as long as i'm breathing, i'll be there ⤅ juliette

as long as i'm breathing,
i'll be there

Janvier 2020.

Balançant entre l'inquiétude et la colère, Viktor tira le frein à main d'un coup sec, garé n'importe comment, dans le parking de l'hôpital. Il dépassait même sur une place handicapée, mais c'était vraiment le cadet de ses soucis. Au vu de l'appel de sa petite sœur, qui était hospitalisée depuis trois jours sans qu'il n'en sache rien avant aujourd'hui, il avait autre chose à foutre que de respecter les lignes blanches des places de parking. Le garçon se dirigea vers l'entrée, où quelques personnes discutaient devant les portes, ou fumaient une cigarette. Et au milieu de tout ce monde, sa frêle Juliette. Intérieurement, il paniquait. Elle n'avait rien voulu lui dire au téléphone, lui demandant simplement de venir la chercher. Bien sûr, il s'était emporté à l'autre bout du fil, mais était quand même directement monté dans sa voiture, même si chaque seconde passée à se questionner sur les raisons de son hospitalisation le rendait fou. « Jules. » souffla-t-il, mi-soulagé et mi-énervé en prenant la rouquine dans ses bras. Il était content de pouvoir la serrer contre lui, en un seul morceau, et profita quelques secondes de ce sentiment de soulagement avant de la relâcher et de faire tomber sur elle un regard noir. « Bon, tu vas me dire ce qu'il s'est passé oui ? » reprit-il, pressant, sur un ton un peu plus brusque, rongé par l'inquiétude et l'incompréhension. Faire face à la contrariété de son frère était certainement la dernière chose dont la jeune fille avait besoin, mais Viktor n'y pensait pas pour le moment, uniquement guidé par la crainte de ce qui avait bien pu se produire, et la colère qu'elle ne l'ait prévenu que maintenant. Il avait besoin de savoir et tout de suite, il n'en pouvait plus de se faire des films plus catastrophiques les uns que les autres, même si elle était bien debout face à lui.

Je m'en voulais en cet instant de n'avoir rien dit à mon frère à propos de mon hospitalisation. J'avais réellement crû que c'était la meilleure décision à prendre, mais quand on m'avait dit que je pourrais enfin quitter l'hôpital, je n'avais eu qu'une envie, appeler Viktor. Après tout il m'avait toujours protéger, depuis que je suis petite et je sentais qu'il était le seul qui pouvait me réconforter après l'épreuve extrêmement difficile que je venais de vivre et qui me hanterais encore surement jusqu'à la fin de mes jours. Je m'étais moi-même préparée pour partir et j'avais pris les quelques effets personnels que j'avais sur moi lors de la fameuse soirée. Je traverse les longs couloirs de l'hôpital et j'ai l'impression que tout ce qui m'entoure est irréel, comme si je regardais un film à la troisième personne et que je ne faisais pas partie de ce monde physique qu'est la réalité. Je franchit les portes et l'air chaud de l'extérieur semble me ramener un peu à moi. Malgré la chaleur de cette journée ensoleillée, je ne peux m'empêcher de grelotter dans mon short et mon débardeur. Je n'ai rien manger depuis plusieurs jours, j'ai l'impression d'être bien plus maigre que je le suis déjà, mais rien que l'idée de manger me retourne l'estomac.

Je ne remarque pas Viktor arriver tout de suite, je me rend compte de sa présence lorsque je vois une silhouette s'avancer frénétiquement vers moi. Il me prend dans ses bras et ça me fait un bien fou, tellement que mes yeux se remplissent d'eau rien qu'en sentant son parfum si familier. Mon frère est énervé et je le comprend. Il doit être extrêmement confus, lui qui croyait que je vivais ma petite vie pénard depuis les 3 derniers jours alors que j'étais clouée dans un lit d'hôpital. Il me demande ce qu'il m'est arrivé, mais avec tous ces gens autour de nous, je ne me sens pas du tout à l'aise. Est-ce qu'on peut y aller? Demandais-je avec une voix qui semblait enrhumée. J'ai besoin de partir d'ici, je lui raconterai tout sur le chemin du retour, lorsque nous seront seuls dans la voiture, mais pas maintenant. Je n'ai pas envie que des inconnus connaissent mon histoire.

Il bouillonnait intérieurement, de frustration et d’inquiétude, il ne pouvait s’en empêcher. Quand il s’agissait de Juliette, son instinct de protection était décuplé et il ne contrôlait pas les émotions qui animaient son être. L’idée que quelque chose de mal lui soit arrivé le torturait, comme si on venait le titiller avec un tisonnier ardent. Après l’avoir prise dans ses bras en un geste réconfortant et soulagé, ses muscles quand même encore contractés par l’inquiétude et l’horrible sentiment de ne pas savoir, il la confronta, se rendant compte plus tard de la brutalité de son ton. Impossible d’être plus délicat que ça, il était rongé par les scénarios qui lui traversaient l’esprit et ça le rendait malade. Il devait savoir, maintenant. Cependant, la petite voix de sa cadette et son regard fuyant, baissé vers ses pieds, parvinrent à lui injecter une petite dose de compassion et il hocha la tête, mâchoires serrées à s’en péter les dents. Sans piper mot, il entoura les épaules de la frêle rouquine d’un bras protecteur, et l’entraîna jusqu’à la voiture, jetant des coups d’œil suspicieux autour de lui, comme s’il défiait tous les gens autour de les approcher. De l’approcher elle. Faudrait lui passer sur le corps pour ça et il aurait balancé une droite à quiconque aurait tenté d’adresser la parole à Juliette en ce moment. Il avait envie de l’envelopper d’une grosse couverture, pour la réconforter et la cacher du monde extérieur à la fois. Viktor ouvrit la portière à la jeune fille, l’aidant à monter. Elle semblait si fragile, comme un oisillon tombé du nid. Mais ce qui l’inquiétait le plus, c’était le regard vide et bordé de larmes de sa sœur. Ça lui crispait l’estomac de peur. Une fois dans la voiture à son tour, il démarra le moteur et quitta le parking. « Je te ramène à ta colocation, ou tu veux venir chez moi ? Ou tu veux aller quelque part ? » demanda-t-il d’une voix mesurée, les phalanges serrées sur le volant, se faisant violence pour ne pas oppresser Jules des questions qui lui brûlaient les lèvres.