Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
Comment c'était possible d'enchainer les galères comme ça ? J'avais un putain de karma ces derniers temps... J'avais dû faire un truc hyper moche dans une autre vie pour en être là maintenant. D'abord les histoires de plumard de mon père qui me faisaient pousser des sœurs comme des champignons, ensuite cette histoire d'amour naissant entre Ams' et moi, et voilà que maintenant cette garce d'Avery se mettait à raconter des saloperies sur mon compte ! Tout partait en couilles depuis quelques jours...
J'avais encore mal au nez en plus, depuis qu'il avait rencontré le poing de Marlon quelques jours plus tôt. Ça aussi ça m'avait grave mis les nerfs... Comme si j'avais pas assez d'emmerdes en ce moment, j'avais trouvé le moyen de me mettre à dos le mec qui plaisait de toute évidence à ma petite sœur. Je croisais les doigts pour qu'elle n'apprenne rien de notre baston, et je croisais ceux de l'autre main pour qu'Amara n'entende jamais parler de ma soirée avec Avery. Même si on n'était pas ensemble à ce moment-là, c'était pas très joli à raconter...
La tension était redescendue entre mon daron et moi. Mais je gardais une certaine rancœur envers lui et il n'avait pas l'air non plus d'avoir totalement digéré notre prise bec. Parce que depuis on se parlait quand même vachement moins. Du coup j'avais pas couru le voir pour lui demander conseil. De toute façon, même sans ça, c'était le dernier à qui je demandais de l'aide pour me dépêtrer de sales histoires. Sa réaction première c'était de me juger, ou de me sortir des trucs du genre "je te l'avais dit..." ou encore "ben la prochaine fois, tu feras gaffe..." Bref. J'avais pas envie d'entendre ça une énième fois.
Mais j'avais besoin de vider mon sac. Et il fallait que je trouve un moyen pour qu'Avery arrête de déblatérer des conneries sur moi. Je ne laisserais pas passer ça, elle était mal barrée si elle croyait gagner à ce jeu-là. J'avais bien l'intention de me venger ! Même si je ne savais pas encore comment j'allais m'y prendre. C'est pour ça que ce matin, j'avais décidé d'aller voir Manwë. Ça faisait quelques nuits que je dormais pas beaucoup, entre tout ce qui me tombait dessus. Alors à 9h j'étais déjà debout. C'était juste un improbable miracle, pour moi qui n'étais pas du matin et qui bossais jusque tard le soir en plus de ça. Je me ramenais devant la boutique de Man' en trainant les pieds, avec ma mine déconfite, déjà gavé de cette journée qui commençait à peine. Il y avait de la lumière, enfin pas beaucoup mais assez pour deviner qu'il était là. J'entrai en soupirant lourdement. Dans les moments épineux de ma petite vide de merde, c'était presque ma façon de dire bonjour. J'aimais cet endroit. Il y avait une ambiance particulière ici. Ça collait bien à la personnalité de Manwë. Je le trouvais cool pour un mec de son âge. Au moins avec lui on pouvait parler sans s'énerver. En tous cas la plupart du temps. Et même si on se prenait la tête, on avait pas besoin de ruminer des jours dans notre coin avant de pouvoir passer à autre chose. Pas comme avec mon vieux...
Je sifflai pour signaler ma présence, ne voyant personne. La lampe de l'atelier était allumée et des carcasses d'instruments trainaient sur l'établi, parmi les outils. C'était un peu lugubre de voir tous ces morceaux de bois. Je ne savais pas pourquoi, mais ça me donnait l'impression d'être dans l'antre d'un psychopathe qui s'amuserait à torturer des violons et des guitares. Alors qu'au final, Man' les réparait et les fabriquait. Peut-être que ça tenait à l'ambiance joliment sinistre de l'endroit, ou à la gueule de Manwë...
- Hé vieux caillou ! T'as fait une syncope ou quoi ?demandai-je en fouinant les recoins de la boutique du regard.
Même si les médecins se félicitent sans cesse à chaque fois qu’ils parviennent à rafistoler Manwë, celui-ci ne peut s’empêcher de constater que chaque blessure est plus longue à soigner que la précédente. C’est donc ça vieillir… On peut dire ce que l’on veut, à commencer que quarante ans c’est encore jeune, qu’il est toujours en forme… Il n’empêche que l’on sent une certaine différence, à commencer par cette toux matinale du tabagisme qui se fait de plus en plus forte, cette pointe dans le dos quand l’on soulève quelque chose d’un peu trop lourd, les pieds qui vous insultent en fin de journée et le verre de trop (vraiment de trop) que votre estomac ne laissera pas passer. Qu’on le veuille ou non, le corps ne cesse de rappeler que le temps passe et vous fait payer les mauvais traitements que vous lui avait infligé à la belle époque… Ou ceux que vous avez subit contre votre gré.
À peine remit d’un coup de couteau dans l’épaule, que des hommes l’avait attendus devant sa boutique pour lui passer un tabac, et avant tout ça, il s’était fait tirer dessus avec un fusil à paint-ball… Certes ce fut un accident, mais les balles de peintures font un véritable mal de chien, notamment sans l’équipement adéquate de protection. Il ne se souvient plus réellement de la dernière fois où il s’est senti véritablement en forme, mais avec son allure, son attitude, les gens ne remarquent rien. Ce qui lui convient parfaitement, il n’aime pas être plaint ou subir de la fausse compassion des gens autours de lui, il préfère leur inspirer défiance, dégout ou haine. Il préfère qu’on lui foute la paix.
Mais à trop avoir la paix, on se retrouve sans personne. Bien que ce fait lui a toujours semblé l’idéal de vie, dégouté par la race humaine, ses rapports sociaux ponctuels lui suffissent pour ne pas mal tourner un jour. Pourtant, ce jour-là, il aurait bien eu besoin de quelqu’un lorsqu’il est allé dans la réserve et que son échelle est tombée. Alors malgré diverses douleurs articulaire post chute, cela fait bien quelques dizaines de minutes qu’il tente de remettre de l’ordre dans cet espace sombre. Cela ne l’arrange guère de prendre davantage de retard, il allait vite renoncer à essayer de rattraper le temps perdu lorsqu’une voix masculine se fit entendre. Les clients ont toujours le chic de se pointer dans les mauvais moments.
Il abandonne ses rangements, ne prend même pas la peine de réajuster sa chemise, bien qu’il remonta son pantalon pour éviter d’effrayer le monde. “ Quoi ?! “ Des paroles trop familière, il sait qu’il devrait se méfier, mais si son père voulait encore lui envoyer des gars pour le tabasser, il sait qu’il s’en remettra, la peur n’est pas quelque chose avec laquelle il vit. “ Tiens donc, River. “ Pas vraiment préparé pour ce genre de visite, ses yeux vert détaillent le gamin par réflexe, celui-ci d’analyser et détecter quel était le problème du jour. Il sait que River n’a pas la moitié des problèmes que lui pouvait avoir à son âge, mais il ne peut s’empêcher de l’apprécier, de vouloir l’aider et quelque part, il se reconnait malgré tout dans cette capacité à s’attirer des emmerdements.
Il profite d’avoir davantage d’espace que dans la réserve pour s’étirer et faire craquer les zones douloureuses, ce qui ne soigne jamais grand-chose. “ C’est déjà pas un compliment quand on te dit que t’as une sale gueule, mais quand ça vient de moi, c’est carrément pire qu'une insulte tu sais. “ Il esquisse un léger sourire au fil de son ami et nouveau propriétaire des lieux, Man’ aura beaucoup décidément de mal à se faire à cette idée… Pour lui proprio et ami ne peuvent pas s’accorder autour de la même personne, il a toujours des retard de paiements et il ne connait aucune amitié capable de survivre à ça. “ Comment elle s’appelle ? “ qu’il demande avec un léger sourire tout en cherchant un briquet enfoui quelque part dans son bazar du jour.
Qu'est-ce qu'il foutait, putain ? Il laissait sa boutique en plan, comme ça, pour disparaître je ne sais où ? J'entendis finalement une voix s'échapper de la réserve et Manwë apparut, débraillé.
- Tiens donc, River.
- Salut...soufflai-je sans cacher mon agacement matinal.
- C’est déjà pas un compliment quand on te dit que t’as une sale gueule, mais quand ça vient de moi, c’est carrément pire qu'une insulte tu sais.
Il était gonflé de me dire ça, avec la mine de déterré qu'il se payait. Mais je ne devais pas être plus frais que lui. La merde que j'accumulais ces derniers temps se lisait sur mon visage. J'étais fatigué et j'abusais des bonnes choses en plus. Rien de tel pour se retrouver avec des cernes et des yeux explosés.
- Tu t'es pas vu, mon vieux... Qu'est-ce qui t'est arrivé ? Non pas que tu sois particulièrement frais d'habitude, mais on dirait que t'es pas au mieux de ta forme, soulignai-je en souriant, amusé de nous voir tous les deux avec des tronches de zombies.
- Tu devrais sortir de ta grotte des fois, tu sais... C'pas sain de rester enfermé là-dedans.
Je savais que Man' était souvent dans la dèche. Heureusement qu'il était pote avec mon père, vu que c'était le proprio. Ça rendait les choses moins compliquées, en tous cas c'était comme ça que je l'imaginais. Et puis mon daron était sûrement pas du genre à faire chier un pote qui était emmerdé financièrement.
- Comment elle s’appelle ?
J'ouvris la bouche pour lui demander comment il savait que j'avais un soucis avec une nana, mais je me ravisai et soupirai. C'était toujours pareil quand je venais le voir pour râler. Soi je me plaignais du vieux, soi d'une nénette qui me prenait la tête. J'étais conscient que c'était pas bien grave comme problème, ma vie était loin d'être semées d'embûches. Mais je ne supportais aucune forme de contrariété.
- Avery...
Je trouvais un tabouret et m'assis tandis que Man' semblait farfouiller dans son bordel à la recherche de quelque chose. Je sais pas comment il s'y retrouvait là-dedans, il y avait de tout partout. Mais j'étais mal placé pour le lui faire remarquer, parce que l'organisation c'était clairement pas mon truc. Je passais mon temps à paumer des trucs, et ma piaule était dans le chaos en permanence, comme si un ouragan était passé par là, avait tout ravagé, ne laissant comme seuls survivants que des fringues sales et des mégots. Je m'en foutais, je plaisais dans mon chaos. La femme de ménage devait moins kiffer elle, vu qu'elle n'entrait même plus dans ma chambre.
- Hé oh ! Tu m'écoutes ou quoi ?m'agaçais-je en le voyant fouiner partout.J'ai un vrai problème là, tu vois pas ?
Avery avait bien foutu la merde autour de moi. Elle racontait des conneries sur moi et ça me plaisait pas. En plus je m'embrouillais avec tout le monde en ce moment. Y avait ce type, Marlon, qui tournait autour de ma p'tite sœur et ça me prenait grave la tête. Et puis Amara qui secouait mon petit cœur, même si ça c'était plutôt cool. Mais c'était un peu angoissant quand même, parce que les relations de couple c'était pas un domaine dans lequel j'excellais.
- Bon tu vois cette fille, Avery. Elle va baver partout que j'ai eu besoin de viagra pour la baiser, et ça me gonfle parce que c'est des conneries ! Je crois qu'elle m'en veut parce que je me suis trompé de prénom quand je la... Enfin, tu vois. Du coup je passe pour un con... Elle me flingue ma réputation cette garce ! Il faut que je trouve un moyen de me venger pour lui faire comprendre qu'il faut qu'elle la ferme. Mais je sais pas comment m'y prendre.
J'avais pensé à taguer sa baraque, ornant sa façade d'un joli "sale pute", ou encore crever les pneus de sa caisse, mais c'était trop subtil. Et si elle savait que c'était moi, j'aurais des emmerdes avec les flics. Il me fallait quelque chose de plus subtil et de plus tordu. Les trucs tordus, ça va, j'avais suffisamment d'inspiration et de créativité pour trouver quelque chose. Mais c'était la subtilité qui pêchait chez moi.
- Aide-moi, mec. Comment on fait pour faire taire une nana qui peut pas s'empêcher de jacasser ?
C’est quasiment improbable que les deux lascars s’entendent, probablement cela n’aurait jamais été le cas si Manwë ne l’avait pas connu gamin… Gamin beaucoup trop gâté, beaucoup trop égocentrique qui n’a aucune idée de la vraie difficulté de la vie. Ce n’est cependant pas Man’ qui va lui montrer qu’il y a plus malheureux que lui en lui exposant ses problèmes, parce que ce n’est pas ce que fait le luthier, il ne demande d’aide et de soutien à personne. Quand Blake est devenu son nouveau proprio, effaçant par la même occasion un part de ses dettes passées avant l’ancien propriétaire, il n’a clairement pas été à l’aise avec la situation. Dans le fond, ça lui va que le môme ne pose pas trop de questions.
“ J’y penserais… “ Répondit-il avec un léger sourire à la pique concernant son absence de vie sociale. Il recentre néanmoins rapidement la conversation sur River et le motif de sa visite : une fille. Il en est persuadé. Il sait plus ou moins détecter les signes physique de nervosité chez le jeune homme quand il s’agit d’une nana.
Avery, v’la bien un nom dont River ne lui avait pas encore fait mention… Du moins pas de ce qu’il se souvienne ! Manwë ne réagit pas quand il perdit patience, il continue de chercher son briquet, parce qu’aucun problème de fille n’est un vrai problème. Rive a le don de dramatiser tout, de prendre peut-être trop à cœur, il ne s’est jamais risqué à lui balancer à la face son hypersensibilité évidente, mais Man’ ne s’est jamais trop fait de soucis pour le fils de son ami. “ J’t’écoute, mes oreilles fonctionnent très bien tu sais. “ Contrairement à sa vue, pourtant il est censé pouvoir retrouver son briquet dans ce foutoir. Il mit enfin la main dessus lorsque River eut achevé ses explications.
Il darde le jeune de ses yeux verts, laissant quelques brèves secondes de silence planer dans l’atelier. Finalement il n'a pu se retenir d’éclater de rire, il n’a clairement pas voulu se moquer de River, mais c’était beaucoup plus fort que lui. Tout ce cirque pour ça ? Comment résister à cette crise de rires ?
Ses rires se calment tandis qu’il se penche pour attraper son paquet de clopes “ Jeez… Désolé, mais tu l’as dis toi-même… J’sors pas souvent de ma grotte, j’ai si rarement l’occas’ d’entendre des trucs pareils. “ Quelle anecdote pour le moins sordide, non ? Il n’en revient jamais des histoires de River, encore moins du fait qu’il puisse s’y intéressé et vouloir l’aider ! Comme s’il n’avait pas plus important à gérer, malgré tout, il tente de l’apaiser. “ Sérieusement… Ignore là. C’est juste marrant de torturer quelqu’un s’il se débat lamentablement, si tu ne réagis pas elle finira bien par te laisser tranquille. “ Il dit ça, malgré sa réputation qui n’est plus à faire, celle d’un type trop sanguin qui fini avec un coquard à l’œil tous les trois quatre matins. “ En tout cas… C’est pas vraiment non plus un compliment pour elle de dire que t’as eu besoin de la pilule bleue pour lui faire son affaire. “ Est-ce qu’elle y a pensé cette Avery avant de lancer la rumeur ? “ Ça m’est arrivé que ça m’prenne beaucoup de temps devant certain engins, mais j’ai écouté beaucoup plus de porno que toi pour nourrir mon imagination et lancer la machine… “ Parle de sexe n’est pas quelque chose qu’il fasse de manière usuelle, non pas par pudeur, mais parce qu’il n’y voit pas trop d’intérêt, mais si ça peut aider… Après tout pourquoi pas… Il n’est pas un beau mec surfeur qui fait tomber les plus belles filles de Bowen, ça lui est arrivé de taper dans le fond du panier et il n’a pas honte de le dire. Il faut dire qu’il n’a honte que de peu de choses. “ Avec ce genre de fille… Vaut mieux se faire oublier et se venger quand elle ne s’y attendra pas. “ La vengeance est un plat qui se mange sans sauce froid.
Je ne comprenais pas comment Man' pouvait tourner en rond dans ce gourbi toute la journée. Il s'y retrouvait au moins dans son bordel ? Il avait besoin d'une secrétaire... Ou d'une femme de ménage, ou même des deux en fait. Mais je me doutais que ses moyens financiers étaient limités. Ou alors c'était un nanti qui voulait jouer les prolos, je sais pas trop. Je ne connaissais pas les détails de son histoire, ni même comment se passaient ses affaires, mais je savais que mon père essayait de l'aider. Cependant, je n'avais jamais cherché à savoir ce qu'ils magouillaient tous les deux.
Le teint blafard de Manwë me confirmait la pertinence de ma suggestion. Il avait vraiment besoin de prendre un peu le soleil. Putain, mais il sortait jamais ou quoi ? Ou alors juste la nuit ? Même moi qui bossais le soir et qui dormais la journée, j'étais pas aussi pâle ! J'avais une vie, quoi.
- J’y penserais…
- Y penser c'est bien, mais tu sais qu'il y a un monde à l'extérieur ? Genre avec des gens, et tout ? Et puis tu pourrais... te raser un p'tit peu quand même, insitai-je en me touchant la mâchoire et en grimaçant.Le côté hippie ça peut être cool, mais le style clodo ça l'est moins.
Je lui souris d'un air provocateur. J'aimais bien le taquiner, même si au final c'était vrai, il avait besoin de se défricher la tronche et d'aller voir la lumière du jour. Moi je n'avais pas ce problème, j'étais presque imberbe. J'avais beau raser, il y avait toujours pas grand chose... Comme si la puberté trainait un peu chez moi. Putain !
Il allait le retrouver son fichu briquet, bordel de merde ? J'aimais pas le voir fouiner dans tous les coins pendant que je lui racontais ma vie. Il devait trouver ça complètement futile comme soucis. D'un point de vue extérieur, ça l'était probablement. Mais moi j'avais les deux pieds dans cette merde !
- J’t’écoute, mes oreilles fonctionnent très bien tu sais.
Ouais... En attendant, j'avais l'impression qu'il n'en avait rien à foutre de ce que je racontais. Il faisait toujours ça, et ça me gavait à chaque fois. (Moi, en manque d'attention ? Mais non, voyons...)
Ça y est, il avait retrouvé son briquet. C'était toute une aventure pour trouver le moindre truc dans cette cambuse... Mais ce n'était pas moi qui lui ferais la moindre remarque sur l'importance de faire le ménage... Je fronçai les sourcils quand Man' posa son regard sur moi sans rien dire, pendant quelques secondes. Il éclata de rire, me faisant instantanément soupirer.
- Bon, ça va...soufflai-je avant qu'il ne décide enfin d'arrêter de se poiler.
- Jeez… Désolé, mais tu l’as dis toi-même… J’sors pas souvent de ma grotte, j’ai si rarement l’occas’ d’entendre des trucs pareils.
- Tu m'étonnes...grognai-je entre mes dents.Il y aurait une guerre nucléaire, que tu serais même pas au courant, toi.
Bon, mon histoire avec Avery, c'était pas la fin du monde, mais quand même. Je savais que j'avais tendance à démarrer au quart de tour pour des trucs pas forcément gravissime, on me le disait sans arrêt. Mais je m'en tamponnais le coquillard !
- File-moi une sèche au lieu de te foutre de ma gueule...
J'étais un peu contrarié qu'il le prenne comme ça, mais à quoi je m'attendais franchement ? C'était Man'... En même temps, ce qui était cool, c'est qu'après avoir parlé avec lui, je rentrais toujours chez moi en relativisant. Soit parce qu'il se foutait de ma gueule à cause de mes petits tracas, soit parce qu'il me racontait ses misères à lui. Et c'était pas une partie de rigolade.
- Sérieusement… Ignore là. C’est juste marrant de torturer quelqu’un s’il se débat lamentablement, si tu ne réagis pas elle finira bien par te laisser tranquille.
- T'es sérieux ? Dixit le mec qui fonce dans le tas dés qu'il a un pet de travers... C'est du genre "fais ce que je dis, pas ce que je fais", c'est ça ? Si c'était pour entendre des conneries pareilles, je serais aller causer avec mon vieux...
Il n'avait pas mieux comme conseil que de me dire de laisser tomber et d'attendre que l'orage ne veuille bien passer ? C'était tout pourri comme conseil !
- En tout cas… C’est pas vraiment non plus un compliment pour elle de dire que t’as eu besoin de la pilule bleue pour lui faire son affaire.
Je haussai un sourcil. Il avait raison, mais ça ne risquait pas d'avoir traversé l'esprit d'Avery vu la façon dont je lui avais sauté dessus. En plus, elle était canon, alors elle ne risquait pas de douter de son sex-appeal.
- Ça m’est arrivé que ça m’prenne beaucoup de temps devant certain engins, mais j’ai écouté beaucoup plus de porno que toi pour nourrir mon imagination et lancer la machine…
Cette fois-ci, c'est moi qui me marrais. Je me levai et tapai dans le paquet de clopes de Manwë, clope que je lui avais demandée mais qu'il n'avait pas daigné m'offrir. Je m'approchai de lui, un sourire pincé aux lèvre et lui tapotait l'épaule.
- Si t'as besoin de quelque chose pour aider ton sifflet, tu me dis hein, je te trouverais un truc, proposai-je généreusement avant d'allumer ma cigarette.
J'avais pas de viagra, contrairement à ce qu'affirmait Avery, mais il y avait des tas de trucs pour bander. Des trucs qui ne servaient pas spécialement à ça, mais c'était bonus. J'étais pas certain que ce soit recommandé pour Man' cela dit, avec ses problèmes et les traitements qu'il devait sûrement déjà prendre. Mais si on passait son temps à écouter les médecins, il ne fallait jamais rien mélanger ! Alors que c'était comme ça qu'on commençait à bien rigoler.
- Avec ce genre de fille… Vaut mieux se faire oublier et se venger quand elle ne s’y attendra pas.
Là, il m'intéressait. Mais c'était trop vague. Ça ne m'aidait pas beaucoup. En plus moi je voulais me venger tout de suite !
- Ok, mais je fais quoi alors, pour me venger ? Je lui ai bien envoyé des textos pour la pourrir un peu, mais elle a fait pareil. Du coup, ça fait un partout, la balle au centre. Je suis pas plus avancé...
Je ruminais en faisant le tour de la piaule. C'était quand même sacrément le dawa dans c'tte boutique... Je posais un doigt sur une étagère et ramassai un paquet de poussière. Il avait de la chance s'il faisait pas d'asthme avec tout ça. Je fouinais, regardant un peu partout pour essayer d'évaluer l'état d'esprit de Manwë en sondant les environs. Diagnostic : dépression chronique... Il y avait des trucs et des machins qui trainaient, des papiers aussi. Un jour, je finirais par tomber sur un rat crevé, genre décomposé depuis des mois, dans un coin, caché sous un bidule.
- Sinon, toi, ça va ? Tu fais rentrer un peu d'air pur dans ta boutique, des fois ? Histoire de... respirer ?
Manwë a seulement levé les yeux au ciel quand River lui fit une remarque sur sa barbe, il pourrait le charrier sur ses joues aussi douces que des fesses de bébés, mais il n’est pas vraiment d’humeur. Ses courbatures de vieux y sont pour beaucoup, mais il sait que ça ne ferait que faire réagir River et l’éloigner du sujet de sa visite : ses problèmes. Du moins, ce que Manwë pensait être un problème, parce que lorsqu’il sut, il n’a pas pu s’abstenir de rire. Dieu sait à quel point il n’a que rarement l’occasion de se marrer autant, même si pour cette fois, il se paye pas mal la tête du fils de son ami. Il est beau le “tonton Manwë”...
“ P’t’être bien. “ Ne pas être au courant de toute l’actualité, lui ça l’arrange bien. Les chaines d’informations rendent les gens anxieux plus que de raison. Il n’a pas la prétention de pouvoir changer le monde, il essaie uniquement d’avoir le contrôle de sa vie et c’est bien assez compliqué comme ça.
Man’ a le sourire aux lèvres, cette histoire de viagra est pour le moins hilarante il faut l’admettre. C’est difficile pour lui de prendre cette affaire au sérieux, ce qui lui permet de garder le contrôle c’est que malgré tout il n’aime pas voir River dans cet état. C’est vrai que ce môme a eu tune enfance aux antipodes de la sienne, mais quand on aime bien quelqu’un, on ne veut pas le voir souffrir. Nul doute que s’il avait eut des enfants, il aurait été un père surprotecteur. Il n’aurait pas été un mauvais père, mais il n’a jamais voulu jouer ce rôle.
“ Et depuis quand je suis un exemple à suivre, hm ? “ qu’il répond bien que River n’ait pas tort, en dehors d’un point… Il ne s’en prend pas aux femmes. Verbalement si parce qu’il ne faut pas non plus se laisser marcher sur les pieds ! Cependant, jamais il n’a levé la main sur une fille et ce n’est pas près de changer. “ En attendant, c’est pas ton vieux que t’es venu voir. “ Il devra se contenter des paroles du luthier ou aller voir ailleurs, le luthier sait qu’il ne partira pas avant de se sentir rassuré, il connait assez River comme ça. Il décide d’enchainer sur un plaisanterie le concernant, histoire de le détendre un peu. “ Kid, j’t’ai pas attendu pour trouver de l’aide en un quelconque domaine. “ Lui répondit-il en pouffant tout en lui administrant un léger coup d’épaule.
Le voyant lui taxer une clope, il fut bien obligé de rappeler l’une des règles ici, même s’il y en a pas beaucoup, certaines sont indispensables : “ Tu fais gaffe à tes cendres si tu fumes ici. “ Il est le seul à fumer dans son atelier, c’est plutôt par période, quand il a vraiment besoin de nicotine et qu’il décide de prendre le risque. Quasiment tout est en bois ici, la moindre cendre envolée pourrait détériorer des heures de travail, voir, faire bruler cet endroit quand on voit tous les liquides hautement inflammables qu’il utilise pour effectuer son travail.
“ J’en sais rien, tu m'a pris pour un génie du mal ? Mais... Elle doit bien avoir des points faibles cette fille ? Une meilleure amie ou une soeur ? Si tu veux réellement te venger de quelqu’un, si ça en vaut vraiment la peine, il faut chercher. Tabasser un mec c’est une chose, se venger en est une autre. “ Et il sait de quoi il parle, il pourrait bien mettre une dérouillée à son paternel, mais à quoi bon ? Man’ veut le faire plonger pour de bon, ça demande beaucoup de temps et d’énergie, mais il a décidé que ça en valait la peine. “ Quand on agit à chaud comme je fais la plupart du temps, c’est vite plié. Là t’as laissé redescendre… Alors tu peux commencer à te demander si cette fille vaut le coup. “ Il doit avouer vouloir faire pencher la balance en faveur de cette Avery même s’il ne la connait pas, mais il est persuadé que River perd son temps pour des gamineries.
“ Bien sur, j’laisse la porte à l’avant ouverte le matin, après il fait trop chaud c’est pas bon pour le bois des instruments. Pourquoi ? Ça pue ? “ Il veut bien croire que ça puisse sentir le vernis ou le solvant un peu trop fort parfois - ou l’odeur de la clope qu’il doit admettre ne plus sentir. Évidemment il esquive la question qui le concerne, même s’il ne dira jamais qu’il ne va pas bien, sans quoi… Il serait obligé de faire la liste des choses qui vont mal et ils en auraient jusqu’au lendemain.
hrp : juste pour la p’tite précision pas méga importante : la boutique de Man n’est pas sale, très encombrée, sombre et bordélique, mais c’est propre, son métier l’exige car ça s’abime vite, il fait de la très bonne qualité malgré les apparences.
Invité
Sujet: Re: Oh shit, I'm fucked... [Manwë] Ven 4 Mar 2022 - 13:27
Oh shit, I'm fucked...
Ça me gonflait quand quelqu'un voulait se la jouer plein de sagesse et de bons conseils alors que lui-même n'était pas capable d'appliquer es propres recommandations. C'est ce que faisait Man' en ce moment. Bon, je savais bien qu'il essayait de m'aider, mais la mauvaise foi ça me gonflait.
- Et depuis quand je suis un exemple à suivre, hm ?
Je levais les yeux au ciel. En effet, Manwë c'était pas une référence. Mais c'était quelqu'un de bien, je le savais. Il était singulier, mais c'était un mec cool. C'était pas pour rien que j'aimais bien causer avec lui.
- En attendant, c’est pas ton vieux que t’es venu voir.
C'est vrai... De toute façon je n'aurais pas pu parler de tout ça avec lui. Il m'aurait jugé, et j'aimais pas voir ça dans ses yeux. Et puis j'avais pas envie qu'il me fasse la morale. En plus, je savais que mon père aurait élaboré une explication logique à toute cette merde pour en conclure que tout ça était de ma faute. Je n'avais pas besoin d'entendre ça. Ce dont j'avais besoin, c'était un plan pour parvenir à faire taire Avery.
- Kid, j’t’ai pas attendu pour trouver de l’aide en un quelconque domaine.
Je plissai les yeux, agacé par tant de condescendance et soupirai. Je savais qu'il avait pas besoin de moi pour quoi que ce sooit, mais quand même. Il aurait pu se contenter de dire un truc du genre "merci, c'est gentil à toi, j'hésiterai pas". Mais non, aucune forme de reconnaissance.
- Tu fais gaffe à tes cendres si tu fumes ici.
- T'inquiètes, Man'. Putain, faut que tu te détendes, mec...
Je savais qu'il était passionné par son taf, mais des fois je le trouvais un peu trop zélé. Mais je ne le jugeais pas, après tout je ne pouvais pas comprendre, il y avait rien qui me passionnait, moi. En tous cas, je n'avais jusque là jamais trouvé une quelconque activité qui me donne envie d'y consacrer tout mon temps. Sauf peut-être la grasse mat', ça compte ?
- J’en sais rien, tu m'a pris pour un génie du mal ? Mais... Elle doit bien avoir des points faibles cette fille ? Une meilleure amie ou une soeur ? Si tu veux réellement te venger de quelqu’un, si ça en vaut vraiment la peine, il faut chercher. Tabasser un mec c’est une chose, se venger en est une autre.
- Chercher ? me demandai-je plus à moi-même qu'à lui.
Mais je la connaissais même pas cette nana. On s'était vus qu'une seule fois. J'allais quand même pas ouvrir une enquête pour trouver son talon d'achille ? Quuoi que... Pourquoi pas ? C'étaiit pas comme si j'étais débordé après tout. Mis à part mon taf au Wojna, j'avais du temps libre, et un esprit assez fourbe pour fouiner dans la vie d'Avery.
- Quand on agit à chaud comme je fais la plupart du temps, c’est vite plié. Là t’as laissé redescendre… Alors tu peux commencer à te demander si cette fille vaut le coup.
Je grimaçai. Il était plein de sagesse finalement ce con. Je commençais effectivement à me demander si je ne perdais pas mon temps en essayant désespérément de me venger d'Avery. Peut-être que ça allait finir par se tasser, peut-être bien que je n'avais qu'à prendre mon mal en patience et attendre que la rumeur ne se dissipe d'elle-même...
- Mouais... T'as peut-être raison, soupirai-je d'un air las.
Manwë se plaisait dans son antre de toute évidence, ce que je ne comprenais pas. Moi j'avais besoin de bouger, j'avais même du mal à faire mes heures au Wojna. Rester plus de quelques heures au même endroit, ça me gavait rapidement.
- Bien sur, j’laisse la porte à l’avant ouverte le matin, après il fait trop chaud c’est pas bon pour le bois des instruments. Pourquoi ? Ça pue ?
Je secouai la tête de gauche à droite. Non, ça ne puait pas, j'évoquais seulement avec subtilité la possibilité pour Man' d'aller faire un tour dehors. Il n'avait même pas répondu à ma question, me laissant deviner que ça n'allait pas comme il le voulait. Mais j'étais du genre à insister, que ça lui plaise ou non. Je tirai une taffe de ma clope et m'approchai de lui.
- Y a peut-être un truc dont t'aurais envie de parler ?
Pour une fois, je pouvais bien m'intéresser à sa vie à lui et à ses problèmes. Après tout, il était toujours là pour moi quand j'avais besoin de râler. J'étais peut-être pas le meilleur des confidents, et peut-être bien que mes conseils étaient foireux, mais j'étais là quand même. Et je savais écouter.
Il émit un simple grognement quand River le somma de se détendre, il faut dire que parfois il ne sait plus trop quand il dépasse les bornes, alors il ne sait pas vraiment quelle image il renvoie et il s’en fiche clairement en général. Il se contente de grogner et continuer à faire et être ce qui lui plait. Il tente de conseiller River, mais pas trop non plus, il n’a pas envie qu’il se foute dans la merde plus qu’il n’en est capable sans lui. Il sait que River n’est pas pleinement convaincue, mais si cette fille le touche autant, c’est qu’il doit bien y avoir une raison… Parce qu’il ne pense pas qu’un type comme River ait besoin de prouver sa virilité à qui que ce soit, même s’il n’a pas encore encore de poils de moustache…
Cette fois, Man’ s’abstiendra de le charrier avec ça.
“ Un truc dont j’aurais envie de parler ? “ Pour le coup, le gamin l’étonne bien ! Même si River est ce que l’on peut qualifier de monstre d’égoïsme, Manwë a toujours perçu chez lui une trop forte sensibilité. Il sait pourquoi les mômes comme lui réagissent comme il le fait. Il ne pense pas que Blake soit un père aussi horrible que ce qu’il a pu connaitre, mais il sait aussi que son ami Blake a fait de nombreuses erreurs. “ Quoi par exemple ? “ Qu’est-ce qu’il pourrait bien évoquer avec River, heureusement, ses cousins adorés le tirent d’affaire. “ Tiens... J’suis invité à un anniversaire… T’y crois toi ? “ Il adresse un sourire amusé à son visiteur “ Ils ont onze ans de moins que moi, tous leurs potes aussi, en plus avant ce jour, j’savais pas c’que c’était un chat de groupe. Tout l’monde à pu lire que j’me foutait d’leur gueule et que j’savais pas ce qu’était un chat de groupe. “ Il laisse River se payer un peu sa tête en retour, c’est bien mérité et il espère vraiment détendre le jeune homme. Ça fait une éternité que Man’ ne fête pas son anniversaire, ni noel, ni thanksgiving, ni rien… “ Faut que j’y aille, c’est mes cousins… C’est p’t’être bien les seuls qui valent le coup dans cette famille… “ S’étendre sur le sujet de la famille, c’est pas son truc. La plupart des gens savent que Man a été orphelin jeune par sa mère et que son père a fini au trou pour violences et féminicide. Personne ne parle jamais de ça, surtout pas lui.
“ Y a rien de pire que d’être trahi par un ami… Tu devrais y penser à propos de cette fille. “ Dans le pire des cas, il aura vraiment sa vengeance, dans le meilleur des cas, Riv’ se sera fait une nouvelle amie. Ça demande de la patience et de la haine d’arriver à un tel plan, mais si River est venu voir le génie du mal, il lui soumet cette idée. “ Mais t’as pas à t’en faire, les rumeurs ça ne dure qu’un temps. “ Contrairement aux réputations, celle de Man’ a la peau dure, mais il n’a jamais cherché à paraitre plus sympathique que ce que l’on peut dire de lui. Il s’en fou de l’avis des autres, contrairement à River, ce n’est pas une question d’âge, Man’ s’en ai toujours moqué alors que certains adultes prendront toujours tout à cœur. “ Et alors ? C’est qui l’autre fille dont t’as joyeusement crié le nom en plein coït ? T’es au courant que c’est pas obligatoire de gueuler, hm ? “ Il le taquine, lui donnant un coup d’épaule en passant à côté de lui pour attraper un pot de vernis. C’est que malgré tout, il l’aime bien ce môme.
Invité
Sujet: Re: Oh shit, I'm fucked... [Manwë] Mer 9 Mar 2022 - 17:10
Oh shit, I'm fucked...
J'étais pas le mec le plus altruiste qui soit, certes, mais j'aimais bien Man'. Et quand j'aimais bien quelqu'un, je m'intéressais quand même à lui, aussi surprenant que cela puisse paraitre venant de moi. Je pensais à ma gueule avant tout, oui, mais il m'arrivait quand même d'avoir un peu de considération pour certaines personnes. En plus Manwë faisait partie de ces gens qui prenaient le temps de m'écouter, alors que je savais que j'étais chiant par moments...
- Un truc dont j’aurais envie de parler ? Quoi par exemple ?
Je grimaçai, attendant un retour de ma généreuse et prévenante sollicitude. Pour une fois qu'on parlait de lui, j'espérais qu'il allait faire un effort et s'ouvrir un peu. Même si d'habitude c'était moi qui me plaignais et lui qui écoutait. Ben pour une fois, je faisais mon psy ! Et j'étais prêt à écouter Man' s'il avait besoin de parler.
- Tiens... J’suis invité à un anniversaire… T’y crois toi ? Ils ont onze ans de moins que moi, tous leurs potes aussi, en plus avant ce jour, j’savais pas c’que c’était un chat de groupe. Tout l’monde à pu lire que j’me foutait d’leur gueule et que j’savais pas ce qu’était un chat de groupe.
Hein ? De quoi il me parlait ? Il voulait en venir où avec son histoire d'anniversaire ? Sérieux, il avait rien de mieux à raconter ? Je ne pus m'empêcher de rire. Il pouvait se foutre de ma gueule avec mes problèmes pas si graves que ça, mais en attendant il ne se confiait pas non plus sur les véritables drames de sa vie. Pourtant j'étais certain qu'il se trainait quelques bagages émotionnels lui aussi, et probablement un peu plus sérieux que les miens...
- Faut que j’y aille, c’est mes cousins… C’est p’t’être bien les seuls qui valent le coup dans cette famille…
Ok, donc c'était clairement pas un problème qu'il évoquait, peut-être simplement un sujet anodin pour éviter de se confier ?
- Ah ben c'est super, quelle vie sociale de ouf, j'te jure...répondis-je en le regardant avec un air plein de pitié avant de rire à nouveau. Y a pas à dire, quand tu racontes des trucs ennuyeux, ça devient vite palpitant...
Il ne m'en voudrait pas de me moquer de lui, il faisait bien pareil avec moi. On s'entendait assez bien pour s'envoyer quelques fions sans que ça dégénère. Je savais qu'il avait vécu des trucs douloureux avec sa famille, j'en avais vaguement entendu parler, sans forcément en connaitre les détails. Mais Man', il causait jamais de ça, et parce que je l'aimais bien, je n'avais jamais fait le curieux. Pourtant je me gênais pas avec d'autres.
- Y a rien de pire que d’être trahi par un ami… Tu devrais y penser à propos de cette fille.
- Ouais enfin, c'est pas une amie elle, c'est juste une greluche que je l'ai levée dans un bar...
- Mais t’as pas à t’en faire, les rumeurs ça ne dure qu’un temps.
Je soupirai... Au fond c'était pas si grave, j'en étais bien conscient. Ça m'avait saoulé parce que je m'attendais pas à ce qu'Avery raconte autant de merde sur mon compte. Mais les gens finiraient bien par se lasser de cette histoire...
- Et alors ? C’est qui l’autre fille dont t’as joyeusement crié le nom en plein coït ? T’es au courant que c’est pas obligatoire de gueuler, hm ?
Je souris à son coup d'épaule. J'avais pas gueulé, bordel de merde... Mais je savais qu'il disait ça juste pour se payer ma tête une fois de plus.
- C'est... juste une nana.
Je n'avais pas envie de parler d'Amara, parce que je n'étais pas le genre de mec à s'épancher sur ses sentiments et à se vanter d'être amoureux. Déjà parce que ça ne m'était jamais arrivé, mais aussi parce que ça me mettait un peu mal à l'aise. Probablement parce que c'était nouveau.
- Et j'ai pas crié... Tocard...ajoutai-je en étouffant un petit rire.
Bon, j'avais même pas réussi à amener Man' à se confier un peu. Mais peut-être que j'étais pas un confident de choix aussi... Je pouvais pas lui en vouloir de ne pas avoir envie de me raconter sa vie.
- Sérieux ? T'as rien d'autre à me raconter que l'anniversaire ringard de tes cousins attardés ?
Ok, c'était gratuit... Mais je le prenais presque pour une offense son histoire de cousins. Je venais de me livrer à lui sur des trucs hyper personnels, putain ! J'aurais apprécié qu'il fasse pareil. Bon, ça lui paraissait probablement très futile comme problèmes, d'ailleurs ça l'avait bien fait marrer. Mais pour moi, c'était pas rien, alors je voulais moi aussi être un super pote et avoir l'occasion de renvoyer l’ascenseur à Manwë pour toutes les fois où il avait eu la patience de m'écouter me plaindre.