Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
Sujet: the saddest part of me (joséphine) Mar 10 Jan 2023 - 17:09
The saddest part of me
ft. joséphine & tommy
La date fatidique était arrivée à grands pas. Un peu trop vite peut-être. Directement après l’euphorie des fêtes de fin d’année. Ce jour, il le redoutait comme la peste. Il le confrontait à ses actions des dernières années. A celui qu’il était devenu depuis que sa vie avait changé du tout au tout, depuis qu’il avait perdu ce petit être qu’il chérissait temps. Amélia. Rien qu’en pensant à ce prénom, tous ses muscles se tendaient. Et comme chaque mois de janvier depuis trois ans, l’ancien pompier s’était peu à peu renfermer sur lui-même, incapable de faire face à ce tsunami de tristesse. Alors Tommy, il avait fait ce qu’il savait faire de mieux depuis un moment : se réfugier dans des verres d’alcool. Verres qui s'étaient bien trop vite transformés en bouteilles. Un remède de lâche, mais efficace, en tout cas pour lui. Tout ce qu’il savait faire maintenant, c’était engourdir son corps grâce à la boisson. Pourtant, cette fois, il s’était résolu à faire ce qu’il n’avait pas été capable les années précédentes : se rendre sur la tombe de sa fille. Et c’est le cerveau embrumé de quelque gorgés, qu’il se retrouvait là, aux portes du cimetière. Bras ballants et peu fier, un bouquet de fleurs dans la main, sa fidèle flasque dans l’autre. Les minutes avaient défilé, le laissant immobile devant l’entrée de ce lieu, avant qu’il ne décide à rentrer. Une dernière gorgée fut nécessaire avant de passer les grilles du cimetière. Le brun remit calmement sa flasque dans sa veste avant d’avancer d’un pas peu rassurer. Malgré ses faibles visites, le chemin lui paraissait familier, ancré dans son esprit depuis l’enterrement. En avançant tête baissée vers la tombe de sa fille, il n’avait pas pris le temps d’observer les lieux. Alors ce n’est qu’en arrivant à quelques mètres de là qu’il posa son regard sur cette silhouette si familière. L’idée de fuir avant qu’elle ne le voie traversa son esprit, mais contre toute attente, il finit par combler les quelques mètres qui lui restaient à parcourir. Conscient qu’il ne pourrait pas l’éviter toute sa vie, encore moins durant ce jour si particulier. “Salut Jo’...” Murmura-t-il pour lui signifier sa présence, incapable de réfléchir à des mots plus appropriés pour le moment.
Dernière édition par Tommy O'Brian le Mar 17 Jan 2023 - 12:55, édité 1 fois
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Sam 14 Jan 2023 - 15:28
Le dix janvier est une date que je redoute. Alors que ce jour arrive, je commence doucement à m'isoler, à préférer le travail à la maison plutôt que au bureau, je ne me sens pas capable de conduire ma voiture. Comme tous les ans, je revêts une tenue noire, celle que j'aurai aimé porter si j'avais assisté aux funérailles. Je nage un petit peu dans ma robe, comme tous les ans, car je perds l'appétit à l'arrivée de cette date si fatidique. Au moment de préparer mon sac à main, je ne manque pas de me rendre dans ma chambre, de saisir une boite au fin fond de mon dressing. En l'ouvrant, je sens les larmes me montaient aux yeux mais en clignant plusieurs fois, j'arrive à les éliminer. J'inspire une grande bouffée avant de me saisir de cette peluche que ma fille emmenait partout avec elle. Malgré de nombreux lavages, il perdure quelques tâches de sang telles une piqûre de rappel de cette journée.
Je me rends ensuite chez mon fleuriste ainsi que chez le boulangerie à proximité de ma maison. Chez le premier, je prends une petite bouquet, plein de couleur comme les aimait Amélia. Cette année, j'ai choisi un mélange de tulipes et d'iris. Magnifique, pensais-je amèrement. Chez le second, je prends une petite part de tarte aux pommes, sa préférée également. Je continue ce rituel en me rendant en transport en commun vers le cimetière où je n'ai pas besoin de réfléchir pour trouver la tombe de ma fille. En lisant ce nom et la date, je ne peux empêcher ma mâchoire de se contracter, avalant ensuite difficilement ma salive. J'inspire un grand coup avant de m'installer au bout de la pierre tombale, commençant mon rituel.
"- Bonjour ma chérie. Je t'ai ramené de jolies fleurs aujourd'hui, pleines de belles couleurs. J'ai pris aussi une part de tarte, aux pommes évidemment. Elle a l'air très bonne."
Tout en disant ça, je dispose les fleurs dans le vase prévu à cet effet. Ensuite, j'ouvre la petite boite où se trouve la part de tarte et une fourchette. Je commence à grignoter un petit bout de cette dernière, appréciant ce calme sinistre que propose l'endroit. J'eus un petit sursaut en entendant mon prénom, ou plutôt mon surnom. Je n'eus pas besoin de me retourner pour reconnaître cette voix. Je l'aurais identifié entre mille tant elle m'a fait rêver, voyager et finalement blesser.
"Tommy."
Je jetais un coup d'œil sur mes mains, hochant la tête, résignée à l'idée qu'il soit là. C'était la première fois que je le croisais ici, en ce jour si particulier. Je ne m'y attendais pas vraiment mais n'en étais finalement pas si surprise. Amélia était notre fille, autant la sienne que la mienne et je ne pouvais prétendre à me recueillir seule sur sa tombe, comme je le faisais chaque semaine depuis cette date ancrée dans ma peau.
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mar 17 Jan 2023 - 12:55
Un seul regard avait suffi pour que son cœur ne fasse qu’un bond. Tommy, il avait beau s’être préparé mentalement à se rendre sur la tombe de sa fille, il n’était pas prêt à la vague de souvenir qui s’emparait de lui à cet instant. Mais il aurait dû s'en douter, Tommy. Perdu dans sa propre tristesse, il n’avait même pas songé un instant à pouvoir croiser quelqu’un sur la tombe de sa fille. Un oubli naïf, alors que déjà, plusieurs membres de sa famille auraient pu être présents dans ce lieu. Croiser Joséphine était d’autant plus logique. Un frisson le parcourut en l’entendant prononcer son prénom. Tout était encore si familier, même après tant de temps loin l’un de l’autre. Le brun baissa le regard, soudainement gêné d’avoir interrompu son moment de recueillement. “Désolé, je ne voulais pas te déranger” dit-il dans un nouveau murmure. L’ambiance du lieu dans lequel ils se trouvaient avait le don de lui glacer le sang. Tout son corps était tendu, brusqué par la quiétude autour d’eux. Seul le léger frottement du vent contre les feuilles et le chant des oiseaux venait rompre le silence, sans pour autant casser cette ambiance morbide. L’Australien regarda légèrement les alentours avant de reporter son attention sur Joséphine, sentant la gêne monter en lui. “Je… Je suis simplement venu déposer ça” Dit-il en brandissant légèrement le bouquet qu’il tenait dans ses mains comme si sa vie en dépendait. “Mais je peux repasser plus tard si tu veux” annonça-t-il, baissant de nouveau le regard, légèrement honteux. Bien évidemment, c’était faux. Combien de temps lui avait-il fallu pour pénétrer l’enceinte du cimetière ? Il n’aurait jamais le courage de le refaire de si tôt.
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mar 17 Jan 2023 - 17:27
Entendre plusieurs mots de Tommy me fit un coup de poignard supplémentaire en cette journée. Comme à chaque fois que je me recueillais, j'étais submergée par la nostalgie, par les bons moments que nous avons passé ensemble telle la belle famille que nous étions, mais aussi par la tristesse des événements. Tant d'émotions me submergeaient en ce dix janvier. Entendre la voix de cet être qui m'était cher, n'arrangeait donc rien à ma peine. Je décidais de ne pas lui répondre, me laissant le temps de digérer mes émotions pour quelques secondes du moins. J'avalais difficilement ma salive, ainsi que ma peine par la même occasion, pour tenter de reprendre une voix claire et froide, comme je l'avais été sur la toute fin de notre relation. Seulement, ma voix ne sortit pas aussi froide que je l'avais espéré :
"- Tu ne me déranges pas. Tu peux rester."
Alors que je fixais encore la pierre tombale d'Amélia, je sortis sa peluche de mon sac à main et la serrais contre moi. Malgré les tâches et le temps qui passait, je n'avais pas encore eu le courage de m'en séparer, c'était un morceau de ma fille qui perdurait à mes côtés. J'étais consciente qu'il n'avait plus son odeur depuis le temps. Pourtant, je la sentais encore. Je percevais encore l'odeur du gel douche poudré que je lui achetais tout comme l'odeur de la crème de change que l'on utilisait bébé.
Après une grande inspiration, je levais finalement le nez en direction de Tommy et retint quelques secondes mon souffle. Il n'avait pas vraiment changé par rapport à la dernière fois que nos chemins s'étaient croisés. Il était toujours ce bel homme, bien que le teint beaucoup plus terne et des cernes qui s'étaient creusés. Malgré tout ce qu'il s'était passé, je ne pouvais pas ignorer ce petit crépitement que je sentais au fond de mon ventre, en souvenir de tout ce qu'on avait vécu probablement. Pour lui faire comprendre que j'acceptais sa présence ici, je me penchais vers la pierre et lui tendit un petit vase vide afin qu'il puisse déposer également ses fleurs pour sa fille.
"- Tiens."
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Ven 27 Jan 2023 - 16:46
Au fond, il aurait presque espéré qu’elle lui demande de s’en aller. Ainsi, il aurait eu la parfaite excuse pour ne pas faire face à cette journée. Il aurait pu rentrer chez lui, la conscience à moitié tranquille, pensant avoir fait la bonne chose en lui laissant l’espace nécessaire. Bien évidemment, la culpabilité serait arrivée dès le lendemain. Comme chaque 11 janvier suivant une énième fuite. Confronté à ce qu’il estimait être un échec parental. Dès que la situation s’était compliquée, l’ancien pompier avait échoué autant dans son rôle de père que de mari et ça, il ne pourrait jamais l’enlever de son esprit. Tout ce qu’il pouvait faire à présent, c’est des efforts, avant d’être complètement consumé par la culpabilité. Tommy, il avait conscience qu’il ne pourrait pas se cacher éternellement derrière une bouteille de rhum. Que ce soit la culpabilité ou le chagrin, il faudrait bien choisir son bourreau. En ce jour, c’était le chagrin qui primait. Et à la vue de la peluche que Joséphine sortait de son sac, le cœur de Tommy se serra un peu plus. Instantanément, sa mâchoire s’était resserrée et son regard s’était détourné tant la douleur était forte. Tous ces souvenirs qu’il avait essayé de repousser au plus profond de lui ces dernières années remontaient soudain à la surface. Petit à petit, sans qu’il ne puisse rien y faire. C’est pour cette raison précise qu’il n’avait pas été capable de revenir ici depuis tout ce temps. Parce que le déni est bien plus simple que le deuil, mais surtout, parce qu’en acceptant les bons souvenirs, très vite, les mauvais arrivent eux aussi. Au fond, c’est ça qui le terrifiait tellement. Il enfouissait tout au fond de lui pour ne pas affronter les souvenirs de ce soir-là. Des images ancrées dans son cerveau à l’indélébile et qui le ramenaient constamment à ce savant mélange entre déchirement et peur extrême. Alors qu’il était exactement en train de se perdre là-dedans, c’est la voix de Joséphine qui le ramenait à la réalité. Tommy releva alors son regard sur le vase que lui tendait son ex femme. Il lui fallut quelques secondes avant de prendre réellement conscience de la situation. “Merci.” Après un soupir, un léger sourire en coin s’afficha sur son visage l’espace de quelques secondes. Plaçant ses fleurs dans le vase, à côté de celles qu’il supposait être celles de Joséphine, le brun ne put s’empêcher un petit commentaire. “C’est ta façon polie de me dire de m’en aller, Jo’ ?”Lâcha-t-il en essayant maladroitement de détendre l’atmosphère. Un commentaire comme il avait eu l’habitude d’en faire pour titiller sa femme. Seulement cette fois, il n’était pas sûr de lui, pas après toutes ces disputes qu’ils avaient eues.
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mar 31 Jan 2023 - 16:00
J'observais les mains de Tommy à défaut de son visage. Ses traits faciaux, je les connaissais encore par coeur bien qu'ils avaient un peu changés avec les années. Je savais que l'observer sourire ou encore être triste me tordrait violemment l'estomac et je préférais m'abstenir pour l'instant. A la place, je l'observais poser les fleurs qu'il avait amené avec lui. Lui aussi avait opté pour de la couleur comme l'aimait notre fille à l'époque. J'observais ces fleurs lorsque je l'entendis parler. ou plutôt essayer de détendre un peu l'atmosphère comme il avait l'habitude de le faire avant. Malheureusement, les choses avaient changés et j'étais beaucoup moins réceptive qu'à l'époque où la vie était plus légère.
Ma première envie fut de lui sauter dessus, de lui faire comprendre toute ma tristesse, toute la rage que j'avais encore enfouie au fond de moi. Contre le monde, de m'avoir retiré mon enfant trop tôt et bien trop violemment. Contre lui, de s'être entièrement fermé à moi et retirer dans l'alcool. Contre moi, d'avoir survécu alors que j'étais aux portes de la mort et que j'aurai pu rejoindre ma fille. Seulement, le temps passait et j'arrivais de mieux en mieux à contrôler cette rage. Evidemment, c'était un travail de tous les jours et qui me demandait beaucoup de courage et de contrôle. Je voyais encore régulièrement ma psychologue afin de parler de ces traumatismes. A deux, nous avions fait un gros travail notamment sur ma culpabilité d'être encore en vie. Seulement, un jour comme aujourd'hui, cette culpabilité remontait et je ne parvenais pas à la faire disparaître. Un jour comme celui-là, j'acceptais de partager mon chagrin avec elle. Ce qui m'avait également beaucoup aidé, c'était les groupes de paroles. J'avais pu échanger avec d'autres personnes qui vivent des situations similaires à la mienne, qui comprennent mon besoin de parler d'elle, de la faire encore vivre à travers moi.
Alors entendre Tommy essayait de détendre un peu l'atmosphère me fit sortir un peu de mes gonds. Seulement, ce n'était ni le lieu, ni l'endroit de reprendre nos querelles. Nous avions, je pense, assez donné au moment de notre divorce. Seulement, j'avais besoin de sortir ma rancœur. Comme à mon habitude, je ne montais pas sur mes grands cheveux et me mettait à hurler. Je n'étais pas de ce genre. J'étais bien plus vicieuse. Je préférais taper sur les faiblesses de mes "adversaires". Ce trait de caractère m'est très facilitant dans mon travail, j'appuie là où ça fait mal et j'aime ça la plupart du temps. Tommy n'était pas sans le savoir d'ailleurs. Je lui répondis alors cette phrase, d'une voix très froide :
"- Contente de voir que tu as trouvé le chemin."
Dernière édition par Joséphine Jazac le Mer 15 Fév 2023 - 13:59, édité 1 fois
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Dim 12 Fév 2023 - 14:32
Même en voulant détendre l’atmosphère, la remarque de Tommy n’était pas très maline. La situation entre eux ces dernières années ne permettait plus ce genre de propos sans qu’ils soient mal pris. Il aurait dû s'en douter, mais les mots étaient sortis tous seuls, comme une vieille habitude. Un sentiment de malaise remplissait tout son être à cet instant, impossible de rester de marbre pour l’Australien. Au fond, cette remarque, il l’avait peut-être tenté pour jauger la réaction de son ex femme. Une façon de se raccrocher au passé. Parce que s’il réussissait à faire revivre un semblant de complicité entre eux, peut-être que cette journée serait moins dure, peut-être que pour une fois en trois ans, il pourrait s’épauler au lieu de se déchirer. Un espoir enfoui en lui et qu’il ne s’avouerait même pas. En étant plus réaliste, il se doutait bien du type de réponse que lui offrirait Joséphine. Ça n’empêcha pas l’Australien de lever les yeux au ciel en entendant sa réplique. Son premier instinct aurait été de répliquer par un commentaire tout aussi glacial. C’est d’ailleurs ce genre d’échange qui était devenu courant entre eux, du temps où il vivait encore sous le même toit. Un dialogue fait de pics intentionnellement blessantes. Sur l’instant, tommy, il en aurait été capable. D’ailleurs, l’envie était là, mais, au dernier moment, il se ravisa. Le regard posé sur son ex femme, il se mordit simplement la joue pour se retenir. “Si tu veux qu’on parte sur ce chemin-là Jo, on pourra le faire sur le parking…” Finit-il par répondre, d’une voix calme. Incapable de décroché son regard d’elle, il finit par soupirer. “Je n’ai pas la force de faire ça aujourd’hui… Pas ici” admit-il, reportant finalement son regard sur la pierre tombale. Se prendre la tête à cet endroit, c’était un peu comme s’engueuler devant leur fille, si elle était encore de ce monde. Il n’avait jamais été à l’aise avec l’idée.
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mer 15 Fév 2023 - 14:16
Je n'avais pas envie de me prendre la tête aujourd'hui avec Tommy. D'ailleurs, je n'avais plus envie de le faire. Nous l'avions suffisamment fait à la fin de notre mariage, nous détruisant mutuellement et laissant l'autre brisé. Je n'avais plus envie de le faire et c'est bien pour cela que nous avions divorcé. Il n'y avait plus un mot doux, seules subsistaient ses piques glaciales et déchirantes émanant des deux côtés. Nous avions prouvé que nous avions des ressources probablement beaucoup trop d'ailleurs. Nous étions vicieux et toujours prêts pour la bataille. Seulement, comme l'avait dit Tommy à l'instant, ce n'était ni le lieu ni l'endroit de reprendre ces mauvaises habitudes. Je hochais la tête silencieusement, confirmant ses propos. En revanche, je n'avais aucune intention de m'excuser de ma réplique, ce n'était pas dans mes habitudes ni dans les siennes d'ailleurs.
Je reportais moi aussi mon attention sur la pierre tombale. Voir ces quelques mots était toujours aussi déchirant : Amélia O'Brian, un ange partie bien trop tôt. Je sentis mes yeux s'humidifiaient mais je refusais qu'il me voit une nouvelle fois pleurer, il l'avait trop vu à mon goût. Je détournais donc la tête, regardant dans le vide les nombreuses pierres derrière celle de ma fille. Je prenais de grandes inspirations, bloquait mon souffle et comptait jusqu'à trois avant d'expirer longuement. Cette technique m'avait été donné par une mère, ayant également perdu son enfant, lors d'un groupe de paroles. Cela permettait de chasser mes larmes et j'en avais besoin en ce moment. Passer plusieurs cycles respiratoires, je jetais un coup d'oeil vers la part de tarte aux pommes que j'avais amené et à peine entamée. Je n'en avais pas franchement envie, c'était plus pour faire honneur à notre fille qui adorait ça que par gourmandise.
Je levais alors la tête vers Tommy, voulant lui proposer une part de tarte, mais les mots ne sortirent pas. Je bloquais sur son visage et ses traits familiers. Je voyais qu'il souffrait, autant que moi très probablement, et ça me brisait le coeur. J'avais toujours détesté le voir ainsi, triste et brisé. L'ancienne moi, son épouse, l'aurait prise dans ses bras, l'aurait consolé et aurait voulu absorber une partie de sa souffrance. J'avais passé cette époque. Aujourd'hui, j'avais toujours de la peine pour lui, pour moi, pour nous mais je restais en retrait. Je serais un de mes poings, voulant sentir la morsure de mes ongles dans la chair de mes paumes, pour chasser cet élan de tendresse envers lui. Je me raclais la gorge, essayant de reprendre ce contrôle qui m'échappait doucement, avant de lui parler d'une voix mal assurée dans un premier temps :
"- Tu...Tu veux un morceau ? C'est aux pommes, sa préférée."
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Sam 25 Fév 2023 - 16:00
Entre eux, tout aurait pu se passer différemment. Leur couple aurait pu survivre à cette épreuve. S’il ne s'étaient pas tous deux renfermé dans leur propre façon de faire le deuil, il aurait pu continuer ensemble. S’entraider pour aller de l’avant. La plaie serait toujours bien présente, mais au moins, ils n’auraient pas tout perdu. Cette option, il y pensait parfois Tommy. Il repensait à tous ces mots qu’ils s’étaient crachés au visage, tous ces moments où ils s’étaient pris la tête au lieu de simplement se prendre dans les bras pour se rassurer l’un l’autre. Encore aujourd’hui, cette pensée lui traversait l’esprit, alors qu’ils s'engageaient sur une nouvelle dispute. Il s’en voulait d’être si maladroit avec elle alors que tout son corps ne réclamait qu’une chose : la serrer contre lui. Alors il serrait la mâchoire à cette pensée. Le droit de la rassurer, de lui prendre un peu de sa peine, il l’avait perdu il y a bien longtemps et le temps n’avait pas aidé à sa rédemption. Le regard plongé sur le nom de sa fille, l’ancien pompier reçu comme un nouvel électrochoc en entendant la proposition de Joséphine. La tristesse devait se lire dans ses yeux alors que son regard se reportait instinctivement sur la part de tarte qu’elle lui proposait. Il resta silencieux l’espace d’un instant, incapable de formuler quelconques paroles. À la place, il régurgita sa salive, serrant un peu plus sa mâchoire pour bloquer toute émotion. ”Merci, mais…” La voix légèrement tremblante, il n’était pas bien sûr de lui. Quelques secondes furent nécessaires pour bien réfléchir à la situation. Finalement, il soupira, prenant conscience que faire une fixette sur une part de tarte n’avait pas de sens une fois arrivé dans cet endroit. “Je veux bien oui, merci” dit-il en relevant le regard vers Joséphine. Il lui adressa un petit sourire légèrement crispé, encore peu sûr de lui. Mécaniquement, il tendit le bras pour saisir cette fameuse part de tarte. “Je n’en ai pas pris depuis que… Enfin… Je ne sais pas pourquoi c’est si dur pour moi" C’était peut-être une des premières fois qu’il s’ouvrait un peu à son ex-femme depuis l’accident. Il laissait soudainement tomber une barrière qu’il avait mit tant de temps à perfectionner. Choisissant pour une fois de ne pas se braquer, de ne pas utiliser cette mécanique de défense qui utilisait avec tous ses proches. “Je veux dire… Ça m’a pris 3 ans pour revenir ici et toi, t’es là avec tout ça” conclut-il d’une voix douce. Au fond, il admirait Joséphine et sa façon de faire face à la situation, sa capacité à s’accrocher aux souvenirs alors que lui les évitait comme la peste pour s’empêcher de souffrir.
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Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mer 1 Mar 2023 - 20:06
Je lui tendis la part de tarte aux pommes tout en l'observant. Il essayait de garder contenance mais sa mâchoire trahissait une certaine tension. Une pulsion de lui caresser tendrement le visage me pris et j'eus beaucoup de mal à la retenir. Je pouvais sentir la rugosité des poils sous mes doigts. Je connaissais les moindres centimètres de ce corps et j'avais toujours envie de le sentir contre moi. Je voulais sentir son corps contre le mien, les muscles de son dos contre mes mains et surtout sentir son odeur. Elle me manquait très souvent, elle était réconfortante à mes yeux. Pourtant, tout cela n'était plus possible, ça ne devait pas se produire. Je devais rester maître de mes gestes mais également de mes pensées.
Toutefois, à l'écoute des paroles de Tommy, mon coeur se pinça. Je n'avais pas l'habitude de l'entendre parler de ses émotions surtout celles concernant la perte de notre fille. Il était toujours resté très discret sur ce sujet. Au moment de faire notre deuil, Tommy s'était plutôt fermé, se plongeant dans l'alcool alors que je m'étais plongée tête la première dans le travail. Nous n'avons jamais eu de véritable conversation pour savoir comment l'autre se sentait. Non, nos conversations étaient loin, nous avons préféré la manière plus violente en hurlant les tords de l'autre. Il était donc déroutant pour moi d'entendre Tommy se mettre un peu à nu devant moi. Je ne pouvais m'empêcher d'un peu le dévisager puis je me ressaisis et baissa les yeux vers mes mains. Elles étaient moites à force de les triturer, dévoilant ce malaise que je ressentais d'être en présence de Tommy.
Tommy s'était un peu dévoilé et je sentis que je pouvais le faire un petit peu à mon tour. Seulement, il était naturel pour moi de le faire lors des groupes de soutien auquel je participais régulièrement. Le faire devant Tommy, à cet endroit et moment précis, me semblait étrange mais j'en ressentais le besoin. Je le fis donc d'une petite voix, non habituelle, mais adaptée à l'instant présent.
"- Tu étais là au pire moment. Pas moi."
Je parlais évidemment de l'enterrement auquel je n'avais malheureusement pas pu assister. Plongée dans le coma suite à un traumatisme crânien lors de l'accident de voiture, j'avais appris la mort de ma fille à mon réveil. Elle était déjà enterrée et j'avais dû faire mon deuil à la suite de ça. Encore aujourd'hui, la culpabilité ne me quittait pas, j'aurai tant aimé être là pour la laisser partir, affronter les événements aux côtés de Tommy, le soutenir et se soutenir mutuellement. Je n'en avais jamais vraiment parler à Tommy, il m'avait fallu un certain temps avant d'identifier cette culpabilité lors de ma thérapie.
Invité
Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Dim 5 Mar 2023 - 22:07
Tommy, il faisait un pas vers elle en s’ouvrant un peu. Cette journée semblait lui faire tomber certaines barrières. Ces moments de sincérités s’étaient faits rares depuis quelques années. Plus apte à enfouir ses émotions au plus profond de son être plutôt que de les affronter. Un plan lâche, mais qui avait plus ou moins bien fonctionné jusque-là, aidé bien évidemment par son nouvel allié : l’alcool. Si Joséphine n’était pas présente dans ce lieu, il aurait très probablement craqué et bu une gorgée de sa flasque. Sur l’instant, il n’en fit rien, trop honteux pour le faire devant elle. Il se contentait donc de manger un bout de la part de tarte qu’elle lui avait donné. Il releva les yeux vers elle quand elle ajouta ne pas avoir été là pendant le pire moment. Le cœur de l’Australien se resserra encore un peu plus alors que cette phrase le plongeait dans la pire période de sa vie. “Je n’étais pas vraiment là non plus, tu sais…” Pour accompagner sa phrase, il pointait du doigt une de ses tempes. Cette période était encore floue pour lui. Comme s'il s’était mis en mode automatique les jours qui avaient suivi l’accident. Entre les préparatifs de l'enterrement, les nuits qu’ils passaient au chevet de Jo’, les appels de leurs proches, le manque de sommeil et la peine immense qu’il ressentait, son esprit n’avait pas pu être à 100%. “Tu viens souvent du coup ?” Finit-il par demander d’une voix douce pour ne pas laisser un silence de gêne s’installer.
Invité
Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Lun 6 Mar 2023 - 13:40
Une partie de moi était jalouse de Tommy, d'avoir pu assister à ses funérailles. Un autre, plus enfouie, ne pouvait que comprendre ce qu'il venait de dire. Evidemment qu'il avait la tête ailleurs. J'étais dans le coma, on enterrait notre petite fille partie bien trop tôt et de manière bien trop brutale. Quiconque n'aurait pas été mentalement présent dans cette période pour le moins compliquée. Je ne relevais donc pas sa phrase, lui disant ainsi silencieusement que comprenais ce qu'il voulait dire. De plus, je ne savais que répondre à cette nouvelle révélation qu'il me faisait. Le voir si fragile me rendait moi même fragile comme si une partie de moi lui appartenait toujours. Néanmoins, je lui répondais à sa question après m'être éclaircie la gorge :
"- J'essaie de venir une fois par semaine...Enfin, quand c'est possible avec le travail."
Si Tommy s'était plongé dans l'alcool, c'était le travail qui avait été ma bouée de secours. J'avais enchaîné les dossiers, passant le plus clair de mon temps libre au bureau ou au tribunal. Encore aujourd'hui, je passais de nombreuses heures par semaine dans mon bureau. Je critiquais toujours Tommy, lui mettant tout sur le dos, car c'était plus simple mais je savais que j'avais aussi mes tords dans notre divorce. D'ailleurs, j'avais récemment fait le calcul et je passais plus de temps à mon bureau que chez moi. Cette constatation aurait probablement dû m'alerter mais ce n'était pas le cas. Je continuais de passer un temps fou là bas, occupée plutôt que chez moi, à broyer du noir. Ce constat était triste, j'en étais bien consciente mais je n'étais pas encore allée de l'avant, la preuve en étant. Je passais chaque semaine sur sa tombe, je la fleurissais, je lui parlais plus qu'à mes amies, enfin anciennes car j'avais coupé les ponts avec tout le monde.
Invité
Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Mer 8 Mar 2023 - 13:53
Ce n’était pas évident pour l’ancien pompier d’être présent dans ce cimetière. Encore moins de l’être en présence de son ex femme. Ne sachant pas trop comment agir, il se retrouvait à faire la conversation pour ne pas laisser s’installer de blanc trop inconfortable. Aurait-il mieux fait de la laisser en paix ? Il se le demandait à chaque seconde qui s’écoulait. Bien que leur échange ait commencé de façon compliqué, tous deux semblaient avoir finalement trouvé un point d’entente. En-tout-cas, suffisamment pour que ce soit cordial. Pourtant, il ne put s’empêcher une petite moue quand elle évoqua son travail. Il l’avait toujours admirée pour cette passion qui l’animait, mais avant le divorce, ce sujet était devenu un point de discorde entre eux. Il préféra alors ne pas commenter. Comme dit plus tôt, ce n’était ni l’endroit, ni le moment de se prendre la tête tous les deux. Chaque mot qu’ils pourraient dire sur la dose de travail que prenait Joséphine pourrait être mal interprété. Aujourd’hui, il pouvait comprendre ce besoin de se focaliser totalement au boulot. C’est pour ça qu’il aimait tant sa nouvelle position de cuisinier. Il avait finalement retrouvé un travail qui lui permettait de s’enlever de l’esprit toutes ces pensées nocives. Il comprenait aujourd’hui qu’à l’époque du divorce, il devait secrètement jalouser Joséphine. Elle avait ce travail comme évasion quand lui avait tout perdu. Incapable de rentrer dans un camion de pompier sans repenser au moment où il avait vu Amélia s’éteindre. Le coup du sort avait voulu qu’il soit de service ce soir-là. Depuis, ce métier, son rêve de gosse, était devenu impossible pour lui. Nerveusement, il se gratta la nuque, pris d’un élan de panique en repensant à tout ça. “Je…” Tout son corps lui disait à présent de courir sans qu’il ne puisse réellement faire un seul pas. “Je ne vais pas t’imposer ma présence plus longtemps” Dit-il fuyant à tout prix le regard de Joséphine, honteux de ce qu’il comptait faire juste après avoir atteint sa voiture. Se sentant à la fois démuni et vidé émotionnellement, il allait très certainement se réfugier dans l’alcool. Seul baume efficace pour apaiser tous ces maux.
Invité
Sujet: Re: the saddest part of me (joséphine) Lun 13 Mar 2023 - 16:57
Aujourd'hui étant un jour pour le moins particulier, je n'avais évidemment pas planifier de rendez-vous pour l'après midi. Enfin, mon assistante ne l'avait pas fait surtout. Elle m'avait laissé mon après-midi de libre sans même savoir ce que j'allais faire. Ayant repris l'ancien bureau d'avocats de mon père, je travaillais avec mes collègues depuis des années et ils avaient assistés de loin à la mort d'Amélia. Néanmoins, personne n'en parlait et c'était pour le mieux. Mon assistante, bien que nouvelle arrivante, devait donc être au courant de mon histoire et ne posait pas de question sur cette après-midi de "libre". D'ailleurs, je comptais la passer au plus près de ma fille, lui parler encore de longues minutes et lui raconter les potins de la famille, de sa famille, ainsi que de ma vie. Les nouvelles n'étaient pas souvent nombreuses en raison du peu d'activités que je faisais en dehors de mon bureau. Je me contenterais donc de lui parler de ces personnes avec qui je travaille qui l'ont peu connues mais qui adoraient la voir débarquer dans mon bureau, en couche culottes en raison de la chaleur avec sa peluche qu'elle trainait derrière elle.
En entendant les paroles de Tommy, je fus déçue. Ne pas vivre cet instant auprès d'Amélia seule m'avait apporté un peu de réconfort, plus que je n'oserais jamais l'admettre. De savoir que Tommy venait voir sa fille m'avait mis un peu de baume au coeur. Seulement, je constatais amèrement que j'allais encore être la seule sur sa tombe comme d'habitude. J'en voulais à Tommy de ne pas venir même si je pouvais concevoir que c'était un instant de douleur et de peine mais je voulais qu'il ressente la même chose que moi à chaque visite dans cet endroit lugubre. Tout en sachant que j'allais être cinglante dans mes propos, je préférais garder le silence, me contentant d'hocher la tête comme seule réponse tout en fixant le nom de notre fille sur cette pierre tombale.