Friday on my mind (Elias)

Comme à l’accoutumée depuis qu’il était arrivé en Australie, Kay avait fini sa semaine de travail par un petit tour à la piscine. De quoi commencer le week-end de la meilleure des façons. Après une bonne heure de nage, plein d’endorphine, les hostilités pouvaient commencer. C’est en croisant Elias au détour du vestiaire qu’il lui avait proposé un apéro post entraînement. Alors tout naturellement, c’est au bar de la plage qu’avait pensé Kay. Depuis son arrivé, il ne se lassait toujours pas de la vue et de la douceur des terrasses en plein mois de janvier. Il avait quitté Londres en plein été pour se lancer vers l’été australien en douceur. Un compromis qu’il ne regrettait pas durant des soirées comme celles-ci. Ces soirées où le soleil tarde, où les verres s'enchaînent et où les terrasses sont prises d’assaut. Ce dernier problème, il l’avait laissé à Elias, le chargeant de trouver une place pendant qu’il s’occupait d’aller chercher leurs commandes au comptoir. Un tour plus ou moins rapide, comptant un temps d’attente incertain. “Voilà pour toi!” Annonça-t-il en plaçant le verre d’Elias devant lui, agrémentant le tout d’un sourire. “Dis, toi qui a vécu ici toute ta vie, on s’en lasse un jour de cette vue ?” Demanda-t-il s'asseyant près de son compère.

Je nage beaucoup en ce moment, plus qu’avant du moins. Quasiment tous les jours en fait et je dois dire que ça me fait du bien. J’ai besoin de cet exutoire, je crois. De me laisser porter par mes mouvements, de ne penser qu’à ça. L’eau a toujours été un endroit refuge pour moi. Quant à la natation en tant que telle, en plus de m’apporter un certain bien être, me permet de rencontrer du monde, de me faire quelques nouveaux potes. Comme Kay par exemple, qui a aménager à Bowen quelques mois plus tôt. Après l’entrainement, le londonien me propose d’aller boire un verre au bar de la plage. L’endroit est bondé, en général, à cet période, et cela n’a rien d’étonnant. L’atmosphère y est agréable, les consommations très abordables et la vue, exceptionnelle. Ma mission ? Nous trouver une table pas trop mal placée. Enfin, vu le monde qu’accueille le bar ce soir, nous trouver une table tout court serait un exploit. Je finis tout de même pas nous en dégoter une, près des toilettes certes, mais ouverte sur la plage, c’est un bon point. Je m’y installe et patiente jusqu’à ce que Kay revienne avec nos verres. J’attrape le mien, tout en remerciant mon pote, puis ris en entendant sa question. «  Quoi, vous n’avez pas ça à Londres ? » je le charrie. Bowen était sans doute bien plus tranquille que la capital anglaise, mais offrais d’autres charmes qui n’étaient pas franchement dégueu. « Je ne m’en lasse pas, j’avoue. Mais je crois que je suis pas très objectif, j’ai toujours aimé vivre ici, et…j’ai pas vraiment connu grand chose d’autre pour être honnête. »

Une bière après un bon entraînement, il n’y a rien de mieux pour le jeune Armstrong. Fidèle à sa philosophie du réconfort après l’effort. Même si, soyons honnête, nager n’était pas vraiment un effort pour lui, plutôt un plaisir. Ce hobby qui lui avait permis de rencontrer Elias. Le brun n’a jamais eu trop de mal à s’intégrer socialement, mais pouvoir se faire un premier pote à Bowen l’avait tout de même mis bien à l’aise. Et il faut dire qu’ils s’étaient bien trouvé ces deux-là. “C’est vrai qu’une vue sur la Tamise avec des mecs saoul qui pissent dedans, c’est bien au-dessus” Dit-il en riant. Londres avait tout de même son petit charme. Rien qu’en repensant à ces années là bas, Kay pouvait ressentir un léger mal du pays. “Vraiment ? Tu t’es jamais ennuyé ici ?” Demanda-t-il vraiment curieux. Ayant grandi dans une plus petite ville, bien que pas si petite que ça, avant de rejoindre la capitale, le brun pensait normal d’avoir des envies d’ailleurs. Durant l’adolescence au moins.“Quand tu croises toujours les mêmes têtes, ça ne laisse pas beaucoup de place à la spontanéité quoi” Et surtout, moins de marge d’erreur quand tu te créais une certaine réputation. Kay était arrivé là en suivant ses frères, pensant que cette atmosphère l’aiderait à se calmer, mais dans tout ça, il avait tout de même peur de s’emmerder au bout d’un certain temps.

Je n’avais jamais mis les pieds à Londres et je ne doutais pas que la capitale britannique regorgeait de petit coins merveilleux, mais il fallait tout de même admettre une chose : Bowen était une petite ville, certes, mais elle était magnifiques par bien des aspects. J’avais la chance d’avoir grandi dans un endroit de la map où on se sentait en vacances presque tous les jours. On ne pouvait pas se lasser de l’ambiance, de l’odeur des embruns qui s’infiltrait dans les rues, des couchers et de lever de soleil sur Horseshoes bay, des bonfires, des bains de minuit et autres réjouissances qu’offrait ma ville natale. « Je suis sûr que ça a son p’tit charme de pisser dans la flotte, avec Big Ben en spectatrice » Cette idée me ramène aussitôt à mes conneries d’ado, quand Elijah et moi s’étions lancé le défi au plus haut de la Big Mango. Cela avait été le plus grand fail de toute l’histoire. Mais on s’était bien marré, du moins à la auteur de deux glandus de dix-sept ans trop arrosés à la bière. Un sourire aux lèvres, j’écoute distraitement la question de Kay, puis marque un silence, réfléchissant. « Je…dis pas que j’ai pas déjà eu envie d’aller voir d’autres horizons mais, ouais…Bowen c’est chez moi. Ca a toujours été chez moi. Et puis je vois ma soeur Nev, elle a eu beau voyager partout de le monde, elle rentre toujours au bercail au final. C’est qu’il doit avoir son charme. » Je prends une gorgée de ma bière, puis lâche un léger rire. « Bon, c’est vrai que j’aurais peut-être pécho un peu plus si j’avais été d’une grande ville, mais…je me plains pas »

Des milliers de kilomètres séparaient Bowen et Londres. Et pour être honnête, les deux villes n’avaient rien à voir entre elles. C’était naturel pour Kay de comparer, mais il en venait assez vite à voir la beauté des deux endroits, aussi différente soit elle. En buvant une gorgée de sa pinte, le jeune Britannique acquiesça en riant suite aux paroles de son pote. “Ça rend la chose mémorable, c’est sûr” Dit, il en riant un peu plus avant de reprendre plus sérieusement sur le fait de potentiellement s’ennuyer de Bowen au bout d’un certain temps. Alors qu’Elias évoquait sa sœur et ses nombreux retours, Kay ne put qu'acquiescer. Lui aussi avait des envies de rentrer au bercail parfois. Aussi idyllique pouvait être cette ville, son Angleterre natale gardait une place de choix dans son cœur. Il ne serait sûrement pas resté très longtemps à Bowen si ses frères n’avaient pas décidé d’y poser leurs valises de façon permanente. Lui, il aurait préféré qu’ils restent tous en Angleterre. “Au moins, ça t’a aussi évité le lot d'emmerdes qui vont avec trop de choix” Continua-t-il en riant, pensant aux situations pas possibles dans lesquelles il avait pu se mettre à Londres. “Après, c’est peut-être juste moi. Je suis faible et je ne sais pas faire de choix donc bon…ça ne fait pas le meilleur des combos” Les dernières années, lui avait apporté un lot de relations pas forcément très saines et surtout pas du tout porté sur l’exclusivité de son côté.

Je n’ai jamais vraiment eu à me plaindre de Bowen, même ado ou jeune adulte, j’y ai trouvé mon compte. Ca n’a rien à voir avec Londres, c’est certain - enfin, pour ce que j’en sais, vu que je n’ai jamais mis un orteil dans la capitale anglaise - mais j’ai pu m’y épanouir, trouvé des endroits où sortir, y faire mes études - ou les commencer pour être précis, étant donné que je n’avais pas passé la deuxième année et que je m’y remettais simplement maintenant, presque dix ans plus tard. Le cadre est idyllique, et pour moi qui puisait mon énergie dans l’élément eau, c’était le paradis. Mais je pouvais comprendre l’interrogation de Kay. « Oh, j’ai eu mon lot d’emmerdes, rassures-toi ! » je rétorque, un sourire aux lèvres tandis que je porte ma bière à ma bouche. Je me suis un peu calmé avec l’âge mais mes jeunes années ont été mouvementé, principalement à cause de mon tempérament, on va se le cacher. Je supporte mal l’autorité, et mon sang chaud m’a valu plus d’une bagarre - pas toujours pour de bonne raison d’ailleurs. « Tu sais pas faire de choix…dans les relation tu veux dire ? »

Il aurait pu jouer les indifférents l’anglais, être peu impressionné par la vue qu’ils avaient depuis la terrasse du bar. Pourtant, il ne pouvait nier la beauté du cadre dans lequel ils vivaient. Dans lequel Elias avait grandi. Le seul désavantage qu’il y voyait Kay, c’était la taille de la ville. Impossible d’être complètement incognito ici. Tout le monde pouvait vite connaître un peu tout le monde. Mais peu importe la taille de la ville, la vie fait que les emmerdes sont trouvables un peu partout, il faut croire. “Ah ouais ? Vas-y balances des histoires !” Dit-il en riant, curieux de connaître des petits détails croustillants sur son pote. Le brun bu une gorgée de sa bière avant de se confier à son tour sur les problèmes liés à son caractère. “Ouais, les relations entre autres. C’est facile de se laisser embarquer dans des histoires sans queue ni tête.” Dit-il en riant de nouveau. Avec l’âge, il s’était un peu calmé, mais fut un temps sa vie était un bordel constant. “Surtout quand t’es high 80% du temps.” Conclut-il, amusé par son propre sort. Il avait suffisamment de recul maintenant pour savoir qu’à une certaine époque, il était simplement débile et influençable au possible. La moindre occasion pour faire de la merde était saisi sans une once d’hésitation ou de réflexion. “Mais bon, on est sage maintenant.” Ça se voyait clairement sur sa tête qu’il ne croyait pas une seule seconde à cette phrase. Il lui en faudrait peu au Britannique pour retomber dans ses vieux travers.

Objectivement, j’avais surtout été un p’tit con par le passé, d’avantage qu’un caïd. J’avais eu des emmerdes, mais jamais bien grandes. Du moins, je ne m’étais jamais trop embarqué dans des histoires qui pouvaient me mettre réellement dans la merde. C’était surtout mon tempérament qui me jouait des tours. Combien de fois m’étais-je retrouvé dans des bagarres sans savoir réellement pourquoi ? Je ne les comptais plus. J’avais un peu calmer le jeu, mais clairement, mes proches s’étaient fait des cheveux blancs avec moi. « Boh…rien de fou, en vrai. Des conneries d’ado… » Je dodeline de la tête tandis que mon sourire s’élargit. « Ouais, bon, de jeune adulte aussi. Disons que la maturité a mis du temps à se manifester. Je pourrais te raconter la fois où on a failli se faire chopper par les flics avec Ja, parce qu’on était en train de pisser sur la Big Mango, mais j’aurais rien de plus à dire qu’on s’en est foutu plein les fringues plus qu’autres chose. Ou la fois où je me suis embrouiller avec un gars en sortant du Elm, et que je l’ai revu le lendemain sur le chantier où je bossais parce que…bah c’était le nouveau contremaitre. Je crois qu’il m’en a voulu et m’en a fait bavé par la suite parce qu’il s’est trimbaler un coquard pendant bien une semaine. » Il y en avait tant d’autres, mais rien de bien incroyable en soi. Kay s’était attiré pas mal d’emmerde lui aussi, ce que je n’avais pas de mal imaginer. Il avait la connerie dans le regard le british, ce pourquoi je l’aimais bien sans doute. À la différence de moi cependant, Kay était adepte de la défonce. J’avais déjà essayé bien sûr, mais ça n’était clairement pas mon délire. Je souris néanmoins à son affirmation. « Ca doit pas être bien pratique, en effet, et ouais…heureusement qu’on est sage, maintenant. Enfin…qu’on essaie de l’être » je fais en riant, tout en portant ma bière à mes lèvres. « D’ailleurs, ça se passe bien pour toi à Bowen ? T’es content ? T’es frère sont dans le coin, c’est ça ? »

Mine de rien, ça lui plaisait bien à Kay d’en apprendre plus sur son pote et surtout sur les conneries qu’il avait pu faire dans le passé. Ils avaient encore l’âge d’en faire, mais c’était sûrement assez juste de dire qu’ils s’étaient tous les deux calmés depuis leurs folles années adolescentes. Le premier exemple qu’expliqua Elias décrocha un bon rire franc à Kay.  “Mais vous êtes trop con ! J’adore.”Les défis à la con, Kay y aurait sûrement pris part s’il avait été dans le coin à cet âge. Surtout avec une équipe comme Elias et Elijah. Le potentiel de connerie était immense. En plus de ça, Elias parlait de bagarre et dans cette aussi le jeune Anglais pouvait s’identifier. “Dans un pub irlandais, c’est normal de se battre. Il aurait pu avoir la décence de te payer un coup après” Dit-il en riant légèrement. Quelques nuits à Dublin avaient suffi à Kay pour se faire une idée de la mentalité à l’Irlandaise, on se tape dessus et on se réconcilie ensuite autour d’une pinte. Une chose est sûre, ils avaient tous les deux le sang chaud, mais ils essayaient aussi de se calmer un peu. Kay essayait de tendre là-dessus en tout cas. Pas certain que tout fonctionne comme il le voudrait, mais sa présence à Bowen représentait déjà un pas vers l’avant. Il portait sa bière jusqu’à ses lèvres en écoutant les questions de l’australien. Il haussait nonchalamment les épaules, pas tout à fait certain de son ressenti vis à vis de son aventure australienne.  “Ça se passe bien en règle générale, honnêtement, je préférerais être à Londres, mais le calme me fait du bien.”Il avait dû faire un choix entre ses besoins et ses envies. Sa vie à Londres, elle lui plaisait plus que tout au monde, ça ne l’empêchait pas d’être nocive pour lui. Le calme de Bowen représentait un refuge relativement efficace aux airs de vacances longues durée.  “Oui, mes deux frères sont là. C’est comme ça que j’ai fini ici. Je t’avoue que je ne connaissais pas cette ville avant que mon frère Percy ne s'y installe.” Comme tout le monde, il connaissait les quatre plus grandes villes australiennes. Pour ce qui est du reste, il avait découvert en arrivant sur place. “ T’es proche de ta famille toi ?”Il savait vaguement qu’il avait des frères et sœurs. Pour une fois que le sujet était lancé, il en profitait pour se montrer un peu curieux.