Blondes do it better (auvio)

La situation s'était quelque peu arrangée depuis qu'il avait rejoint Aura en pleine nuit, pour mettre cartes sur table et enterrer la hache de guerre. Tenir sa femme dans ses bras lui avait fait un bien fou. Il s'était rendu compte à quel point ils étaient allés loin, à quel point ils s'étaient butés, à quel point il l'avait délaissé. L'ignorance n'avait pas été la meilleure des solutions. Et s'ils avaient prévu d'aller voir un thérapeute pour être conseillés et s'améliorer, il y avait aussi un travail à faire l'un auprès de l'autre. Livio s'était remémoré leur début de relation et il s'était rappelé à quel point il aimait surprendre la belle brune, avec des surprises romantiques, où il voyait son regard pétiller, ou des bêtises pour lesquelles il aimait voir un sourire pointer sur ses lèvres et entendre son rire éclatant, communicatif. Il aimait l'entendre rire. Malheureusement, c'était un son qu'il n'avait pas réellement entendu ces dernières semaines. Alors il avait repris de bonnes résolutions et s'était promis de redevenir le Livio entreprenant, plein de surprises.

Il avait d'ailleurs très vite trouvé la première idée. Ayant envie de changement, il avait décidé de faire écho à un moment qui les avait rapprochés, près de deux ans auparavant : la fois où il avait décidé d'attirer son attention en devenant blond comme les blés. Ou plutôt blond dégueu. Elle s'était moquée de lui, ils en avaient ri et puis, elle l'avait sauvé en rattrapant sa chevelure malmenée. Aujourd'hui, donc, il était redevenu blond. Un blond pas dégueu, ceci dit, parfaitement bien réalisé par un professionnel. Mais il se doutait que cela allait surprendre la belle italienne. Arrivé devant la maison - après de nombreuses péripéties, dont la voiture en panne - il passa le pas de la porte. "Amore ! Tu ne devineras jamais la journée pourrie que j'ai pu avoir !!" Il entendait du bruit dans la cuisine, où Aura devait s'affairer. Il se rendit alors au salon, caressant Marlow qui l'accueillait et vit Leandro dans son petit parc. "Coucou mon bébé !" s'exclama-t-il, un poil gaga, prenant son fils dans les bras. Seulement il n'avait pas anticipé la surprise que son changement capillaire pourrait occasionner chez son fils. Il vit les yeux bruns du petit s'écarquiller, puis son visage se décomposer jusqu'à ce que des sanglots bruyants viennent secouer le bébé. "Mais Leandro, qu'est-ce qu'il y a ? C'est moi, c'est Papa !" Sans succès...

Le téléphone collé contre l’oreille, j’écris à la va vite la recette que me dicte ma Nonna à l’autre bout du téléphone.
— Si…si Nonna, ok…ti manda la foto promessa…si, grazie…ti amo.
Je raccroche à peine que j’entends la porte d’entrée s’ouvrir. Livio parle de journée pourrie et pourtant, dans sa voix, je ne distingue aucun agacement. Je termine de retranscrire les derniers détails de la recette quand les pleurs de mon fils résonne depuis le séjour. Je lâche mon crayon et rejoins le salon, pour trouvé Leandro dans les bras de son père, sanglotant et visiblement déboussolé, ce n’est qu’en suivant que je remarque la couleur de cheveux inhabituelle de Livio. La surprise me fige un instant, avant que je ne me mettes à rire doucement en approchant.
— Qu’est-ce que…
Arrivée à la hauteur de mon mari, je passe une main dans ses cheveux nouvellement blond. Je penche le regard et me laisse attendrir par les yeux humides de mon fils qui a arrêter de hurler mais qui regarde son père avec un air tristoune.
— Oh mon bébé, je dis en riant, me penchant pour embrasser son front.
Le petit se colle au torse de Livio comme pour se rassurer. La surprise passée, il a besoin du réconfort de son papa. Je lève à nouveau les yeux vers ce dernier, puis porte une main devant ma bouche, sans me départir de mon sourire.
— Est-ce que la journée pourrie impliquait un pari perdu ? je demande, amusée. C’est…pas si mal, en vrai. Ca te donne un air de Captain America.
Je plisse les yeux, malicieuse.
— Tu veux pas me faire un petit « Avengers Assemble » pour voir ?

Leandro, une fois le choc passé, avait arrêté de pleurer mais ses yeux tout embués continuaient de fixer son père. En tout cas, cela avait eu le mérite de rameuter Aura. Aura qui s'était figée en posant ses yeux sur Livio, avant qu'un rire ne s'empare d'elle. C'était exactement la réaction qu'il souhaitait. Il avait tout gagné : il avait fait rire sa femme et cela était une victoire pour lui. Il ne l'avait pas vraiment rendu heureuse dernièrement. Alors qu'elle les rejoignit, Livio ferma les yeux quand elle passa sa main dans sa chevelure blonde. C'était bête, mais cela lui faisait un bien de retrouver n'importe quel contact avec elle. Il esquissa un sourire attendri quand elle embrassa le front de Leandro, ce dernier venant se blottir contre son torse. Il fit un câlin à son fils, déposant à son tour un baiser en haut de son crâne. Quand Aura parla de pari perdu, il répliqua en riant : "Même pas ! C'est de mon plein gré. Et je ne sais pas si c'est une bonne chose, finalement..." Il allait le traîner un moment, son blond. Mais étrangement, cela ne déplaisait pas à Aura. Elle lui trouva même un air de Captain America. "Captain America ? ça va, il est plutôt beau gosse." dit-il en souriant. Mais sa femme était d'humeur taquine, aujourd'hui. Alors, quand elle lui demanda de lui sortir la fameuse scène mythique de Endgame, Livio l'observa afin de voir si elle était sérieuse. Elle l'était. Donc... Il lui déposa Leandro dans les bras, baissa la tête quelques secondes, le temps de se mettre dans la peau du personnage. Et très sérieusement, il fit mine de se relever, abattu, comme s'il sortait d'un long combat interminable. Il regarda devant lui, au loin, la respiration haletante. Puis il porta la main à son oreille, comme s'il avait une oreillette qui lui disait On your left. "Là, c'est le moment où les super-héros reviennent tous, hein." dit-il pour la remettre dans le contexte. "Black Panther, Doctor Strange, Spider man, Star Lord, Hulk, Ant-man, Bucky, etc.etc." Il recula de quelques pas et attrapa la télécommande de la télé, comme si c'était le Mjöllnir de Thor. Il leva ensuite la télécommande et lança, déterminé : "Avengers.... Assemble !" Il resta ainsi quelques secondes avant d'éclater de rire : "Y a encore du boulot à faire ! Là, je fais plus Drago Malefoy !" D'ailleurs, il agita la télécommande, telle une baguette magique, lâchant : "Serpensortia !" Il garda son sourire aux lèvres, regard malicieux alors qu'il reprit : "Alors, conquise ?" Son sourire s'élargit davantage "Fais attention, si tu te fais rousse ou blonde, je te demanderai un remake de Black Widow." Black Widow encore et toujours.

Livio s’était déjà teint les cheveux en blonds, une fois, alors que nous n’étions pas encore officiellement ensemble. Il m’avait confié plus tard qu’il avait chercher à m’impressionner de cette manière. Cela n’avait eu l’effet escompté, mais cela avait clairement contribué à nous rapprocher. Quand je m’étais occupé d’arranger sa couleur, on avait eu un contact comme jamais auparavant. Cela ne pouvait sembler rien, mais je me souvenais de la douceur de ce moment. Il était comme ancré dans ma mémoire, dans notre histoire. Et je savais que son changement capillaire aujourd’hui, n’était pas un hasard. Ma mention des Avengers non plus n’était pas un hasard. Je récupérai Leandro dans mes bras tandis que mon mari se parait de son meilleur jeu d’acteur. Je le regardai rejouer la scène mythique d’Endgame, tandis que mon fils, prenant son pouce et se calant contre moi, se remettait de ses émotions. Livio me fit rire, et j’avais le sentiment que ça n’était pas arrivé depuis de longue semaine. Cela faisait un bien fou.
— Impressionant, dis-je juste avant que mon mari ne se compare à l’ennemis juré d’Harry Potter. Je suis complètement conquise.
Et puisque nous en étions aux Marvels, Livio ne se priva pas d’évoquer Black Widow, sa préféré. Je plissai les yeux malicieuse.
— Je peux essayer de passer une combinaison moulante mais je ne suis pas sûre que ça rendra le même effet…

En effet, son changement capillaire n'était pas anodin. Tous les moyens étaient bons pour se rattraper, pour raviver la flamme, pour oublier les mauvais moments passés dernièrement. Ils étaient allés loin dans leurs mots, dans leurs actes. Ils se fragilisaient à chaque fois un peu plus, mais ils arrivaient à redresser la barre. Bien sûr, tout n'était pas arrangé. Ils allaient avoir besoin de crever des abcès, d'entendre des choses qui allaient faire mal. Ils allaient avoir besoin de tierces personnes. Mais ils avanceront ensemble. Comme le disait Jim Hopper : Rien ne redeviendra comme avant. Pas vraiment. Mais ça va s'améliorer. Avec le temps. Et ce temps-là, ils le prenaient pleinement, se lançant quelques messages cachés qui faisaient allusion aux débuts de leur relation, quand tout était encore bien rose. Alors quand elle parla de Captain America, Livio fit ce qu'il savait faire de mieux : le con. Il se lança dans une interprétation de la fameuse scène de Endgame, qui fit rire Aura. Il avait gagné. Il avait eu ce qu'il voulait. Livio esquissa un sourire, dans lequel transparaissait toute son émotion. Il ne disait pas toujours les choses à voix haute, mais son corps, son visage, ses expressions parlaient pour lui. Et là, il était heureux, heureux de la faire rire. « Tu as devant toi le prochain Oscarisé, évidemment ! » dit-il, pour la blague. Mais très vite – et parce qu'il ne pouvait pas passer à côté d'une telle référence – il évoqua Black Widow. En entendant la dernière phrase, il posa son regard vers Aura, malicieux. « Tu as ça dans ta garde-robe ? » Son esprit divagua vers une Aura en combinaison moulante. « Dans ma tête, ça rend pourtant très bien. » répondit-il avec un sourire. « Regarde-moi, je suis loin d'avoir le cul de l'Amérique. » Mais ils étaient parfaits comme ils étaient. « Je n'ai pas besoin d'avoir une Scarlet Johansson. Ma femme est bien mieux, bien plus belle et sexy. Dommage qu'elle ne s'en rende pas toujours compte... » Son sourire en coin s'élargit alors qu'il soutenait son regard. Ça aussi, c'était des choses qu'il n'avait pas dit depuis un moment. Toutes ces disputes lui avaient permis de mettre le doigt sur quelque chose d'important : leur relation n'était pas acquise. Garder la passion, c'était un travail de toute une vie.

Cela fait longtemps que je n’ai pas ri…bien trop longtemps. Ces moments là avec Livio me manquent, et le voir se teindre en blond et jouer une scène tiré d’un film des Avengers me remémore nos débuts. J’ai l’impression de retrouver le Livio dont je suis follement tombée amoureuse. Pourtant il est là, jamais vraiment loin, je le sais bien. Il n’a pas changé, c’est à moi de m’en rappeler désormais. Je suis touchée par son initiative et ris de bon coeur face à sa remarque, tandis que notre fils, un pouce dans la bouche, nous regarde sans trop comprendre.
— C’est clair que tu mérites un oscar, je confirme.
Nous rions ensemble, et à l’évocation de Black Widow, la fameuse espionne russe qui en a fait bavé des hommes, j’objecte que le lycra m’irait sans doute moins bien qu’à elle, et ris de plus belle lorsque mon mari en profite pour me demander si je possède un tel vêtement dans ma garde-robe.
— Non ! je retorque en riant, et…le cul de l’Amérique peut aller se rhabiller, tu possèdes celui de l’Italie entière…voire même de l’Australie. Captain, lui-même, ne peut pas se venter d’avoir ce titre sur deux continents.
Je lève des yeux tendre vers mon mari lorsqu’il me complimente. Avec lui, j’ai appris à recevoir ces mots-là. Des mots qui me rassure là où, avant, ils m’auraient complètement gêné.
— Je fais des efforts, je lui rappelle.
J’embrasse le front de Leandro qui commence à fatigué, toujours lové contre moi.
— Je vais le coucher, tu…euh…j’avais prévu de cuisiner, mais, j’ai un peu la flemme. On commande un truc plutôt ? Manny m’a fait goûter un plat indien, d’un restau du centre ville, ça te dit ?

Cela faisait des semaines et des semaines qu'ils n'avaient pas ri de la sorte. Le moment était d'une douceur qui avait manqué à Livio. Pourtant, il n'était pas rare de voir l'italien faire le pitre, faire preuve d'inventivité pour surprendre et faire rire sa femme. Mais ces derniers jours, il n'avait eu ni l'énergie, ni le cœur à plaisanter. Ses efforts, il avait préféré les mettre dans le sauvetage de son couple. Ce n'était pas encore gagné, mais ils étaient sur la bonne voie. Ce qui poussait Livio à se détendre un peu. Après sa fameuse représentation de la scène d'Endgame, le jeune homme taquina sa femme au sujet de Black Widow. Black Widow et sa célèbre combinaison qui moulait tout ce qu'il fallait. Il afficha une fausse moue déçue quand Aura lui confirma qu'elle n'avait pas un vêtement de la sorte. « ça donne des idées de cadeaux. » dit-il en riant. Non, il n'irait pas jusque là. Elle n'avait pas besoin de cela pour attirer le regard de son mari. Il l'aimait comme elle était. Il arqua un sourcil, amusé, quand elle vanta le cul de l'Italie et de l'Australie. « Tu n'es pas très objective. Mais je suis flatté. Il va juste falloir que je travaille mes muscles fessiers pour garder le titre. » Il rit de bon cœur, lui retournant le compliment, vantant le fait qu'il n'avait pas besoin de super-héroïne au physique parfait. A ses yeux, sa femme l'était tout autant. Et encore plus. Il afficha un sourire attendri en croisant le regard de sa femme, venant déposer un baiser sur sa tempe quand elle lui souffla qu'elle faisait des efforts sur le regard qu'elle portait sur elle-même. Cela n'avait pas été simple mais il était heureux de voir qu'elle voyait enfin ses atouts. « Je sais. Mais c'est toujours bien de faire une petite piqûre de rappel. » Surtout après une période aussi difficile où l'un et l'autre s'étaient demandés s'ils se plaisaient toujours. Tout contre sa mère, Leandro commença à donner des signes de fatigue. Livio hocha la tête quand elle lui annonça aller le coucher, venant déposer un baiser sur sa tête. Et alors qu'il allait répondre positivement concernant leur futur dîner, l'italien se figea en entendant la fin de sa phrase. Manny. Encore Manny. Toujours Manny. « Si Manny t'a fait goûter ce plat, alors goûtons ce plat. » On sentait une once d'ironie dans sa voix. Et pour cause, là où Livio n'arrivait pas à tenir la moindre conversation avec sa femme, Manny, lui, emmenait Aura dans des petits restaurants de Bowen. Mais comme il ne voulait pas mettre de l'huile sur le feu, il reprit, avec une voix plus maîtrisée : « Faudrait que tu l'invites à venir manger à la maison, un soir, non ? Comme ça, je le rencontrerai. »

La piqure de rappel faisait du bien. Livio avait eu ce pouvoir sur moi, depuis que nous nous connaissions de changer ce regard que je portais sur mon corps. Au moins un peu.
— Manny ? Euh…si tu veux, oui. Je peux proposer au groupe de venir aussi. Comment ça tu les rencontreras tous ! Elmo vient de Sorrente en plus, c’est pas dingue ?
Je souris à Livio, puis rehausse mon fils dans mes bras. Avant de tomber amoureuse de l’homme que j’ai épousé, j’avais tendance à penser que personne ne pourrais avoir un jour envie de me toucher, ou simplement me trouver jolie. L’idée s’était frayée un chemin depuis et je me sentais belle dans ses yeux. J’y songe au moment où je monte mon fils dans son lit, au chemin parcouru depuis que Livio et moi sommes ensemble. Je repense à ce baiser volé dans la cuisine de l’appartement que je partageais encore avec Enzo à ce moment-là, et à tout ceux qui ont suivi, aux mots doux, aux moment de complicité, aux moments plus difficiles aussi et comment nous en sommes ressortis plus soudé encore. Je songe à tout ça et mon coeur se rempli d’une sérénité que je n’ai pas ressenti depuis longtemps. Livio et moi, quoique nous traversions en ce moment, allons en ressortir plus fort. J’en suis persuadée.