i tried to be perfect but nothing was worth it (luna)

Elle avait vu juste, Riley était américain. A l'évocation de la ville de New York, elle eut des étoiles dans les yeux, elle qui n'avait connu que Bowen et ses alentours et qui rêvait de voyager, c'était tout à fait compréhensible qu'elle soit impressionnée par une telle ville. Pourtant le brun n'avait pas le même entrain lorsqu'il en parlait. Il avoua que oui, c'était comme dans les films, mais aussi que ce n'était pas fait pour lui. En y réfléchissant, et avec le peu d'informations qu'elle avait sur lui, ça ne la surprenait pas. Difficile de l'imaginer vivre dans un endroit si vivant, lui qui était si discret. Bowen lui allait largement mieux, même si ça faisait moins rêver. « ça doit être tellement différent d'ici, je crois que je n'arrive même pas à imaginer. » dit-elle en riant légèrement avant de lui demander s'il avait des frères et sœurs. La réponse fut négative mais elle apprit qu'il venait tout juste de rencontrer son père biologique. Elle sourit. « Ah, c'est pour le rencontrer que tu es venu ici ? » questionna-t-elle en espérant que ce ne soit pas trop indiscret. Elle ne voulait pas le déprimer encore plus que ce qu'il l'était déjà, surtout qu'elle avait proposé cette petite virée exprès pour lui changer les idées. Elle but une nouvelle gorgée de café et reposa la tasse sur la table. « Oui, je n'ai pas eu la chance de connaître ma mère... » Elle marqua une pause avant de reprendre. « Mon père n'a jamais rencontré personne d'autre donc je suis fille unique. » Au fond, elle aurait aimé grandir avec d'autres enfants, et surtout que son père remonte la pente, ce qui n'avait jamais été le cas, malheureusement. « Il n'a jamais réussi à se remettre du décès de ma mère, du coup c'est compliqué. Je m'occupe de lui, il est tout le temps mal. » se confia-t-elle presque naturellement.

Les Etats-Unis, c’est sûr que ça fait rêver, tu peux totalement comprendre. Surtout New-York, parce qu’on se croyait vraiment dans un film ou dans une série. Mais toi, ça ne te faisait plus rêver. Peut-être qu’un jour, tu y retournerai pour tourner la page et en finir avec ce mauvais souvenir de ta jeunesse. Il disparaitrait à un moment, même s’il avait laissé des traces indélébiles dans ta tête mais aussi sur ton corps. « Ça l’est. Tout est différent aux Etats-Unis » dis-tu avec un petit sourire en coin. Tout était démesuré, c’était plutôt ça qu’il faut dire. Quand elle te demandait si c’était pour rencontrer ton père biologique que tu étais venu à Bowen, tu tiquais un peu mais tu allais être honnête avec elle. « Non c’est lui qui est venu en Australie pour me rencontrer » dis-tu simplement. Tu prenais une petite inspiration avant de continuer tes explications. « Ma mère me battait, à New-York, c’est pour ça que j’en ai pas un très bon souvenir. Un jour, j’ai eu le courage d’appeler la police parce que j’en avais marre. Vu que j’étais encore mineur aux Etats-Unis, on m’a envoyé chez ma famille la plus proche et c’était ma tante qui habite maintenant à Bowen » dis-tu simplement. Tu soufflais et tu prenais ton verre de limonade pour en boire la moitié comme si ça allait te soulager. Tu avais à ton tour demander à Luna ce qu’il en était de sa famille. Elle n’avait pas eu la vie familiale facile, elle non plus, et tu étais triste pour elle. Son père semblait être un poids sur ses épaules et qu’elle en prenait toute la responsabilité. « Oh je vois… je suis désolé pour toi » soufflas-tu un instant. Tu aurai préféré ne pas connaître ta mère, mais tu imagines que Luna aurait aimé rencontrer la sienne. « Et tu vis encore avec lui, ton père ? » demandas-tu simplement, un peu innocemment. Tu étais triste qu’elle soit comme ça, elle semblait être malheureuse.

Il confirmait que tout était différent aux Etats-Unis, et ça se voyait. A la télévision en tout cas, tout était extravagant, surtout à New York. Ca n'avait rien à voir avec la petite ville tranquille de Bowen. Il avait l'air de s'y plaire et il fallait avouer que cet homme n'avait rien d'extravagant, au contraire, alors c'était plutôt logique. Il se confiait timidement et Luna espérait ne pas le mettre mal à l'aise. Elle ne voulait absolument pas qu'il se sente obligé de lui raconter sa vie s'il n'en avait pas envie, surtout lorsqu'il en vint à parler de son enfance et de sa mère violente. La blonde grimaça, elle se sentait malheureuse pour lui et ne pouvait qu'imaginer la souffrance dans laquelle il avait grandi. Elle comprenait mieux maintenant pourquoi New York lui laissait un goût amer. « Je suis vraiment désolée pour toi, c'est... horrible. » C'était le seul mot qui pouvait sortir de sa bouche à cet instant. A vrai dire elle ne savait pas vraiment que dire d'autre, c'était délicat. « J'espère que tu as pu vivre mieux et grandir sereinement avec ta tante, même si j'imagine que l'on ne peut jamais oublier ce genre de choses atroces. » dit-elle avec compassion. Elle se confia ensuite à son tour sur le décès de sa mère et sur la situation compliquée de son père. C'était le moins qu'elle puisse dire. Elle secoua la tête lorsqu'il demanda si elle vivait toujours avec lui. « Non, mais on va dire que c'est tout comme. J'essaye d'aller le voir tous les jours, il n'accepte pas d'aide extérieure et il ne fait rien tout seul. Il boit beaucoup... » C'était un énorme poids sur ses épaules mais elle n'était pas malheureuse. Enfin, si, elle était malheureuse de voir son père dans cet état mais pas de l'aider. Il lui avait donné la vie, elle ne se voyait pas le laisser livré à lui même dans son état, même si elle espérait qu'il accepte de l'aide pour qu'elle puisse vivre sa vie avec moins de soucis. Pour l'instant ce n'était pas à l'ordre du jour. « Je vis seule dans une caravane que j'ai complètement aménagée, c'était mon rêve. » dit-elle avec un sourire, pour essayer d'emmener un peu de positif dans cette conversation.

C’était difficile de parler de ton histoire passée à Brooklyn mais ça faisait partie de toi, partie de la personne que tu étais devenu. C’était pas agréable à entendre ni à dire mais ça avait forgé ta personnalité. Luna n’avait pas l’air de savoir trop quoi dire mais tu comprenais. Q’est-ce que tu pouvais dire à quelqu’un qui venait se confier parce qu’il se faisait battre étant enfant ? Rien de plus que ceux qu’on déjà dit les autres auparavant. « Ne t’excuses pas, c’est du passé maintenant, j’essaye d’oublier » soufflas-tu avec un léger sourire en coin. Tu essayais de balayer cette histoire de ta vie mais c’était compliqué. En parler comme ça, c’était déjà plus facile pour toi. Peut-être qu’un jour tu serai totalement guéri. « Oui, j’suis vachement mieux avec ma tante. Elle est tout ce dont j’ai rêvé en guise de mère et elle remplit très bien son rôle » dis-tu avec un léger rire. Jolene était la personne parfaite pour t’aider à grandir et à t’épanouir. « Malheureusement, ça laisse des traces indélébiles » soufflas-tu en laissant ton sourire s’effacer petit à petit. Luna n’avait pas la vie facile non plus. Elle n’avait pas connu sa mère et son père n’était pas le meilleur exemple de paternité que l’on puisse avoir. Elle s’en occupait, comme elle le pouvait. « Oh d’accord » dis-tu en baissant les yeux. Tu avais l’impression qu’elle vivait un peu la même chose que tu avais vécu avec ta génitrice, sans les coups et la violence. Elle aussi était alcoolique et c’est grâce à ça que tu avais réussi à t’enfuir des Etats-Unis. « Et tu t’en sors ? J’veux dire… ça te dérange pas de l’aider tout le temps ? » demandas-tu curieusement. A vrai dire, tu ne savais pas comment rebondir sur la conversation et tu étais un peu curieux aussi de savoir comment elle se sentait vis-à-vis de ça. « Une caravane ? C’est stylé ça ! » dis-tu avec un sourire un peu plus grand sur les lèvres.

Tout le monde traînait des casseroles, certaines étant plus ou moins lourdes à traîner. Riley était un jeune homme brisé, ça se voyait. Malgré son jeune âge, il avait subi des traumatismes qui avaient laissé des traces. Sa sensibilité et sa façon d'être en général s'expliquait mieux maintenant qu'il s'était un peu confié sur sa vie. Elle lui dit qu'elle était désolée pour lui et il répondit qu'il essayait d'oublier. En parler n'aidait pas à oublier, mais ça pouvait faire du bien et apaiser son coeur. Elle se contenta de lui adresser un léger sourire bienveillant, puisque de toute façon il était impossible de trouver les bons mots dans ce genre de situation. Elle fut quand même ravie d'entendre que sa tante l'avait bien aidé à se reconstruire. « Je suis contente de savoir que tu as trouvé du réconfort chez ta tante, et une nouvelle figure maternelle. » Ca leur faisait un point commun, puisque Luna aussi était très proche de sa tante qui l'avait beaucoup aidée quand elle était enfant et encore aujourd'hui, elle était toujours présente pour elle. Elle se confia à son tour, sur le décès de sa mère, sur son père qui ne vivait plus depuis ce jour là, le jour de sa naissance. Luna avait eu une période, vers l'adolescence, où elle avait culpabilisé. Se disant que c'était sa mère qui devait être en vie à sa place, mais elle avait finalement réussi à comprendre que ce n'était pas de sa faute, et que sa mère aurait voulu qu'elle lui rende hommage en vivant sa meilleure vie et non pas en se sentant coupable. La blonde se disait aussi que sa mère aurait voulu que son mari refasse sa vie et soit heureux, mais la réalité était toute autre. Lorsque Riley demanda si ça ne la dérangeait pas de toujours s'occuper de son père, elle fit non de la tête. « Je dirais pas que ça me dérange, c'est mon père, jamais je ne le laisserai tomber. C'est juste que c'est parfois pesant, j'avoue... » Son sourire s'effaça directement. « Ca m'affecte beaucoup de le voir dans cet état et de ne rien pouvoir faire. » C'était difficile malgré ce qu'elle montrait. Elle n'était pas de ceux qui baissaient facilement les bras, mais elle était humaine alors parfois, oui, c'était compliqué. Elle enchaîna ensuite sur une note plus positive, retrouvant son sourire en parlant de son rêve de vivre dans une caravane. Elle l'avait réalisé. « C'est vraiment top ! C'est mon petit cocon, j'adore. Tu viendras visiter un jour si tu veux. » répondit-elle avec fierté, et son grand sourire réapparu sur ses lèvres.

Quand tu racontais ton histoire aux autres, tu voyais dans les yeux des gens à quel point ils étaient désolé que tu ai vécu ce genre de choses. Mais malheureusement, ils ne pouvaient rien y faire. La seule personne à avoir pu faire quelque chose c’est ta tante mais elle non plus ne savait pas vraiment ce qu’il se tramait et tu avais compris qu’elle aussi traîner des choses pas nettes avec tes grands-parents, que tu n’avais pas connu d’ailleurs. « Oui, ça fait un bien fou » soufflas-tu avec un sourire. Tu attrapais ton verre pour boire une gorgée et tu le reposais sur la table. Elle aussi avait des sales histoires derrière elle, Luna. Tu l’écoutais alors te compter ses problèmes avec son père, le décès de sa maman quand elle est née et le fait qu’elle soit comme toi, proche de sa tante, avec qui elle était venu à l’église aujourd’hui d’ailleurs. Tu voyais qu’elle était surtout en peine de voir son père dans cet état là et qu’elle ne savait pas trop quoi faire de plus pour l’aider. Ça te rendait triste de la voir comme ça. Mais malheureusement, la vie n’est rose pour personne et ça tu l’as compris assez vite. « J'imagine » dis-tu en soufflant. Tu voyais de quoi elle voulait parler, même si ta mère à toi était violente en plus d’être alcoolique. Tu comprenais qu’elle veuille faire un million de choses pour l’aider mais qu’elle se sentait impuissante. Rapidement, elle enchaînait sur quelque chose de plus joyeux et tu voyais que son sourire s’élargissait. La blonde avait accompli son rêve en faisait de sa caravane son petit cocon. « J’en doute pas, ça doit être top » dis-tu avec un sourire. Quand elle te proposait d’y passer un de ses jours, tes joues prirent une légère teinte rosée, un peu gêné par la proposition. « Oh, avec plaisir ! J’adorerai voir ça » dis-tu avec un petit sourire.

Ca lui faisait du bien à Luna de parler de sa situation, de son père, de la charge mentale qui pesait sur les épaules. Elle n'avait d'habitude pas de mal à en parler mais en général, elle minimisait pour ne pas montrer qu'elle était affectée par la situation. Bizarrement avec Riley, elle laissait paraître ses émotions, sûrement parce qu'il avait aussi vécu des choses difficiles et qu'il pouvait la comprendre. Même si elle ne le connaissait pas bien, ça avait été plutôt facile de se confier à lui à ce sujet. Mais elle était loin d'avoir envie de se plaindre tout le temps, au contraire. Il y avait toujours pire dans la vie et elle avait appris à se contenter de ce qu'elle avait. Certes, elle subissait l'état de son père mais elle l'avait choisi aussi. En même temps, c'était impensable qu'elle l'abandonne. Il restait son père, celui grâce à qui elle était en vie aujourd'hui. Pour clore cette discussions difficile pour tous les deux, elle parla de sa caravane, cet endroit dont elle avait rêvé pendant toute son enfance et qu'elle avait pu avoir à force de travail et de détermination. Du tac au tac, elle avait proposé au jeune homme de venir la visiter un jour, ce à quoi il répondit par la positive, visiblement un peu gêné par la proposition. « Cool, on pourra se faire une petite soirée tranquille avec Polly, si elle veut. » répondit-elle directement pour effacer le malaise. Elle savait que son amie serait enchantée par cette idée. La sonnerie de son téléphone retentit, c'était sa tante qui lui envoyait un message pour lui demander où elle était. Elle pianota quelques secondes sur son téléphone pour lui dire qu'elle allait revenir la chercher à l'église et se concentra ensuite de nouveau sur Riley. « Il faut que j'aille retrouver ma tante, on doit aller voir si mon père va bien. » Elle posa un billet sur la table, de quoi payer les deux boissons et même un peu plus, en guise de pourboire, et se leva. « Je suis contente d'avoir pu discuter un peu avec toi ! On se dit à bientôt ? » Elle lui adressa un dernier sourire avant de repartir en direction de l'église.

Fin du sujet