lucky to have you (pippa)

Un message. Ça n'avait pris qu'un seule message pour que Pippa accepte la folie que lui proposait Nevaeh. Dix jours en Nouvelle-Zélande. Sans doute que Juliann lui en voudrait. Sans doute qu'elle devrait ramer, des jours et des jours, pour se faire pardonner de partir sans lui, lui qui avait toujours dit vouloir y aller. À la défense de la brune, il avait prévu partir avec Tahlia. Et bien que leur relation était compliquée aujourd'hui, Nevaeh ne doutait pas qu'ils renoueraient et qu'ils concrétiseraient leur projet. Ce n'était pas pour blesser son petit ami, elle n'avait pas choisi l'endroit d'elle-même, on le lui avait offert. Et elle était difficilement en position de refuser un voyage pour le boulot, Nevaeh, elle qui n'avait pas pris les voiles depuis bien trop longtemps. Ce n'était pas raisonnable. Puis, Pippa et elle avaient encore des choses à mettre au clair. Non pas qu'elles allaient ressasser les disputes passées, mais toute leur complicité demeurait à se retrouver. Elles la retrouvaient, petit à petit, cette complicité qui faisait d'elles, elles. Ça avait commencé la veille, crevée d'un vol directe de 6h10, à manger des bonbons dans le lit de leur chambre d'hôtel en se remémorant leurs vieux souvenirs d'enfance. Le lendemain matin, 6h45 à l'horloge, excitée comme une gamine, Nevaeh sautait sur le lit. « Alors alors alors, on fait quoi ce matin !? »

On en avait besoin de ce moment là, de cette escapade toutes les deux. Nous avions besoin de nous retrouver, amies et liées comme jamais, et ce voyage, proposé par Nevaeh tombait littéralement à pic. À titre personnel, j’avais, moi aussi, un grand besoin d’horizon. Je travaillais beaucoup, passant mon temps le nez dans mon manuscrit, ou dans des avions entre Bowen et Sydney, aussi avais-je besoin de souffler. Il y avait eu la visite surprise des parents de Liam qui m’avait aussi particulièrement éprouvée. Alors, quand Nevaeh avait parlé de la Nouvelle-Zelande, j’avais sauté sur l’occasion à deux pieds joints. Je n’en avais pas eu grand chose à faire du vol de plus de 6h, ce qui m’importait surtout, c’était de passer du temps avec ma meilleure amie et de faire table rase de ce que nous avions vécu dernièrement. Arrivée tardive, papotage jusqu’à une heure avancée, la nuit avait été courte. Pourtant, le réveil sonna presque à l’aube, un réveille humain qui s’appelait Nevaeh. Ma meilleure amie, visiblement d’excellente humeur, avait décidé de m’insuffler son énergie débordante en sautant sur le lit. Pour tout réponse, elle ne reçu qu’un long grognement. J’avais pris goût aux réveils en douceur de Liam, et celui là n’avait clairement rien à voir.
— Dormiiiiiiiiiiiiiiiiireuuuuuuuh, m’écriai-je en replaçant un épais coussin sur ma tête.

« Dormir, c'est pour les nuuuuuuuuuuls ! », faisait Nevaeh en s'obstinant. Elle tirait sur le coussin de Pippa, presque en se battant avec elle pour le lui retirer. Peut-être se montrait-elle trop insistante, mais quelque part, Nevaeh, avait besoin de s'occuper la tête et l'esprit. Quelque chose lui disait que ce voyage ne serait pas de tout repos, et ça n'avait rien à voir avec les folies dans lesquelles Pippa la traînerait. Elle redoutait plutôt davantage l'attitude de son petit ami qui n'avait à peine répondu à son sms de départ. « Oooooooh, aller, Pippa », la suppliait-elle en lâchant le coussin, se montrant vaincue. « T'es vraiment une marmotte ! » Nevaeh lâcha un rire avant de se lever du lit, farfouillant dans sa valise. « J'vais à la douche. Mais quand je reviens, ça serait bien que tu aies, au moins, un oeil d'ouvert. J'ai trop envie d'aller manger un petit déjeuner avec vue sur les montages. » Sans doute que Juliann aurait adoré la vue. Oh, merde, commençait-elle déjà à culpabiliser ?

Le sommeil était quelque chose d’infiniment précieux pour moi. Je n’avais pas nécessairement besoin de dormir beaucoup, mais travaillant pour moi, sans horaires fixes depuis des années, j’avais pris l’habitude d’écouter mon corps et de ne me réveiller que lorsque ce dernier décrétait que je m’étais assez reposée. Ce qui n’était clairement pas le cas au moment où Nevaeh me sauta dessus après que nous ayons dormi quelques yeux seulement. Je grognai machinalement, rabattant un cousin sur ma tête, comme si cela allait la dissuader de me secouer. C’était mal connaitre ma meilleure amie, je savais pourtant qu’elle n’était pas du genre à abandonner si facilement la bataille. Je me demandais si elle ne yoyotait pas un peu de la touffe de se lever si peu de temps après avoir fermer l’oeil. Elle me laissa jusqu’au moment où elle allait sortir de la douche pour émerger de mon côté. Finalement, après m’être longuement étirée et avoir baillée plusieurs fois jusqu’à m’en décrocher la mâchoire, je me levai. Moins d’une heure plus tard, nous étions à la table du petit déjeuner, mes lunettes de soleil dissimulant les cernes que j’avais sous les yeux. Je n’avais clairement pas assez dormir, mais, malgré tout, je devais reconnaitre que Nevaeh avait une chouette idée de nous offrir l’opportunité d’observer le soleil du matin se lever sur les montagnes.
— Ok…t’as raison, c’est beau. Mais il va me falloir un deuxième café.
Je baillai pour la énième fois de la matinée puis recentrais mon attention sur ma meilleure amie.
— On a quelque chose de prévu aujourd’hui ?