an evening i will not forget (fede)

J’aimais les belles choses et cela incluait bien évidemment la mode, que je considérais comme un art depuis que je fréquentais Livio, malgré ça, je n’avais jamais été du genre à faire du lèche-vitrine. Ca n’était simplement pas mon truc de passer des heures dans une boutique à la recherche de LA pièce pour parfaire ma tenue, je préférai largement dispenser ce temps-là à arpenter une brocante à la recherche d’une pépite. C’était plus mon style, en effet, de déambuler au milieu des vieilleries, mais aujourd’hui était un jour spécial puisque j’accompagnais mon frère pour choisir son costume de marié. Leandro assis sur mes genoux, j’attendais, installé dans un petit canapé, que Fede tire les rideaux de sa cabine pour nous montrer sa première tenue. Je donnais à mon fils un petit ours en caoutchouc à mâchonner pour ses dents, ses gencives lui faisaient mal ces temps-ci et sa première dent n’allait pas tarder à sortir. C’est à ce moment là que Fede sortit de la cabine, vêtu d’un premier costume. Je l’observai un moment avant qu’un large sourire ne s’imprime sur mon visage.
— T’es beauuuu ! le complimentai-je. Tu aimes ?

@fede luciano

La mode c’était pas vraiment ton point fort. Alors quand ta petite soeur t’avait proposé d’aller faire les magasins pour t’aider à trouver ton costume de marié, tu avais sauté sur l’occasion. Même si ça t’enchantait pas de passer ta journée à essayer des vêtements, on va pas se le cacher. Mais bon, c’était pour le jour le plus important de ta vie, pour sceller ton amour avec la femme la plus importante de ta vie. Il fallait bien faire un effort. Alors qu’Aura attendait sur un petit banc en face de ta cabine d’essayage avec ton neveu sur les genoux, tu enfilais le premier costume que vous aviez choisi. Après avoir boutonné ta chemise, l’avoir rentré dans ton pantalon, tu sortais de la cabine pour montrer à ta soeur à quoi tu ressemblais. « C’est vrai, tu trouves ? » demandas-tu en te regardant dans le miroir. T’avais l’impression d’être un pingouin. Elles étaient loin les années où tu mettais un costume, voir même trop rare. Tu t’observais dans la glace en voyant ta soeur avec son beau sourire sur les lèvres. « J’aime bien, mais j’me sens pas à l’aise » dis-tu en tournant un peu sur toi-même pour voir tous les angles de ta tenue. « J’ai tellement pas l’habitude de porter un costume. Même Leandro ça le fait rire » ajoutas-tu dans un rire, observant ton neveu qui était entrain de rire aussi sans raison.

J’avais rarement vu mon frère en costume, les occasions d’en porter avait été rares. Il n’y avait pas eu de mariage dans notre famille proche depuis un certain temps, et lorsque mon frère s’habillait chic, en général, il se contentait d’une chemise, ce qui lui allait déjà très bien. Mais avec Livio, qui adorait la mode et qui avait une panoplie de costume dans ses placards, j’avais, de mon côté aiguisé mon regard quand à la mode masculine.
— Je trouve qu’il te va vraiment bien oui, confirmai-je en regardant mon frère.
Il s’observa dans le miroir, tourna sur lui-même pour avoir accès à tous les angles du costumes, puis nota qu’il ne ne sentait pas à l’aise. Mon fils, comme de fait exprès, se mit à rire pile à ce moment là. Le rire des bébés étant communicatifs, Fede et moi imitâmes Leandro.
— Tu portes rarement des costumes, c’est normal que tu ne te sentes pas à l’aise tout de suite, c’est comme de porter des talons ou…même de repasser à des chaussures fermées quand t’as été en nu-pieds tout l’été. Tu vas t’y faire. T’es très beau en tout cas. Tu veux en essayer un autre ?

T’aimais pas vraiment être en costume. Tu te sentais vraiment trop engoncé là-dedans et pas à l’aise du tout. Mais tu savais très bien que si tu te mariais en jean et en t-shirt, la future madame Luciano te le ferai payer. Alors tu avais fais appel à Aura, la petite amie du créateur de mode mais surtout ta petite soeur qui allait être intransigeante avec toi. « T’es sûr que j’ai pas l’air d’un pingouin ? » demandas-tu à ta soeur en faisant la grimace. Bon, tu voulais faire les choses bien alors tu n’allais pas choisir le premier costume venu. Mais ça faisait déjà deux tenues que tu essayais et tu n’étais toujours pas satisfait. « Merci » soufflas-tu quand ta soeur te dit que tu étais beau. Un petit sourire en coin et tu te regardais une dernière fois dans le miroir. « Oui, je veux trouver le costume parfait pour le mariage parfait avec la femme parfaite » affirmas-tu à ta soeur avec tout ton sérieux. Rapidement, tu te mettais à rire. « Tu trouves que j’en fais trop ? » demandas-tu en serrant les dents, souriant à peine. T’étais vraiment stressé aujourd’hui, parce que tu voulais vraiment trouver la tenue de tes rêves pour que Letícia soit éblouie le jour du mariage.

Il était clair que la tenue de prédilection de Fede n’avait rien d’un costume cravate. Je pouvais compter sur les doigts d’une main les fois où je l’avais vu en porter, mais en le voyant ainsi face à moi, je ne pouvais que réaliser à quel point cela lui allait. Pas pour tous les jours, évidemment, cela ne lui ressemblait pas, cela ne collait pas à sa personnalité, mais il n’avait rien d’un pingouin contrairement à ce qu’il semblait croire.
— Pas du tout, le rassurai-je.
Il était beau et très élégant, et puis, ce costume était pour une occasion très spécial et comme mon frère ainé le souligna ensuite, il souhaitait trouvé la tenue parfaite. Je souris en l’entendant parler de sa future femme, puis, me levant, replaçant mon fils contre ma hanche, je m’approchai de Fede pour lisser le tissu sur ses épaules.
— Ca me rassure au contraire, que tu en fasses trop, le taquinai-je en riant, je commençais à croire que tu étais devenu complètement australien !

Personne ne t’avait vu avec un costume trois pièces, ou si c’était arrivé c’était rare. Pour les grandes occasions en général, tu t’efforçais de bien t’habiller. Mais t’étais plus tranquille à porter une chemise un peu trop ouverte et un jean avec des chaussures confortables. Tu demandais quand même à ta soeur de quoi tu avais l’air, si ce n’était pas trop. Mais dans ses yeux tu voyais de la fierté pour son grand frère et ça te faisait trop plaisir. « Si tu le dis, j’te crois » dis-tu simplement en te regardant dans le miroir. T’avais envie que tout soit parfait pour ce mariage. C’était une seule fois dans ta vie, tu ne comptais pas te marier plusieurs fois à plusieurs femmes. Leticia était l’amour de ta vie et tu l’avais su dès que tu l’avais vu la première fois. Tu te regardais dans le miroir et tu voyais ta soeur se lever avec ton neveu dans ses bras. Elle venait lisser le tissu sur tes épaules qui était un peu froissé. « Madre mia ! Je ne serai jamais un vrai australien, rassures-toi » dis-tu avec un léger rire. Tu vous regardais dans le miroir, la petite famille Luciano. « Qui aurait cru qu’un jour, tu aurai un enfant avec Livio et que j’allais me marier ? » demandas-tu à ta soeur avec un regard attendri dans le miroir. « Surtout la partie : je vais me marier. J’y crois toujours pas » ajoutas-tu avec un léger rire.

J’explosai de rire à la réaction de mon frère ainé. Il n’était pas complètement et il me le confirmait vigoureusement, jurant en italien.
— Tu bois leur café infame sans même grimacer, notai-je pour le taquiner, ça me laissait des doutes !
Fede avait quitté l’Italie à dix huit ans, et s’il était revenu de nombreuses fois sur sa terre natale, il s’était longuement imprégné de la culture australienne, son accent était beaucoup moins prononcé que celui d’Enzo ou le mien et il aimait ce pays, cela se voyait. Mais il n’oubliait pas pour autant ses racines, je le taquinai en disant cela. La conversation reprit un court plus sérieux, et tendrement, je baissai le regard sur Leandro.
— Je sais oui…c’est fou.
Surtout quand on connaissait mes antécédents avec Livio, les choses n’avaient clairement pas été simple au début. Léti et Fede en revanche, cela avait fait des paillettes d’amour presque tout de suite.
— Tu vas te marier, fis-je alors qu’un sourire heureux se peignait sur mon visage, c’est dingue en effet.

On clôture là ?

« Madre mia, Aura, tu me prends pour qui ? Je fais semblant. Fallait bien que je m’intègre dans ce pays quand même » dis-tu avec un rire. Bon okay, elle avait raison pour le coup mais c’était bien la seule chose que tu aimais. Les pizzas et les pâtes de ton pays te manquaient énormément, tu en avais fais le plein pendant votre voyage avec ta future femme. Et puis tu étais celui des trois Luciano qui avait le moins d’accent, même si quand tu parlais anglais c’était toujours très chantant vu que ça résonnait quand même un peu tes racines italiennes. « C’est plus que fou ! C’est dingue ! » dis-tu avec un sourire. Tu allais te marier, Aura avait un enfant et elle allait aussi se marier. C’était vraiment pas un truc auquel tu t’attendais, et surement qu’elle non plus mais ça vous était tombé dessus. « Sono felice » dis-tu dans ta langue natale, un sourire attendrissant vers ta soeur mais aussi ton neveu.


FIN DU SUJET.