanteries, attrapant par les épaules la brune qui lui rendit son étreinte. « C'est bon oui », souffla-t-elle, enfin comme chez elle. Ça sentait bon la maison, la chaleur de sa maison. Et ça lui faisait du bien. La Norvégienne l'invita à entrer, à visiter les lieux ce à quoi Nevaeh répondit en hochant la tête, laissant son amie lui présenter les pièces de sa modeste maison qu'elle avait pu acheter toute seule. Elle était fière de son amie, fière du chemin parcouru, son entreprise de décoration d'intérieur qui avait pris de l'ampleur et qui tournait bien. « Ça te ressemble, vraiment », lui dit-elle alors qu'elles avaient terminé le tour des pièces et qu'elles s'étaient arrêtées dans la cuisine. Ça lui ressemblait, oui. Mais, pourtant, il semblait manquer quelque chose. Rien ne laissait croire que Woody y avait passé du temps, rien ne laissait paraître qu'ils étaient encore proches tous les deux et bien rapidement, Nevaeh fit le rapprochement entre les rumeurs et la réalité. « Freja, commença-t-elle. Ça ne me regarde pas, je sais, mais je ne peux m'empêcher de te poser la question.. » Comme si ça lui avait déjà déranger d'entrer de front dans un conflit, elle qui reportait des nouvelles où il fallait avoir du caractère pour avoir des réponses à ses questions. « Woody et toi, dis-moi que ce n'est pas fini ? »

Tu souris plus largement alors que Nevaeh souligne que ta maison te ressemble vraiment. C’est ce que tu voulais, que quand on passe la porte d’entrée on ressente toute ton énergie et tout le cœur que tu as mis dans ces quatre murs. Tu veux qu’on puisse cerner une partie de ta personnalité rien qu’en observant ton intérieur. Et visiblement, c’est une réussite. Une fois de retour dans la cuisine, tu te diriges vers le frigo, prête à proposer quelque chose à boire à la jeune femme. Mais avant que tu ne puisses la questionner à ce sujet, c’est elle qui s’engage sur un terrain glissant. Au moment où elle commence sa phrase, tu sens qu’elle va faire allusion à Woody et ça ne manque pas. Tu soupires en baissant légèrement la tête ce qui donne déjà des indices à Nevaeh sur ta réponse. « Si. C’est terminé. » Dis-tu finalement en croisant brièvement son regard avant d’ouvrir le frigo pour fuir cette conversation pesante. A chaque fois que tu parles de Woody, ou que tu penses à lui, tu te sens triste et ce sentiment ne te quitte plus pendant quelques heures. Mais en voyant l’australienne débarquer ici, tu te doutais bien qu’elle aborderait le sujet. « Woody ne t’a rien dit ? » Demandes-tu en tournant la tête vers elle, le regard interrogateur. Ce ne serait pas tellement étonnant puisqu’il a l’air de s’être complètement renfermé dans son monde ces derniers mois. Mais tu espérais tout de même qu’il ait pu parler à quelqu’un de tout ça. Visiblement, ce n’est pas le cas. « Il m’a repoussée pendant des mois Nev’. J’me suis battue pour lui mais j’ai fini par manquer de forces alors, j’ai arrêté. J’en pouvais plus. » Tu cherches à te justifier même si dans le fond, tu ne devrais pas devoir le faire. Dans tous les cas, tu sais que Nevaeh prendra toujours le parti de Woody parce que c’est son frère et que c’est légitime.

Elle le pense, Nevaeh reconnait sa grande amie dans cette maison. Toutes les touches y sont. Son élégance, sa façon propre à elle de faire du bien autour d'elle, sans même le savoir. Cette douceur aussi, dans le choix des couleurs. La cuisine est sans doute la pièce favorite de la journaliste. Elle se plait à l'observer davantage alors que leur course s'y termine, à regarder le détail du muret derrière les comptoirs et d'admirer les appareils électroménagers que Freja a choisis, l'un dont elle s'approchait alors que Nevaeh se demandait comment elle pourrait aborder le sujet qui lui brulait les lèvres sans mettre son hôte mal à l'aise. Cette histoire affectait tout le monde, dont la brune qui savait bien que sa curiosité était bien mal choisie, que Freja en avait sans doute assez de justifier ses choix. Mais elle avait besoin de comprendre. Elle avait besoin de savoir. Parce qu'à défaut de voir son frère malheureux, d'être triste pour lui, elle perdait également une partie d'elle en laissant Freja sortir de sa vie ainsi. C'était comme de perdre une soeur. Et elle ne voulait pas y croire. Seulement, la belle Norvégienne ne démentit pas les rumeurs, confirmant que son histoire avec Woody était bel et bien terminée. Terminée pour de bon et pas seulement faussement terminé, comme il leur était déjà arrivé. Son but n'était pas de chercher à lui faire du mal, de la convaincre qu'elle faisait une erreur, au final ils étaient maitres de leur relation. Mais il fallait s'attendre à ce que la journaliste cherche à comprendre. Elle sentit pourtant bien que la conversation était dérangeante, Freja qui la fuyait du regard en cherchant quelque chose dans le réfrigérateur. « Oh... », soupire Nevaeh. Freja se tourna vers elle, sonda son regard en lui posant une question à son tour. La brune haussa les épaules en secouant la tête. « Woody..., commença-t-elle, c'est Woody.. » Et quand il était dans un état comme dans celui qu'il se trouvait présentement, il n'était pas le plus bavard. Il se renfermait sur lui-même, évitait les conversations profondes et lourdes de sens. Freja finit par expliquer ses raisons, Nevaeh hoche la tête. « Je comprends.. », souffla-t-elle visiblement déçue. « Je sais comment peut être mon frère.. » Après tout, elle vivait avec lui à ses côtés depuis vingt-neuf longues années. « Mais je sais aussi qu'il n'a jamais aimé une fille comme il t'a aimé... », confia-t-elle. Pas même Sara. « Et moi non plus, d'ailleurs. » C'était son cri du coeur, l'espoir que leur amitié ne s'arrête pas ici parce que la designer avait choisi de terminer son histoire avec son sang. « T'as quelqu'un d'autre dans ta vie ? »

Oh, c’est le mot, oui. C’est le mot qui convient le mieux pour qualifier la situation entre Woody et toi. Tu te sens toujours triste quand tu penses à lui parce que tu étais persuadée que vous alliez vivre une belle, grande et longue histoire d’amour. Malheureusement, celle-ci a été belle et grande mais bien trop courte. Cela ne t’étonne pas réellement qu’il n’en ait pas parlé à sa sœur car comme le souligne si bien Nevaeh, Woody reste Woody. Il n’est pas des plus bavards en règle générale mais en ce moment, c’est encore pire. Bien qu’il ait été honnête avec toi la dernière fois que vos chemins se sont croisés, il a tout de même fallu que tu fasses le premier pas. Si tu n’avais pas été jusque chez lui, il ne t’aurait probablement jamais dit qu’il était prêt à vivre une vraie histoire à tes côtés. Malheureusement, le timing était véritablement mal choisi. Tu attrapes finalement une bouteille de vin rosé dans le frigo pour la poser sur le plan de travail de la cuisine, le temps de mettre la main sur l’ouvre-bouteille. « Tu prendras bien du vin, hein ? » Depuis le temps que vous ne vous êtes pas vues toutes les deux… il est temps de rattraper le temps perdu. « Si, Sara. Je sais qu’il l’aime toujours… Il t’a dit qu’il était parti à l’autre bout du monde pour la voir ? » Et même si l’australien t’a affirmé qu’il n’avait pas été à Pékin pour la retrouver, comme tu peux l’imaginer, tu as du mal à y croire. Tu es persuadée que si elle lui avait laissé une porte ouverte, il aurait été capable de rester là-bas et de vivre avec elle. « Au-delà d’avoir été la meilleure des belles sœurs, le temps de quelques mois, tu resteras toujours mon amie, Nev. » Sauf si la brune en décide autrement en privilégiant sa relation avec Woody plutôt que la vôtre. Tu pourrais le comprendre, néanmoins, tu espères qu’elle n’aura jamais à faire ce genre de choix. Tu soupires légèrement en entendant la question de l’Australienne parce que tu sais que ta réponse ne lui plaira pas. Forcément, elle ne sera pas heureuse d’apprendre que tu fais ta vie avec un autre que son frère. Pour beaucoup, Woody et toi c’était une évidence… Tu y as cru pendant longtemps, toi aussi, mais aujourd’hui, les choses ont changé. « Oui… ça fait des mois que je vois quelqu’un mais on a officialisé notre relation il y a un mois environ. Je sais que ce n’est pas ce que tu as envie d’entendre mais je suis heureuse. Vraiment heureuse. » Et même si, souvent, tu te trouves égoïste d’avoir trouvé le bonheur sans Woody, tu te sens tellement bien dans ta vie actuelle que tu mets ces mauvaises pensées de côté la plupart du temps.

Oh, c'était sorti tout seul. Maladroit, un peut comme elle. Déçu, légèrement. Troublé, aussi. C'était que Woody en avait un peu parlé, mais il était si souvent de nature pessimiste qu'elle n'avait pas cru que ça aurait pu être réellement terminé. Parce que Freja, elle avait tout donné pour son frère, elle avait fait des monts et des montages pour lui. Et si elle aussi, elle abandonnait, c'était que la fin était proche, c'était qu'il n'y avait pas d'espoir. C'était qu'il n'y avait plus de lumières pour Woody. Freja, c'était sa seule motivation, la seule chose qui le gardait en vie encore aujourd'hui. Les Rutkowski, Nevaeh, ce n'était pas assez pour lui. Il lui fallait sa muse, sa force, son étoile. La seule qu'il avait autant aimée. Mais, cette fille, elle vivait autre chose, elle était ailleurs. Et Nevaeh était forcée d'admettre qu'autant toute cette histoire avait mis Woody dans tous ses états, elle avait le même effet sur elle. Et dans les yeux de Freja, il y avait une tristesse infinie qui brisa le coeur de la journaliste, qui la cloua sur place, alors que la belle Ivanova posait une bouteille entre eux sur le plan de travail. « Oui, je veux bien », fit-elle en désignant le rosé que son amie commence déjà à verser dans des coupes. Du vin, elle en avait bien besoin. Pour encaisser le choc, oui, mais aussi pour prendre le temps de rattraper les moments perdus. Les trois dernières années avaient été ponctuées de peu de venue à Bowen. Et Nevaeh s'était ainsi éloignée de la plupart des gens qui formaient son cercle de vie à Bowen. Certains, même, avaient choisi de ne plus lui adresser la parole. D'autres, comme Woody, lui en voulaient vocalement d'être partie. Et, jamais, elle ne parlait des réelles raisons qui avaient entouré son départ. « Non. Je peux t'assurer que non », fit-elle quand Freja parle de Sara. Bien évidemment qu'il l'a aimée, Woody. Mais pas comme il aime Freja. Et peut-être qu'il ne l'avait pas toujours fait comprendre à la Norvégienne, mais la brune le savait, elle le connaissait. « Il m'en a glissé un mot, oui... », souffla-t-elle en prenant sa coupe de vin comme un bouclier. « Il.. Il n'est pas allé la voir pour lui déclarer sa flemme, Freja. » Elle parlait trop, elle allait au-delà de ce qui était permis de raconter. « Il avait besoin de faire le point sur cette histoire.. Je crois qu'au fond c'était pour te donner toute la place que tu méritais. Dommage que ça n'ait pas été suffisant », fit-elle avec déception en portant son verre à ses lèvres alors que la désigner la rassurait. « Ça me soulage de l'entendre.. J'ai pas envie de te perdre à cause de cette histoire... » À moins que Woody lui demande de ne plus jamais entrer en contact avec Freja, Nevaeh ne couperait pas les ponts entre elle et la Norvégienne. Elle avait été trop importante à ses yeux pour mettre aux oubliettes leur amitié à cause d'une rupture. Et puis, elle ne put s'empêcher de poser la question, cette question qui lui tournait en tête depuis qu'elle lui avait avoué que Woody et elle n'étaient plus ensemble, que tous espoirs étaient disparus. « Je vois... », fit d'abord Nevaeh en reprenant une gorgée de vin. « Je suis contente pour toi, Freja. » Et c'était sincère, vraiment. « Tout ce que je veux, c'est de te savoir heureuse. J'aurais préféré que ce soit mon frère qui t'apporte ce bonheur, mais je ne peux te blâmer d'avoir tout donné et de t'être épuisé. Je... Je comprends tellement... » C'est qu'elle le vivait, Nevaeh, tout ça. Mais, contrairement à Freja, elle ne pouvait pas l'abandonner, elle ne pouvait pas le laisser tomber. Woody, c'était son sang. C'était sa chair. Même s'il était plus important que tout ce qui pouvait se passer dans sa propre vie et qu'elle s'oubliait constamment pour lui, elle, elle ne pouvait pas le laisser tomber.

Machinalement, tu verses le vin rosé dans deux verres, sans réellement attendre l'avis de Nevaeh. Tu te doutais bien qu'elle accepterait car vous n'en êtes pas à votre première bouteille de vin ensemble. Tu te souviens encore de ces soirs d'été où vous discutiez sur la terrasse de ton ancien appartement de tout et de rien, retraçant l'histoire de vos vies. Souvent, votre discussion dérivait sur vos relations amoureuses et te concernant, sur Woody. Avant que les sentiments s'immiscent entre vous, il était en couple avec une autre et tu sais pertinemment qu'il la considère comme le grand amour de sa vie. Il est le tien mais tu doutes constamment d'être le sien. Même si Nevaeh t'assure qu'il n'a jamais aimé quelqu'un autant que toi, tu n'y crois pas totalement. S'il t'aimait autant qu'il le prétend, c'est à toi qu'il aurait rendu visite et pas à Sara, à l'autre bout du monde. « J'sais pas Nev, j'ai du mal à croire qu'il ne se soit rien passé entre eux là-bas. » Tu baisses les yeux sur les deux coupes de vin que tu tiens en mains avant d'en tendre une à la brune et de l'inviter à rejoindre le salon. « Tu sais, c'est parce que j'ai été jusque chez lui qu'il m'a parlé de tout ça. Sinon, il me l'a dit lui-même, il ne m'aurait probablement pas dit qu'il était prêt à se lancer dans une vraie relation avec moi. » Et ça, ça veut tout dire à tes yeux. Même si Woody se dit prêt, il n'était pourtant pas prêt à faire le premier pas. Après cela, comment pouvais-tu t'engager pleinement dans cette relation alors que les doutes planaient toujours au-dessus de ta tête ? Et qu'en plus, tu vivais une relation avec un autre qui te rendait réellement heureuse. « On est amies avant tout. Aucune raison de me perdre, donc. » Dis-tu en souriant et en t'installant sur le canapé, ton verre de vin toujours en mains. A tes yeux, il n'y a aucune raison de faire un choix entre Nevaeh et Woody. Si quelqu'un doit faire un choix, ce sera peut-être l'Australienne si son frère lui demande mais sûrement pas toi. Une fois installées au salon, la jeune femme s'engage sur un terrain encore plus glissant : ta nouvelle relation amoureuse. Tu sais qu'elle aurait préféré te voir avec son frère mais elle ne connait pas encore toute l'histoire, elle n'a pas encore toutes les cartes en mains pour comprendre. « Merci d'être compréhensive. » Nevaeh l'a toujours été parce qu'elle est la gentillesse incarnée et qu'elle a un fond vraiment bon. Mais ça fait plaisir d'entendre qu'elle ne veut que ton bonheur, malgré tout. « Il est tellement borné... » Dis-tu en soupirant. Avec les mots qu'elle emploie, tu comprends aisément que la brune a été confrontée au caractère de cochon de Woody. Il est désemparé et il baisse totalement les bras alors forcément, il en devient exécrable. Malgré tout, tu ne cesseras jamais de l'aimer parce qu'il restera toujours le grand amour de ta vie. « J'imagine qu'il n'a pas été tendre avec toi. » Tu sais à quel point le jeune Rutkowski peut appuyer là où ça fait mal et employer des mots tranchants pour blesser. Par chance, Nevaeh est forte et peut encaisser. Mais jusqu'à quand ?

Ces soirées d'été, elle s'en souvenait très bien. C'était avant de partir de Bowen, avant que sa vie ne soit qu'un casse-tête bien trop compliqué à rêver. C'était, aussi, quand son frère allait un peu mieux, que la maladie n'avait pas commencé à le ronger comme elle le faisait maintenant. C'était pire, pire qu'avant. Et s'il ne se prenait pas en main, ça ne serait pas près de ralentir. Il se laissait mourir, dépérir, Woody. Et Nevaeh n'y comprenait rien. Évidemment, c'était facile pour elle d'avoir espoir. Elle était en santé. Elle n'était pas la Rutkowski malade de la famille. Optimiste, elle se montrait positive face aux épreuves de son frère alors que lui trainait tout le monde vers le bas par son négativisme légendaire. Mais si on avait inversé les rôles, aurait-elle était si optimiste, Nevaeh ? C'était difficile à dire, même si elle souhaitait répondre à l'affirmative. Mais elle ne pouvait pas savoir, elle ne l'était pas, malade à en mourir. Elle ne souffrait pas comme lui. Et c'était bien ça le problème. C'est que personne ne pouvait réellement comprendre ce qu'il endurait quotidiennement. Pas même Nevaeh. Pas même Freja. Et Woody agissait souvent par la détresse, physique ou psychologique. Ce n'était pas de sa faute, pas complètement, c'était son cerveau qui était épuisé de tenter de faire taire les douleurs constamment. Oui, elle le défendait. Oui, elle le défendrait toujours, même s'il avait tort. Mais là-dessus, elle pouvait tout de même avouer qu'il y avait une partie qui ne lui appartenait plus, incapable de tout contrôler. Freja leur servit le vin, Nevaeh s'empressa de le porter à ses lèvres l'écoutant parler de Sara, de ce qu'elle pensait qu'il s'était passé à Pékin. « Je ne peux pas t'assurer qu'il ne s'est rien passé... Ou qu'il n'avait pas envie d'en retirer quelque chose. Je ne sais pas, Freja. Je n'y étais pas », commença-t-elle en soufflant. « Il l'a aimé. Mais moi, je le vois à ses yeux, que la femme de sa vie c'est toi... » C'était sans doute blessant à entendre, elle qui avait dû faire le deuil de sa relation avec son frère il y a des mois et qui était forcé, aujourd'hui, à tout revivre pour une revenante. Elle s'en voulait, Nevaeh, c'est pourquoi elle se tut, se contentant d'ajouter : « Tu le connais, Freja. Woody ne parle pas. Il a du mal avec ça. Alors, imagine avec le fait de devoir dévoiler ses sentiments à une femme ? Encore plus à une femme comme toi... » C'était tout, elle n'en dirait pas plus, elle n'avait pas envie de blesser son amie, de lui faire revivre ses mauvaises émotions. « C'est rien », lui lança la brune quand Freja la remercia d'être si compréhensive avec elle. Au fond, que pouvait-elle faire d'autre ? Tout ce qu'elle voulait, c'était le bonheur de Freja et de Woody. Et malheureusement, ça ne pouvait pas résulter de leur relation. La vie continuait. Freja était belle, séduisante, tellement une femme exceptionnelle, c'était évident qu'elle allait trouver un nouvel homme, elle plaisait. Et, au fond, Nevaeh ne voulait que son bonheur. Woody ne le lui apportait pas, et elle avait raison, il était borné. La journaliste hochait la tête, acquiesçant ce que son amie disait jusqu'à ce qu'elle lui parle de l'attitude de son frère avec elle. Elle sentit ses mains trembler. La force, elle ne l'habitait plus. C'était sans doute à force d'essuyer les blessures. Felix, son histoire complexe avec l'ex de sa meilleure amie, Woody qui lui en voulait pour toutes les fautes du monde... Elle se contenta de secouer la tête avant de répondre. « C'est pire qu'à l'habitude, mais ça va aller... » Elle trouvait toujours le moyen de faire aller. Nevaeh, elle était passée maître dans l'art de gérer les blessures.

Personne mise à part Woody et Sara ne sont au courant de ce qu’il s’est passé à Pékin puisque personne d’autres n’y était. Et si parfois tu as envie de connaître les moindres détails de ce voyage, d’autres fois, tu préfères ne pas savoir. Cela te ferait probablement plus de mal que de bien. « Je sais. De toute façon, je ne suis pas certaine d’avoir envie de le savoir. » Dis-tu en haussant les épaules. « Peu importe, aujourd’hui, c’est trop tard. » Mais l’était-ce vraiment ? N’y-a-t-il pas une petite part, en ton fort intérieur, qui pense toujours que vous vous retrouverez un jour ou l’autre, Woody et toi ? Tu es vraiment heureuse avec Concho mais une part de toi appartiendra toujours à Woody. Tu ne peux pas lutter contre ça parce qu’il a été et il est encore, le plus grand amour de ta vie. « Justement, Nev. Comment peut-on envisager une relation s’il n’est pas capable de me dire ce qu’il ressent, ce qu’il désire ? » L’Australien a toujours été taiseux, certes. Beaucoup moins lors de vos derniers échanges, tu es obligée de reconnaître qu’il s’est beaucoup ouvert à toi. Mais pas suffisamment à tes yeux. De ton côté, tu as toujours été transparente avec lui – ou presque – même si tu étais terrifiée à l’idée d’être rejetée. Tu aurais voulu qu’il en fasse de même avant qu’il ne soit trop tard. Avant qu’un autre ne t’apporte tout le bonheur dont tu avais besoin. Quand Nevaeh se montre compréhensive, voulant ton bonheur avant tout, tu te sens légèrement soulagée. Tu avais peur que l’échec de ta relation avec Woody mette des distances entre vous. Aujourd’hui, tu considères l’Australienne comme une vraie amie et c’est bon de la voir de retour en ville. Pour combien de temps, ça, tu l’ignores encore puisque vous n’avez pas encore vraiment eu l’occasion de parler de la vie de Nevaeh. « Tu es sûre ? Je sais qu’il peut se montrer vraiment horrible quand il veut. » Tu vois à son comportement et à sa façon de parler que ça ne va pas aller comme elle essaie de te le faire croire. Tu sais que rien n’est aussi simple. « Tu as le droit de souffrir de la situation, toi aussi, Nev. Ce n’est pas parce que c’est lui qui est malade que tu n’as pas le droit d’avoir mal. » Tu as longtemps cru que tu devais te montrer forte face à Woody parce qu’il vivait pire que toi mais aujourd’hui, tu as compris que la souffrance d’un autre n’empêche pas la tienne pour autant. Même si les deux se trouvent à des niveaux différents. « Ca va, toi ? Tu es de retour pour combien de temps ? » Demandes-tu finalement en lui souriant.

C'est vrai, personne, mis à part Woody et Sara, ne savent ce qui c'était réellement passé durant le voyage à Pékin de son frère, puisqu'il n'y avait eu qu'eux pour le vivre. Nevaeh ne pouvait promettre avec certitude les événements passés. Seulement, elle connaissait minimalement son frère. Et même si quelques mots doux avaient pu être échangés, parce que de l'amour pour Sara, il en avait eu, ça ne changeait pas le fait que la femme de sa vie, c'était Freja. Tout le reste ne trahissait pas. Selon la brune, son frère avait cherché à boucler la boucle, à fermer un chapitre de sa vie qui ne l'était pas complètement afin d'être en mesure d'accueillir le prochain plus facilement. Mais ça, c'était l'avis de Nevaeh. La journaliste un peu trop romantique pouvait bien se tromper. Freja lui confia qu'elle n'avait pas envie de savoir ce qui s'était passé réellement à Pékin, la brune hocha la tête. Elle comprenait, se mettant dans sa position, elle ne voudrait pas savoir ce que l'homme qu'elle aime avait fait avec une autre, bien que rapidement, pour la belle Rutkowski, ce scénario serait envisageable sans même le savoir présentement. Et, selon la Norvégienne, de toute façon, c'était trop tard. À cet instant, Nevaeh cessa de hocher la tête. « Il n'est jamais réellement trop tard », souffla-t-elle. Elle n'avait pas envie de tourner le fer dans une plaie encore ouverte, de faire du mal à son amie pour espérer la revoir avec son frère, ce n'était tellement pas son but. Seulement, elle était optimiste pour mille et selon elle, s'ils avaient à se retrouver, ça se ferait. Un jour ou l'autre. « Ce n'est peut-être juste pas le bon moment », ajouta-t-elle avant de soupirer quand Freja lui parla des travers de Woody. Elle avait raison, tellement raison. « Avec Woody, il faut beaucoup de patience, ce que visiblement tu as épuisé... » Il finirait par s'ouvrir, mais cela prendrait du temps. Beaucoup de temps. Et Nevaeh comprenait que du temps et de la patience, Freja n'en avait plus autant qu'avant. Elle-même commençait à moins en avoir à revendre. Et elle ne cherchait pas à se mêler des histoires de son amie. Si elle était heureuse avec un autre, Nevaeh était heureuse pour elle. Quant à Woody, elle tenterait de lui faire du bien, de faire passer la douleur de la séparation, même s'il avait été odieux avec elle. Freja sembla le sentir dans le regard de son amie, puisqu'elle lui demanda comment leurs retrouvailles s'étaient passées. Mal, c'était la vérité. Elles avaient fini par voler en éclat, se briser et effriter leur relation au passage. Il l'avait été, horrible. Mais l'avouer, c'était impossible pour la brune. « Il s'est comporté comme il le fait toujours... », souffla-t-elle avec une toute petite voix. Non, ça n'ira pas. Freja le sait. Et ses mots l'encouragent. « Je sais.. », ajouta-t-elle sur le même ton. Elle aurait voulu ajouter un merci, merci de comprendre, parce qu'autant que ce qu'elles vivaient était différent, autant c'était similaire. Seulement le type d'amour différait. Elle lui demanda ensuite combien de temps elle comptait rester en ville. Nevaeh sourit en haussant les épaules. « Tu sais, c'est jamais bien clair avec moi. Assez longtemps pour avoir pris un appartement, du moins. » Pour le reste, elle aviserait. « Je ne retournerai plus à New York », finit-elle par avouer à la Norvégienne. « C'est terminé avec Felix. »

C’est sûr qu’en ce qui vous concerne, Woody et toi, le temps n’est pas vraiment un frein à votre histoire. Le temps ne semble pas capable de vous éloigner définitivement ou encore d’amoindrir vos sentiments. Pourtant, le temps devrait être un facteur important quand on prend en compte la maladie du jeune Rutkowski. Celle-ci ne lui laisse aucun répit et grandit même avec les semaines et les mois. Tu le vois à chaque fois que ton chemin croise celui de Woody, la maladie progresse. Néanmoins, tu ne veux pas que la maladie soit la seule raison de vos retrouvailles et lui ne le voudrait non plus de toute façon. « Peut-être… » Dis-tu en haussant doucement les épaules, à moitié convaincue. Ta relation avec Concho peut te porter très loin, tu le sais, tu le sens. Mais si l’amour que tu éprouves pour Woody reste là, tapi dans l’ombre, tu sais également que cela posera forcément problème à un moment ou un autre. Pour l’heure, en tout cas, tu préfères voir où tout ça va mener en te laissant porter par cette relation des plus inattendues. « Je ne dirais pas que j’ai épuisé tout mon stock de patience avec Woody parce que j’en aurai toujours pour lui… » Répliques-tu avec un petit sourire au coin des lèvres. « Mais j’ai ressenti le besoin de prendre mes distances pour ne pas me perdre complètement. » C’est le sentiment que tu avais ressenti, lors de ta fausse couche. Ce besoin de t’éloigner pour te préserver ne t’avait plus quitté et dans le fond, quand on y pense, c’est triste d’en arriver à un tel point. Mais c’est parce que ta relation avec l’Australien a toujours été à la fois belle et destructrice. Woody a toujours su où appuyer pour que ça fasse mal, il a toujours su employer les bons mots pour blesser les autres. Et c’est sûrement l’un de ses pires côtés qu’il ne t’a, heureusement, pas réservé très souvent. Par contre, en ce qui concerne Nevaeh, tu sais qu’il s’est déjà montré très dur avec elle par le passé et que les choses ne doivent pas s’améliorer à cause de la propagation de sa maladie. Pourtant, il l’aime profondément, sa sœur. C’est ça qui est complètement dingue. « Je vois. » Réponds-tu en fronçant les sourcils. « Si tu as besoin d’en parler, de vider ton sac, tu m’appelles d’accord ? Ne garde pas tout ça pour toi. » Cela ne ferait qu’empirer le sentiment qu’elle doit probablement ressentir suite à cette « altercation ». Pour changer un peu de sujet et surtout pour prendre des nouvelles de la brune, tu l’interroges sur son retour à Bowen. « Wow, un appart’ ! C’est génial, Nev. Je vais pouvoir profiter de toi plus longtemps comme ça. » Réponds-tu avec un sourire qui s’élargit mais qui s’efface bien vite quand l’Australienne t’annonce sa rupture. « Oh… je suis vraiment désolée. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » Demandes-tu même, si bien sûr, elle n’a aucune obligation de t’en parler.

C'était impossible de croire que tout était réellement terminé entre Woody Et Freja. Eux, c'était à la vie à la mort. Nevaeh avait été témoin des efforts de Freja, et bien d'autres lui manquaient parce qu'ils avaient été faits dans leur intimité. Et bien qu'elle comprenait la fatigue que la brune pouvait ressentir, elle-même l'avait ressenti à un moment avec Woody, une part d'elle ne cessait d'espérer ce jour où tous les deux finiraient par se retrouver. À ses yeux, il n'y avait aucune personne qui pourrait rendre Freja aussi heureuse que Woody, peu importe le bonheur qu'elle vivait aujourd'hui, peu importe le bonheur qu'elle vivrait dans dix ans. La brune se laissait croire qu'un jour elle serait témoin à leur mariage, même si ça pouvait prendre des années encore, même si Freja avait besoin de vivre autre chose de son côté. Mais tout ça, elle ne lui disait pas, respectant ses décisions. Seulement, le fait que Freja avouait avoir toujours un peu de patience en réserve pour son frère rendait Nevaeh confiante. Elle avait besoin de se retrouver et, qui sait, peut-être être un jour en mesure de revenir. « C'est le plus important », lui confia-t-elle avec un sourire avant de poser une main sur la cuisse de Freja. « Avec tout ça, tu ne m'as pas parlé de ce garçon », fit-elle en lui souriant. « Je le connais ? » La soeur Rutkowski était mise de côté laissant place à l'amie. Elle voulait réellement tout savoir, parce qu'entre elles, elles avaient toujours été franches. Et ce genre de confessions, elles en avaient l'habitude, toutes les deux. Comme celles à l'entour du comportement de Woody à l'égard de sa soeur. Souvent, elle était venue se confier à Freja parce que c'était l'une des seuls qui pouvait réellement comprendre ce que ça faisait d'être dans la vie d'un homme comme lui. Mais cette fois, il avait dépassé les bornes, il avait été beaucoup plus tranchant avec elle que son habitude. Freja l'invita à ne pas garder ça pour elle, la journaliste lui sourit, lasse. « Ça ne mènerait à rien, il est pas lui même en ce moment », souffla-t-elle en baissant les yeux vers ses mains et sa coupe de rosé. « Je ne l'ai jamais vu aussi renfermé sur lui-même. Et je l'ai vu bas, très bas... Mais là, je ne comprends rien. Je ne comprends pas comment l'aider. Et lui, il ne veut pas de moi... » Son coeur se brisait, se heurtait contre sa poitrine alors qu'elle disait finalement les mots qu'elle retenait depuis quelques jours. Elle n'avait même pas pu prendre plaisir à s'installer dans son nouvel appartement parce que ses pensées des derniers jours avaient été portées sur ses retrouvailles houleuses avec Woody. Le sourire de Freja se dissipa quand le sujet de sa rupture avec Felix arriva. Nevaeh secoua la tête. « Non, non, ça va », la rassura-t-elle. « Il m'a trompé. J'attire les mecs infidèles, il faut croire », gloussa la journaliste en portant sa coupe à ses lèvres.

Nevaeh n'est pas la première à être étonnée de cet éloignement entre Woody et toi. Elle n'est pas la première à penser que votre relation est indestructible, puissante et intemporelle. Toi-même tu étais persuadée de tout cela avant de t'investir dans cette nouvelle relation avec Concho. C'est en prenant conscience de tout le bien que t'apporte ton petit-ami, au quotidien, que tu as compris que ta relation avec Woody n'était pas totalement saine. Aujourd'hui encore, tu es convaincue que vous n'êtes pas prêts, Woody et toi, pour une relation durable tous les deux. Un jour, peut-être... Tu ne peux pas prédire l'avenir mais pour ce qui est d'aujourd'hui, c'est dans les bras de Concho que tu te sens bien et que tu as envie d'être. « Peut-être... Woody le connait en tout cas, ils étaient à l'école ensemble. Il s'appelle Conchobáhr, ça te dit quelque chose ? C'était mon coloc'. » Dis-tu en souriant du coin des lèvres. Vu que son prénom est encore moins courant que le tien, tu te doutes bien que si Nevaeh a déjà entendu parler de lui, elle doit s'en souvenir. Et maintenant que tu y penses, puisqu'elle est déjà venue plusieurs fois au 17, tu es persuadée qu'elle voit de qui il s'agit. Mais bien vite, votre conversation dévie à nouveau sur le jeune Rutkowski et sur sa relation apparemment compliquée avec sa petite-soeur. Ces deux-là se sont toujours bien entendus mais visiblement, Nevaeh a également eu droit au Woody renfermé, froid et presque méchant. C'est pour cette raison que tu invites la brune à se confier parce que tu sais à quel point être confronté à ce Woody-là peut faire mal. « Non, il n'est pas lui-même. » Réponds-tu, complètement d'accord avec l'Australienne. Vous avez toutes les deux eu droit au vrai Woody par le passé alors vous savez pertinemment qu'il ne montre plus qui il est réellement, au fond. La maladie l'a poussé à être froid et distant avec tous ceux qui s'approchent de lui. Heureusement pour lui, il a un entourage coriace, à commencer par sa soeur. Même si elle t'avoue ne pas savoir quoi faire, tu sais qu'elle se battra toujours pour son frère. « Ne dis pas ça. Il veut toujours de toi dans sa vie, c'est juste qu'il a pris l'habitude de repousser tout le monde à présent. C'est plus facile pour lui d'agir comme ça mais dans le fond, bien sûr qu'il te veut à ses côtés. » Rétorques-tu, sûre de toi. Tu as ressenti les mêmes doutes que Nevaeh par le passé et plus d'une fois mais contrairement à elle, tu as dû baisser les bras à un moment pour te reconstruire et te retrouver. Continuant dans les sujets compliqués et tendus, la jeune femme t'explique que sa relation amoureuse s'est terminée par une tromperie. Tu soupires, vraiment triste pour la brune qui mérite d'être heureuse et d'être aimée à sa juste valeur. « Mais non ! Tu trouveras le bon, j'te le promets. » Qui ne voudrait pas d'une femme comme elle ? « Comment l'as-tu appris ? » Demandes-tu même si finalement, ça n'a aucune importance.

C'était l'attachement qui parlait. L'attachement pour eux, en tant que couple. L'attachement envers ce membre ajouté à la famille. L'attachement envers son frère. L'attachement envers son amie. Trop de relations qui s'entrelaçaient et qui, au final, résumaient bien la déception de Nevaeh quant à cette fin à laquelle elle ne se serait pas attendue. Pour elle, Woody et Freja étaient plus forts que tous, ils avaient connu des tempêtes, des ouragans même, mais avaient toujours fini par se relever, ensemble, plus fort que tous. Celle qui tenait cette relation à bout de bras, c'était inévitablement la brune, force de leur couple, force de leur équipe. Mais de la force, elle n'en avait plus. Ou alors, elle ne voulait pas la perdre et elle préférait la préserver dans les bras d'un comme qui ne lui faisait pas affronter des montagnes à chaque nouvelle étape. Ça se comprenait. Il fallait seulement à présent faire le deuil de cette relation qui n'était plus, de cet amour qui s'était dissipé. Et si Freja avait eu le temps de le faire, ce deuil, Nevaeh, elle, avait été mise devant le fait accompli que maintenant. Elle s'intéressa tout de même à la nouvelle relation de Freja, parce qu'au final le bonheur de son amie comptait bien plus que tout le reste, même si son propre frère était dans l'équation. Cet homme dont elles parlaient, celui qui rendaient Freja rayonnante, il avait sans doute un nom. Et c'est ce que la journaliste se tâta à découvrir. Et quelle ne fut pas sa surprise en découvrant que celui qui avait conquis son coeur était son ancien colocataire du dix-sept. Nevaeh haussa les sourcils, surprise, mais un sourire vint vite se poser sur ses lèvres. « Concho ? », demanda-t-elle avec surprise dans le ton de sa voix. « Mais comment c'est arrivé ? Comment il est passé de simple coloc à boyfriend material ?Je veux tout savoir. » Elle posait son visage entre ses mains pour mieux écouter son amie, sa tête d'ange et ses grands cils qui battaient, prête à recevoir les confessions de la Norvégienne jusqu'à ce que la conversation ne revienne sur Nevaeh. Et là, une gorgée de son rosé était nécessaire pour mieux répondre. Sa relation avec Woody était difficile depuis quelque temps déjà, depuis qu'elle avait accepté le job à New York. Trois ans à marcher sur des oeufs avec lui, jusqu'à maintenant, jusqu'à ce qu'il la repousse une énième fois et qu'elle s'en lasse. « Pas cette fois », souffla la brune lorsque Freja lui assura qu'il voulait d'elle à ses côtés, Woody. Mais cette fois, ils s'étaient disputés bien plus qu'à leur habitude et s'étaient dit des choses que Nevaeh regrettait déjà. Sa vie partait en vrille, sur tous les plans. Elle avait besoin de son grand-frère plus que jamais. Mais, encore une fois, elle se mettait dans l'ombre, s'empêchant de demander l'aide qu'elle aurait voulu parce que lui allait bien pire qu'elle et sa petite histoire de tromperie. Quand Freja lui assura qu'elle finirait par trouver le bon, la brune haussa les épaules en pinçant les lèvres, mais ne choisit de ne rien ajouter à l'affirmation de son amie. Elle n'y croyait plus, ou alors difficilement. Sa confiance envers les hommes était effritée, ils semblaient tous être pareils, au fond, incapable de se contenter d'une seule femme pour être heureux. « Je l'ai surpris sans caleçons dans son bureau, sa secrétaire à ses pieds en pleine fellation », lança Nevaeh, un sourire jaune au visage, levant son verre en portant un toast ironique à la situation. « C'était assez clair, il n'y avait aucune erreur de perception. Il s'est avéré que ça se produisant depuis longtemps... Je pense bien qu'à présent elle a ma bague au doigt. » Et elle serait à plaindre, la secrétaire, si elle avait accepté.