Seul avec du monde autour (Samuel)

Dans son coin, il ne faisait pas de vague, pas de bruit, car il ne se faisait surtout pas remarquer. La capuche de son hoodie usé était rabattue sur sa tête, une barbe de quelques jours couvrait la partie inférieure de son visage, tandis que ses paupières closes dissimulaient ses yeux d’un vert hazel qui avaient vu beaucoup trop de choses en quarante années d’existence. Un jour, voir ne sera plus un problème pour le luthier. Il le sait, mais ça n’était pas sa préoccupation majeure depuis son retour à Bowen. Il avait eut à faire à la police, il avait dû mentir droit dans les yeux à tant de personnes qu’il ne savait plus lui-même ce qu’il devait dire au sujet de la mort de son père. Vivre reclus, en solitaire et laisse filer les années… Il ne voyait que ça… Le temps qui mettra doucement cette histoire sous le tapis, les gens oublient toujours même si parfois cela semble effroyablement long. Il était fatigué, chassé de chez lui, il avait trouvé refuge dans une caravane, avec bon nombre des rebuts de la société.

Il s’était vu proposé de tremper dans des affaires louches, un homme seul, fort malgré les apparences et surtout avec rien à perdre… Ça vend du rêve aux différents trafics qui pullulent dans la ville. Il pourrait y songer ce soir, plus que jamais. Suite au tremblement de terre, il n’avait plus d’électricité dans sa caravane et les dépanneurs lui ont bien fait comprendre qu’il n’était pas leur priorité.

Vivre sans courant, ça n’est pas insurmontable pour lui. Non… Le problème provenait des canalisations, des eaux nauséabondes remontent par l’évier et le bac de douche. Pour éviter ça, obligé de déconnecter les caravanes des circuits, à l’ancienne mais ça devenait vite infernal de vivre dans cette puanteur… Manwë squattait depuis plusieurs jours dans son magasin en travaux suite aux vandalismes subis pendant son absence… Il n’était pas certain que la police ait prit au sérieux son dépôt de plainte, il ne pense pas qu’on le considère encore comme un être humain, peut-être même, moins qu’un animal. C’était sans doute surtout lui-même qui se percevait ainsi.

Lorsqu’il ouvrit les yeux, sa bière à moitié bue s’était éventée et quelqu'un s’était vraisemblablement installé face à lui. Il lui fallu quelques battement de cil pour réajuster sa vue et distinguer une forme humaine.

“ Ça va, j’t’ai pas trop dérangé en ronflant trop fort ? “ ironise-t-il avec un léger sourire en coin, car il sait très bien avoir un sommeil plutôt discret. Il n’a aucune idée de l’heure et combien de temps il a somnolé de la sorte. À l’hôtel, il n’y a plus de place, soi-disant, il sait qu’il devra encore dormir par terre dans son magasin. Il sait se contenter de rien, dans le fond, pas plus qu il n’avait jamais réellement eut peur de finir en prison ou de mourireun jour. “ Que me vaut l’honneur de cette compagnie ? “ Il a toujours eut cet humour insolent que ses amis connaissent bien, c’est pour lui une seconde nature de titiller, même ceux qu’il aime. Manwë espère toujours que son humour et son cynisme laisseront supposer qu’il va bien. Mais il ne va pas bien, c’est tout à fait le contraire. Cette histoire a détruit tous ces efforts depuis des décennies pour être quelqu’un de bon, il le sait parfaitement. Ses chances de ne pas mal tournée sont plus que moindres désormais, ils le savent tous.

Arrivé à l’établissement, tu balayes de ton regard la salle… Habitude de flic qui est ancré bien creux dans le crâne que c’est maintenant un geste automatique. Tu as besoin de savoir où sont les sorties de secours, combien d’individus approximatifs qu’il peut y avoir ici et bien sûr, le plus important, voir si tu connais quelqu’un. C’est d’ailleurs comme ça que tu reconnais Manwë dans son coin. Il a beau avoir la capuche de son hoodie sur sa tête, tu reconnaîtrais sa silhouette parmi mille ! Ou alors ce n’est seulement ton don caché. Tu dois cette affirmation à tout ce temps à l’avoir observé lorsqu’il venait voir ton mari, tu ne peux pas te tromper.
Pourtant, malgré tes observations, Manwë est un homme que tu as du mal à cerner parfois. Même si tu le connais depuis ton secondaire, il se trouve qu’il y a encore des questions à son sujet qui restent sans réponse. À bien y penser, tu t’en fiche, Sam. Oui, puisque cet homme, tu le vois comme le grand frère que tu n’as pas eu… Ça t’a tellement tué de l’intérieur de devoir enquêter sur lui après ce qu’il à fait. Enfin, officiellement, ce qu’il n’a pas fait. Ayant compris la raison de ses actes commis, hypothétiquement parlant, tu as donc essayé de ralentir l’enquête sans pour autant mettre ta carrière en danger. Finalement, par manque de preuve, le procès est tombé à l’eau. Tu as été content de ne pas voir l’un de tes amis derrière les barreaux — ami de ton mari.

Parlant de ton mari, il s’est encore une fois montré violent ce soir. Voilà la raison pour laquelle tu as atterri ici, assise devant Manny, une bière à la main. Depuis son accident, ton conjoint a du mal à contrôlé sa colère. C’est comme s’il devenait quelqu’un de complètement différent. Détacher… Tu as aussi remarqué que sa jalousie est deux fois plus pire, te demandant constamment à qui tu parles, avec qui tu es. Puis, si tu as le malheur d’oublier de lui envoyer un texto lorsque tu es sorti, c’est reparti pour un tour une fois que tu retournes chez toi. Mais tu l’aimes ton mari et tu sais que ce n’est pas de sa faute s’il est ainsi. Que c’est ce foutu accident de travail qui l’a changé… Alors tu subis et tu continueras a subir jusqu’à ce qu’il accepte de se faire soigner ou jusqu’à ce que tu te retrouves à l’hôpital ou pire.

Manwë ne prend pas longtemps pour réaliser que tu es présent ni même d’utiliser son ton ironique comme à son habitude. « Le pire bruit que je n’ai jamais entendu ! » Que tu dis en lui faisant un clin d’œil. « Je n’ai plus le droit de prendre de tes nouvelles ? Tu me brises le cœur Manny… » Continues-tu en prenant une gorgée de ta bière. Avec lui, tu n’as pas besoin de faire attention à comment tu agis. Avec lui, tu as la possibilité de t’amuser, de rire. Ce qui t’aide énormément à oublier toutes les épreuves qui se passent dans ta vie. « Comment tu vas ? » Que tu demandes, en souriant sincèrement.

Man’ reconnu la voix de Samuel, du mari de son ami. Il faut dire qu’en général, il ne s’entend pas vraiment avec les conjointes et conjoints de ses amis. Souvent par principe, parce qu’il ne croit pas au mariage, qu’il est persuadé que ce sont des histoires qui vont mal finir pour ses amis et la plupart du temps… Il avait raison.

Pour Sam’... C’était un peu différent. Ils se connaissaient depuis l’enfance, sans qu’ils aient été aussi proches que Man’ pouvait l’être des O’Brian ou de l’époux de Sam à l’époque. Néanmoins, il avait toujours apprécié ce petit gars à la belle gueule d’ange qui ne manquait pas de courage. Le luthier voulait croire que le couple d’hommes lui donnait tort, pour une fois, au sujet du mariage. Que leur histoire se passait pas trop mal, bien qu’il n’en connaissait pas les détails.

Il ignorait que son ami levait la main sur son mari, s’il l’avait su… Man serait si furieux, si incontrôlable. Il appréciait Samuel, parce qu’ils avaient travaillé ensemble à une époque au poste de police et parce que même s’il savait pour son père, il était là pour lui. Plus que son ami, à croire que Sam était devenu davantage son ami que l’inverse, avec le temps. Il ne lui en voulait pas, tout le monde s’éloignait de lui depuis cette affaire de meurtre, tout le monde le pensait coupable et ils avaient raison… Chacun était libre d’agir en conséquence.

“ Hm… “ Répondit-il tout simplement, papillonnant encore des yeux pour émerger et voir un peu plus clair, ses yeux se trainent de plus en plus, les ombres sont de plus en plus floues et selon sa fatigue il y voyait de moins en moins. Les traits de Samuel apparaissaient doucement, c’était peut-être aussi pour cette raison qu’il ne pouvait pas remarquer que son ami portait du maquillage. “ C’est pas moi le spécialiste des cœurs brisés. “ Man’ n’a jamais présenté qui que ce soit comme une ou un partenaire de vie, il a eut bien des conquêtes dans sa vie mais jamais d’histoire sérieuse. Il pourrait dire qu’il est tombé amoureux, une fois, d’un homme, mais celui-ci avait quitté la ville après la mort du père de Manwë, il ne lui en tient pas rigueur, de toutes ces promesses non tenues, il s’y était clairement attendu. Personne ne peut l’aimer, c’est comme ça.

Le luthier eut un rictus ironique à la dernière question posée par son interlocuteur. “ Ça roule et toi ? “ Qu’est-ce qu’il aurait pu répondre d’autre ? Man’ n’est pas le genre de mec qui se lamente à longueur de journée, bien au contraire. “ C’est moi ou t’as une sale gueule mon pote ? “ L’hopital qui se fout de la charité, sans doute. À présent sorti de son semi-sommeil, il voit bien mieux les traits de son ami. Ça n’a jamais été clair, il voit le monde de sa manière bien à lui, sans les couleurs. Personne ne peut comprendre à quoi ressemble vraiment sa vie et il ne cherche pas à être compris, il a lâché l’affaire. “ C’est quand la dernière fois que t’as pris des vacances ? L’affaire Keynes-Druid t’as donné du fil à retordre, hm ? “ Des histoires de meurtres c’est pas ce qui court le plus à Bowen, ils auraient pus donner quelques jours à Samuel après ça, pour qu’il se retape quoi… Enfin, c'était son avis… Malgré tout, il est désolé de l’épuisement psychologique qu’a dû lui couter une telle enquête. “ Entre nous… Tu pense aussi que ma place est en taule, pas vrai ? “ C’est pas son genre de rentrer dans le tas comme ça, mais entre amis, ils peuvent tout se dire, même si Man’ ne pouvait pas dire à un flic : oui, je l’ai tué. Il n’a pas besoin de le dire, ils le savent tous les deux, comme ils savent que son père était une vraie raclure de trafiquant doublé d’un assassin.

Il a le don de te faire sourire cet homme. Un sourire vrai suivi d'un petit rire de cœur au vue de sa réaction. "Parce que tu insinue que je suis le briseur de coeur ?" Tu continues avec ton sourire même si tu restes toujours aussi alerte que pendant ton quart de travail. Est vraiment dans le but de guetter discrètement la moindre activité criminelle ou est-ce parce que tu as peur de voir ton mari débarquer et te voir avec Manny ?
Tu le sais, Sam, qu'il peut débarquer puisque tu as accepté d'installer un logiciel dans ton cellulaire pour lui indiquer où tu es en tout temps. C'est excessif, mais tu as accepté, sous prétexte qu'il veut faire sur que tout va bien.

Tu laisses la bière couler le long de ta gorge une deuxième fois, on écoutant toujours ton ami. Ton cellulaire se mit à sonner de plusieurs notifications indiquant des textos. A peine un coup d'œil jeté, tu le repose face contre table pour ne plus te faire déranger. Surtout que Manwë à bien remarquer la fatigue tirer les traits de ton visage. Si seulement il savait que ce n'est pas à cause de ton travail. Du moins… Une bonne partie, l'est. Pas le reste.
Tu souris tristement avant de répondre à sa première question : "Oh… Ça va, pas trop d'histoire." Men-tu. "Que veux tu, il n'y pas de repos pour le crime, il n'y aura pas de repos pour moi." Dis-tu en lui faisant un clin d'œil. Monsieur enchaîne sur sa constatation en ajoutant que l'affaire Keynes-Druid t'a bien pris de l'énergie. Mais tu ne réponds pas à propos des vacances. Tu préfères largement travailler que de te retrouver entre 4 mure a te demander quand est-ce que Scott va pété un plomb à nouveau… Puis tu le regardes, surpris de sa dernière question. Cette fois, tu utilises un ton plus ferme, Samuel, presqu'outré par ses pensées. "Tu sais très bien ce que j'en pense ! Arrête de croire que je veux le contraire, Manny. Ton daron a eu ce qu'il méritait après les atrocités qu'il à fait." Tu n'as pas parlé trop fort, mais tes paroles sont sincères. "Tu te mérites une médaille plutôt que des reproches." Est ce que tu es vraiment flic ? Est ce que tu es dans la bonne vocation pour avoir des pensées comme ça ?

HJ:

Il avait simplement hoché la tête, il pense bien que Samuel a brisé bien plus de cœurs qu’il ne se l’imagine, il avait probablement laissé de nombreuses personnes déçues. Manwë n’était pas encombré par ce genre de chose, ces conquêtes l’ont trouvé sympas, mais personne ne veut s’engager avec un homme tel que lui. Ce qui tombait bien, puisqu’il ne voulait s’engager avec personne non plus, il estimait qu’il avait une vie suffisamment compliquée et destructrice… Inutile d’entrainer quelqu’un avec lui.

Pas de repos pour le crime, Man’ eut un sourire un soupçon moqueur. Pourtant, à une époque, il avait lui-même essayé d’être policier, mais il n’avait pas réussi les tests d’aptitudes physiques à cause de son handicap visuel. Pourtant, il aurait fait un flic formidable et sa vie en aurait été changée. L’histoire ne peut être ré-écrite.

Il pose la question, pour savoir à quoi s’en tenir, pour savoir ce que pense son ami de lui, en toute franchise. Il fut étonné que celui-ci n’hésite pas une seconde sur sa réponse et paraisse même… Plutôt ferme. Le brun esquisse un faible sourire, sincère cette fois-ci. “ Une médaille, hm… Dans l’hypothèse où je l’aurais fait. “ Il ajoute ça, car les murs ont des oreilles, sait-on jamais. Le luthier soupire faiblement avant de dire plus bas encore “ D’accord, n’en parlons plus jamais. “ Pourtant, il aurait bien besoin d’extérioriser ce qu’il s’est passé, ce qu’il a ressentit, mais ce n’était pas Manwë après tout, d’agir ainsi.

“ Tu enquêtes sur quelque chose ? “ Qu’il demande, parce qu’il a remarqué les divers coups d’œil jeté vers la porte, comme s’il attendait quelqu’un. Peut-être que ça lui changerait les idées, à Manwë, même s’il n’était qu’un civil. Enfin, un civil censé faire profil bas. Ça n’a jamais été son fort d’être un gentil petit citoyen sans histoire, alors il n’est pas certain de parvenir à tenir ce rôle encore longtemps avant d’avoir à nouveau divers problèmes à son actifs. “ Vu que tu picole, t’es pas vraiment en service, si ? “ Aucun jugement sur la consommation d’alcool, Man lui-même devrait franchement lever le pied, mais ces derniers temps c’était sa majeure source de réconfort. Man’ comprenait un peu plus chaque jour pourquoi sa mère était une alcoolique, il est si bon et si doux d'édulcorer la réalité de ce monde. “ J’ai peut-être des infos… Tous les connards de la ville me tournent autour, j’suis devenu la bonne meuf du moment faut croire. “ Manwë lâche un léger rire avant de faire signe à un serveur de lui remettre une bière, la sienne étant éventée il n’a pas vraiment le gout de la terminer.

« Ouais, dans l’hypothèse que tu l’aurais fait ou peu importe qui l’a fait ou si ton père s’est enlevé la vie… Ce n’est pas une mauvaise chose. » Bon, faut dire qu’en ce moment ce n’est pas le flic qui parle, mais l’homme que tu es. Puisque normalement, tu ne félicites personne d’avoir pris une vie… Même que tu es surpris par tes propres paroles. Peut-être est-ce parce que tu connais la douleur toi aussi ? Bref, peu importe, tu as dit ce que tu as dit et tu ne t’en veux pas non plus après tout, ce n’est qu’avec Manny.
« J’te dis pas de ne plus jamais en reparler… » Dis-tu en levant les yeux vers Manwë. « Tu sais que je vais toujours t’écouter si tu as besoin de parler. » Tu poses une main sur celle de ton ami, dans un geste pour le rassurer. « J’te laisserais pas tomber… » Après quelques secondes, tu retires ta main, réalisant que c’est peut-être un peu trop personnel. Puis, si Scott l’avait vu, ça aurait déclenché une bagarre, sûrement.
Tu soupires à cette réalisation et tu t’étais mis à regarder la porte. Tu faisais seulement sûr que ton mari n’arriverait pas. « Mmmh ? » Échappes-tu en le regardant, laissant à ton cerveau le temps de calculer l’information de la question. « Oh, euh… Non, non… Je n’enquête sur rien en ce moment. Je me suis perdu un peu dans mes pensées, je crois. » Que tu souris cette fois en ramenant la bouteille de bien a ta bouche. Tu essaies de dissimuler le petit mensonge inoffensif que tu viens de lui dire et tu passes ta main dans tes cheveux pour les ramener sur ta tête. Un petit geste nerveux ou de malaise… « Non, je ne suis pas de service. T’inquiète. »

Après… Même si tu avais été en service, tu n’aurais pas vraiment refusé un p’tit verre de rien du tout. « Bah alors… C’est quoi, tu te fais de la publicité ? Qu’est-ce qu’ils font au juste tes Connards ? » Cette fois tu souris, amusé puisque tu imagines bien Manwë dans des vêtements de femmes amadouant les gros cons. Enfin… Peut-être un signe que tu es fatigué en fait. Tu secoues la tête pour faire disparaître les images et te concentrer sur ton ami. « Tu veux que je te débarrasse d’eux ? »

Ils savent bien que son père ne s’est pas suicidé, celui-ci avait été tabassé à mort, on ne se fait pas ça tout seul. Mais le brun n’allait pas relever ce fait, changer de sujet de conversation lui convenait parfaitement. Il disait ne plus vouloir en parler, de toutes manières, avec qui pourrait-il se montrer honnête ? Certainement pas un mec qui bosse à la criminel, non, il fallait être un minimum raisonnable. C’était le genre de choses affreuses qu’il devait garder pour lui, à jamais, laisser pourrir ça dans son cœur avec ses autres déceptions. Il eut une légère crispation de la main lorsque Sam’ vient le toucher, il faut dire qu’il n’avait plus vraiment l’habitude des contacts doux ces derniers temps, son corps était facilement en alerte. “ Ouais, ok. “ Dit-il simplement, un peu gène par cette démonstration, bien que dans le fond, oui… Ces mots faisaient du bien. “ Et désolé que tu aies dû enquêter sur ma disparition et possible mort… J’avais pas prévu de disparaitre si longtemps, j’ai un peu hésité à revenir. “ Il aurait pu devenir n’importe qui, n’importe où…

Man le connait assez bien pour savoir qu’il lui cachait quelque chose, bien sûr il pourrait chercher à savoir mais il avait bien assez de problèmes ainsi. Il avait tort, il le regrettera le jour où il comprendra. “ Si tu le dis… “ Puis finalement il lâche un léger rire aux dernières questions de son ami. “ Non, j’suis juste un mec qui n’a plus rien à perdre, l’idéale nouvelle recrue des réseaux, mais t’inquiète pas, j’sais me défendre tout seul. “ Même si ce n’était pas le cas, il ne sait pas demander de l’aide, sur ce point, Samuel et lui se ressemblaient beaucoup. Man n’est pas un type très balaise, mais il sait faire très mal. Se battre, il le fait depuis bien jeune. Il avait tabassé un homme jusqu’à ce qu’il expire son dernier souffle, c’était ça, qui faisait de lui le type idéal à recruter au sein des gangs et mafias de la ville et alentour. Néanmoins, même s’il pouvait tomber plus bas, il le fera seul. Le serveur arriva à leur hauteur avec la bière et fit savoir aux deux hommes que le bar fermerait dans vingt minutes.

Le luthier soupire, il fallait vraiment qu’il fasse quelque chose au niveau de son mobil-home, oui… Il devrait sans doute essayer de se reloger quelque part et taper dans l’héritage laissé par son père, mais il n’arrivait à se résoudre d’utiliser cet argent sale. Il se promit de trouver une solution d'ici à la fin de semaine. “ J’ai dû m’endormir plus longtemps que je ne l’imaginais… “ Au moins, il avait pu récupérer un peu, à croire que la vie en cavale était plus reposante que celle-ci.

« Ne sois pas désolé même si j’avoue que ça été dur, même voir une source de nervosité puisque chaque indice pouvait me mener à ta possible mort. » Qu’tu dis en avalant le reste de ta bière. « J’avoue que j’ai été content de te voir revenir… » Pas que tu es attachée à Manwë, mais c’est ton ami. T’es ami son cher à tes yeux et tu seras toujours là pour eux, peu importe leur situation… Tu es comme ça, tu vas te donner corps et âme pour les gens que t’aimes. C’est sûrement ta plus belle qualité, mais aussi ce qui peut te faire tomber. Ça te donne une faiblesse que tout le monde peut exploiter…
Ton cellulaire sonna encore à cause d’un texto. Tu soupires en voyant le nom afficher, tu réponds vite fait avant de reposer ton appareil sur la table. Tu vas devoir retourner bientôt et t’as pas vraiment envie… D’y retourner. T’as envie de rester et parler avec ton ami. De le retrouver, d’écouter ce qu’il a fait… Bien qu’il n’est pas comme toi. Il ne va pas jeter ce qu’il ressent dans tes mains mon beau Sam. Tu le sais.

« Ok » que tu dis en le regardant. L’observant plutôt, pour voir s’il te dit la vérité. Mais s’il est comme toi, c’est sûrement assuré qu’il ne demandera pas d’aide. « Mais tu connais mon numéro, si jamais t’as besoi d’aide. J’ai pas envie de perdre un ami. » Ne pas t’inquiéter c’est comme demander à un chien de ne pas renifler les odeurs des alentours. Tu ne peux pas ne pas t’inquiéter, tu ne peux pas ne pas fouiller. C’est inné chez toi. Un trait que t’as appris à l’académie et avec tes années d’expérience dans le métier. Tu observes tout, tu analyses tout ce qu’on te dit. Un automatisme parfois très épuisant en réalité, si seulement tu pouvais mettre ton cerveau sur off ou sur pause pour pouvoir agir comme un homme normal … Bien que normal n’existe pas.
Tu lèves les yeux vers la dame qui venait servir Manwë une dernière fois, sûrement. Elle vous dit que le bar fermera dans vingt minutes. Tu soupires… Une fois qu’elle est partie, déçue de cette courte durée avec lui. « Hmm… Eh bien, je ne pensais pas que ça fermait aussi… Tôt. » Tu pouffes légèrement du nez, chassant cette émotion de ta pensée. « J’te ramène… Et je ne prends pas non pour une réponse. » Que tu dis en ne le laissant pas protester. Au moins, tu profiterais encore un peu de répit avant de connaître la tempête qui s’abattra sur toi en arrivant. Surtout après avoir ignoré les textos…

Il hoche doucement la tête, il sait les soucis qu’il a causé dernièrement, c’est bien pour cela qu’il se fait petit ces derniers temps. Il sait qu’il faudra du temps pour se faire oublier, mais il est patient, après tout, il a eut ce qu’il voulait, peu importe la suite.

“ J’suis d’la vraie carne tu sais, increvable. “ On dit que ce sont les tendres qui meurent les premiers, il n’en sait rien, mais il ne craint pas la mort. Sa mission était de préserver ceux qui tenaient encore à lui, malgré tout…

Il se fit servir une autre bière et débarrassé celle qui avait bien trop pris l’air pendant son petit somme. Le brun observe son ami soupirer, comme s’il ne voulait pas rentrer chez lui. Peut-être de l’eau dans le gaz, mais qu’est-ce qu’il y connait en vie de couple ? Il se dit que ça ne le regarde pas… Pauvre Samuel. “ Ça ferme tôt à cette saison, il y a moins de touristes. “ Dommage d’ailleurs… Si les touristes étaient là, il pourrait davantage passer inaperçu, se fondre dans la masse. Mais ils reviendront tous, ces vacanciers, et pour une fois, il sera ravi de les revoir. Ça lui fera peut-être des gens avec qui parler et qui ne le connaissent pas, ni lui, ni son histoire tragique, beaucoup trop mise en lumière ces derniers temps. “ Ok, si tu veux. “ Il avait encore une demi-heure pour réfléchir à quoi faire… Se faire déposer à son ancienne adresse, au risque d’être vu en train de faire demi-tour, en flagrant délit de mensonge, un de plus. Se rendre à son mobile-home au risque que l’odeur n’interroge son ami… Restait le magasin, sujet aux questionnements…

C’était tout réfléchi, en quelques gorgées. “ Il faut que j’aille au magasin avant de rentrer, un peu de boulot. De toutes manières… Je ne dors plus vraiment. “ C’était plié. C'est qu’à force de mentir, il commence à devenir bon à ce petit jeu, qui l’aurait cru, lui. “ C’est pas à cause de lui… “ Ce coup-ci, il ne croit pas lui-même à son mensonge, il sait que ça sonne faux, mais comment trouver le sommeil quand l’on a découvert de quoi l’on est vraiment capable… De tuer un homme à mains nues. Il continue donc de boire, presque pressé de mettre fin à cette journée, d’avorter quelconque geste de sympathie, parce qu’il ne le mérite pas, il ne l’a jamais mérité, il le sait, il en est convaincu.

« Heureusement ! » Qu’tu lui réponds en souriant. Tu n’aurais pas voulu l’retrouver mort après tout. Tu n’sais pas pourquoi, mais tu tiens à c’mec… Même s’il est l’ami d’ton mari avant tout.
Puis tu soupires lorsque t’entends la femme vous dire qu’il reste 20 minutes avant la fermeture… Tu soupires parce que t’as pas envie d’rentrer chez toi. Pas maintenant… Surtout pas après l’texto que t’as reçu de ton mari, hein, Sam. « Dommage » réponds-tu simplement en terminant ta propre bière. « Si je ne voulais pas, je ne t’aurais pas demandé. » Cette fois, ton sourire s’élargit en pensant qu’il a doit être encore assez endormis. « J’crois que le sommeille te fait pas bien, Manny »

Hmm… Ouais, toi alors, avec tes belles cernes sous les yeux… Faut croire que toi, tu fuis l’sommeille ! Voilà que ton ami te parle de boulot dans son magasin, serait-ce là une porte de sortie pour t’empêcher d’retourner chez toi ? Mais si tu fais ça… Caleb, il va te péter une crise de jalousie encore une fois… La meilleure solution est bel et bien d’emporter ton ami et de retourner chez toi pour éviter d’empirer les choses. Il te dit ensuite qu’il ne dort plus vraiment… « T’es sûr ? I mean, ce n’est pas rien… Tu peux m’en parler, tu sais, je comprends mieux que tu le penses. » Pas parce que tu as tué quelqu’un de la même façon. Mais… T’as déjà tiré pour protéger les gens. Même si c’est ton métier, tu as quand même enlevé la vie de quelqu’un, pas beaucoup, heureusement, deux gros max et ça te hantent encore aujourd’hui. Tu n’avais pas eu le choix d’appuyer sur la gâchette la première fois, c’était pour te protéger, toi et ta sœur. La deuxième fois non plus à bien y repense… L’gars allait tirer.
« Allez… Je te ramène, je sais qu’il reste encore quelques minutes, mais je crois que ce serait plus sage… Et puis si tu as besoin d’aide pour tes travaux, je peux peut-être t’aider, te tenir compagnie. » Ce serait bien mieux finalement.

Il ne savait pas vraiment s’il dormait ses derniers temps ou s’il se mettait seulement en veille, comme un peu plus tôt avant qu’il ne ressente la présence de Samuel. Moins il se pose de question existentielle, mieux il se porte. Malgré sa vie de merde, le luthier n’a jamais eut de troubles psychiatriques, de névrose ou de dépression, ni même d’alcoolisme ou dépendance aux drogues. Il fumait certes beaucoup trop, mais il avait toujours su garder la tête froide, pendant toutes ces années de perdition. Désormais, à présent que son but était accompli, le mental n’était plus aussi fort.

“ Y’a rien à dire, Sam. “ Il était un poil sec, mais il ne voulait pas être vu comme quelqu’un de faible, il n’a jamais eu besoin de parler à qui que ce soit, il ne voulait pas que ça change. Man’ ne voulait pas non plus que l’on s’imagine qu’il regrette son geste. “ C’est pas à cause de lui. “ Cette fois, il l’affirme avec plus de conviction, puis il termine sa bière. Il sait bien, c’est à cause de lui-même, des limites de sa violence qui semblent tellement différentes depuis ce qu’il a fait…

“ En route alors. “ dit-il avec un léger sourire. “ T’as envie de bricoler toute la nuit ? Tu vas pas assumer demain matin. “ Il parlait bien sûr du boulot, il ne songeait pas à des représailles de son mari. Ils quittent l’établissement, non pas sans lâcher un rot dû aux bière et parce qu’il manque pas mal de bonnes manières, suite auquel il eut un léger sourire, un peu trop fier, l’immaturité masculine dira-t-on…

Le froid réveille un peu le luthier plutôt amincit ces derniers temps. Il n’a jamais eut grand appétit, mais les dernières circonstances lui font négliger ce genre de besoin. “ Au fait, j’me suis débarrasser d’ma voiture, j’vais arrête de conduire sans permis, j’me suis dis que ça te ferais plaisir de le savoir. “ Un danger public en moins sur la route, c’était une belle avancée, il avait eut beaucoup de chance de n’avoir jamais eu d’accident, enfin, pas d’accident grave. Il lâche un léger rire avant de grimper dans le véhicule de son ami, c’est pas souvent qu’il apprécie de monter dans la voiture d’un policier.