Time for redemption [Blake]

J'en avais assez de cette situation. Je n'avais pas parlé à mon père depuis plusieurs jours. Il avait appelé une fois, envoyé un texto aussi, mais je n'avais pas répondu. Je savais que c'était pas cool, mais je suis sûr qu'il avait compris que je ne voulais simplement pas parler. Il devait quand même se demander où j'étais passé. Heureusement pour moi que j'avais une amie en or, Amara avait accepté de m'héberger pendant quelques jours, comprenant que j'avais besoin de mettre de la distance entre moi et mon père pendant quelques temps, histoire de digérer la nouvelle qu'il m'avait balancé sans ménagement. Grâce à elle, j'avais compris que j'avais eu une réaction disproportionnée. Cependant, je restais persuadé que j'avais eu raison de mal le prendre, mais je n'avais sûrement pas réagi de la bonne façon. Peut-être que mon père ne se serait pas emporté si je n'avais pas moi-même commencé à monter dans les tours. Ça me faisait mal de le reconnaître, mais une fois de plus, Ams' avait raison. Et même si j'étais conscient que je n'allais pas me faire à cette situation immédiatement, en un claquement de doigt, j'étais prêt à faire un effort. De toute façon, je n'avais pas le choix. Je ne supportais plus cette tension qui me séparait de mon père. On était proche, et même si j'aurais adoré avoir mon propre appartement et une totale indépendance, il me manquait. Savoir qu'il m'en voulait me faisait un peu culpabiliser. Putain que j'aimais pas ça ! Je voulais arranger les choses, même si je savais que ce ne serait pas facile. Je n'étais pas du genre à demander pardon, et pourtant je ne voyais pas d'autres solutions pour mettre un terme à notre conflit. Je ne savais pas encore ce que j'allais lui dire. certainement pas "je suis désolé", comme ça, direct. J'en étais incapable. Mais je trouverai bien un moyen de lui exprimer mes regrets. Je redoutais un peu sa réaction. Si ça se trouve, il était toujours en colère, lui. Peut-être qu'il avait besoin de plus de temps, peut-être qu'il ne voudrait même pas m'écouter. Peut-même qu'il s'excuserait même pas. Parce que bon, ok, j'avais mal réagi, mais je n'étais pas le seul à avoir des torts dans cette histoire. Lui aussi avait manqué de tact après tout. Ça nous était déjà arrivé de nous embrouiller, mais d'habitude ça ne durait pas si longtemps. J'espérais qu'on allait pouvoir dépasser ça, comme on y arrivait toujours jusque là. J'espérais aussi que cette fois, il serait plus diplomate. Non parce que j'étais prêt à mettre de l'eau dans mon vin, mais s'il ne faisait pas de même, ça allait compliquer mon initiative.

Il était 10h quand j'arrivai devant la maison. Il était tôt étant donné nos horaires de travail tardifs à tous les deux. Si ça se trouve, mon père dormait encore. Mais je ne pouvais pas attendre, j'avais déjà eu suffisamment de mal à me décider à venir, alors une fois que j'eus le cran de me bouger, je me décidai à rentrer à la maison tout de suite, avant de changer d'avis. De toute façon, je n'avais pas été au taf hier, trop perturbé par tout ça. J'avais zoné dans l'appartement d'Amara toute la journée, à ruminer tout ça devant la télé. Je n'avais même pas appelé au Wojna pour les prévenir. Mais ça m'était égal pour le moment, je trouverai bien un bobard à raconter au gérant d'ici ce soir.

Je tournai la clé dans la serrure et entrai en prenant soin de ne pas faire trop de bruit, au cas où mon père dormirait encore. Pour une fois, j'étais prévenant. Mais je n'allais pas débarquer comme un éléphant dans un magasin de porcelaine alors que j'essayais d'arranger les choses avec lui. Si je le réveillais en sursaut en claquant la porte, y avait peu de chances pour que ça le mette de bonne humeur. J'imaginais mal comment on pourrait engager la conversation s'il se mettait direct à râler.

C'était le calme plat, pas un bruit aux alentours. Je fis un tour dans le salon, personne. Dans la cuisine non plus. Il dormait donc. Je me voyais mal aller le réveiller juste parce que j'avais besoin de parler tout de suite. Tant pis, j'attendrai, même si la patience c'était loin d'être mon fort, surtout dans ce genre de situation. Plus j'attendais, plus je redoutais cette confrontation, et plus j'avais envie de me barrer. Mais il était temps de mettre un terme à cette dispute, et je devais le faire maintenant. Et puis je n'allais pas squatter chez Amara éternellement non plus. Elle était adorable, mais elle n'avait sûrement pas envie de me voir m'incruster indéfiniment. Je bus plusieurs cafés, regardant inlassablement l'horloge de la cuisine, soupirant à de nombreuses reprises. Putain de suspense, ça me tuait ! En ayant marre de faire les cent pas en enchainant les lampées de caféine, je me posai sur le canapé et allumai ma console. Une petite partie de "Call of" me détendrait sûrement. Massacrer d'autres joueurs virtuellement, ça c'était un putain d'exutoire !

Je m'acharnais à dézinguer du péquenaud, clope au bec, sourcils froncés, quand le râle d'un bâillement me sortis de ma partie enragée. Je mis sur pause et tournai la tête pour voir mon père apparaître dans le salon. Ben voilà on y était. Je ne savais même pas par où commencer, j'étais décontenancé par son air surpris. Ben oui forcément, il ne s'attendait pas à me trouver là alors que ça faisait des jours que je faisais le mort.

- Salut papa, dis-je en affichant un petit sourire forcé.

Bon, la crise était passée, il avait fallut le temps tout de même. Mais vu qu'on était pareil à ce niveau-là, ces quelques jours de distances l'avaient probablement apaisé autant que moi. Enfin... J'avais digéré la nouvelle, j'avais quelques remords et j'étais prêt à me faire pardonner avec les moyens du bords, même si ce n'était pas mon fort. Mais je n'en restais pas moins susceptible, et il en faudrait peu pour me faire vriller à nouveau. Et je comptais sur mon père pour donner le ton de la conversation, de façon à ce que celle-ci ne tourne pas une nouvelle fois en pugilat. J'étais prêt à faire un effort si lui aussi prenait la peine de faire de même.

Je n'avais même pas pensé à lui, à ce qu'il avait ressenti ces derniers jours pendant que je ruminais chez Amara. Mais je n'étais pas doué pour éprouver de l'empathie ou pour me mettre à la place des autres. Je me préoccupais avant tout de ma petite personne et de mes contrariétés, oubliant bien souvent le mal que je pouvais causer à mes proches. Mais j'étais là, j'étais rentré et décidé à mettre un terme à cette situation que je ne supportais plus.

Lorsque j’aperçus enfin mon père, visiblement à peine réveillé, clope au bec, je l'observai en essayant d'identifier son humeur.

- Salut… Je ne m’attendais pas à te voir ici ! Comment tu vas ?

Il avait l'air assez serein, en tous cas il était visiblement de meilleure humeur que la dernière fois qu'on avait parlé. Ou alors il n'était pas encore totalement réveillé. Qu'importe ! J'allais profité du calme retrouvé pour essayer d'effacer les rancœurs qui nous avaient poussés à nous dire des choses franchement pas sympas quelques jours plus tôt.

- Ben... je crois que j'ai chopé la chtouille, mais à part ça, ça va... Et toi ?

Je n'étais pas du genre à faire ce genre de confidences à mon père, mais j'avais vu là une occasion de crever l'abcès tout en évitant le sujet qui fâche. Même si je me serais bien passé de me ramasser une MST qui me démangeait le paquet, je devais reconnaître que l'idée de détourner la conversation que je redoutais par un sujet plus léger, me soulageait grandement. Mais c'était bien le seul et unique point positif à tout ça. Parce que la chaude-pisse c'était pas une partie de rigolade, contrairement aux jouissances lubriques qui en étaient à l'origine.

J'abandonnai la manette de jeu sur le canapé et rejoignit mon père à la cuisine, me servant un nouveau café. Putain, j'allais être une vraie pile électrique toute la journée ! Je ne savais même pas combien de tasses j'avais bues. J'observais mon père, ne sachant pas vraiment si je cherchais mes mots ou si j'attendais que lui dise quelque chose. J'aurais préféré qu'il parle le premier, pour savoir sur quel pied danser. J'étais un peu embarrassé de la façon dont je lui avais parlé, mais j'étais aussi en colère quand je repensais à ce que lui m'avait dit. J'étais tiraillé entre l'envie de me réconcilier avec lui et la rancœur que j'éprouvais encore à son encontre.

- Désolé de pas avoir répondu à tes messages... déclarai-je en soupirant.

C'était déjà pas mal, c'était peu de choses comparé aux excuses que je lui devais pour tout ce que je lui avais dit, mais je ne me sentais pas le courage, ni l'envie, d'aborder directement le sujet de notre prise de bec virulente. Je marchais sur des œufs, redoutant à nouveau la suite de cet échange.

On avait tous les deux accusé le coup, même si dans mon esprit rien n'était réglé. Malgré ça, j'avais vraiment envie de repartir sur de bonnes bases avec mon père, je n'aimais pas qu'on se dispute. Même si ça partait toujours un peu loin, ce n'était jamais vraiment volontaire, je ne faisais pas exprès de laisser ma colère prendre le dessus et je savais que c'était pareil pour lui. Je crois qu'au final je lui en voulais parce que lui et moi on était pareil. Et ce que je lui reprochais n'était pas vraiment légitime parce que je lui faisais la même chose. Mais je n'y pouvais rien, je ne savais pas me contrôler...

Partager avec mon père mes problèmes de tuyauterie avait au moins l'impact positif de briser la glace. On se parlait, c'était un bon départ. Même si j'étais pas ravi d'avoir l'entre-jambe qui me chatouille, et pas de façon agréable... Je savais même pas où j'avais chopé ça, ni de qui. Et je savais encore moins à qui je l'avais refilé...

- T’as été voir le médecin ? Ou au moins avisé tes conquêtes ?

- Ben... Je vais le faire.

J'étais pas du genre à courir chez le médecin au moindre petit désagrément, mais je devais avouer que là c'était nécessaire. Pour ce qui est de mes partenaires, elles se rendraient bien compte toutes seules que ça leur démangeait sous le capot, elles n'avaient pas besoin que je leur envoie une notification de contamination. Et pourquoi pas des chocolats et une petite carte, tant qu'on y était ? C'était pas comme si c'était de ma faute, j'avais pas demandé à choper ça moi...

- Je vais bien, merci de demander…

C'était quand même pas hyper détendu comme conversation, je sentais une certaine tension entre nous malgré le calme de nos paroles. Ça me saoulait que ce soit aussi difficile de passer à autre chose... D'habitude c'était plutôt lui qui faisait un pas vers moi, tête de mule que j'étais ! Mais pour une fois, je me disais que c'était à moi de rendre les armes le premier, je lui devais bien ça. D'où mes petites excuses. Bon, c'était juste concernant le fait que j'avais ignoré ses messages, mais je trouvais que c'était déjà énorme étant donné mes difficultés à faire mon mea culpa... D'ailleurs, mon père me connaissait assez pour le savoir. C'est sûrement pour ça qu'il me regardait avec cet air surpris.

- T’avais besoin de temps pour digérer… Je peux comprendre, j’ai eu moi aussi besoin d’un peu de temps. Je ne m’y suis peut-être pas très bien pris pour te dire tout ça non plus. Je suis désolé.

Je ne pouvais qu'être d'accord avec lui, il n'y était pas allé avec des pincettes, mais je gardais mon opinion pour moi, ne voulant pas relancer la dispute. Notre réconciliation me paraissait suffisamment fragile comme ça, pour que je ne remues pas le couteau dans la plaie. Du moins, tant que je parviendrais à me contenir. Et je pouvais y arriver, tant que mon père ne me piquait pas au vif avec une remarque déplaisante. Il faisait un effort, alors moi aussi, même si ça me coutait de prendre sur moi.

- Je sais... soupirai-je.

Je sortis moi aussi une clope et l'allumai, enchainant avec une gorgée de café. Je ne savais pas quoi lui dire de plus et ce silence commençait à me peser. J'avais l'impression que malgré nos excuses mutuelles, on avait du mal à passer le cap de ce qui arrivait à notre famille.

- Elles sont comment mes sœurs ? Comment elles l'ont pris quand tu leur a annoncé que... t'étais leur père ?

Je n'étais pas certain d'avoir envie de le savoir, j'avais posé la question surtout pour combler ce silence insupportable. Et je redoutais ce qu'il allait me dire. J'espérais secrètement qu'il ne montrerait pas trop d'enthousiasme, je n'étais pas sûr d'arriver à faire bonne figure s'il se réjouissait d'avoir rencontré ses deux autres filles.

Causer des petits désagréments qui touchaient ma tuyauterie, c'était pas vraiment mon truc. Mais là tout de suite, j'étais ravi que la conversation s'oriente autour de ça plutôt qu'autour de notre dernière prise de bec. J'avais pas envie de remuer le couteau dans la plaie, on s'était dit suffisamment de choses déplaisantes comme ça. Je lui en voulais toujours cela dit, mais la pression était redescendue, alors j'étais prêt à mettre tout ça derrière nous. Bon, ça prendrait du temps, mais j'avais envie que la situation s'améliore entre nous. Même si on se disait des trucs blessants par moments, j'aimais mon père et m’engueuler avec lui ne me faisait pas plaisir. Malheureusement je ne savais pas bien contrôler mes émotions quand j'étais contrarié, du coup ça partait un peu vite. Et de son côté, il prenait la mouche assez rapidement aussi. Bref, malgré ça, on semblait tous les deux prêts à avancer.

- Tant mieux…. ça se propage vite cette merde…

Bordel... J'aimais pas aller voir le médecin pour ce genre de trucs, ni pour autre chose d'ailleurs. Moins je le voyais, mieux je me portais. La vue de la blouse blanche, ça me rendait hyper tendu. Mais je n'avais pas le choix, c'était pas ma première MST mais je m'y faisais toujours pas. Par contre, j'avais clairement pas l'intention d'en informer mes conquêtes. Je me voyais pas passer les coups de fil de la honte, il y avait assez de rumeurs pas très jolies qui circulaient sur mon compte.

J'avais envie de mettre ma rancœur de côté, et je voyais bien que mon père essayait de faire de même. Malgré ça, on était pas encore très à l'aise. On s'était bien chahutés quand même la dernière fois... On n'allait pas oublier les mots un peu durs qu'on avait échangé en un claquement de doigt. Je tirai nerveusement sur ma cigarette, essayant d'aborder le sujet qui fâche sans que ça tourne à nouveau au pugilat.

- En fait, ce n’est pas moi qui lui ai appris. Flore est arrivée ici en pleine crise, les larmes aux yeux et elle s’est mise à m’engueuler. Comme si j’étais le pire des menteurs de la terre et m’a mis un test d’ADN en pleine gueule. En fait, mon cher frère lui a caché et m’a aussi caché le fait, qu’en réalité il était stérile et que j’étais le père de Flore. Mais, c’est écrit noir sur blanc…

Je grimaçai en entendant ses explications. Je sais bien que c'était moi qui avais posé la question, mais finalement je ne savais pas si j'étais prêt à entendre tout ça. Lui ne voulait pas fuir la réalité, mais moi si.

- J’ai l’impression qu’il s’est vengé sur elle, parce qu’il m’en voulait et ça, ça me fait encore plus mal que tout ce mensonge en vrai. J’aurais préféré le savoir, ou qu’au moins il lui permette d’être heureuse. Si tu savais comment je me suis senti impuissant quand elle s’est effondré dans mes bras, je m’en veux tellement t’a pas idée. Je m’en veux aussi pour tout ça… Kaz et toi êtes ce que j’ai de plus précieux, c’est horrible de savoir que quelqu’un à souffert à cause de mes fautes. Elle n’y est pour rien, tu peux m’en vouloir, mais ça ne changera pas le fait qu’elle soit ma fille aussi.

Putain que j'aimais pas ces mots... Je savais qu'on ne pouvait pas nier la génétique, et que de toute façon mon père n'avait pas l'intention de faire comme si tout ça n'était pas arrivé. Mais moi je serais volontiers rester dans le déni... J'aimais beaucoup Flore, mais jusque là ce n'était que ma cousine. Savoir que mon père était aussi le sien, ça ne m'enchantait pas. Et je n'aimais pas qu'il me rappelle que ce n'était pas de sa faute à elle. Je le savais quand même, j'étais pas débile ! Et cette dernière phrase "elle est ma fille aussi"... Il y avait rien à faire, j'étais pas prêt à entendre ça. Je n'avais aucun contrôle sur cette situation, et mon père ne manquait pas de me le rappeler une nouvelle fois. Que ça me plaise ou non, j'avais une autre sœur. Je détestais quand la vie prenait des décisions pour moi sans même me demander mon avis.

Je fronçai les sourcils et me pinçai l'arête du nez, ne supportant déjà plus cette conversation. Pourtant il avait parlé calmement et avait fait preuve d'un peu plus de tact que d'habitude, mais c'était pas encore ça...

- Bon ok, on arrête de parler de ça, ça me saoule en fait... avouai-je en écrasant nerveusement ma clope dans le cendrier.

J'avais pas envie qu'on se prenne la tête encore une fois, et j'étais sincèrement rentré à la maison avec l'intention d'arrondir les angles. Mais je devais me rendre à l'évidence, je n'arrivais pas encore à encaisser la nouvelle...

- De toute façon, je peux rien y faire... Alors, je laisse tomber.

Je retournai sur le canapé avec une énième tasse de café et attrapai la manette de ma console. Je m'enfonçai dans les coussins et démarrai un jeu en soupirant, les yeux rivés sur l'écran. La pression commençait à remonter, autant arrêter de parler de ça avant que les choses ne dégénèrent à nouveau.

Voilà, on avait finalement réussi à en revenir au point de départ... Enfin pas tout à fait, on ne s'était pas pris la tête comme la dernière fois, mais si on continuait de parler de ça, je n'étais pas certain de réussir à me contenir. Dommage... J'étais rentré plein de bonnes intentions, voulant sincèrement arranger les choses, et ça avait même plutôt bien démarré, mais on en revenait à nouveau à frôler la dispute...

-  River je…

Son soupir profond me fit lever les yeux au ciel. C'était plutôt mon truc ça, d'habitude. Je n'avais pas envie qu'on se lance à nouveau dans une grande discussion, surtout concernant ce sujet que je n'arrivais visiblement pas à digérer. J'avais essayé pourtant, vraiment ! Mais je n'y pouvais rien, parler de ça m'agaçait assez rapidement. Je préférais faire la sourde oreille en me concentrant sur ma partie de Call of en mode zombie. Dézinguer de la chair pourrie ne pouvait pas me faire de mal. Quoi que ce n'était pas le passe-temps idéal pour faire redescendre la pression...

- Je sais que je ne suis pas un père parfait. Tu aurais peut-être préféré quelqu’un d’autre que moi. Je suis désolé de te décevoir, mais d’un autre sens, j’aime mieux que tu vois ce que je suis vraiment, je n’ai pas envie que tu penses que je t’ai caché des choses. Parfois j’ai simplement besoin d’accuser le coup.

Non, je n'ai jamais voulu d'un autre père. Je l'aimais comme il était, malgré tout. Et c’était bien parce que je l'aimais que je lui en voulais autant. Ça aurait probablement été moins douloureux si on n'avait été moins proches, mais ce n'était pas le cas. Lui et moi on était très complices, même si on se chamaillait souvent, alors ça me faisait mal de découvrir autant de trucs sur lui que je n'avais pas soupçonnés... Mais je ne risquais de lui dire ça pour le moment, je lui en voulais trop pour le rassurer.

Mais je savais que j'y allais un peu fort avec lui, et que je n'étais pas des plus indulgents... Surtout que de mon côté, je ne brillais pas par mes prouesses de fils exemplaire, et que je savais qu'il m'arrivait de décevoir mon père aussi. Mais je n'arrivais pas à contrôler ma rancœur, aussi illégitime soit-elle...

- Pourtant tu m'en as caché des choses... T'as gardé ça pour toi pendant des semaines, lui reprochai-je sans lâcher mon écran des yeux, continuant de m'acharner sur ma manette pour dégommer du zombie.

J'attrapai ma tasse et terminai mon café, j'en avais pourtant déjà trop bu, mais peu importe. Je la reposai sur la table basse avant de m'affaler à nouveau dans le canapé, poursuivant ma partie. Je faisais comme si mon père n'était pas là, mais il était là, et ça me saoulait de savoir qu'il était assis juste à côté de moi, sans rien dire !

- Pourquoi t'es encore là ? T'as d'autres enfants cachés et tu sais pas comment me le dire ? me moquai-je de lui, même si ça ne me faisait absolument pas rire.

J'étais pas diplomate sur ce coup-là, mais la diplomatie c'était pas mon truc déjà de base. Et je commençais à m'énerver tout seul, même si je ne l'avais pas prévu, du coup je pouvais pas m'empêcher de le provoquer. A ce train-là, j'avais plus qu'à repartir squatter chez Ams', parce que je me voyais pas rester là si c'était pour qu'on s'ignore royalement pendant des jours, encore une fois...

Mon père avait fait son possible pour qu'on tente à nouveau d'avoir une discussion mais cette fois-ci dans le calme. Je devais le reconnaitre, il avait fait preuve de plus de délicatesse cette fois. Malgré ça, je n'arrivais pas à encaisser. Pourtant j'avais eu le temps de ruminer tout ça, mais il faut croire que le sujet restait sensible. J'avais peut-être besoin de plus de temps. Ou alors j'attendais désespérément que mon père me dise ce que je voulais entendre. Je crois qu'au fond je voulais qu'il me dise qu'il se fichait de son autre fille et que rien ne changerait. Mais je savais que ça n'arriverait pas. En plus, c'était pas comme si c'était n'importe qui, c'était Flore. Et même si je l'adorais en tant que cousine, j'étais pas ravi de savoir qu'elle était plus proche de moi que je le croyais. Rien que d'y penser, ça me foutait grave les nerfs !

- Tu devrais aller faire un tour. Qui sait, tu peux peut-être engrosser une autre nana avant midi, ajoutai-je le regard toujours rivé sur la télévision.