dear lord, when I get to heaven, please let me bring my man (bellamy)

Deux mois et demi qu’Elmo n’avait pas mis les pieds à Bowen. Deux mois et demi qu’il avait pris la semi-décision de ne pas revenir. Semi, parce qu’il n’en avait jamais vraiment été convaincu, de ça, Elmo. L’Italie était belle, ce sentiment d’être chez-soi lui avait fait du bien, mais ça n’avait duré qu’un temps. Toutefois, il n’avait pu manifester ses doutes à qui que ce soit, ni à Bella ni à Bellamy. Pas à Bella parce qu’il lui avait brisé le cœur ce jour-là à l’aéroport, et qu’il ne pouvait jouer avec ses sentiments avant d’être certain de son retour. Pas avec Bellamy parce que ce dernier avait foutu le camp avant même qu’Elmo ne le fasse lui-même, et qu’ils avaient perdu contact depuis. Alors qu’Elmo revienne ou pas à Bowen, sans doute Bellamy s’en balançait-il. Ils ne se reverraient pas pour autant. C’est du moins ce que pensait l’italien, et pourtant, une heure après qu'on l'ait enfin relâché de la quarantaine préventive pour le coronavirus, quelques minutes après que la navette l’eut déposée au noyau central de Bowen, la grosse mangue, il aperçut son meilleur ami. Il était assis sur une palissade non loin de ladite mangue, en train de boire un truc qui devait être bourré de sucre, le regard rivé sur l’écran de son téléphone cellulaire. Un sourire se dessina sur les lèvres d’Elmo, parce que malgré tout ce qu’il s’était passé entre eux, bordel ce que c’était bon de le voir. Mais ça, Elmo avait encore un peu trop de fierté pour l’admettre, alors plutôt que de courir se jeter sur lui avec bonheur, il attrapa son propre téléphone et tapa Dickhead dans sa vieille conversation avec Bellamy, conversation qui n’avait eu aucune activité depuis des mois maintenant. Il envoya ce bref message d’insulte – amicale ? – et guetta la réaction de l’universitaire.

Les sourcils haussés, tentant de dissimuler un sourire amusé par sa propre insulté textée, Elmo guettait la réaction de Bellamy en se demandant si c’était la meilleure méthode pour ouvrir une conversation. C’était ça, ou continuer à jouer les bébés en passant son chemin. Il n’avait plus envie des confrontations, Elmo, et surtout, il ne savait même plus à propos de quoi ils se disputeraient. Que Bellamy et Vega fassent ce qu’ils veulent, ils étaient majeurs et vaccinés. En revanche, il faudrait que Bellamy le laisse faire ce qu’il voulait avec Bella, que ça implique de la voir en secret ou au grand jour, selon ce qu’Elmo se déciderait à faire quand il la verrait en face, après deux mois et demi d’absence et de silence. Sans quitter son ami du regard, l’italien sut exactement à quel moment il reçut son message. L’attitude de Bellamy changea, son expression faciale aussi, et automatiquement il releva la tête en balayant la foule du regard. Elmo, lui, resta planté droit comme un piquet, une simple esquisse de sourire au coin des lèvres, ses mains plongées dans les poches de ses shorts. Bellamy se leva et rejoignit rapidement l’ancien universitaire. « Je te détestais. » Affirma Elmo d’une voix grave. Puis, il haussa les épaules. « Et ça m’est passé. Et tu m’as manqué. » Analysant à nouveau les paroles de son ami toutefois, le jeune homme fronça les sourcils. « Depuis quand t’es revenu ? T’as pas essayé de rencontrer en contact du tout avec moi depuis ton retour ? Non parce que si tu l’avais fait, t’aurais bien vite vu que j’étais pas ici, que j’étais pas à Bowen. » Et toutes les informations s’additionnèrent dans sa tête. « Ce qui veut dire que t’as pas reparlé à Vega non plus. Autrement, elle te l’aurait dit. » Non mais quel lâche, Bellamy. Un lâche qu’il aimait tellement malgré tout.

Tous les deux n’étaient là que depuis quelques jours, donc. Enfin, en ce qui concernait Elmo, c’était plutôt depuis deux semaines mais on l’avait placé en quarantaine à l’aéroport dès son arrivée, puisqu’il arrivait d’Italie. Il avait tout de même eu la chance de pouvoir passer la frontière australienne, car à l’heure actuelle, rien ne bougeait plus en Italie. Il n’aurait pas pu revenir à Bowen s’il s’était décidé quelques jours plus tard de prendre un vol. Comme quoi, c’était un peu le destin qui l’avait amené à revenir sans difficulté. Cela n’empêchait pas Elmo de s’inquiéter pour sa famille là-bas et de prendre des nouvelles trois fois par jour. Bref, Bellamy attirait cependant son attention actuelle. « Ouais mais si t’es revenu c’est que t’avais l’intention d’nous reparler, si on te manquait. C’était con d’attendre. Mais bon peu importe, j’étais pas là. » Ce à quoi Bellamy répondit qu’effectivement, il n’était pas au courant qu’Elmo avait quitté le pays. Il haussa les sourcils quand son ami parla de la géolocalisation de son téléphone. « Tu m’espionnes maintenant ? » Un sourire au coin de ses lèvres traduisait de son amusement face à ça. Si Bellamy avait pensé à ça, sans doute que Bella aussi, et peut-être était-elle donc déjà au courant qu’il était en Australie depuis deux semaines, coincé à Brisbane depuis. Lorsqu’il fut question de Vega, Elmo eut un léger rire. « C’est clair qu’elle t’envoie chier oui. » L’universitaire tendit sa main à l’italien, qui la serra à son tour. « Meilleur pote. Toujours. » Il lâcha sa main. « Et t’inquiètes j’ai pas le coronavirus, même si visiblement t’en aurais rien eu à foutre. » Il eut un grand sourire. « Alors, t’étais parti t’cacher où ? J’veux tout savoir. » Tout comme Elmo lui raconterait tout, en espérant que cette fois, ils puissent s’écouter sans jugement.

Au moins, il se connaissait bien, Bellamy ! Elmo rigola à son tour. « Ouais t’inquiète je le sais, t’es toujours là pour me le rappeler. » Il continua à rire, pour lui signifier bien sûr que c’était une insulte amicale. S’insulter c’était un peu ce qu’ils faisaient de mieux, dans leur bromance. « Y’aurait pas eu de bon moment, j’pense. Mais le hasard a bien fait les choses aujourd’hui. » Elmo haussa les épaules. Sans doute que s’il avait su que Bellamy était de retour, il n’aurait pas eu le réflexe d’aller le voir en premier, lui non plus. Il aurait sans doute attendu que Bel fasse les premiers pas. Et si les deux étaient restés dans cette manière de penser, ils auraient pu attendre longtemps, comme les deux idiots qu’ils étaient. « J’suis parti avant que ça devienne la folie. Y’a deux semaines c’était pas aussi chaotique, là c’est hallucinant, ça me fait un peu peur … J’appelle mes parents six fois par jour. Pour le moment ça va. » Avoua-t-il, ne voulant pas céder à la panique mais sentant tout de même qu’il aurait être en Italie, lui aussi, pour aider ses parents, et ses grands-parents surtout qui étaient plus vulnérables. Mais maintenant qu’il était ici, impossible de repartir, les frontières se fermaient pays après pays. De toute façon, Elmo avait des choses à régler ici, il n’était pas revenu pour rien. Bellamy aussi, avait des histoires à boucler, comme celle avec Vega. Elmo avait bien hâte de voir comment ça évoluerait, entre eux. Connaissant ses meilleurs amis, ça pouvait aller dans un sens comme dans l’autre. « Ton objectif c’est quoi ? Tu veux revenir avec elle ? » Osa-t-il demander, maintenant qu’il était plus ouvert à leur relation que quelques mois plus tôt. Ils reparlèrent momentanément du virus juste parce qu’Elmo assura à son ami qu’il ne l’avait pas. « Et au pire on en meurt ensemble comme ça ta vie sera plus jamais nulle. » Il sourit. Il fallait bien en rire un peu. Le bras de Bellamy autour de son cou, Elmo commença à marcher jusqu’à un bar non loin de la place centrale. Il se prit une bière, première en deux semaines, il y avait de quoi fêter rien que pour ça. « Elle va mieux, ta sœur ? Ça lui a fait du bien qu’tu passes la voir ? » Demanda Elmo. Il n’avait jamais rencontré ladite sœur de Bellamy mais il avait tellement entendu parler d’elle – et fait des blagues de mauvais goût à son propos – qu’il avait l’impression de la connaître. « Moi j’suis resté en Italie tout c’temps-là, avec ma famille. » Il hésita un moment, avant d’ajouter : « Bella est venue me rejoindre au nouvel an. On a passé deux semaines ensemble … et c’est en allant la reconduire à l’aéroport après que je lui ai dit que j’revenais pas … » Comme un lâche.

Toute sa famille serait heureuse d’avoir des nouvelles de Bellamy. Ils ne l’avaient jamais rencontrés mais au nombre de selfies qu’ils avaient eu ensemble l’année dernière, publiés sur les réseaux sociaux, c’était comme si les Santavenere le connaissaient depuis belle lurette. Quand ils avaient appris la dispute entre les deux meilleurs amis, ils avaient été tristes mais n’avaient pas insisté auprès d’Elmo, sachant le jeune homme assez buté quand il le voulait. « Ouais, absolument. On devrait les Face Time ensemble. Ça leur ferait plaisir. » L’italien sourit. En ces temps difficiles, n’importe quelle bonne nouvelle et communication ferait du bien. « J’espère. Mais comme ce sont des baby boomers, rien n’est moins certain. » Se moqua Elmo. Il était maintenant reconnu que les personnes de cette tranche d’âge ne prenaient pas la pandémie au sérieux. Il espérait que ses parents se montreraient un peu plus raisonnables que d’autres. Lorsque vint le sujet de Vega, l’italien demanda si l’objectif était de revenir ensemble, ce à quoi Bellamy apporta une nuance. « Tu comprends c’que je veux dire … » Son pote ajouta qu’il était amoureux d’elle, donc oui, il voulait la reconquérir, en un sens. « Tssk, et dire qu’y’a quelques mois tu me reprochais ça avec Bella. » Elmo leva les yeux au ciel avant de secouer la tête. Mais il fallait laisser ça dans le passé. Il ne pourrait pas le reprocher à Bellamy éternellement. Ce dernier en profita pour questionner le barista à propos de la belle costaricaine, justement. Il haussa les épaules. « J’crois que je lui ai brisé le cœur en lui disant que je ne revenais pas à Bowen, en janvier. On ne s’est pas beaucoup parlé depuis, que des textos quand elle était saoule, tu vois le genre … » Il baissa les yeux, honteux et triste. Après quelques blagues de mauvais goût sur le virus, qui les faisaient rire malgré tout, les deux amis décidèrent d’aller prendre un verre. Elmo prit des nouvelles de la sœur de Bel’. « Ouais, c’est déjà un bon début. Je suis sûr que ça a dû lui faire plaisir. Elle a toujours pas envie d’venir te rejoindre ici ? » Demanda Elmo, avant d’en revenir au sujet de Bella. « Assez mal pour que j’aie la trouille d’aller cogner à sa porte, quoi. » Mais il le ferait quand même. Il avait besoin de la revoir. Elmo prit une gorgée de sa bière et rit en la redéposant. Deux beaux lâches, ouais. « Qui se ressemble s’assemble. » Lâcha-t-il pour confirmer les propos de son ami.

Elmo hocha la tête avec un grand sourire, donnant une tape sur l’épaule de Bellamy. Au fond, il était plus qu’heureux que le hasard ait bien fait les choses en le mettant sur son chemin aujourd’hui. Et il se remerciait intérieurement de ne pas avoir continué son chemin comme un lâche, et d’avoir au moins osé lui envoyer un texto pour se faire repérer. « Parfait. J’vais nous trouver un p’tit moment dans leur calendrier de 5 à 7 virtuel. » Il sourit. « Dès que la situation revient à la normale autant là-bas qu’ici, j’prends le premier avion pour les voir, t’aurais pas envie d’venir ? » En même temps, Bellamy risquait d’être pris avec les cours, lui. Elmo ayant tout lâché, il n’avait plus les mêmes contraintes. De toute façon, comme personne ne savait quand les frontières rouvriraient, ils ne pouvaient que spéculer. Les deux meilleurs amis prirent place dans un bar et se commandèrent à boire, avant d’entrer dans les sujets les plus chauds : les filles. « J’espère bien. Sinon c’te fois j’me gênerai pas pour te remettre correctement à ta place. » Il arqua légèrement un sourcil, se prenant un air menaçant, et but une gorgée de sa boisson. À la question à propos de ce qu’il avait dit à Bella, Elmo haussa les épaules en soupirant. « Parce que je pensais vraiment que c’était le cas, Bel’. Les vacances de Noël en Italie m’ont fait réaliser plein de trucs, j’avais vraiment pris la décision de rester là-bas. J’voulais pas qu’elle m’attende ici sans savoir. » Et s’il avait respecté son choix de rester en Italie, Elmo n’aurait pas regretté cette rupture avec Bella. C’était la meilleure chose à faire. Mais maintenant qu’il se rendait compte que sa maison c’était ici, en Australie, il se trouvait bien idiot d’avoir peut-être perdu Bella pour ses incertitudes. « La communication entre ta sœur et toi, ça a jamais été votre fort. » Remarqua Elmo, avant que le sujet de Bella ne revienne sur le tapis. « Non, promis, j’y vais. À condition qu’tu envoies un sms à Vega, of course. » Il sourit, mais ce sourire disparut bien vite quand ses plans d’avenir, même à court terme, l’angoissèrent. « J’en ai aucune idée. Déjà faut que je trouve le moyen de rester ici à long terme. J’n’ai pas de visa, ni de travail ni d’étude, j’connais pas trop le fonctionnement mais bon si j’veux m’établir ici pour de vrai va falloir que j’m’informe de comment ça marche. » Parce que pour le moment sa seule idée était de se marier à Vega et tout d’un coup, ça ne lui semblait pas le meilleur plan. Y’en aurait quelques-uns de mécontents.

Elmo aussi avait déjà hâte. Découvrir l’Italie auprès de Bella ça avait été une expérience belle, douce et romantique. Découvrir l’Italie en compagnie de Bellamy, ce serait évidemment très différent mais ô combien amusant. Ils sortiraient jusqu’à tard, se retrouveraient un peu ivres sur les plages de Sorrento, prendraient des selfies débiles devant les monuments historiques, bref, ils feraient les cons comme ils les faisaient ici, mais dans son pays natal. « Génial. Mes parents vont être fous de joie. Et j’ai plein d’amies d’enfance qui ont pas arrêté d’me demander c’était qui l’mec sur quasi toutes les photos que je leur envoie sur Snap. » Elmo fit un clin d’œil à son ami, même si la suite de leur conversation lui fit bien comprendre que des filles, il en avait surtout une seule en tête, c’est-à-dire sa propre meilleure amie, Vega. Elmo devait se montrer protecteur autant envers l’un que l’autre, c’était dingue. Mais pour le moment, et de ce qu’il en savait, c’était surtout Bellamy qui avait merdé. Tous les deux avaient merdé. Lui aussi, avec Bella. Mais ils se promirent de tenter de réparer les pots cassés, chacun de leur côté. Et Elmo devait également trouver un moyen de rester ici à long terme. L’italien rit à la proposition de son meilleur ami, mais fronça rapidement les sourcils, suspicieux. « T’as pas la nationalité américaine seulement, toi ? J’croyais que t’étais aussi ici avec un visa pour tes études … » Fit remarquer Elmo, avant d’hausser les épaules en prenant un air innocent. « Pas que je pensais considérer ton offre avec sérieux, mais … » Il rit. Franchement, avant de se marier avec Bellamy, il avait quand même d’autres noms qui lui venaient en tête pour ce petit tour de passe-passe face à l’Immigration.

Elmo rit. Bien sûr que c’était parce qu’il était trop beau. D’ailleurs, s’ils allaient tous les deux faire la tournée des bars italiens, ils allaient faire des ravages ensemble. On aurait presque pu les prendre pour des frères, et si ici tout le monde savait que ce n’était pas le cas, dans les grandes villes d’Italie, ils pourraient très bien jouer le jeu. Bon, Elmo avait beau penser à tout cela, si ses plans fonctionnaient comme prévu, il allait être en couple dans quelques heures ou quelque chose qui s’en rapproche … Aller draguer avec Bellamy, ce ne serait plus trop une option. De toute façon, son meilleur pote aussi semblait avoir d’autres plans, même si les siens foiraient un peu plus jusqu’à maintenant. « Elle c’est parce qu’elle a appris à te connaître au-delà de la beauté et là, elle a vu à quoi elle avait vraiment à faire, et … » Il fit une grimace, dans le genre ça fait peur. Puis, il rit, parce que bien sûr il se moquait de Bellamy. Quand on prenait le temps de le connaitre, il était loin d’être le dragueur macho qu’ils se donnaient ensemble l’air d’être. Bref, la conversation à propos des femmes compliquées de leurs vies s’arrêta pour qu’ils parlent d’autres choses sérieuses, soit la possibilité qu’Elmo puisse rester en Australie à long terme. L’italien haussa les sourcils quand Bellamy proposa qu’il se marie avec Vega, s’arrêtant dans son geste alors qu’il allait porter son verre à ses lèvres. « J’sais pas si t’es sérieux ou si tu blagues en ce moment. » Lâcha Elmo en reposant son verre sans en avoir bu. « Parce qu’en vrai si une connerie du genre est la seule solution, j’vois pas qui d’autre que Vega pourrait peut-être accepter un deal du genre. » Continua-t-il. « J’pourrais pas demander à Bella, ça implique trop, quoi. Comme on a déjà des sentiments, de se marier, c’est … c’est comme un vrai engagement quoi. Alors que Vega et moi, bah, on sait qu’on n’est que des potes mais on se connaît tellement par cœur qu’on relèverait haut la main tous les tests débiles de l’Immigration pour voir si notre mariage est un scam. » Expliqua l’italien. Si Bellamy avait lancé l’idée à la blague, le sérieux d’Elmo allait certainement jeter un froid.