I'm not fazed, only here to sin (lorenzo)

Un énième regard vers l’horloge vintage au-dessus du comptoir de commande, et un énième soupir de la part d’Elmo. La soirée s’allongeait et il détestait être le barista sur le quart de travail du soir. Le matin, au café, c’était les monsieurs cravates et les madames tailleurs, pressés ou en retard pour le travail. Ils prenaient leur café, laissaient trop de pourboire par inadvertance, et repartaient. Il y avait aussi les étudiants qui venaient pour bosser sur leurs travaux, en solo ou en équipe, mais ça ne faisait généralement pas trop de bruit et ils étaient aussi normalement trop paumés pour se prendre davantage qu’un seul latté, même en restant pendant trois heures. Le soir par contre, c’était une autre paire de manches. Il s’agissait des fêtards qui venaient s’avaler des doubles espressos en gueulant entre potes, se préparant à rester éveillés toute la nuit, ou alors des ivrognes de 17h qui venaient se prendre un café bien fort avant de rentrer à la maison avec la famille. Bon, il généralisait, Elmo, mais ça ressemblait quand même à ça. Il regardait toujours plus l’horloge quand il était de soir. Surtout quand il avait une soirée de planifiée après. Ce soir, c’est Lorenzo qu’il rejoignait sur la rue festive et animée de Bowen où on retrouvait la plupart des endroits branchés de la ville. Ils n’avaient pas encore décidé où ils iraient, ils s’étaient dit qu’ils iraient au feeling.

À 22h, Elmo tourna la pancarte dans la porte du café local, indiquant que c’était désormais fermé. Finally. Il verrouilla derrière lui, s’assura qu’il avait bien fermé les lumières qu’il avait à éteindre, puis il se dirigea vers le coin qui faisait encore du bruit à cette heure-ci. Ce n’était pas bien loin, un gros dix minutes à pieds. Il repéra rapidement Lorenzo en train de fumer un joint. Enfin, avant de le voir, il l’avait senti, fallait l’admettre. « Yo fuckface on m’attend même plus maintenant ? » Avait-il lancé alors qu’il était de l’autre côté de la rue à traverser. Il avança vers Enzo, se fit klaxonner par une voiture qui arrivait un peu plus vite que calculé, mais s’en moqua d’un rire insouciant. « J’peux ? J’dois décompresser de cette soirée de merde. » Il leva ses deux doigts, prêt à attraper le joint avant même qu’Enzo ait donné le feu vert.

Ton retour en ville est encore récent et il va sans dire que tu manques légèrement de temps pour tout faire. Comme ta jumelle est déménagée avec son mec, ton meilleur ami à l'occurrence, tu as dû te trouver un loyer en ville et tout organiser de sorte à pouvoir intégrer ton logement au plus vite. La caserne t’a accueilli quelques soirs, les hôtels miteux de la ville aussi par la même occasion, mais maintenant que t’es installé, tu te sens prêt à commencer un nouveau chapitre de ta vie. Oublier Gigi, tirer un trait sur elle définitivement et te concentrer sur l’avenir ou plutôt sur les soirées endiablées données à Bowen. Ce soir, c’est à Elmo que tu as donné rendez-vous. Il t’a manqué ce petit con durant ta période d’absence et il te tarde de pouvoir mettre le feu au cul à cette ville en sa compagnie. Point de rencontre donné, tu t’y rend à l’avance, ce qui ne te ressemble pas trop… En attendant ton compagnon de teuf, tu roules un joint sagement histoire de passer le temps. Tu mises énormément sur cette soirée, car t’en a plein le cul de te sentir dépressif… et ennuyant. Ce n’est pas dans ta nature. Tu as envie de retrouver celui que tu as toujours été et personne n’est plus qualifié que ce barista pour t’aider à y parvenir. Joint coincé entre les pulpeuses, tu tires une latte, suivi d’une seconde lorsque la voix de ton ami parvient à ton conduit auditif. L’entrée en matière franchement, tu éclates de rire, c’est plus fort que toi. ‘’ Tu crois que j’fais quoi depuis quinze minutes sesame street ? ‘’ Ta voix porte jusqu’à lui alors qu’il se prend pour un invincible en traversant la rue dangereusement. Lorsqu’il arrive à ton niveau, il te demande directement le joint que tu lui tends du bout des lèvres. ‘’ À ce point ? Raconte.‘’ Tu hausses légèrement un sourcils. Après, tu ignores comment il fait pour bosser dans le service à la clientèle. Les gens sont tellement ingrats de nos jours. ‘’ Content de te revoir. ‘’ Dis-tu simplement, l’air faussement blasé avant de te mettre à rire. Huit mois que tu ne l’as pas vu… mais après tout, c’est une bonne chose qu’il choisisse d’agir comme si tu n’avais jamais quitté le pays ‘’ T’as envie d’essayer un nouveau truc ? J’ai entendu parler d’une soirée chez les nudistes ! ‘’ T’es pas pudique et t’es toujours prêt à épater la galerie avec tes attributs… Il faut dire que tu ne connais pas l’endroit en question, mais le nom de ce dernier se veut plutôt éloquent. Après, tu peux te tromper. Suffit de mettre le mot cul partout pour attirer les gens alors qu’au fond il ne se passe rien. Quoi qu’il en soit, t’as l’aubergine au taquet et c’est ce qui te fait marrer.

Huit mois sans voir la gueule de Lorenzo, Elmo commençait à trouver le temps long. Certes, il avait d’autres potes un peu fucked up avec qui faire des conneries mais soyons honnêtes, ça n’égalait jamais Enzo. Ses autres potes, ils étaient encore à l’université, ils avaient leur carrière à atteindre, ils devaient rentrer en un seul morceau chez eux pour pouvoir poursuivre leurs rêves. Enzo et Elmo, ils en avaient un peu moins grand-chose à foutre, de l’état dans lequel ils rentraient chez eux. Dès que Lorenzo était rentré au bercail, Elmo avait commencé à le harceler par message pour qu’ils sortent un soir. C’était le mieux qu’il pouvait offrir. Il savait que son ami cherchait un endroit où vivre depuis que sa jumelle était partie vivre avec son mec, mais Elmo avait déjà une colocation complète avec Vega et Lena. Déjà que tous les trois se marchaient un peu sur les pieds dans l’appartement, ce n’était pas le moment de sous-louer le canapé. Et puis, ce canapé, il était trop souvent utilisé par les trois joyeux lurons de toute façon. Bref, tout ça pour dire qu’au lieu d’offrir l’hospitalité, Elmo offrait le booze. C’était tout aussi bien, à son avis.

Après avoir survécu à l’intersection et à la voiture, Elmo sourit en retrouvant ce surnom qu’Enzo n’avait certes pas inventé, mais que l’italien n’entendait pas souvent depuis qu’il était à Bowen. « J’parlais de m’attendre pour le joint, stronzo. » Lâcha-t-il quand il arriva à la hauteur de son ami. Il en profita aussi pour réclamer ce même joint dont il avait cruellement envie après cette journée de boulot. « Rien, c’était juste long. Et les gens tippent mal. » Il attrapa le joint à même les lèvres de Lorenzo et l’inséra entre les siennes. Il tira une latte, recracha la fumée au-dessus de leur tête, et redonna le joint à son pote. « Content de te revoir aussi. » Il esquissa un sourire qui contenait mal sa bonne humeur de le retrouver. Pour la suite, il aurait fallu qu’il garde le joint pour deux ou trois coups encore. « Une soirée chez les nudistes ? What the fuck, bro ? » Il éclata de rire. « À la plage nudiste ? » Parce qu’il y avait effectivement une plage nudiste parmi toutes les plages de Bowen, mais Elmo n’y avait jamais mis les pieds. Apparemment, c’était pas trop des gens de leur âge. Il ignorait que c’était au Nudie Patootie, qui visait plutôt une clientèle dans la vingtaine, dans la trentaine, et qu’ils pourraient carrément s’éclater là-bas.

S’il y a bien une chose qui t’a manqué durant ces huit longs mois, c’est bien la présence d’Elmo. Sa bonne humeur et sa connerie qui s’apparente à la tienne, vos délires à la con qui n’en finissent jamais. Tu sais qu’il est le remède miracle au mal qui te ronge et tu sais qu’avec lui, tu finiras par oublier, du moins, l’espace d’une soirée. Il t’a bombardé de message, mais au fond, un seul aurait suffit. Tu es toujours partant pour une soirée en sa compagnie, car vous ne pouvez jamais prévoir à l’avance dans quel état vous terminerez. Attendant au coin de la rue, un large sourire voit le jour sur ton visage lorsque tu crois reconnaître ton ami accompagné de ses surnoms à deux balles. Aucun doute, il s’agit bien de lui, ce qui te pousse à délaisser cette pose avachi contre quelque chose de plus fier. ‘’ Je sais. ‘’ Tu aimes taquiner, tu enchaines les jeux de mots, pas toujours drôle, mais qui a son charme somme toute. Le joint disparaît, pas longtemps, avant de revenir se coincer entre tes pulpeuses. La journée à été longue pour lui et tu peux comprendre que travailler dans le publique, c’est un peu la merde. Des gens qui se croient tout permis ou supérieur à toi parce que eux, ne bossent pas dans un café ou dans un supermarché. Ils s’imaginent que ce sont uniquement des illettrés qui bossent dans ce genre d’endroit alors que pas du tout. ‘’ J’te file un vingt si tu me fais une petite danse sexy. ‘’ Sourcil arqué, tu le défis du regard avant de poursuivre sur autre chose. Il y a ce bar dont tu as entendu parlé, mais ou tu n’as jamais mit les pieds. On n’en dit que du bien, mais si la clientèle est la même qu’à la plage, tu risques de te lasser assez tôt des poitrines pendantes et des zizis fripés. L’hilarité de ton pote provoque le même cataclysme chez toi. ‘’ Pas la plage du con ! ‘’ Dis-tu avant de t’étouffer avec le nuage de fumée. ‘’ Un Bar… le Nudi je sais pas quoi… ‘’ Joint offert, tu attends qu’il le saisisse avant d’ouvrir la marche. ‘’ Apparemment y’a des jeunes… c’est un bar ou tu bois en sous-vêtement ou à poil selon le niveau d’acceptation de ton corps. ‘’ Elmo est beau gosse, il ne risque pas de reculer devant un tel défi. Il est curieux autant que toi et ne semble pas avoir de tabous. ‘’ Ils ont annoncé une soirée - défis - ‘’ Tu ignores ce que ça veut dire pour eux, mais une chose est sûr, tu n’as peur de rien et t’es toujours prêt pour des émotions fortes. ‘’ Qui sait, peut-être qu’on sera amené à se faire une petite branlette mutuelle. ‘’ Tu imites le roucoulement d’une poule tout en lui mettant une main au cul.

L’italien éclata de rire, reculant de quelques pas en faisant même un tour sur lui-même, sur le trottoir, avant de revenir vers Lorenzo. Son rire redevint un sourire. « Arrête, tu vas me tenter. » Le pire c’est qu’il aurait peut-être pu se débrouiller. « Tu sais qu’en lâchant l’uni, ça m’a quand même traversé l’esprit. M’trouver un bar de danseurs où aller faire une fortune en me montrant la queue à qui le veut. » Qu’est-ce que mama Santavenere aurait dit, de savoir que son fils, ayant quitté le nid familial pour devenir infirmier en Australie, avait plutôt fait carrière comme danseur à gogo ! Elle aurait fait une crise cardique, drette-là. « Remarque j’aurais pu juste devenir pompier comme toi. Ça revient un peu à ça. » Il esquissa un sourire moqueur. En tout cas, à voir le compte Instagram d’Enzo, on pouvait rapidement confondre. Et comme si cette conversation n’était pas assez, le jeune homme sembla vouloir amener ça vers la réalité. Il proposa en effet une soirée en sous-vêtements pour un événement ce soir, un truc du genre. Elmo ne comprit pas vraiment de quoi il s’agissait. Tout ce qu’il savait, c’était que c’était un peu weird et qu’il n’avait pas envie de se retrouver avec papi et mami sur la plage, forcé à regarder leurs sexes pendants et ridés. Lorenzo rectifia cette idée, parlant plutôt d’un bar. « Le Nudi je sais pas quoi. C’est encourageant ton truc, Enzo. Pas louche du tout. » Il attrapa de nouveau le joint entre les doigts de son ami cette fois et en tira un second coup avant de le lui redonner distraitement. Ils avaient commencé à marcher vers cet endroit qui ne portait même pas encore officiellement de nom. Son ami italien poursuivit ses explications. « Avant de te dire oui ou non, c’est quoi toi, ton niveau d’acceptation de ton corps ? Si j’dois voir ta graine jusqu’à trois heures du mat’, j’vais peut-être changer mes plans live. » Elmo s’esclaffa. Mais il savait que s’ils se mettaient à boire avec pas trop de modération, ils finiraient tous les deux à poil. Généralement, c’était les circonstances et les lieux qui les empêchaient se rendre jusque-là. Mais si le bar était fait pour ça … ils n’auraient aucune limite. Surtout s’il était question de défis. « Pas question que tu touches à Excalibur. » Il venait de le nommer. À chaque fois, son sexe avait un nom différent. Un jour, il trouverait le surnom parfait, à la hauteur de sa magnifique virilité.