turn off the music +18 (concho)

Lorsque la photographe m’affirma avoir été une enfant chanceuse, je n’en compris pas tout le sens. À mes yeux, cela signifiait que la blonde avait eu deux parents aimants, la petite famille nucléaire parfaite quoi, qui l’avaient planifiée, qui l’avaient voulue, qui avaient vécu les neuf mois de grossesse comme un cadeau. Je ne pense pas que c’était comme ça que mes propres parents l’avaient vécu. Mon père avait foutu le camp bien rapidement face à ce trop-plein de responsabilités, et ma mère avait probablement passé toute sa grossesse à avoir envie de se faire une ligne de cocaïne pour oublier qu’elle avait quelque chose – moi – qui grandissais en-dedans d’elle. Mais j’étais ravi d’entendre que la jeune femme avait été chanceuse, même si je n’imaginais pas exactement ce qu’elle avait comme cellule familiale. Je ne jalousais pas ces gens-là, au contraire. Ça en prenait plus, beaucoup plus, dans ce monde. « Tant mieux si t’en as aucune idée. Je préfère entendre ça. » Je lui souris. La photographe me proposa bien rapidement de monter et de présenter quelques ateliers de photographie. C’était bien la preuve que la mission de Head Ahead la touchait réellement, que ce n’était pas juste pour les apparences qu’elle disait que c’était beau. Autrement, elle n’aurait pas proposé de s’impliquer. Comme toute aide était la bienvenue par ici, je la relancerais certainement. Mais avant, ce serait plutôt bien de connaître son prénom, au moins. Je me présentai donc le premier, officiellement, question de repartir sur de bonnes bases. Avec un peu de chance, elle oublierait complètement ma facette bougonne, celle que je lui avais présentée quelques heures plus tôt et qui ne me ressemblait pas vraiment. Elle, c’était Alba. Spontanément, je m’exclamai que c’était comme la abuela dans Jane the Virgin, une série télévisée chouchou du #17, que la blonde n’avait jamais vue. « Alors là il va falloir que tu me promettes de remédier à ça. » La grondais-je sur un ton léger et humoristique. En même temps, c’était vrai que cette telenovela était géniale et pleine de rebondissements. J’avais constamment cette tête-là quand je regardais. Alba me proposa ensuite d’ouvrir le champagne, champagne que je ne pensais pas pouvoir goûter ce soir. Visiblement, il m’était destiné. Enfin, à tous les deux. « Non, non, je t’en prie, reste. Passer à côté de champagne gratuit ? J’peux bien endurer ta compagnie une heure de plus. » Je ris. « Plus sérieusement, c’est un revirement de situation ce soir, et je suis ravi que tu sois revenue et qu’on ait pu mettre les choses au clair. T’es pas désagréable, finalement. » Encore un sourire un peu amusé par mon choix de paroles, mais le compliment derrière était quand même là, et vrai. Alba se leva et fit péter le bouchon. J’avais toujours trouvé que c’était sexy, une femme qui ouvrait ses propres bouteilles. « Merci. » Dis-je en prenant la coupe qu’elle me tendait. Je trinquai avec elle sans mot, mais le pétillement dans nos yeux et dans nos sourires valait tous les toasts possibles. « Tu prends des cours de danse ? Trop bien. Les cours de la ville, ou bien au privé ? » Demandais-je, intéressé. « On pourra pratiquer un peu notre salsa, après, alors. Tu pourrais me montrer quelques trucs de rock, aussi. Et j’te montrerai le hip-hop. » Proposais-je avec de prendre une gorgée du champagne. Il était délicieux. Digne d’un vernissage à une galerie d’art, j’imagine.

Elle ne cachait pas ses origines Alba, mais habituellement elle ne se livrait pas comme ça à un parfait inconnu. Elle ne connaissait pas son prénom et elle lui disait déjà qu’elle avait été adoptée, enfin plutôt lui faisait comprendre. Pour comparer, Léo l’avait appris plusieurs jours après leur rencontre, alors qu’ils avaient passé tout leur temps ensemble. Freja elle l’avait appris avant le voyage pour Brisbane. Elle n’en avait pas honte, loin de là, parce que ses parents lui avaient sauvé la vie. Elle aurait pu être cet enfant que Conchobàhr décrivait. Celui qu’il avait été. Elle lui rendit son sourire. « En tout cas, tu as l’air de t’en être très bien sorti. » Disait-elle en montrant avec la tête le lieu où ils étaient et la mission que ça représentait. C’était un chouette projet et Alba voulait aider si le gérant l’acceptait. Alba avait de loin montrer une bonne image d’elle, même si elle essayait de se rattraper avec cette bouteille de champagne. Mais elle espérait qu’il accepterait de temps en temps son aide, puis s’il le voulait, elle pourrait même certains soirs fermés la galerie et la privatiser à l’organisme pour quelques ateliers. Dès qu’il s’agissait de convertir les personnes à l’art, Alba avait toujours des tonnes d’idées. Elles n’étaient pas toujours bonnes à prendre, mais certaines si. « N’hésite pas en tout cas, tu sais où me trouver. » Disait-elle en riant légèrement. Il n’avait qu’à traverser la rue et si un jour Alba voulait l’embêter ou attirer son attention elle n’aurait qu’à monter le son. Il se présenta, son prénom était original, jamais elle ne l’avait entendu et pourtant elle rencontré des tas de personnes avec des prénoms de tout genre. Lui, il avait une petite référence par rapport à son prénom à elle. Une série qu’elle avoua n’avoir jamais regardé. Sa réaction la fit rire. « Ok, promis. Je vais t’harceler avec mes résumés, prépare toi. » Elle ne le fera surement pas. Les résumés, pas ne pas voir la série. De toute façon, elle n’avait pas grand-chose à faire les soirs. Karl était triste mais elle passait ses nuits seules. Il n’avait pas compris que le champagne était pour lui et elle. L’artiste était partis et Alba avait à cœur de se pardonner son comportement de la soirée. « Hé ! » Disait-elle faussement outrée, lui balançant gentiment un bout du bouchon du champagne. Elle lui souriait, heureuse qu’il appréciait son geste. C’était un vrai revirement et maintenant qu’elle était avec lui, elle se disait qu’elle avait bien fait. Il aimait l’embêter. « Finalement ? » Disait-elle. « Tu sais j’peux toujours repartir avec. » Disait-elle en lui souriant, amusée par ses petits piques amusantes et loin d’être blessantes. Rapidement elle ouvrit la bouteille et se rasseyait à ses côtés pour trinquer. Il était beau avec son sourire et ses yeux pétillants. « Tu n’es pas si méchant, finalement. » Elle lui fit un rire amusé avant de prendre une gorgée. Relevant qu’il était danseur, elle se souvenait très vaguement de ses pas durant la soirée, mais il devait être doué. Et Alba adorait danser, alors elle sautait sur l’occasion pour lui demander quelques conseils. « Ceux de la ville, ils proposent pas mal de danse différentes. » Elle en avait essayé quelques-unes. Elle avait des bases ayant appris la danse petite, mais ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas réapprit à danser avec des professionnels. Avant elle se contentait de boucher ses hanches au rythme de la musique. « Parfait, mais si tu marches sur mes pieds tu vas la regretter. » Elle riait. Il n’était pas le genre maladroit à marcher sur ses pieds. Elle s’essayerait bien au Hip Hop, une danse beaucoup trop acrobatique pour la blonde.

Je comprenais qu’on ne se lance pas directement dans des révélations comme celle d’avoir été adoptée. Pour elle, ce devait être normal, rien de bien particulier. Et puis, surtout, ça ne la définissait pas en tant que personne, pas totalement du moins. Ça avait peut-être façonné une partie de sa personne, de sa manière de voir le monde et de le réfléchir, mais elle n’était pas la fille adoptée. Ce n’était qu’un détail, au fond, et que je l’apprenne aujourd’hui ou plus tard ne changerait rien à notre relation naissante, quelle qu’elle soit. « Oui. La chance m’a sourit à un moment où je m’y attendais pas. I tried to make the best of it. » Ce que je ne lui disais pas à mon tour, à la photographe, c’était que si ma vie allait si bien aujourd’hui, c’était parce que j’avais gagné à la loterie. Avec des collègues du domaine de la construction, nous étions devenus millionnaires du jour au lendemain. Si eux avaient pris bonne partie de leur argent pour tomber dans l’excès, moi, je l’avais pris pour revenir au bercail et mettre sur pied cet organisme communautaire. Le reste de mon argent, je l’avais placé, ce qui m’enlevait un stress quant à ma retraite. Mais ça non plus, ça ne me définissait pas en tant que personne. J’osais croire que cette chance-là aurait tout aussi bien pu me propulser dans une spirale malsaine. Mais j’avais choisi de l’utiliser à bon escient. J’hochai la tête quand la blonde me dit de ne pas hésiter pour les ateliers de photographie, que je savais où la trouver. À quelques pas d’ici, oui. Je lui souris, avant de finalement repartir cette rencontre comme il se doit : avec des présentations. Alba, comme dans Jane the Virgin, telenovela qu’elle n’avait encore jamais regardée. « Oh, je suis prêt. Plus que prêt. Et toi, attends-toi à des quiz surprises, question que je m’assure que tu te contentes pas seulement de lire les résumés de chaque épisode sans les regarder. » Je ris à mon tour. En réalité, c’était le genre de jeu qu’on pouvait faire, au #17, avant que toute la colocation n’éclate par le passage du temps. Des quiz éclairs pour savoir qui de nous connaissait mieux Harry Potter ou encore Friends. Et on passait toujours tout plein de tests débiles pour savoir quel personnage nous étions. Le bon vieux temps ! Bref, il fut alors temps de passer au champagne, qui finalement m’était destiné à moi aussi. Alba me balança le bouchon du champagne et je ris en essayant de l’éviter, ce qui s’avéra un échec total. Le morceau rebondit au sol accompagné de nos rires. « Non non non, mon précieux ! » Lâchais-je alors que la blonde menaçait de repartir avec. Ce fut à son tour de me narguer un peu alors qu’elle revenait s’asseoir près de moi. « Pas si méchant ? » Je ris, amusé aussi, avant de prendre une gorgée en même temps qu’elle. Les piques derrière, on se tourna vers un sujet que j’appréciais évidemment tout particulièrement : la danse. « Ouais, j’avais déjà regardé l’offre, c’est vraiment pas mal. Je m’étais dit que je pourrais en essayer mais j’ai jamais fait le saut de l’inscription, avec les cours que je donne déjà ici, et parfois j’danse avec des gens de mon âge aussi pour des duos … je me disais que ça ferait peut-être trop. » Avouais-je. Mais ce soir, j’aurais la chance de danser avec Alba ici-même dans la salle de danse entourée de miroirs. « Girl, je suis un très bon lead, tous nos orteils vont sortir d’ici en santé. » Je ris, avant de boire à nouveau une lampée de champagne. « Tu veux qu’on s’essaie maintenant ? » Comme brise-glace, il n’y avait pas mieux. Et cette bouteille pourrait nous désaltérer entre deux chansons.

C’était étrange cette conversation. Quelques heures auparavant, elle n’avait qu’une idée, foutre un coup à cet homme qui l’avait dérangé. Il avait eu raison, mais à aucun moment il avait montré de la sympathie. Et là, ils venaient de se confesser rapidement sur son passé et Alba sur ses origines. Chose qu’elle ne cachait pas, mais qu’elle ne disait pas si facilement. L’adoption en soit avait été une des meilleures choses qui lui étaient arrivées, mais ce vide dans son cœur était toujours présent. Pourtant, ç’avait l’air tellement naturel comme le petit geste réconfortant d’Alba. Elle posait quelques secondes sa main sur celle du brun, avant de la récupérer. Il était temps de changer de sujet. Conchobahr avait trouvé le bon sujet, leur prénom. Très vite, ils avaient ri et il l’obligeait presque de regarder la série où un personnage avec le même prénom qu’elle. La photographe n’était pas une sériephile. Evidemment, elle avait vu les classiques, mais elle n’avait pas le temps. Jeune elle passait son temps à être dehors pour faire des photos. Puis il y a eu le voyage. C’était durant sa grossesse qu’elle avait pris un peu le temps, mais la naissance de Jonah l’avait un peu stoppé. Pourtant, elle promettait à Concho de voir cette série, l’avertissant des nombreux messages qu’il risquait de recevoir. Dans le fond, elle s’attendait à ce qu’il réfute son offre. Mais c’était tout le contraire et la photographe le regardait avec des yeux ronds de surprise et amusée. «  Ah oui tu ne rigoles pas sur les séries. » Elle riait. L’espace de quelques secondes elle s’imaginait bien les petits quiz de Concho où elle échouerait probablement. Peut-être qu’elle regarderait la saison une ou deux, puis elle oublierait un jour qui se transformera en semaine et en mois. Puis elle aurait la flemme de recommencer la série. Depuis plusieurs minutes maintenant la bouteille de champagne les narguait, perdant de sa fraîcheur. La blonde se levait pour proposer une coupe à cette nouvelle rencontre. Il s’amusait à la taquiner lui rappelant son comportement précédent, mais cette fois-ci elle ne s’offusqua pas Alba. Au contraire, elle mêlait son rire à celui de Concho quand il essayait d’éviter le bouchon qu’elle lui envoyait. Rire qui augmentait à son imitation peu réussi de Gollum. Ce moment était tellement léger et Alba se sentait bien. Alors qu’elle s’asseyait, elle se permettait à son tour une petite pique. Elle le trouvait beau, avec ce sourire communicatif. « Tout à fait. T’es même très agréable. » Elle lui souriait avant de prendre une gorgée de son champagne sans détourner son regard. Au final, à part les événements de tout à l’heure, ils étaient fait pour s’entendre. Ils étaient tous les deux dans le milieu artistique. Elle lui expliquait succinctement les cours qu’elle suivait. « Dommage, j’aurais eu un partenaire de danse pour une fois. » Elle se retrouvait à danser avec le prof, puisque la plupart des personnes venaient en couple. La blonde lui demandait des cours et elle se voyait bien danser la salsa avec lui dans cette pièce remplie de miroir. Mais elle ne put s’empêcher une petite moquerie, qu’elle savait fausse. Elle buvait une autre gorgée avant qu’il lui propose de commencer maintenant. Lui souriant, Alba posait son verre avant de se lever pour tendre sa main. « Et puis tu peux mettre la musique aussi forte que tu veux. J’crois que la voisine chiante est occupée ce soir. » Elle riait, les yeux malicieux par cette future danse.

La main de la blonde, j’avais pensé un peu plus tôt que je la sentirais plutôt sous sa forme de poing, en plein sur ma gueule. En quelques minutes pourtant, maintenant que l’agacement s’était estompé entre-temps, sa main était plutôt venue se poser sur la mienne dans un geste réconfortant. Cela eut d’ailleurs l’effet escompté, et la douceur de ce contact me fit sourire. J’étais encore plus à l’aise dorénavant, ne ressentant plus aucune once d’hostilité entre nous deux. Il n’en restait que des poussières imperceptibles, juste assez pour nous permettre de nous lancer quelques piques par-ci et par-là, pour en rire. « Ah non les séries, c’est sacré. Bien plus que les films selon moi. T’as le temps de t’attacher, de développer quelque chose avec les personnages, de vraiment rentrer dans leur vie, t’sais. Alors faut leur faire honneur en n’laissant aucun détail de côté. » Je souris, ne me prenant qu’à moitié au sérieux. Il était vrai que j’étais davantage sérivore que cinéphile, mais je ne vouais pas non plus un culte à tous les tv shows que je regardais. Juste certains. Alba se leva finalement pour ouvrir cette bouteille de champagne qui se faisait impatiemment désirer, peu habituée de ne pas être dévorée du regard. C’est que ce n’était pas une bouteille du supermarché, quoi. Elle me faisait d’ailleurs de l’œil depuis le début mais je n’avais même pas pensé que la blonde ait pu avoir décidé de venir célébrer avec moi la réussite du vernissage. J’accueillis évidemment avec plaisir cette proposition, plus du tout gêné par la présence d’Alba, bien au contraire même. Elle me parla des cours de danse offerts par la ville, et sa réponse me donna encore plus envie de m’y inscrire. « T’es la seule qui ose y aller en solo ? Remarque, je suis pas si étonné au fond, les gens essaient rarement de nouvelles choses sans être accompagné … » Et même de vieilles choses connues et communes comme aller au cinéma. Comme si les gens avaient peur de leur solitude, qui pourtant n’était pas toujours négative. « Peut-être que j’ferai une apparition surprise à un moment … » Sans prévenir, je pourrais débarquer dans un des cours et l’arracher aux bras du professeur. J’étais persuadé qu’on aurait beaucoup de plaisir à danser ensemble. Il n’y avait d’ailleurs qu’une manière de le confirmer … essayer ! Je posai ma coupe en voyant qu’elle le faisait, attrapant sa main avec enthousiasme. Je ris à sa réplique sur la voisine chiante. « Ah ! Il était temps qu’elle me laisse un peu tranquille, ouais … » Je marchai jusqu’au système de son et je partis ma playlist de chansons latines. Je rejoignis Alba au centre de la pièce, et je me mis en position en nous regardant dans le miroir pour valider notre posture. « On fait un duo pas si mal, je trouve. » J’esquissai un sourire. Alba était une beauté, je ne lui ferais jamais justice en tant que partenaire, alors il faudrait que je performe vraiment très bien pour compenser.

Parfois Alba pouvait paraitre froide, surtout quelques heures plus tôt où elle jouait l’ouverture de sa galerie. Mais une fois que la tension était redescendue elle redevenait cette jeune femme douce, parce que la photographe avait toujours beaucoup d’amour à donner. L’histoire de Conchobáhr l’avait touché. C’était plaisant d’avoir une conversation calme et apaisée, une conversation qui lui permettait de connaître ce nouveau voisin. Et après ces quelques confessions plutôt dramatiques, elle découvrait également sa passion des séries. Jamais elle n’avait entendu quelqu’un parlé des personnages de série de cette façon. Ça lui donnait presque envie de la regarder cette série et d’apprécier les personnages et de les aimer comme pouvoir l’expliquer Concho. « Tu as réussi, je vais regarder. Je te tiendrais au courant. » Disait-elle dans un petit rire. Elle allait trouver le temps. Elle n’en avait pas beaucoup parce qu’une fois Jonah couché, Alba aimait prendre un peu de temps pour ses photos. Mais maintenant qu’il passait du temps chez Léo, elle pourrait de temps en temps regarder un ou deux épisodes. La bouteille de champagne attendait sagement d’être ouverte. Alba avait pensé qu’apporter cette boisson pour s’excuser était une bonne chose et au final elle était plutôt contente de partager sa première réussite de sa galerie avec ce charmant nouveau voisin. Habituée, elle ouvrait la bouteille, servant deux verres. Ils n’oubliaient la petite interaction plus tôt, mais se moquaient de l’autre gentiment. Elle se rasseyait à ses côtés parlant de danse. La spécialité de Conchobáhr. Elle ne le croyait pas vraiment quand il lui disait qu’elle pouvait lui montrer quelques pas de rock. Il devait être doué. Elle lui parlait des cours de danse, l’endroit où elle avait rencontré Charlie. La photographe n’était pas toujours assidue et souvent elle se retrouvait à danser avec le prof puisque la plupart des personnes venaient à deux, accompagnés de leur moitié. « Oh je crois que je suis surtout la seule qui n’a personne à amener. » Disait-elle en riant. Alba était célibataire et même si Léo était toujours dans un coin de sa tête, elle ne pouvait pas lui demander. « Mais ça ne me gêne pas. » Alba avait voyagé en solo, la solitude ne lui faisait pas peur. Mais le fait que Concho propose de venir par surprise plaisait à la photographe. Peut-être qu’un jour elle danserait avec une autre personne que le charmant professeur. « Tu sais que je ne risque pas d’oublier ce que tu viens de dire. » Elle s’y attendait maintenant à cette surprise. Il proposait d’essayer alors sans hésiter la blonde se levait tendant la main vers le danseur. Une dernière petite remarque sur la situation précédente. Elle riait à la réponse de Concho. « Heureusement qu’elle n’est pas susceptible. » Lâchait-elle quand il partait en direction du système de son. Il revenait et chacun prenait position. Il posait sa main sur hanche pendant qu’Alba liait sa main à celle du danseur. Elle regardait dans le miroir, voyant l’image de ce couple improbable. « Je trouve aussi. » Répondait-elle en lui souriant. La musique se lançait et Alba se laissait guider par Conchobáhr. La danse était sensuelle et Alba se sentait bien dans ses bras.

Satisfait et fier de moi, j’hochai victorieusement la tête quand Alba affirma qu’elle regarderait Jane the Virgin. Je savais qu’elle m’en remercierait rapidement. Je n’ajoutai rien, joignant mon sourire au sien avant de la laisser aller nous servir de ce champagne qui était pour nous deux, finalement. On trinqua puis on le dégusta en se moquant gentiment de l’un et de l’autre, avant de rentrer dans l’un de mes sujets préférés et, à mon grand mais agréable étonnement, un sujet qui rejoignait également Alba. Je savais que la ville offrait des cours mais je n’avais jamais vraiment trouvé l’occasion d’assister à l’un d’entre eux. Les coûts étaient pourtant des plus raisonnables mais, quand même, sachant que j’avais accès à tout le matériel ici et que je n’avais pas besoin de professeur, je n’avais pas ressenti le besoin. Il était cependant vrai que j’aurais sûrement beaucoup de plaisir avec des gens de mon âge. Je les aimais, mes jeunes, mais quand même, cela demeurait un travail. Je m’ennuyais du temps où, avec Harmonie, on dansait pendant des heures en suivant nos envies et notre créativité. Qui sait, avec quelqu’un d’aussi artistique que la photographe, peut-être cela serait-il possible ? Pour le moment, la seule contrainte d’Alba semblait son absence de partenaire. Je pouvais être la solution à ça, même si ça ne la gênait pas pour le moment. « Ou t’as juste des amis qui doivent penser que c’est juste réservé aux femmes ou aux gays. » Relevais-je avec un léger rire. C’était évidemment lancé comme ça, je ne connaissais pas l’entourage de la blonde, mais il n’était pas rare que des hommes ne veuillent pas se lancer dans la danse par peur du jugement. Je sous-entendis que je ferais peut-être une apparition surprise à un moment, sans trop m’avancer sur le moment. Il faudrait que je vois quand ces cours se donnaient et si cela empiétait sur les cours que je donnais moi-même aux jeunes, avant de promettre quoi que ce soit. « J’compte sur toi pour me le reprocher, alors, si j’me pointe jamais. » Je souris, amusé. Ça n’en viendrait probablement pas à ça. En attendant, rien ne nous empêchait de nous lancer quand même dans un duo improvisé. Je guidai donc Alba jusqu’à la salle principale de Head Ahead, soit la salle de danse entourée de miroirs. Je fis jouer une musique latine, et je revins vers elle pour nous admirer dans le miroir, à la blague. « Voyons voir si on est aussi beaux en mouvement que figés … » Sur ce, je pris le lead des pas de danse, d’un déhanché que je tentai de rendre sensuel, pour rendre justice à la chanson plutôt caliente. L’espace de trois minutes et vingt-six secondes, Alba et moi étions devenu des esclaves de la musique, nos corps vibraient sur chaque note, nos pas se liaient et se déliaient sur les rythmes. Quand les derniers sons s’évanouirent, dans ce court laps de temps avant que l’autre chanson ne débute, je plongeai mon regard dans celui de la blonde. Emporté par la sensualité et l’intimité de ce moment que nous venions de partager, je l’embrassai.

Cette série, elle allait la regarder, même la dévorer. Mais pour le moment elle ne promettait qu’à Conchobáhr qu’elle le ferait sans trop grande conviction. La photographe estimait qu’elle n’avait jamais le temps. Entre son fils, la galerie et la photo, Alba ne trouvait que très rarement du temps pour elle. Mais maintenant qu’elle était à Bowen, elle en aurait plus, surtout quand Jonah sera chez son père. Ce n’était pas le moment de penser à ça. Concho avait toute son attention. Auparavant froid et dur, Alba appréciait ce visage plus naturel et plus doux de lui. Ils parlaient si facilement. Il n’y avait pas de blanc ou de moment où la malaise pouvait s’installer. La danse était un sujet commun. Sauf que Conchobáhr était un professionnel, alors qu’Alba ne restait qu’une danseuse du dimanche. Ses parents lui avaient appris petite à danser mais très vite la blonde s’était réfugiée dans la photographie. Ça ne l’avait pas empêché de reprendre des cours dans le but de se défouler et de rencontrer du monde. Mais à part Charlie et le professeur, Alba restait quand même seule. Elle en parlait à Concho. Si jamais il se pointait au cours, le professeur se retrouverait très vite sans partenaire. Elle fronçait un peu les sourcils à la remarque du danseur. « Non ils ne pensent pas ça. » Enfin ceux qu’elle avait à Brisbane. C’était l’argument qui expliquait pourquoi Alba était seule. « Je n’ai pas beaucoup d’ami ici. » Mais c’était plutôt ça la vraie raison. La photographe venait d’arriver, elle avait retrouvé Charlie mais ça s’arrêtait là. Puis elle n’allait pas demander à son ex de l’accompagner. Ça ne la gênait pas Alba de n’être pas entourée par toute une bande de pote, elle avait toujours été un peu solitaire. C’était son paradoxe, elle avait ce besoin d’être aimée et appréciée, mais elle avait du mal à se lier de peur d’être in fine blessée. Avec Conchobáhr, pas de danger pour le moment. C’était peut-être pour ça qu’elle lui proposait de venir. Il ne la connaissait pas encore, et Alba était très têtue. Si la blonde avait une idée en tête, elle ferait tout pour que ça se produise. « Compte sur moi. » Disait-elle dans un rire. Elle ne lui reprocherait jamais directement mais ne se gênerait pas pour se plaindre en sa présence. Il lui proposait de s’essayer à la danse de couple et la photographe le suivait au centre de la pièce. Près de lui, dans ses bras, elle se sentait sereine pour la suite. Une dernière phrase avant qu’il ne commence à la faire tournoyer. Ils ne disaient rien laissant leur corps s’exprimer pour eux. Le danseur était un merveilleux leader. Les mouvements fluides et naturels rajoutaient une petite tension entre eux. Et quand les dernières notes s’évanouirent, ils se regardaient. Le bout de la bouche de la blonde se retroussait dans un léger sourire. Sans prévenir et sans anticipation, pris par le moment, Conchobáhr embrassait Alba. Elle aurait pu être surprise, mais la blonde répondait à ce baiser croisant ses bras derrière la nuque du danseur pour l’approcher d’elle. Finalement, elle détachait ses lèvres de celles de Concho dans un sourire. « Y’a le champagne à finir. » Disait-elle en rougissant légèrement mais avec un resplendissant sourire.

Ma remarque à propos des amis d’Alba était un peu déplacée, avec du recul. Je miroitais mes propres préjugés sur les hommes qui ne dansent pas. En même temps, dans mon adolescence ou mes jeunes années d’adulte, beaucoup me l’avaient confirmé en me ridiculisant. J’en gardais de si mauvais souvenirs que bien sûr, ça se reflétait dans mon discours. « Désolé, j’voulais pas redevenir le trou de cul de tout à l’heure en deux secondes. J’crois que je faisais un peu de … comment on dit ça, déjà … de projection ? En tout le cas, le truc que tu fais quand tu transposes ton propre vécu sur celui de quelqu’un d’autre. » Un fin psychologue, n’est-ce pas ? Je n’étais pas très clair et surtout je ne maîtrisais pas ce concept dans lequel je m’étais lancé. Mais les excuses étaient là, c’était l’important. J’entendis cependant sa remarque sur le fait qu’elle n’avait pas beaucoup d’amis, bien que je ne l’aie pas relevé. Une fille comme elle, gentille (quand on commence du bon pied) et drôle, ça ne saurait tarder. Après une sorte de promesse de passer un jour à ses cours de danse, je proposai de ne pas attendre jusque-là pour danser ensemble. Alba accepta et me suivit jusqu’au local principal. Sur une musique latine et chaude, je menai la blonde dans des pas rythmés et sensuels. Comme activité brise-glace, il n’y avait pas mieux que de laisser nos deux corps s’apprivoiser de cette manière. Quelques rires par ici, quelques regards fiévreux par-là, bien vite la tension monta, ou alors était-ce juste moi ? Ce n’était pas juste moi. À la fin de la danse, quand les dernières notes retentirent, je l’embrassai, cédant à la tentation qui avait grandi pendant notre improvisation torride. Alba me rendit le baiser, croisant ses bras derrière ma nuque, m’attirant vers elle. Je posai mes deux mains juste au-dessus de ses fesses, l’approchant à mon tour. C’est Alba qui mit fin au baiser la première, et je me sentis rapidement en manque. En manque de ses lèvres, en manque de cette proximité. Je ne la connaissais même pas tant que ça. J’étais dû. « Ouais, ahem … ce serait … ce serait dommage de le laisser tiédir et perdre ses bulles … » À la place c’était notre petite bulle qui venait de s’égarer un peu. Je rougis à mon tour, sans perdre mon sourire de gamin fébrile et timide. J’éteignis le système de son en chemin vers le hall, où on retrouva le canapé et les flûtes de champagne. « Tu bouges vraiment bien, en tout cas. C’est facile de tout enchaîner avec toi, ça coule naturellement … » La complimentais-je avant de prendre une grosse gorgée … c’est que j’avais eu chaud !

Elle ne le prenait pas forcément mal Alba. Elle préférait être claire, les gens qu’elle côtoyait n’avait jamais eu ce genre de penser. Peut-être que le fait d’avoir été élevé par deux parents actifs dans la communauté LGBT+ avait permis à Alba de rencontrer des personnes qui pensaient comme elle. Son froncement de sourcils n’était pas méchant, ou son ton froid n’était pas voulu. Mais il y avait quelque chose de clair, Conchobáhr et Alba venait de deux monde différents. Elle souriait à ses excuses. Il était touchant et adorable cet homme une fois qu’on faisait le premier pas. En le voyant s’excuser et exprimer un peu son passé, Alba était prise d’une envie de le serrer dans ses bras. Elle se retenait. « Oh non t’inquiète, ce n’est rien. C’est dommage que tu sois tombé sur des cons dans le passé. » Disait-elle honnêtement. Elle avait toujours trouvé ça stupide de croire qu’un mec ne savait pas danser à moins qu’il ne soit un peu étrange. Elle en avait rencontré des bons danseurs. Léo par exemple qui avait su la charmer avec ses pas de danse. Elle ignorait encore le niveau de son voisin, mais elle s’apprêtait à le découvrir. Ils déposèrent leur coupe de champagne. Attrapant sa main, elle se laissait guider jusqu’au centre de la pièce. Les miroirs imposant intimidait presque la photographe. Alors pour éviter de se regarder, elle se concentra sur Conchobáhr. La danse était bien trop sensuel pour leur propre bien. Frôler son corps ainsi à celui du danseur rendait Alba joyeuse. Les regards fiévreux traduisaient de cette tension naissante. La musique s’arrêtait mais elle restait dans ces bras talentueux. Il l’avait guidé comme personne. Il était sans aucun doute le meilleur partenaire qu’elle ait eu. Cette tentation était fragile, il ne suffisait que d’un léger rapprochement. Quand Conchobáhr prenait possession des lèvres de la blonde, elle soupirait de satisfaction. Elle se cambrait légèrement réduisant l’écart entre leur deux corps. Les mains du danseur de la bas du dos de la blonde l’encourageait à approfondir ce baiser. Mais elle se détachait de lui, les joues rouges. Elle venait de briser cette petite bulle en proposant de continuer le champagne. Idiote. Pensait-elle. Elle n’avait qu’une envie de recommencer. Ils se séparaient, Alba rejoignant le canapé et Conchobáhr éteignant la musique. Elle en profitait pour resservir les deux verres. Elle avait chaud, trop chaud. Ils ne trinquèrent pas, chacun prenant une gorgée. « C’est gentil. » Disait-elle en rougissant. « T’es surement le meilleur danseur que j’ai rencontré. » Elle ne mentait pas la blonde. Elle reprit une gorgée de son champagne. « Et un personne qui embrasse très bien. » Disait-elle avec une voix plus faible avant de lever la tête et lui sourire. Elle voulait recommencer et ne comptait pas attendre la réaction de Conchobáhr. Elle reprit possession de ses lèvres pour commencer un balais langoureux.

Je me contentai d’hocher la tête, je ne voulais pas forcément me replonger dans mes souvenirs d’adolescent, repenser à ceux qui s’étaient ouvertement moqué de moi dont ce cher Woody Rutkowski duquel je ne pourrais visiblement jamais m’échapper. Je lui avais fait un énorme doigt d’honneur symbolique en tombant amoureux de Freja et en la voyant tomber amoureuse de moi aussi. Mais finalement, sa présence inconditionnelle dans la vie de la brune avait eu raison de nous. Il gagnait, encore. C’était peut-être mon insécurité résultant de toutes ces années à me faire intimider par lui qui avait causé notre perte, à Freja et moi. Je n’en avais aucune idée. Tout ce que je savais c’était que Woody, et tous les autres qui m’avaient regardé de haut, avaient encore une énorme emprise sur moi. Aujourd’hui j’étais le mec en confiance, plein d’assurance, drôle et on pourrait presque dire accompli, mais il y avait une part d’ombre sur cette personne. Le gamin en moi qui se cachait encore dans son coin. Bref, je ne répondis rien à Alba à ce propos et je préférai l’inviter à danser. Plutôt que de montrer davantage mes faiblesses, je choisis de lui montrer ma fierté. Ce petit trois-quatre minutes de danse latine me redonna toute mon assurance ou presque, en tout cas bien assez pour que je trouve le courage de l’embrasser. J’avais envie de le faire depuis dix bonnes minutes de ça déjà, mais la chaleur de nos corps pendant ces pas de danse avait décuplé l’envie. Ses lèvres goûtaient déjà un peu le champagne malgré les quelques gorgées qu’elle avait eu le temps de prendre. Ou bien était-ce moi qui avait laissé ledit champagne me monter à la tête et influencer mes sens ? Je relâchai mon étreinte lorsqu’Alba s’éloigna tout légèrement, proposant d’aller terminer le champagne. Je balbutiai un truc comme quoi ouais, fallait le boire pendant qu’il était encore froid et mousseux, avant de repartir vers le lounge à l’entrée. Je la complimentai sur son talent naturel en danse, elle me renvoya un compliment franchement gratifiant. Je souris. « Wow, ça pour être un compliment … Merci, j’suis touché. Et vraiment content de l’entendre. » Une petite motivation de plus à aller la retrouver à un cours de danse donné par la ville. On allait épater les autres participants, ensemble. Alba ajouta que j’étais aussi une personne qui embrassait très bien. Je plongeai mon regard dans le sien, évidemment surpris de cette affirmation. Je pensais m’être planté quelques minutes plus tôt en l’embrassant, mais voilà que la blonde prenait les devants pour reprendre notre baiser là où on l’avait laissé. Je déposai ma coupe de champagne à tâtons avant de revenir me donner pleinement à Alba. Je me calai dans le vieux canapé et invitai la photographe à se rapprocher de moi, à s’asseoir sur moi, même. Heureusement que les stores étaient fermés, s’il avait fallu qu’un jeune ou pire, qu’un parent de mes jeunes, voit ce que je faisais après les heures d’ouverture …

Alba était persuadée de n’être revenu à Bowen que pour rapprocher son fils avec la père. L’opportunité de reprendre la galerie n’avait été que le prétexte. Mais dans le fond Alba l’aimait encore Léo et peut-être qu’elle espérait qu’ils aient une deuxième chance. Mais depuis ce baiser au coin de ses lèvres plus rien et Alba n’était pas connu pour sa patience. Elle se disait que c’était peine perdue, et ce soir elle avait mis Léo de côté. La blonde se perdait dans sa conversation avec le danseur, elle se perdait dans ses beaux yeux et son assurance. Concho était le type d’homme a qui on faisait confiance instantanément. Bon ça n’avait pas été le cas de suite pour les deux, mais depuis une heure maintenant elle se sentait bien Alba. Cela se confirmait pendant la danse. Ils dansaient pour la première fois comme s’ils avaient déjà fait ça. C’était fluide et elle se laissait emporter par la sensualité du danseur. Elle était loin de s’imaginer les peines qu’avait pu vivre cet homme. Il était tout ce dont Alba pouvait rêver. Elle le découvrirait bien après qu’avec Concho elle se sentait belle, désirée et que c’était facile d’être avec lui. Peut-être qu’Alba aurait fait partie de chez gens qui auraient blessé Concho dans le passé. Surement pas, Alba avait des défauts mais elle n’humiliait pas les personnes. Elle l’aurait surement trouvé cool avec ses pas de danse. Elle ne s’attendait pas à ce baiser et pourtant quand il posait ses lèvres sur les siennes, elle n’avait pas envie que ça s’arrête. Approchant son bassin, elle se sentait attiré par cet homme. Ce baiser n’était pas réfléchi, ils avaient juste foncé, ils avaient juste décidé de satisfaire ce besoin. Pourtant la blonde mit fin à cette jolie parenthèse et elle ne savait pas pourquoi ; les lèvres du danseur lui manquaient déjà. Elle avait presque froid maintenant qu’elle s’était éloignée de lui. Elle avait tout aimé de ces derniers instants. C’était sincère quand elle lui disait que c’était le meilleur danseur. Même son prof n’arrivait pas aussi bien à la guider. Elle lui avait fait confiance pour la guider et elle avait bien fait. Elle se mordait la lèvre en voyant la fierté sur le visage du danseur. Alba avait toujours été honnête et elle ne réfléchissait pas à la portée de ses mots, elle les disait tout simplement. Au final cette coupe de champagne ne l’intéressait pas vraiment, mais les lèvres du brun si. Alors elle posait son verre avant d’embrasser Concho. Elle sentait qu’il essayait de poser le verre sans le faire tomber et quand enfin il réussit ils intensifiaient le baiser. Comme un peu plus tôt, il guidait Alba mais cette fois-ci pour une danse encore plus sensuelle. Suivant ses demandes elle s’asseyait à califourchon sur lui en le lâchant pas ses lèvres. Elle oubliait les raisons de sa venue dans cette salle, elle oubliait les conflits précédant. Tout ce qu’elle voulait c’était de continuer à embrasser cet homme. Finalement elle relâchait ses lèvres avec un sourire. Son nez vint de poser sur celui de Concho. « Au final je pense que l’entente entre voisin se passe plutôt bien. » Elle riait de sa propre bêtise.

La soirée prenait une toute autre tournure alors qu’on revenait s’asseoir pour terminer le champagne. Finalement, ce n’était pas vraiment la bouteille qui allait être terminée mais plutôt le moment de tout à l’heure, qui avait été rompu bien trop vite par Alba. Cette dernière semblait le regretter, ou en tout cas avoir changé d’avis sur la poursuite des événements, puisqu’elle revint s’emparer de mes lèvres, à ma plus grande surprise. Une très agréable surprise, cela dit. Je l’accueillis contre moi en tâchant de ne pas mettre du champagne partout sur le plancher. J’arrivai à le poser à proximité et à me concentrer pleinement sur la jeune femme, que je guidai vers moi, sur moi. J’avais envie de sentir plus encore que ses lèvres contre moi, je voulais tout son corps, toute sa chaleur. Je voulais sentir ses formes se presser contre mon torse. Alba détacha ses lèvres des miennes mais cette fois, ce ne fut que pour quelques mots glissés entre nos baisers. Je ris à sa remarque sur notre bonne entente de voisinage. « Oui, je pense qu’on pourra souvent s’organiser nos propres petits 5 à 7 mais … ça ne me dérangerait vraiment pas qu’on n’étende pas l’invitation aux autres commerçants … » Je souris. En d’autres mots, je voulais qu’Alba et moi on se retrouve plus souvent de cette façon-là. Après tout, le courant passait finalement bien et nos deux lieux de travail étaient si proches l’un de l’autre, c’aurait été dommage de ne pas profiter de cette proximité. Je repris notre baiser plus langoureux encore, la pressant contre moi avec désir. Voyant que la température ne cessait de grimper et que la photographe semblait plutôt être sur la même longueur d’ondes que moi cette fois, je me reculai légèrement rien que pour retirer mon chandail avec aisance. Je repris ses lèvres une fois torse nu, seulement pour mieux me reculer à nouveau et lui retirer son tailleur rose pastel. Maladroit comme à mon habitude, j’eus du mal à la sortir des manches ajustées du vêtement. « Mais c’est la veste du démon, ça. » Oui parce que la différence entre un tailleur et une veste, je ne lui portais que bien peu d’attention. J’arrivai enfin à la délivrer du morceau et à lui retirer également le chandail qu’elle portait en-dessous, en riant. « Voilà qui est mieux. » Je la repris contre moi, posant mes mains sur sa chute des reins. Mon érection se fit davantage sentir maintenant que mes doigts touchaient sa peau nue et que mon imagination s’emportait déjà avec la suite des choses.

Idiote. C’était le mot qui repassait dans sa tête encore et encore depuis qu’elle lui avait proposé de retourner boire du champagne. Pourquoi avait-elle arrêté le baiser ? Il était sensuel, il était beau, il était drôle, tout ce qui plaisait à Alba. Alors pourquoi cette hésitation ? Le temps qu’il aille éteindre la musique et qu’elle resserve du champagne, elle avait le temps de s’insulter. Elle avait hésité parce qu’il était son voisin, parce qu’ils s’étaient déjà parlé de choses personnelles avant même de s’embrasser. Ça n’allait pas dans le bon sens pour Alba. D’abord elle embrassait et après elle parlait. Le contraire relevait normalement de l’amitié. Pourtant à cet instant les pensées amicales envers Concho étaient loin. A ce moment, elle voulait que les mains du danseur reviennent se poser dans le creux de son dos et que cette bouche revienne mordiller sa lèvre du bas. C’était la jeune femme fougueuse qui revint à ses lèvres. Entrainée par l’envie réciproque de Concho, elle montait sur lui pour lui faire face et faciliter l’échange. Pour reprendre de l’air, elle balançait ces quelques mots simples. Ils n’allaient pas se prendre la tête. Et s’il continuait aussi bien qu’il dansait et l’embrassait, Alba comptait revenir souvent à cet endroit. Amusée, elle riait à sa réponse. « Pourquoi ? Tu n’aimes pas les plans à plusieurs. » Evidemment qu’elle ne comptait pas partager. « Mais bon je suis d’accord, on ne reste qu’entre nous. » Disait-elle dans un dernier rire avant que Concho revienne à l’attaque de sa bouche. Ils ne savaient pas encore qu’ils ne resteraient pas qu’entre eux. Que sans le vouloir, tout allait se compliquer et qu’Alba serait en manque des caresses du danseur. Elle l’aidait à enlever son tee-shirt. Pendant un instant elle observait ce torse parfait aux lignes épurées. Du bout des doigts elle touchait ce nouveau corps avant de regarder Concho d’un œil malicieux. Il s’empressait d’enlever son tailleur alors qu’il l’embrassait. Elle sentait l’empressement. Puis elle riait alors qu’il s’énervait contre l’obstacle. Il ne lui fallut que quelques secondes plus pour réussir et lui enlever le top qui se trouvait en-dessous. « Je trouve aussi. » Répondait-elle avec sourire. Il la rapprocha et Alba pouvait sentir l’érection naissante du danseur. Sensuellement elle descendait ses mains jusqu’à la ceinture du brun. « Il va falloir que tu m’aides. » Elle lui l’espace pour qu’il puisse retirer son pantalon pendant qu’Alba le regardait un désir brûlant.

De mon côté, les choses avaient coulé dans l’ordre naturel, d’où mon étonnement de la sentir prendre ses distances après notre premier baiser. Je n’avais pas l’habitude d’embrasser des femmes sans avoir eu un minimum de connexion avec elles d’abord. Et mon minimum à moi était probablement plus élevé que le minimum des autres. Après tout, mes ex copines ou ex flammes avaient toutes plus ou moins passé par la case meilleure amie avant qu’on ne développe des sentiments. Ally, Amélia, Zelda, Freja … c’en était presque ridicule. Peut-être que finalement, ce n’était pas une formule gagnante pour moi, et que j’aurais dû adopter la méthode d’Alba. Embrasser puis parler après, si l’occasion se présentait. Présentement, je n’avais cependant aucune de ces réflexions dans ma tête. J’étais juste en train de me faire violence pour ne pas me réessayer auprès d’Alba. Je n’étais pas non plus le type lourd, je comprenais les messages quand ils passaient. Heureusement, c’est la blonde qui changea d’avis, reprenant le baiser là où nous l’avions laissé, mais en l’emmenant sur le divan, dans une position bien plus sensuelle et suggestive. Décidément, je pourrais prendre goût à ce genre de fin de soirée. « Oh, si, si, j’aime bien les plans à plusieurs. Mais, j’sais pas si tu as rencontré tous les voisins du coin … ? » En d’autres mots, ils n’étaient pas tous vraiment mon genre. Ou de mon âge. Ou de mes préférences sexuelles. Alba était certainement ma voisine commerçante favorite à partir de maintenant. Évidemment, j’ignorais à ce moment-là qu’un plan à plusieurs, on en aurait un. Juste pas avec des commerçants de la rue. Avec quelqu’une de bien plus importante autant pour elle que pour moi. Nous n’avions absolument aucune idée de ce qui nous attendait, et la soirée actuelle allait nous sembler tellement improbable, quand on y repenserait. J’enlevai mon t-shirt, puis le tailleur d’Alba non pas sans difficulté. Les doigts de la photographe s’égaraient sur ma peau et les miens valsaient encore sur son dos. La jeune femme s’attarda à ma ceinture, réclamant mon aide. « Ah, comme tu m’as aidé pour ta veste ? » Me moquais-je dans un rire avant de relever mes fesses du canapé pour déboucler ma ceinture et les retirer, mes caleçons avec. Tant qu’à déloger Alba, aussi bien ne le faire qu’une fois. Mes vêtements au sol, je rapprochai la blonde qui s’était relevée pour me laisser de l’espace pour me déshabiller. Je lui retirai à son tour le bas de ses vêtements. Puisqu’elle était à la hauteur parfaite pour mes lèvres, je laissai ces dernières se perdre contre la peau de son pubis et de ses cuisses, la sentant frémir après chaque passage de ma bouche.