just to build a bridge back to your heart (bella)

Deux semaines. Deux semaines à être en isolement forcé à l’aéroport, à se demander s’il avait pris la bonne décision, à s’inquiéter pour sa famille restée en Italie, à se demander comment se portait Bella. Évidemment, il la suivait sur les réseaux sociaux, et avait bouillonné intérieurement en voyant cette photographie avec un autre mec alors que lui était enfermé par mesure de prévention puisqu’il arrivait d’Italie. Il savait donc qu’elle se portait bien. Un peu trop bien, même. Il aurait pu lui envoyer un message, Elmo. Il avait cependant préféré bien faire les choses, et lui apprendre son retour à Bowen en face à face. Après l’avoir laissée de cette manière à l’aéroport de Naples, après lui avoir brisé le cœur à la suite des dix journées parfaites, Elmo ne pouvait pas lui annoncer qu’il était de retour par texto. Ça ne se faisait pas. Elle méritait bien mieux que ça. La femme dont il était amoureux méritait bien mieux que ça. Il avait donc impatiemment attendu, Elmo, que le délai de quatorze jours passe, pour enfin retrouver sa liberté puisqu’il ne présentait aucun symptôme et avait testé négatif aux tests. Il avait d’abord croisé Bellamy, par pur hasard, alors que son seul objectif avait été de retrouver Bella. Elle était la seule personne dans ses pensées depuis son atterrissage. Par contre, Elmo prit tout le temps nécessaire pour renouer avec son meilleur ami, parce qu’après tout ce qu’il s’était passé entre eux, et la coïncidence qui les remettait tous les deux sur le même chemin aujourd’hui, l’italien ne pouvait remettre ça à plus tard. Ils avaient eu besoin, tous les deux, de s’expliquer et de se pardonner. Dès qu’il quitta Bellamy toutefois, Elmo héla un taxi et indiqua l’adresse de Bella au chauffeur. La nuit était en train de tomber, il espérait qu’elle n’était pas sortie ou avec des copines chez elle. Après avoir payé la course, le jeune homme s’avança jusqu’au bloc d’appartement, traîna sa valise jusqu’au numéro de porte appartenant au logement de la costaricaine, et inspira profondément. Après près de trois mois, Elmo n’avait aucune idée de la réaction qu’aurait Bella. Une gifle ? Un claquement de porte ? Il n’avait que ça en tête, Elmo, alors que lui espérait profondément qu’ils puissent se retrouver pleinement, complètement, comme si jamais il n’avait fait l’erreur de la laisser partir. Il leva son poing, et cogna trois fois contre la porte, la tête baissée, qui ne se releva que lorsque la porte s’ouvrit face à lui.

Ses pieds ne cessaient de changer de position sur le tapis du couloir du bloc d’appartements. On aurait dit une danse improvisée d’un mec trop coincé pour bien bouger sur une piste de danse. Mais non, Elmo avait généralement de bons dance moves. Ça, en ce moment, c’était la nervosité, rien d’autre. Et s’il pensait que son niveau de stress descendrait dès que la porte se serait ouverte face à lui, il comprit bien vite que l’effet contraire survint. En voyant le visage de Bella, son cœur s’emballa et l’angoisse monta en flèche. Pendant un moment il ne vit qu’une tache rouge dans sa vision, son débardeur rouge, avant de reprendre ses esprits, de retrouver le contrôle sur sa personne, et de répondre. « Surprise ! » avec très peu de conviction. Pour l’une des premières fois de sa vie, Elmo était réellement awkward, un malaise ambulant. Et il n’était même pas au bout de ses peines. « Tout est fermé maintenant, ouais. Mais j’suis arrivé depuis semaines, aux aéroports y’avait déjà des mesures d’urgence sanitaire mises en place, on m’a mis en quarantaine. C’était pas encore la folie à ce moment-là alors j’ai pas eu trop de problèmes. Oublie ça, plus tard que ça, j’aurais pas pu bouger de Sorrento. » C’était le cas actuellement. Ses parents étaient coincés chez eux, le pays au complet était paralysé. Sur les réseaux sociaux, on ne voyait que de belles et touchantes vidéos d’italiens qui chantaient sur leurs balcons. Elmo savait que ce n’était pas aussi jovial en permanence. Il ne fallait surtout pas céder à la panique, mais sachant que certains membres de sa famille étaient plus vulnérables que d’autres, il ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter. Là toutefois, l’italien n’avait pas la tête à ce foutu virus. Il avait le cœur qui ratait des battements pour une toute autre raison. Une raison qui se trouvait droit devant lui, et qui fut rapidement rejointe par un homme qu’Elmo ne connaissait pas du tout. Ce n’était même pas le mec de la photo Instagram d’il y a quelques jours. Il y en avait donc plusieurs. Il fronça les sourcils. « Hum … J’aurais dû prévenir avant d’venir. » Il eut un rire nerveux. « C’est pas comme si je n’avais pas eu le temps, hein, en plus. » Dit-il en ouvrant les bras, faisant référence à ces deux semaines complètement isolé du reste du monde. Mais non, Elmo avait voulu faire en grand, il avait voulu garder la surprise pour Bella. Il ne pensait pas que trois mois auraient pu les séparer à ce point-là. Certes, les douze semaines loin d’elle avaient été longs, pénibles, déprimants. Mais il ne l’avait pas oubliée. Il n’avait même pas essayé, d’ailleurs. Cette amie sur la photo, elle n’était que ça, une amie. Ils avaient fait des bêtises ridicules pour passer le temps comme quand ils étaient gamins. Mais à voir la tête que faisait le mec à côté de Bella, Elmo avait comme l’impression que lui, il n’était pas qu’un ami. L’italien recula de deux pas. « On s’parlera plus tard, Bella. J’vous dérangerai pas plus longtemps. » Entre frapper le mec ou fuir, Elmo préférait fuir. C’était lui-même qui méritait la gifle, personne d’autre. Il l’avait cherché.

Elle n'y avait plus cru. Si au départ elle s'était laissé miroiter l'idée qu'Elmo pourrait la surprendre, pourrait changer d'avis, pourrait trouver l'envie de pousser son aventure australienne à plus que ses études, mais plutôt à elle. Il y avait eu plusieurs nuits où elle y avait pensé, où elle s'était réveillée avec le goût amer d'un rêve qui ressemblait trop à la réalité, mais qui avait le malheur d'être fictif, d'être seulement le fruit de ses pensées qui ne cessaient de la tourmenter avec lui. Mais il n'était jamais venu. Trois mois. Trois longs mois sans lui. Elle n'y avait plus cru, elle s'était résolue à devoir se souvenir de lui comme un mirage, de se remémorer son parfum parce qu'il n'était plus là pour laisser son odeur sur ses draps. Jusqu'à cette soirée-là. Jusqu'à ce qu'il débarque, sans avertir, sans s'annoncer, exactement comme elle l'avait fait, quand elle avait décidé de fouler les heures de vol les séparant et d'enfin le retrouver. Surprise avait agrémenté son accueil quand elle ouvrit la porte et qu'elle réalisa alors qu'il était réellement là, que ce n'était ni un mirage ni un hologramme. C'était à ce moment précis qu'ils se seraient embrassés, s'ils avaient été dans un film à l'eau de rose, devant un générique où les lettres du mot fin seraient apparues une à une, dans un fondu lent, sous une musique d'amour. Mais ils n'étaient pas dans un film. Et bien trop surprise, Bella se trouvait paralysée devant lui, à ne penser qu'à la pandémie qui affectait la terre entière plutôt qu'à retrouver ses bras. Elle était abasourdie. Et, aussi, peut-être pensait-elle encore à cette fille, celle qui avait hanté les dernières semaines, celle qui avait un trop étroit lien avec lui et qui avait pu partager bien plus que dix jours à ses côtés. « J'suis soulagée », fit-elle dans un soupir en souriant. « J'espère sincèrement que toute ta famille n'a rien. » Elle aurait pu lui écrire. Lui demander des nouvelles de ses parents, de sa tente Maria avec qui elle avait tant aimé discuté de pâtisseries italiennes, de ses oncles, de ses cousins, de ses amis. Elle aurait pu être plus altruiste, plus aimante, plus attentionnée. Mais elle avait fait fit de silence, égoïstement. Elle s'apprêtait à s'avancer vers lui, elle ne savait pas trop encore pourquoi d'ailleurs, une étreinte, une caresse, un baiser, elle aurait suivi son instant, quand l'ombre d'un étranger se dessina derrière elle, et les yeux d'Elmo virèrent au rouge alors qu'il fronça les sourcils. Bella l'imita, les sourcils froncés, l'écoutant alors qu'il disait qu'il aurait dû prévenir avant de débarquer à l'improviste, comme s'il la dérangeait. Elle secoua la tête, mais Joey, lui, impatient de retrouver sa partenaire de travail, hocha la tête. « Ouais, peut-être. On était au beau milieu d'un truc », lui rappela-t-il, la ramenant à l'ordre. Leur travail devait être rendu dans deux semaines, mais tout le monde savait que Bella Garcia ne remettait jamais ses travaux à la dernière minute. Il était insistant, parce qu'il était angoissé, sans doute, parce qu'il n'avait pas prévu prendre des cours de reprise dans le cas où ils échouaient leur travail. Elmo, malaisé, chercha à fuir, prenait déjà la poudre d'escampette, la première occasion de se pousser plutôt que d'affronter la vérité. « Non! », s'opposa Bella. « Non, non, non! », répéta-t-elle en s'avançant vers lui pour le convaincre de ne pas partir. « T'as pas fait tout ce trajet pour partir aussi rapidement », tenta-t-elle de le raisonner. Son coeur voulait exploser, elle ne voulait pas le voir la quitter, pas encore, pas avant d'avoir parlé. « Bella... », implora presque Joey, tentant lui aussi de la raisonner. Mais la raison, elle l'avait perdu. Surtout lorsqu'il était question d'Elmo. Et, déjà, elle n'écoutait plus Joey. Elle ne voyait qu'Elmo.

Lui aussi, il espérait que toute sa famille n’avait rien. C’était un peu de se bercer d’illusions, de croire que dans une telle situation alarmante, aucun de ses proches ne serait touché. Mais, s’ils continuaient tous à respecter leur confinement comme ils le promettaient à Elmo, peut-être y avait-il de l’espoir. Ils avaient la chance d’avoir assez de moyens pour cesser de se rendre au travail tout en permettant également à leurs employés de soit continuer à bosser dans des conditions sécuritaires, avec des effectifs en moins, soit de rester chez eux pour éviter tout contact. Ce n’était pas donné à tout le monde, de pouvoir vivre sans revenu pendant une durée indéterminée. « Pour le moment, ils vont bien. » Il esquissa un sourire. Son pour le moment signifiait bien sûr que ce n’était pas gagné d’avance. Mais Bella le savait, ça. Le monde entier le savait. Ce n’était plus que l’Asie ou l’Europe, c’était partout. En deux semaines de quarantaine, il avait eu le temps d’en lire, des articles, Elmo. Alors que Bella sembla initier un mouvement vers l’avant, vers lui, un homme apparut derrière elle, freinant sec son élan. Et le bonheur d’Elmo, du même coup. À ses paroles, l’italien haussa les sourcils, dévisageant le garçon. « D’un truc, hein ? » Demanda-t-il en posant son regard dans celui de Bella, visiblement déçu et blessé. Mais avait-il le droit de se sentir ainsi ? Après tout, c’est lui qui l’avait laissée filer. Pour cette raison, Elmo décida de partir plutôt que de lui reprocher quoi que ce soit. L’envie était là, mais il serra les poing et tourna sa langue sept fois, préférant les laisser continuer à faire leur truc sans avoir à se soucier de lui. Il commença à s’éloigner dans le couloir mais la costaricaine refusa cette fuite. Il ouvrit les bras en signe d’incompréhension, se tournant à nouveau vers elle. « J’ai pas non plus fait tout ce trajet pour te voir avec un autre mec ! » L’autre se montrait impatient, la suppliant de son prénom. Il voulait sans doute qu’elle lui revienne, qu’ils referment la porte et reprennent les choses où ils en étaient. Elmo ne voulait même pas s’imaginer la scène et pourtant, elle était bien claire dans sa tête. « Tu t’attends vraiment à ce que je reste, là ? Alors que t’es en train de fourrer quelqu’un ? Non mais ça va pas … » Il secoua la tête et reprit sa fuite.

Pour le moment. Parce que dans la crise actuelle, il n'y avait rien de sûr. Pas même que demain soit sécuritaire pour eux, en Australie. Ils étaient tous sur le qui-vive, en attente de ce que le monde leur réservait, de cette fin atroce qui en venait à choisir qui avait le droit de vivre ou non. Pour le moment, c'était le mieux qu'il pouvait dire, Elmo. Il esquissa un faible sourire auquel Bella eut envie de répondre par une étreinte. Douce, réconfortante, un soutien à ce qu'il devait vivre à l'intérieur de lui, le débat de se demander sans cesse s'il avait fait le bon choix en prenant la chance de prendre l'avion, sans savoir quand serait la prochaine fois qu'il pourrait serrer ses parents dans ses bras. Pour combien de temps était-il ici, Elmo ? Si ce n'était pas indéfiniment, son retour en Europe pourrait causer problème, pourrait être reporté. Qui sait quand les frontières seraient fermées, quand on leur demanderait de cesser de voyager, quand les touristes seraient pris ici, avec les kangourous et les koalas, plutôt que les pizzas et le bon vin. Elle s'avança vers lui, voulant initier leurs retrouvailles, bien qu'encore sous le choc de la surprise, quand Joey vint gâcher leur moment, s'immisçant dans leur intimité sans y avoir été invité. Et tout ce qu'ils disaient, à partir de maintenant, lui et Bella, semblaient si mal interpréter. Hors de son contexte, ça ne faisait aucun sens. Elmo virait au noir colère, perdant son sourire, perdant même l'envie de voir Bella. Elle avait l'impression qu'elle le dégoutait. Et, pourtant, elle n'était pas au beau milieu de ce qu'il croyait. Et elle voulait le rassurer, lui dire qu'il se faisait des films, qu'il imaginait le pire. Il serrait les poings, l'italien, mais ne disait rien. Et ça faisait bien plus peur que s'il déversait sa colère sur elle. Elle aurait préféré l'entendre hurler de rage, communiquer sa déception, plutôt que de le voir tourner les talons. Bella chercha à le rattraper, Joey encore dans le cadre de la porte d'entrée, soufflant son nom dans l'espoir de la voir revenir. Mais elle était déjà partie, sa course entamée, impossible de l'arrêter sans qu'elle ait rejoint l'ex-étudiant. Et quand enfin elle arriva à son niveau, quand enfin elle croisa son regard, regard qui lui fit mal tant il contenait de déception, elle lui demanda de rester. Mais elle le répugnait. Et il avait l'orgueil blessé. « Mais de quoi tu parles ! », haussa-t-elle la voix, alors qu'il fabulait sur les raisons qui justifiaient la présence d'un autre garçon dans son appartement. Ok, dans le cas inverse, Bella aurait réagit exactement de la même façon, rappelons sa réaction démesurée à la découverte d'une photographie qui mettait en scène son amant et une fille qu'elle ne connaissait pas, la langue bien collée sur la joue de l'homme. Oui, elle avait exagéré. Tout comme lui. Elmo ne voulait rien entendre, il tourna à nouveau les talons, Bella impuissante au beau milieu des couloirs de son bloc appartement, les voisins qui pouvaient tout entendre. « On baisait pas, j'suis encore habillée! », hurla-t-elle, ce qui n'aidait pas à sa cause. Elle rit nerveusement. « Merde, Elmo, j'terminais une étude de cas de droit pénal avec Joey.. » Elle soupira, elle aussi blessée. Évidemment, Bella avait la réputation de coucher avec tous les mecs de son entourage. Évidemment, il ne pouvait pas s'agir d'un coéquipier pour un projet scolaire ou d'un ami, tout simplement. Parce que Bella, tout le monde la connaissait comme la garce incapable de garder son vagin dans sa petite culotte. Évidemment... Derrière eux, la silhouette de Joey se dessina à nouveau, lui qui avait tout entendu de leur dispute, son sac à dos sur l'épaule. Visiblement, il avait choisi de se retirer. C'était un choix judicieux, vu la situation. À la hauteur d'Elmo, il mit une main sur l'épaule de l'Italien. « Yo, t'en fais pas dude, j'te la laisse. C'est vraiment pas mon genre de fille », lança-t-il, comme si ça pouvait rassurer Elmo, comme si ça faisait un velours à Bella. « J'fréquente pas les filles qui ont ce genre de réputation.. », lâcha l'étudiant, en référence à la crise d'Elmo et à la supposition qu'elle baisait avec n'importe quel mec.

Ce virus et les fermetures de frontière, c’était en même temps un message pour Elmo – même s’il ne se prenait pas le nombril du monde au point de penser que le destin n’aurait pas fait un coup pareil à la Terre entière juste pour guider les traces d’un pauvre mec paumé. Mais il se disait que s’il ne pouvait pas reprendre un vol vers l’Italie avant les prochains mois, c’était parce qu’il avait encore des choses à faire à Bowen, que cette ville n’en avait pas fini avec lui malgré ce qu’il avait tenté de se convaincre lui-même au mois de janvier. Et, surtout, il n’en avait pas fini avec Bella. Leurs sentiments étaient vrais, leurs sentiments ne s’éteignaient pas, alors il fallait qu’ils trouvent une solution durable. Une solution qui ne les rendrait pas complètement fous à force de s’aimer en secret, de se cacher de tous les autres. En tout cas, c’était le raisonnement et le plan qu’avait Elmo en se pointant chez la costaricaine mais, lorsqu’il vit un autre homme apparaître derrière la jeune femme, il comprit qu’il avait fait erreur. Ne voulant pas en voir ou en savoir davantage, Elmo tourna les talons et accéléra le pas dans le couloir. Bella laissa le mec en plan, la porte de son logement toujours ouverte, pour partir aux trousses de l’italien, qui s’emporta contre elle. « De quoi je parle ? Tu me prends pour un idiot ou quoi !? » Dit-il en désignant de sa main ouverte, le bras tendu, le type qui était toujours planté là comme un con, attendant que sa partenaire revienne. Il aurait pu s’en aller, aussi, bordel. Pourquoi tenait-il à assister à ça, il n’avait donc rien de mieux à faire ? Il pouvait aller se finir tout seul, for fuck’s sake. Quand Bella se défendit en disant qu’elle était encore habillée, Elmo rit, arrogant. « C’est vrai que t’aurais pas eu le temps de te rhabiller avant de venir répondre à la porte. » Tout le monde va ouvrir flambant nu, c’est bien connu. Il roula les yeux, avant de reporter son regard sur la costaricaine lorsqu’elle ajouta qu’elle terminait une étude de cas de droit pénal avec Joey. « Vraiment ? » Demanda-t-il, cette fois sans attaque, juste pour avoir la vérité, parce qu’il prenait peu à peu conscience qu’il avait peut-être effectivement sauté aux conclusions. Et le tout aurait pu se terminer correctement si Joey n’avait pas choisi ce moment pour les rejoindre et insulter Bella. Elmo fronça les sourcils. « Qu’est-ce que t’as dit ? » Il attrapa le mec par le collet et le plaqua violemment contre le mur du couloir, criant à nouveau : « What the fuck did you just say about her ? » Qu’il ose lui manquer de respect juste une autre fois, pour voir.

Ces retrouvailles, Bella les avait tellement espérées. De retour à Bowen, le coeur en mille morceaux, le soir quand elle se couchait et que sa tête ne cessait de tourner, seule, personne pour l'empêcher de penser à lui, elle se les était imaginées. Elles n'avaient rien à voir avec celles d'aujourd'hui, elles étaient bien plus douces, bien plus joyeuses. C'était la naïveté qui l'avait laissé croire que quelque chose de beau pourrait leur arriver. Puis les semaines avaient passées, un mois s'était écoulé, et elle n'avait eu que de vastes nouvelles de lui. Ses mots résonnaient dans la tête de la brune, ne pas laisser l'attendre à Bowen, parce qu'il ne reviendrait pas, parce que Bowen ce n'était pas sa maison. Et elle avait fini par perdre espoir, arrêter d'imaginer des retrouvailles qui ne faisaient qu'agrandir le creux qu'Elmo avait créé dans la poitrine de Bella quand il lui avait arraché son coeur. Des belles paroles, des mots qui auraient dû lui faire du bien avaient tenté de calmer la douleur des adieux, mais ça n'avait pas fait. Parce que c'était plutôt égoïste comme réaction. Elle était extraordinaire Bella, elle avait fait vingt heures de vol pour le retrouver, parce que séparés elle n'arrivait plus à respirer normalement. Elle était tout ce qu'il recherchait, mais il l'avait laissé partir avec ces aveux, avec pour seule demande de ne pas l'attendre à Bowen. Et si ça avait été bien difficile à faire avant ce jour, Bella avait fini par respecter la demande d'Elmo, de ne pas l'attendre à Bowen, de continuer sa vie, de poursuivre son chemin. Et pour ça, il ne pouvait pas lui en vouloir. Seulement, ce qu'il insinuait, là, maintenant, qu'elle couchait avec Joey comme si elle ne faisait que ça en présence des mecs, c'était blessant. Non seulement parce qu'il lui reprochait de ne pas l'avoir attendu à Bowen, alors qu'il le lui avait demandé, mais aussi parce qu'il laissait entendre que toutes les rumeurs à son sujet étaient vraies, que Bella se tapait tout le monde et n'importe qui. Venant des autres, c'était blessant. Venant d'Elmo, c'était destructeur. « Oh, joue pas au con avec moi Mo, tu sais très bien ce que je veux dire », répliqua la brune quand Elmo, sur un ton beaucoup trop sarcastique, dénota qu'elle aurait bien pu se rhabiller avant d'ouvrir. Ouais, il avait raison. Seulement, quand on se rhabillait en vitesse, ça paraissait, non ? Mais l'italien sembla s'adoucir quand Bella lui expliqua les réelles raisons qui justifiaient la présence d'un garçon dans son appartement. « Vraiment. » Elle ne jurait pas ne pas avoir couché pour oublier la douleur, ça serait de lui mentir. Elle l'avait fait, une fois, parce que vivre avec lui constamment dans sa tête était insupportable, vivre avec des doutes, vivre avec des questions, vivre avec la jalousie de savoir qu'une autre pouvait le toucher, sentir sa peau contre elle, observer son sourire alors qu'elle, elle n'avait que les photos et les messages de formalité comme lien de contact, c'était en train de la rendre folle. Donc, non, elle ne jurait pas. Mais aux accusations d'aujourd'hui, elle tenait à lui faire voir la réalité en face. Joey avait tout entendu, il avait fini par se joindre à eux, rassurant l'ex-étudiant sur ses intérêts envers Bella. Au fond, s'il l'avait choisi comme partenaire de travail, c'était pour sa réputation à exceller à l'université, pas parce qu'elle était de son goût. Bella fronça les sourcils à la remarque de l'homme alors qu'Elmo, lui, s'énervait pour deux et l'attrapa par le collet. « Elmo, laisse tomber ! », demanda Bella. Mais il répliquait à nouveau. « Hey, calme-toi mec », tenta Joey de le raisonner. « J'te la laisse, j'tai dit. J'fréquente pas les putes dans son genre », grogna Joey, voyant bien que d'amadouer son agresseur ne servait à rien. « Merde, Elmo, arrête, fait pas le con ! », lui demanda Bella alors que Joey lui souriait, tout aussi arrogant que l'italien avait pu l'être à l'égard de son amante. « Ouais, fait pas le con, tu risquerais de le regretter. Lâche-moi, ou je t'en colle une », menaça-t-il. Et comme si ça ne suffisait pas, Joey lui envoya un droit au visage.

Lui aussi avait eu le temps de s’imaginer tous les scénarios possibles et il n’avait malheureusement pas envisagé, Elmo, que Bella ait pu être avec un autre homme au moment de se retrouver. Dans aucune des possibilités envisagées, ça ne se déroulait comme ça. Oui, il s’était imaginé que la costaricaine lui offrait une gifle monumentale et surtout bien méritée. Mais elle demeurait toujours bien physique, cette gifle. Jamais une comme celle-là, confrontant Elmo à l’idée que Bella ait pu passer aussi rapidement à autre chose. Cette déception-là le mena à s’enfuir sans chercher à comprendre, sans chercher à s’humilier plus longtemps que ça devant Bella et Joey. Certes, c’était ce qu’il lui avait demandé à l’aéroport de Naples alors qu’il lui annonçait leur séparation – s’il y avait quoi que ce soit à séparer dans leur secret. Elmo lui avait dit de ne pas l’attendre à Bowen puisqu’il ne reviendrait pas. Il ne s’imaginait toutefois pas qu’en plus de ne pas l’attendre, elle le remplacerait, aussi. Aussi vite. « Non, Bella. Je sais pas très bien ce que tu veux dire. J’sais plus quoi que ce soit entre nous. » Répliqua-t-il en secouant la tête, se tournant vers elle. S’ils avaient été aussi doués pour mentir sur leur propre relation, qu’est-ce qui lui faisait croire que Bella ne pourrait pas mentir à propos des autres ? C’était facile, l’excuse des études, des révisions. Trop facile, même. Pourtant, Elmo voulut y croire, du plus fort qu’il le pouvait. Et quand il demanda si c’était vrai, et que Bella la confirmait, il sentit toute la sincérité qui émanait d’elle. Il se calma, juste un peu, juste un court moment avant que Joey ne se ramène pour mettre son grain de sel qui enclencha une chaîne de dominos dont les dernières pièces à tomber se fracassaient de plus en plus violemment. Elmo l’avait empoigné par le collet et rentré dans le mur. Il n’écoutait pas Bella lui demander d’arrêter, même s’il l’entendait très bien. « Hey, calme-toi mec. J'te la laisse, j't’ai dit. J'fréquente pas les putes dans son genre. » Le sourire arrogant de ce connard, son regard rivé sur le sien, défiant, suffit à mettre Elmo hors de lui. « Tu vas fermer ta gueule, connard. Tu la traites pas de pute. » Il resserra son emprise. « Ouais, fait pas le con, tu risquerais de le regretter. Lâche-moi, ou je t'en colle une. » Et comme Elmo ne sembla pas enclin à le relâcher, Joey leva effectivement le poing pour qu’il atterrisse contre le côté de la tête d’Elmo – le positionnement de ce dernier ne permettant pas à l’universitaire de se dégager pour le frapper autre part. Le coup avait de la force mais pas assez pour déstabiliser l’italien, qui relâcha l’une de ses mains du collet afin de refermer ses doigts et d’asséner à son tour un coup contre la mâchoire de l’homme. Elmo le relâcha complètement et le poussa loin de lui, loin de Bella. « Get the fuck out. Tu la mérites pas de toute façon, enfoiré. » Il se tint droit, les poings encore fermés, attendant qu’il foute le camp.

La dernière phrase d'Elmo resta en suspend. Il ne savait plus rien de ce qu'il y avait entre eux. Et Bella sentie un nuage de tristesse se poser au-dessus de sa tête, c'était où ils en étaient, elle et lui, à ne plus savoir ce qu'il y avait entre eux alors que trois mois avant, on pouvait clairement lire dans leurs regards qu'ils étaient fous l'un de l'autre. Elle n'était pas en train de coucher avec un autre mec alors que Elmo venait la rejoindre. Mais il lui avait dit de ne pas l'attendre, qu'il ne revenait plus à Bowen, alors si tel en avait été le cas, aurait-elle vraiment été à blâmer ? On pouvait comprendre la frustration de l'avoir perdu, si tel en était le cas. Mais, au fond, avait-il raison de faire des pieds et des mains ? S'il n'était jamais revenu, Bella aurait dû l'attendre indéfiniment ? S'empêcher d'avancer au cas où il déciderait à revenir dans sa vie ? Il l'avait planté à l'aéroport, presque comme on plantait quelqu'un devant l'autel. Et quand elle lui expliqua qu'il se faisait des idées, il ne la crut même pas. Il avait pourtant raison, elle avait cherché à l'oublier dans les bras d'un autre, parce que la douleur était trop forte pour la supporter encore. Et même après cette aventure, elle n'avait su l'oublier. Mais ce n'était pas ce soir, ce n'était pas Joey. Et Bella finirait par le lui dire, s'il pouvait se calmer. Mais Elmo supposait qu'elle ne pouvait pas que réviser, qu'évidemment elle couchait avec lui. Au fond, n'était-ce pas la réputation qu'elle avait ? C'est celle que Joey avait d'elle, et qu'il ne cachait pas. Qu'il criait même haut et fort, dans les couloirs de l'immeuble de la Costaricaine, augmentant la tension entre les deux amants. Elmo avait d'ailleurs accroché Joey par le collet, menacé qu'il se taise enfin juste avant que la bagarre éclate entre eux et que le premier coup soit lancé directement au visage d'Elmo. Et sans attendre, Elmo répliqua d'un coup qui résonna dans les couloirs vides. « Elmo, putain, lâche-le ! » Mais il l'avait déjà relâché, repoussé assez loin pour qu'il comprenne que sa présence ici n'était pas désirée. Et ce, depuis le tout début. « T'es timbré ! », l'asséna-t-il une dernière fois avant de prendre fuite. Bella s'approcha de Elmo, les sourcils froncés. « T'es content là ? », lui demanda-t-elle en secoua la tête. « J'tavais dit que je couchais pas avec lui.... » Un long soupire s'extirpa de ses poumons. « Viens, entre... Je vais te donner un sac de petit pois pour éviter que ça enfle... » Et, surtout, ils avaient des choses à se dire. Elle lui sourit. « T'as des choses à mon raconter, Santavenere! »

« T'es timbré ! », venait de lui lancer Joey. Elmo s’en fichait bien de ce que cet homme pouvait bien penser de lui. S’il était le genre de personne à traiter une femme de pute aussi ouvertement, alors son opinion ne valait absolument rien. À cela, donc, l’italien répliqua : « Well at least I’m not a fucking asshole ! » Mais au fond, Elmo pouvait-il réellement prétendre ne pas être un enfoiré de même catégorie que Joey ? Il ne traiterait peut-être jamais Bella de garce mais il l’avait quand même lâchée comme une vieille chaussette, la plantant là à l’aéroport après les dix journées les plus belles de leurs vies. Et il revenait à Bowen comme si de rien était, pensant pouvoir la retrouver chez elle et continuer leur histoire comme si rien ne s’était brisé. Ce n’est pas comme ça qu’on traite la femme qu’on aime, non plus. Une fois que Joey se soit poussé et que la porte de la cage d’escalier fut refermée, Elmo se tourna vers Bella qui lui demandait s’il était content, maintenant. « Content ? Non, je suis pas content, Bella. » Il secoua la tête à son tour. Elle lui répéta qu’elle ne couchait pas avec lui. « Que t’aies couché avec ou pas c’est pas pour ça que j’lui ai refait le portrait et tu le sais très bien. I can’t believe you hang out with guys who treat you like that. » Et lui, comment la traitait-elle ? Pas forcément mieux. Il ferma un moment les yeux, pour se calmer, pour renouer un peu avec la réalité de laquelle il s’était déconnecté pendant ce moment de colère. Bella soupira, l’invitant à rentrer chez elle pour qu’elle puisse poser un sac de pois congelé sur son poing. Il baissa les yeux vers sa main, ses jointures étaient rouges. Il hocha la tête et releva le regard sur une Bella souriante. « Comment tu peux retrouver le sourire, juste comme ça ? » Ce n’était pas un reproche, c’était une constatation, de la force de Bella. Mais il se doutait bien que si elle portait cet air fier au-dessus, c’est qu’en-dessous elle était blessée des paroles qui venaient d’être lâchées à son égard. L’italien la suivit à l’intérieur de son appartement, et il referma la porte de sa main épargnée. L’autre était tenue haut dans les airs, à la hauteur de sa poitrine, le poing à demi fermé. Il rejoignit Bella à la cuisine. « J’imaginais mon retour un peu différemment de ça, j’t’avoue … » Il soupira et s’assit à une chaise de la table à manger, orienté vers Bella qui était au réfrigérateur. « Je suis désolé, Bella. » D’avoir fait une scène mais surtout de l’avoir quittée. Désolé pour tout.

Quand la rumeur à son sujet était sortie, Elmo n'avait pas pris la défense de Bella. Il l'avait laissé se faire transcender sur la place publique, alors que les autres garçons impliqués dans l'histoire avaient pris la peine de voler à sa rescousse. C'était ce soir qu'il le faisait, plutôt, alors que les commentaires n'étaient pas virtuels mais plutôt bien réels cette fois. Et ça lui faisait du bien, à Bella, qu'Elmo prenne enfin sa défense. Mais, est-ce que ça effaçait tout ? Est-ce que son acte de chevalerie effaçait les mois de douleurs qu'elle avait subis ? Est-ce que ça effaçait l'accueil qu'il lui avait servi ? Elle aurait bien voulu dire oui, bien voulut admettre que c'était une belle preuve d'amour qu'il lui avait fait, mais tout le reste était encore là. Bien trop vivant dans sa tête pour l'oublier. Elle regardait Elmo les sourcils froncés, lui demandant s'il était content de la scène qu'il avait faite, scène que tous ses voisins avaient dû entendre de leur logement. Et elle lui rappela qu'elle lui avait dit la vérité, qu'elle n’avait pas couché avec lui. Pourtant, Elmo ne l'avait pas frappée pour cette raison. Et elle le savait bien. Mais ça avait été la raison première pour laquelle il avait été en colère, l'Italien, et pourquoi ils s'étaient disputés tous les deux. Pour le reste, le comportement de l'autre, elle haussa les épaules. Les mecs croyaient avoir tous les droits. Et, avec le temps, elle avait appris à s'y faire. Certains la traitaient de garce, d'autres l'abandonnaient à l'aéroport. Quand il était question de garçons, elle n'avait pas de bol, Garcia. Et bien que toute cette histoire lui faisait encore du mal, laisser filer Elmo lui en faisait encore plus. Elle avait besoin de savoir, de régler les choses quitte à le foutre à la porte elle-même par la suite, mais elle voulait entendre ce qu'il avait à dire pour sa défense. « Vaut mieux sourire que pleurer... », souffla-t-elle alors qu'il questionnait son comportement. Mais derrière ce sourire, il avait effectivement bien d'autres sentiments. La rage, la peur, la colère, la tristesse, toutes ces choses qu'elle tentait de réprimer, parce qu'elle en avait marre de pleurer toutes les nuits en attendant qu'il ne revienne, même s'il lui avait demandé de ne pas l'attendre. Elle mena le pas vers l'appartement à la porte qui était grande ouverte, puis vers la cuisine où elle s'affaira dans le congélateur. Au milieu des bucks de bière au frais et des repas surgelés, elle trouva le sac de petit pois qu'elle lui avait promis. Elmo, lui s'était installé à la table, lui signifiant qu'il s'était imaginé une tout autre entrée que celle qu'il lui avait livrée. « Moi aussi, je dois dire », fit-elle en fermant la porte du congélateur, mais y restant adossé quelques instants. « J'croyais que la prochaine fois qu'on se verrait, toi et moi, ça ferait des étincelles... Pas une bombe. » Mais entre eux, rien n'avait été simple. Et ce, depuis toujours. Elmo lui demanda pardon, Bella secoua la tête comme si ce n'était pas de sa faute, comme s'il n'avait pas à le faire. « J'aurais fait pire si je t'avais vu avec une autre fille... », confia la brune en s'avançant près de lui, le fameux sac de petits pois congelés dans les mains. « Tu me corriges si je fais n'importe quoi, t'as quand même plus d'expérience que moi dans l'art de soigner l'autre. » Elle posa le sac contre la main rouge de Elmo avant de regarder son visage. « Au moins ta tête n'a rien... », fit-elle en examinant son visage avant de reposer ses yeux dans les siens. « T'es pas venu jusqu'ici que pour moi, pas vrai ? Qu'est-ce qui t'amène à Bowen ? » Et au-delà de tout, elle cherchait des explications.

Quand la rumeur au sujet de Bella était sortie, Elmo en était encore au stade embryonnaire de leur relation, dans sa tête comme dans son cœur. Il savait que cette fille-là était très différente de toutes les autres, mais il ne prenait pas pleinement conscience de tout ce qu’elle allait représenter pour lui. Pas assez, du moins, pour agir contre ceux qui se moquaient d’elle, lui qui ne voulait pas avoir l’air de trop s’en faire pour elle. Lui qui ne voulait pas que leur cruel secret soit révélé au grand jour, lui qui ne voulait pas perdre Milo, lui qui ne voulait pas s’avouer qu’il tombait amoureux. Aujourd’hui, face à Joey, Elmo n’en avait rien eu à foutre de leur relation secrète ou de sa propre réputation. Que Joey aille crier à qui voulait bien l’entendre que Santavenere avait défendu Bella Garcia avec ses poings, il n’en avait rien à foutre. Ils comprendraient tous enfin pourquoi ces deux-là chuchotaient si souvent dans leur coin, pourquoi ils s’échangeaient des regards à l’autre bout des pièces et pourquoi ils avaient liké à peu près toutes les photographies de l’un et de l’autre sur les réseaux sociaux dans la dernière année. Ils comprendraient qu’Elmo était amoureux de Bella, et la rumeur bien fondée ferait rapidement le tour de Bowen et honnêtement, he couldn’t care less. L’italien suivit donc la costaricaine jusqu’à l’intérieur de son appartement, et alla s’installa à la table à manger, bien décidé à ne pas laisser ces retrouvailles-là sombrer dans un mauvais souvenir. C’était un faux départ, c’est tout. C’est pourquoi Elmo mentionna qu’il avait imaginé la scène différemment. Bella aussi. Elle avait donc souvent songé à son retour, elle aussi. « J’crois que j’avais tellement mon idée en tête que de voir un mec ici, j’ai juste … pété les plombs. » Expliqua Elmo comme si cela pouvait justifier sa réaction. Bella comprenait, elle ajouta même qu’elle aurait fait la même chose à sa place. Il esquissa un sourire. « Like those drunk texts you sent me ? » Demanda-t-il, amusé. « Tu sais, toi non plus tu semblais pas me croire. Qu’elle était qu’une amie. Et pourtant c’est le cas. Il ne s’est rien passé avec elle. » C’était un bisou pour la photo, pour la forme, entre deux amis d’enfance qui s’éclataient un samedi soir en Italie. Rien de plus. Bella quitta la cuisine pour le rejoindre, le sac de pois congelés entre les mains, et bientôt sur celle d’Elmo. « Tu te débrouilles plutôt bien. » Il sourit. À sa question plus que légitime, Elmo prit une grande inspiration et secoua brièvement la tête, cherchant surtout quoi dire. Il se repositionna plus convenablement sur la chaise de bois. « Je me suis trompé, en Italie. Quand j’ai dit que j’étais de retour à la maison et que je pensais y rester. Ma maison ce n’est plus là-bas. J’en ai eu l’illusion parce que c’était confortable. Mais y’avait quelque chose qui manquait … » Son poing fermé se souleva, le sac de pois dans un équilibre approximatif pendant le mouvement, et il vint poser sa main froide sur celle de Bella. « Et dans ce sentiment de vide, y’avait une grosse partie qui revenait à mon manque de toi … » Continua-t-il, son cœur battant la chamade. « Je suis revenu parce que je suis amoureux de toi, Bella. Et j’avais besoin que tu le saches. » Il plongea son regard dans le sien, le temps en suspens.

Ça chamboulerait tout ce qu'ils s'étaient dit, tout ce qu'ils s'étaient promis, cette histoire de bagarre de coq. Eux qui en avaient parlé brièvement, lors du passage de la brune à Sorrento, eux qui avaient décrété que leur retour à Bowen, ensemble ou pas, ne devrait pas trahir le secret qu'ils avaient convenu de garder entre eux, le pacte qu'ils s'étaient fait. C'était les mots d'Elmo, c'était sa demande, qu'ils soient encore discrets à ce sujet. Sauf que maintenant, après avoir frappé ce mec, après avoir pris la défense de Bella, le secret ne pourrait plus être gardé. Et les gens commenceraient à résoudre les équations, associer les évènements, se douter de leurs escapades et des raisons qui les entouraient, quand on les trouvait tous les deux en retrait dans une pièce. Il n'y avait pas que de l'amitié, entre eux. Il y avait bien plus que ça. Et ce, bien avant qu'il le lui dise à l'aéroport, ou du moins qu'il le sous-entende. Parce qu'on ne disait pas à une fille qu'elle était merveilleuse, qu'elle était tout ce qu'on recherchait dans la vie, sans avoir des sentiments pour elle bien plus profonds que de l'amitié. Mais tout ça, ça allait contre leur entente. Et Bella ne savait pas encore très bien si c'était ce qu'Elmo voulait, que la nouvelle se répande aussi rapidement. À Bowen, les choses allaient vite. Dans la cuisine, il lui confia avoir imaginé bien des scénarios entourant leurs retrouvailles, ce que Bella confirma elle aussi. Et quand il pointa les messages qu'elle lui avait envoyés, les yeux de la brune se rivèrent contre le sol. « Genre... », dit-elle alors qu'il lui retournait les mêmes mises en garde qu'elle lui avait faites, lui aussi lui avait pourtant dit qu'il n'y avait rien derrière ce baiser inoffensif. « J'étais saoule », se défendit-elle, « et... et je t'ai écrit le lendemain pour te demander pardon. » Elle s'était bien rendue compte que tout ça était exagéré. « Puis, même s'il y avait eu quelque chose avec elle... ça n'aurait pas été de mes affaires. On était pas ensemble, t'avais bien le droit de faire ce que tu voulais avec qui tu veux... » Ça ne veut pas dire qu'elle n'aurait pas souffert, Bella, de le savoir avec une autre. Mais c'était tout de même la vérité, ils ne s'étaient rien promis. Bien au contraire, ils s'étaient dit de s'oublier. Et, d'un autre côté, elle essayait peut-être aussi d'excuser le geste qu'elle, elle avait fait, quand elle avait décidé de coucher avec Viktor. Elle le rejoignit rapidement pour faire désenfler sa main rougie, posant le sac sur la blessure sans savoir si il avait réellement besoin de froid. « J'ai pas l'habitude, d'habitude c'est toi qui me soignes », lança-t-elle en référence aux fois où il avait joué aux infirmiers avec elle. Puis, elle lui demanda ce qu'il était venu faire à Bowen, pourquoi il avait choisi de lui rendre visite. Elmo reprenait position sur sa chaise, elle l'imita en prenant une assise devant lui. Et les premiers mots la scindèrent. Et sa main froide contre celle de Bella lui coupa le souffle. Son coeur, lui, accéléra quand elle l'entendit prononcer les mots manque et toi dans la même phrase. Vraisemblablement, il n'en avait rien à foutre que Joey balance la rumeur qu'Elmo ait défendu Bella, parce qu'il l'aimait. Il l'aimait et il le lui disait ce soir. « Attends, attends je comprends pas », fit-elle plutôt que de répondre à la déclaration de l'Italien. « T'es revenu pour moi ? T'es revenu parce que tu m'aimais ? », lâcha-t-elle dans un murmure, presque comme s'ils devaient encore être discrets. « Elmo, si tu savais comment... combien j'ai attendu le moment où on se le dise... » Elle sourit, le regardant dans les yeux, le coeur qui allait lui sortir de la poitrine. Et bien qu'il le savait déjà, en lui caressant la main, elle ajouta : « Je t'aime aussi », comme une idylle, comme le paradis. Et ils auraient dû s'embrasser, mais elle s'empressa d'ajouter : « mais... » Mais... Et elle revoyait son départ à l'aéroport en boucle, le mais qu'il avait utilisé. « mais ensuite quoi ? tu restes à bowen ? Tu vas repartir ? J'sais pas si je pourrais endurer encore un départ, Elmo... »

Elmo n’avait pas à ce point-là calculé, il s’était peut-être imaginé la scène de leurs retrouvailles pendant tout son vol et tout sa quarantaine, mais ça c’était arrêté là. L’italien ne pensait jamais vraiment aux conséquences de ses actes, il ne commencerait pas aujourd’hui. Bien sûr que tout déboulerait rapidement par la suite, bien sûr qu’à Bowen tout se savait vite, bien trop vite. Peut-être qu’Elmo et Bella n’étaient pas prêts à ça, ou alors peut-être avaient-ils justement eu tout le temps du monde pour l’être. La seule personne qui lui revenait en tête par rapport à tout ça, évidemment, c’était encore et toujours Milo. Des autres, la plupart était au courant au fond des véritables sentiments de Santavenere envers Garcia. Il n’avait plus cherché à le cacher auprès de Bellamy ou Vega. Mais auprès de Milo cependant, Elmo avait toujours promis de faire passer leur amitié avant et ça, il n’avait plus vraiment l’impression de l’avoir fait. C’est pourquoi il devait tout avouer à Milo, une bonne fois pour toute, cette fois pas pour demander la permission à travers sa réaction, mais pour lui annoncer qu’il en était ainsi. Que son ex et un de ses meilleurs potes s’aimaient et qu’ils ne feraient plus semblant du contraire. Pour le moment toutefois, ce n’était pas avec le guitariste qu’Elmo se trouvait, mais bien avec Bella. Et elle avait droit à toute son attention. Il esquissa un sourire amusé alors que la costaricaine se défendait d’avoir été saoule, le soir où elle lui avait envoyé un texto à propos de sa photo Instagram. Et elle s’était excusée le lendemain. « Je sais. Ce n’était pas grave. » Elmo haussa les épaules à la suite de sa remarque. « Peut-être … Mais j’t’avais toujours en tête, alors j’avais pas envie d’être avec qui que ce soit d’autre. Je sais que j’avais le droitou whatever mais j’veux que tu saches que c’est pas arrivé, avec personne. » Il était loin de se douter, Elmo, que ça avait été le contraire pour Bella, et avec un homme qu’il ne pouvait pas sentir en plus. Il en avait tellement après sa propre réputation que c’était lui qui s’expliquait sur les actes qu’il n’avait pas posés, sans penser que la costaricaine avait elle aussi finalement pu vivre ses histoires après eux … Comme quoi, l’altercation avec Joey avait balayé cette peur, quand Bella l’avait regardé droit dans les yeux et lui a dit qu’elle n’avait pas couché avec. Mais Elmo aurait dû se rappeler qu’il n’y avait pas que Joey. Bref, la brunette revint vers lui avec le sac de pois congelés et elle le posa sur sa main, portant une attention particulière au positionnement. C’est vrai que d’habitude, les rôles étaient inversés. Il se contenta de sourire, parce que la suite des choses lui venait déjà en tête, et son cœur avait du mal à se contenir. Il se replaça sur sa chaise et lui déballa cette sorte de déclaration d’amour un peu boiteuse et improvisée. « I guess I came back for many different things but … but mostly for you, yes. Parce que jusqu’à maintenant j’étais jamais tombé vraiment amoureux d’une fille alors … je me suis trouvé con de ne pas essayer davantage. » Il sourit quand Bella affirma qu’elle avait attendu longtemps ce moment, où ils se le diraient, qu’ils s’aimaient. Et elle le lui dit à son tour, ce qui agrandit le sourire sur le visage d’Elmo. Il allait se pencher vers elle pour l’embrasser mais un mais l’arrêta à mi-chemin. « J’ai pas vraiment pensé plus loin que ça, Bella, tu me connais … » Il eut un léger rire. « J’ai envie d’faire un bon bout de chemin ici mais j’ai encore quelques détails pratiques à réfléchir, par exemple pendant combien de temps j’peux rester ici comme touriste avant qu’on me kick out, ou alors m’renseigner sur les démarches nécessaires pour m’établir ici … » Il posa sa main libre sur le genou de Bella. « Mais j’ferai ce qu’il faut. » Même si elle allait peut-être devoir lui botter le cul un peu pour qu’il entame le processus.