the little things that give you away (perring)

La même routine depuis bientôt quatre ans, depuis que Perry est revenu s’installer à Bowen. Chaque semaine, Siobhan fait la navette entre chez lui et Aisling. Parfois des événements viennent perturber cette mécanique bien huilée, les vacances de l’un ou de l’autre, des déplacements qui changent un peu les jours que leur fille passe chez elle ou chez lui. Ils essaient au maximum que le fait de ne pas être ensemble ni vivre ensemble ne la perturbe pas trop. C’était un peu la crainte de Perry, lui qui a trois enfants dont aucun ne vit avec ses deux parents, d’autant plus avec l’arrivée d’Harper dans la vie de son ex et d’Isaiah, qui elle va vivre avec ses deux parents. Il avait peur que sa fille ne le vivent pas très bien, mais ça a l’air d’aller, en tout cas il n’a rien vu par rapport à ça. Par contre ces derniers temps, il a remarqué des changements dans le caractère de leur fille, elle grandit, elle s’affirme, un peu trop à son goût. Elle n’a jamais été une enfant très turbulente, il s’est même demandé de qui elle tenait son calme, lui ayant été un enfant relativement insupportable et Aisling ayant un caractère pas forcément le plus calme non plus. Il se dit que son passage hebdomadaire chez la blonde sera l’occasion de lui en parler, histoire de voir s’il se fait des idées ou si elle l’a remarqué aussi. « Salut ! » dit-il lorsqu’elle ouvre la porte, Siobhan allant dire bonjour à sa mère avant de partir jouer dans sa chambre, à présent suffisamment grande pour ne pas avoir besoin d’une surveillance en continue. « J’peux t’parler d’un truc ? » demande-t-il, ce qui n’est pas vraiment dans ses habitudes. C’est le genre de phrase qui annonce une discussion sérieuse et il déteste les discussions sérieuses.

Le passage de Perry pour venir chercher Siobhan, ou la ramener, n'était plus un sujet depuis longtemps pour la blonde. Il serait faux de dire que ça ne l'avait jamais gênée, stressée, fâchée. Elle avait eu du mal à laisser sa fille repartir chez son père à son retour, parce qu'elle avait eu du mal à s'en détacher. Mais évidemment, elle l'avait fait, pour son bien, parce qu'elle serait plus heureuse en grandissant avec ses deux parents, et sans aucune tension. Aisling avait plus pris sur elle qu'on pouvait le penser au premier abord, surtout quand on la connaissait un peu.

Elle alla ouvrir la porte, sachant très bien de qui elle s'agissait, elle l'accueillit avec un sourire sincère. Si leurs relations n'avaient pas toujours été un long fleuve tranquille, les choses se passaient bien en ce moment, depuis un moment même.

-Bonjour Perry !

Elle baissa les yeux.

-Et bonjour toi.

Elle attrapa sa fille avant qu'elle ne file défaire ses affaires, lui faisant un bisou sur la joue avant de la relâcher. Elle releva la tête vers Perry, un peu surprise, mais elle acquiesça d'un signe de tête.

-Oui bien sûr. Tu veux quelque chose à boire ?

Elle le laissa entrer et ferma la porte derrière lui avant de les installer sur le canapé.

-Quelque chose te tracasse ?

Quiconque connaît un minimum Perry sait qu’il évite les sujets sérieux comme la peste. Il s’arrange toujours pour changer de sujet, blaguer, répondre à moitié ou repousser ses questionnements loin dans son cerveau pour ne plus y penser. Mais lorsqu’il s’agit de ses enfants, il sait faire preuve d’un peu plus de maturité et tente de prendre les choses en main sans les laisser couler. Avec Siobhan il pourrait laisser Aisling gérer toute la partie sérieuse mais il sait que ça ne serait pas fair pour elle, ils l’élèvent à deux, il a aussi sa part de responsabilité. Évidemment elle est un peu surprise qu’il veuille parler d’un truc. Ils s’installent tous les deux dans le salon. « Euh..un verre d’eau, ‘fin ce que tu as t’inquiète. » Parce que en dehors de mojitos auxquels il touche à présent qu’en soirée, il ne boit pas trop d’autres choses que de l’eau, du soda parfois, pendant les soirées burgers notamment, mais pas trop d’autres choses. Même s’il a fait le pas de demander à discuter, il ne sait pas vraiment comment aborder les choses et un Perry stressé, c’est une expérience assez unique avec ses euh et ses mains qu’il tripote dans tous les sens. « T’as pas remarqué...euh..des changements chez Sio ? Depuis quelques temps. » demande-t-il en se passant une main dans la nuque.

Aisling hocha la tête, allant chercher deux verres d'eau pour les mettre sur la table basse du salon. Il était rare que Perry en vienne aux discussions sérieuses alors... Ca lui faisait presque peur ! Enfin, peut-être pas jusque-là quand même. Assise en face de lui, elle l'interrogeait du regard. Elle arqua un sourcil en voyant qu'il était en train de retourner ses doigts dans tous les sens. Qu'est-ce qu'il préparait ? Il n'allait la demander en mariage alors... Qu'est-ce qui pouvait le rendre aussi nerveux ?

-Sio ?

Elle fronça légèrement les sourcils. Elle pensait qu'ils auraient ce genre de conversation au moment de sa puberté, mais pas maintenant. Qu'est-ce qu'il essayait de lui dire ?

-Et bien... Je ne suis pas sûre de comprendre à quoi tu fais allusion ?

Elle passa une main dans ses cheveux blonds, réfléchissant.

-Tu veux dire qu'elle commence à avoir du caractère ?

Si c'était réellement ça, elle avait du mal à saisir pourquoi il était aussi stressé.

Si la parentalité de Perry n'a pas été ordinaire et qu'il a connu quelques obstacles avant de se faire au fait d'avoir des enfants et s'en occuper, il n'a pas eu plus de soucis que ça avec les enfants en eux même. Penny n'a pas été difficile malgré son passé pas franchement simple avec le décès de sa mère et son père qui lui est inconnu. Avec l'adolescence elle se rebelle un peu, mais comparé à Perry au même âge, elle reste bien calme et fait partie des enfants sérieux. Luke accepte encore l'arrivée de son père dans sa vie mais il ne l'a pas rejeté et quand ils passent des moments ensemble, les choses se passent plutôt bien. Et la petite dernière, Siobhan, tout allait plutôt bien selon le jeune homme, jusqu'à il y a quelques temps. Et si pour n'importe quel parent, il n'y a aucune inquiétude à avoir, pour quelqu'un comme Perry qui a l'habitude que les choses roulent plutôt pas mal pour lui, c'est source d'inquiétude. Aisling, elle, ne semble pas plus inquiète que ça. Elle comprend de quoi il veut parler même si comme toujours avec lui quand il s'agit de choses sérieuses, il faut un peu déchiffrer parce qu'il a du mal à dire les choses clairement. « Oui…je sais pas j'ai l'impression que ça a changé rapidement. » Faut dire qu'il a encore du mal à se dire que maintenant elle est à l'école des grands et qu'elle apprend à lire. C'est toujours un peu son bébé. « Tu crois que tout va bien à l'école ? » Oui il s'inquiète, peut-être, sans doute, pour rien.

Elle ne pensait pas voir Perry si inquiet pour ce genre de choses. Lui qui prenait toujours tout à la légère. Lui qui était toujours si optimiste. Voilà qu'il semblait presque au pied du mur parce que Siobhan grandissait. Ou peut-être était-il seulement dérouté ? Peut-être aussi y avait-il des choses qu'Aisling ignorait ? Mais dans ce cas-là, elle espérait qu'il passe au-dessus de sa gène pour les conversation sérieuses et qu'il s'exprime.

-Rapidement... Je ne sais pas. Elle grandit. Je ne m'y connais pas tellement en développement de l'enfant, mais j'imagine que c'est une période où ils se construisent. Elle essaye de tester les limites d'un côté, et surtout d'exister... Je ne peux pas lui en vouloir. Je n'étais pas une enfant timide et discrète non plus !

Elle eut un léger rire avant de hausser les épaules.

-Et puis... il y a aussi eu des changements dans sa vie... Luke, Harper... Même si elle n'en parle pas, ça l'a peut-être un peu chamboulée.

Siobhan n'était jamais désagréable avec Harper, elle semblait même apprécier sa petite sœur. Mais ça n'était pas incompatible avec le fait qu'elle ressentait peut-être un manque d'attention ou d'intérêt de la part de son entourage.

-A l'école ? Je n'ai pas été convoquée par la maîtresse ou la directrice d'établissement en tout cas... Pourquoi ? Tu as l'impression qu'elle a du retard ?

Contrairement à Perry, elle n'avait pas de point de comparaison.

Il s’inquiète sans doute pour rien, sa fille grandit c’est tout, elle affirme son caractère, elle a pris de ses parents donc forcément, il ne fallait pas s’attendre à ce qu’elle reste une enfant facile toute sa vie, ou alors elle aurait vraiment pris que du positif des deux côtés. Aisling le rassure un peu, elle qui ne semble pas s’inquiéter du développement de leur fille et de son caractère beaucoup moins calme qu’avant. « J’pense que ça t’étonnera pas de savoir que j’étais pas l’enfant le plus cool du monde non plus. » A Bowen personne ne l’a connu dans sa jeunesse à part Poppy, mais ceux qui l’ont fréquenté durant son enfance savent à quel point il a pu être invivable, menant la vie dure à Poppy, par jalousie envers elle, à ses parents aussi, peut-être pour se venger un peu de leurs absences et à tout le monde autour de lui en général. Il était un enfant plutôt turbulent, c’est ce qui ressortait sur ses bulletins scolaires, entre les bavardages, l’impertinence et les mauvaises notes. « T’as raison. » approuve-t-il, Aisling, la voix de la sagesse. Heureusement qu’elle arrive à être un peu plus stable et terre à terre que lui pour relativiser les événements dont il semble faire toute une montagne. Il évoque ensuite l’école, cherchant une piste au changement de comportement de leur fille. « Non, non, ‘fin je sais pas, on m’a rien dit non plus...j’espère un peu qu’elle a plus pris de ton intelligence que de la mienne quand même. Mais c’est juste que j’ai peur qu’elle se fasse embêter ou que son caractère qui s’affirme comme tu dis, ça cache quelque chose. Mais j’m’en fais peut-être trop. »

Aisling esquissa un léger sourire à la révélation, si on pouvait dire les choses ainsi. Perry, pas un enfant cool ? Elle était certaine qu'il se comportait en gamin gâté, qu'il se lassait tout le temps de ses jouets, qu'il en voulait d'autres. Mais elle l'imaginait aussi en enfant sociable.

-Quelle genre de misère tu faisais subir à tes parents ?

Perry semble finalement plutôt aller dans son sens. En tout cas, il ne la contredit pas. Elle ne savait pas si c'était parce qu'il était réellement d'accord avec elle, ou bien s'il ne voulait juste pas se disputer. Enfin, dans tous les cas, pour elle, il n'y avait pas de vrai sujet. Mais peut-être aussi qu'elle prenait les choses un peu trop à la légère.

Elle esquissa un nouveau sourire alors qu'il disait espérer qu'elle prenne de son "intelligence". Ah, il tendait trop facilement la perche.

-Evidemment, je ne la laisserais pas devenir comme toi !

Elle montra par un sourire moqueur qu'elle le taquinait, avant de retrouver son sérieux.

-C'est vrai que je ne lui ai jamais vraiment demandé comment ça se passait avec ses camarades... Peut-être que je devrais le faire... J'ai peur de me montrer intrusive. Je ne sais pas comment m'y prendre.

Aisling n'avait pas lu tout un tas de bouquin sur la maternité -pour des raisons évidentes. Alors, elle tâtonnait beaucoup dans sa parentalité. Peut-être qu'elle laissait un peu trop les choses se faire, peut-être qu'elle n'était pas assez inquiète.

Apprendre qu’il a été un enfant turbulent n’a pas été la plus grande révélation de l’année pour Aisling. S’il est aujourd’hui bien plus vivable et calme, il garde son ego un peu trop gros. « Je piquais des crises tout le temps, pour rien, j’étais jamais content, j’me plaignais tout le temps, vraiment insupportable ! » résume-t-il avec un sourire. Repenser à lui enfant le fait relativiser sur le comportement de sa fille aujourd’hui. Certes elle est davantage colérique qu’il y a quelques temps et il a l’impression que les choses sont moins simples, mais comparé à l’enfant qu’il a pu être, elle est l’enfant le plus sage du monde. Et comparé à lui aussi, l’enfant la plus intelligente du monde, parce qu’en plus d’être colérique et turbulent, il avait des mauvaises notes. Les cours ça n’a jamais été son truc, ses parents n’ont pas persévéré, le laissant vivre sa vie de gosse de riche qui décide de déménager sur un coup de tête dans un coin perdu à l’autre bout du monde, et finalement d’y rester faire sa vie. « J’étais une cause perdue, je sais pas si t’aurais pu y faire grand-chose. » S’il avait été poussé, il aurait peut-être pu faire un peu mieux, mais Perry n’est pas une lumière, il le sait et mise clairement pas là-dessus dans la vie, il sait qu’il peut compter sur d’autres atouts. Pour le jeune homme, ce n’est pas les notes de sa fille qui l’inquiète, mais le reste, la cour de récrée. Et si le changement de comportement de Siobhan ne venait pas seulement du fait qu’elle grandisse mais aussi de l’école, des autres élèves ? Est-ce qu’elle aurait des problèmes ? Est-ce qu’elle leur en parlerait ? « On en parle un peu mais, je pousse pas trop non plus et je sais pas, si y’avait un truc tu crois qu’elle nous en parlerait ? Tu crois qu’on lui montre assez qu’elle peut tout nous dire ? »

Aisling éclata de rire quand Perry lui avoua qu'il était un enfant capricieux. Pourquoi le visualisait-elle aussi bien, ce Perry enfant, en train de faire des crise pour un oui ou pour un non ? Suppliant pour avoir le dernier jouet robot à la mode ou quelque chose comme ça. Et sûrement, pour pouvoir sécher les cours, aussi. Elle tenta tout de même de se calmer, se massant doucement les joues.

-Ah, vraiment, c'est tellement toi. J'espère que tu remercies Dieu tous les jours que tes enfants ne soient pas comme ça.

Aisling secoua la tête de droite à gauche alors qu'il semblait penser que l'éducation ne pouvait rien changer. Certes, les enfants avaient tous leur caractère inné, pour une partie du moins. Mais elle ne pensait pas que les parents étaient complètement impuissants pour autant.

-Bien sûr que si, et je ne laisserais pas Sio' se rouler par terre dans un magasin de jouets. Ou elle devra retrouver le chemin de la maison toute seule.

Est-ce que Perry allait trouver ça cruel ? Sûrement, il aurait été du genre à acheter le jouet de toute façon. Mais pour Aisling, ce ne serait pas lui rendre service de toute façon.

La discussion était soudainement devenue vraiment plus sérieuse. S'il y avait un problème à l'école, est-ce qu'ils le sauraient ? Est-ce qu'elle leur dirait ? Aisling n'avait pas plus la réponse que Perry sur le coup. Elle se mordit la lèvre, réfléchissant.

-J'aime croire qu'elle en parlerait au moins à Isaiah, parce que justement, il n'est pas son parent, ils leurs propres secrets mais en réalité... Je ne sais pas... C'est difficile de raconter ses problèmes quand on est enfant. On pense que les adultes ne peuvent rien y faire, pas vrai ?

Et sûrement que botter le cul des autres enfants n'était pas censé être une option, même si la blonde n'hésiterait pas une seconde.

Forcément l’étonnement n’était pas immense pour Aisling. Si Perry a tout de même changé depuis son enfance, il n’est tout de même pas difficile d’imaginer qu’il a été un enfant relativement insupportable à piquer une crise pour pas manger de légumes et avoir des frites à chaque repas. Ses parents n’étaient pas réellement strictes, se disant, les fois où ils s’occupaient de lui que s’il était comme ça c’était à cause de l’adoption et des traumatismes qu’il a pu vivre quand il était encore tout petit. Ce n’est pas totalement faux puisqu’il a eu du mal à accepter sa nouvelle maison et la présence de Poppy comme grande sœur, vivant mal la séparation d’avec sa jumelle qu’il n’a jamais revu. « Je fais ma prière devant ma statue spiderman chaque soir. » plaisante-t-il même si jamais il en venait à prier un jour, il le ferait devant cette figurine valant une petite fortune qui trône sur la commode de sa chambre. Il a de la chance d’avoir des enfants bien plus calmes, Penny ayant été adorable, ne se rebellant que l’adolescence bien entamée, Luke semble aussi relativement bien vivre les choses et Siobhan, il se demande si elle ne commence pas à emprunter ses pas avec ses crises. Des deux, c’est Aisling qui est la plus stricte, parce que Perry n’a jamais eu aucune autorité sur ses enfants, faisant toujours tout pour leur faire plaisir. Il essaie de ne pas céder à tout mais bien souvent il se dit qu’il peut bien prendre ce jouet là en plus si ça lui fait plaisir. « J’suis trop faible, je peux pas faire ça. C’est peut-être pour ça qu’elle fait plus de crises maintenant, parce que j’ai pas su mettre des limites. » Penny a pu bénéficier un temps de l’éducation de sa mère, idem pour Luke, mais Sio il l’a eu dès la naissance, avec Aisling certes, mais il a pleinement contribué à son éducation, peut-être qu’il en récolte aujourd’hui les conséquences. Il se demande également si ça ne pourrait pas venir d’ailleurs. Si elle avait des problèmes à l’école, est-ce qu’elle leur en parlerait ? Pour la blonde, elle pourrait en parler à Isaiah qui est une figure adulte importante pour elle sans être un de ses parents. Perry se dit qu’elle pourrait en faire de même avec l’un de ses colocs, après tout elle a plusieurs figures adultes de confiance dans sa vie. « Oui c’est vrai...j’ai jamais connu ces problèmes là alors je ne sais pas trop si je saurais les identifier. Faudrait peut-être qu’on parle plus avec les adultes qu’elle voit à l’école, voir comment elle est avec les autres enfants. »

Aisling eut un léger rire à cette confidence. Elle imaginait très bien prier devant une statu géante d'un héro marvel ou DC. Il priait sûrement pour que son enfance éternelle ne s'arrête jamais. Ou pour que quelqu'un soit prêt à le suivre dedans. D'ailleurs, elle ne s'était que peu intéressée à la vie amoureuse de Perry récemment, mais elle ne sait pas non plus comment il le prendrait si elle le faisait.

-J'espère que cette statue sacrée est bien en sécurité, à l'abri des petites mains des enfants.

La blonde aurait bien aimé rassurer le père, mais elle ne pouvait pas totalement le contredire non plus. Honnêtement, elle ne pouvait pas en être sûre. D'une part elle n'était constamment avec Perry et Sio', d'autre part elle n'était pas pédopsychiatre.

-Peut-être que... Elle fait plus de crises avec toi qu'avec moi.

Elle se mordit la joue, elle ne voulait pas faire passer Perry pour quelqu'un d'incompétent, ou quelque chose comme ça.

-Sûrement qu'elle commence à comprendre la différence entre ce qui se passe avec moi et ce qui se passe avec toi, ou même avec nos amis, et qu'elle teste les limites.

Elle essayait sans doute de tirer les avantages à être chez l'un et chez l'autre.

Cependant, cela n'empêchait pas la question de savoir comment ça se passait avec ses camarades de classe. Aisling hocha doucement la tête. Elle ne s'était jamais particulièrement entendue avec les autres, mais, elle était déjà à cette âge plutôt différente de sa fille.

-On peut, peut-être, demander un rendez-vous avec l'institutrice ? Juste pour savoir comment ça se passe. Je pense que c'est normal, non ?

Malgré l’argent dont il dispose, Perry a peu d’objets de valeurs. Il n’est pas si dépensier, à part quand il s’agit de faire plaisir aux autres, ou vivre assez confortablement tout de même. Il n’ira pas s’acheter une montre hors de prix, ou une voiture de sport, il n’a pas le permis de toute façon. Par contre, il possède quelques figurines et objets de pop culture plutôt précieux auxquels il tient. Alors effectivement, il fait attention à ce que ceux auxquels il tient le plus ne puissent pas être abîmés facilement. « Oui, je la mets suffisamment en hauteur pour éviter tout accident. » confirme-t-il même si d’autres figurines sont bien moins protégées, mais elles sont moins uniques à ses yeux. Et ses enfants ne viennent pas non plus tant traîner que ça dans sa chambre. Concernant ses inquiétudes sur leur fille, Aisling soulève un point auquel il n’avait pas pensé. Peut-être qu’elle fait des crises qu’avec lui, parce qu’elle a compris qu’il finira par céder. Il n’arrive pas à être dur et pour autant il ne fait pas non plus spécialement d’éducation bienveillante. Il fait un peu au hasard et il est bien trop faible quand il s’agit de céder aux caprices. « Oui, peut-être. Mais bon, j’cède facilement donc elle aurait même pas forcément besoin de faire de crise. Ou alors je cède peut-être un peu moins facilement qu’avant, c’est peut-être pour ça. » Il arrive un peu à dire non et à avoir une certaine autorité, Sio n’y a pas été habituée. Mais les choses peuvent aussi venir de l’école, il ne sait pas ce qui s’y passe et la blonde non plus, elle propose un rendez-vous avec l’institutrice pour pouvoir en discuter. « C’est vrai, j’en avais eu pour Penny je me souviens, comme elle était arrivée en cours d’année et tout ça, c’était pour voir comment elle s’adaptait et tout, mais avec Sio on est peut-être un peu trop partis du principe que tout allait bien. Mais l’école nous aurait dit s’il y avait quelque chose, non ? »

Aisling ne pouvait qu'émettre des hypothèses sur le comportement de Siobhan. Elle n'avait pas l'impression que sa fille était une enfant difficile. Elle commençait à avoir du caractère, certes, et elle devait rester ferme parfois, mais elle lui expliquait toujours pourquoi elle pouvait, ou ne pouvait pas avoir ou faire quelque chose. Aisling lui parlait comme à une adulte, sûrement parce qu'elle ne savait pas adapter son discours aux enfants. Mais elle avait déjà entendu que les enfants pouvaient être différents selon avec qui ils étaient : leurs parents, leurs grands-parents, l'école, etc.

-Est-ce que tu as déjà essayé de parler avec elle ? De lui demander pourquoi elle faisait ces crises ?

La blonde hochait doucement la tête de bas en haut, un peu pour réconforter Perry. Il semblait inquiet, et elle se disait que sûrement qu'elle n'était pas assez inquiète. Est-ce qu'elle prenait trop les potentiels problèmes de sa fille à la légère ? Mais elle n'avait jamais eu l'impression de l'avoir abattue ou malheureuse. Et en même temps, elle avait vécu tellement d'épreuves qu'elle savait peut-être très bien lui cacher ce genre d'attitude.

-S'il y avait quelque chose de grave, ils nous auraient sûrement convoqué oui. Il ne faut sûrement pas trop se faire de soucis, mais ça ne peut pas faire de mal de voir son institutrice. Au pire on ira juste pour rien, mais on connaîtra son avis sur Siobhan.

Perry n’a jamais été trop du genre à s’inquiéter pour les choses, il part souvent du principe que tout va bien, que les choses vont s’arranger. Mais pour ses enfants, il s’inquiète parfois peut-être un peu trop. C’est un vrai papa poule qui fait tout son possible pour qu’ils aient la meilleure vie possible, en faisant quand même attention à pas trop les gâter. Il a toujours du mal à résister de leur acheter un nouveau cadeau et ce n’est pas son budget qui va le restreindre, mais il n’a pas envie qu’ils vivent dans le luxe comme lui a pu le connaître durant son enfance. Il tient davantage à ce qu’ils vivent entouré dans un appartement vivant et joyeux que dans une grande maison avec piscine mais totalement impersonnelle. Sauf qu’en ce moment, tout ne semble plus rouler comme sur des roulettes avec Sio, enfin c’est ce qu’il se dit parce qu’Aisling n’a pas l’air plus inquiète que ça. « Oui...j’ai essayé...mais j’ai peut-être pas assez insisté, je sais pas. » répond-il en haussant les épaules. Histoire d’en avoir le cœur net sur ce qui peut se passer à l’école, la blonde lui propose une rencontre avec son institutrice. « On peut toujours faire ça oui, peut-être que Sio se comporte pas du tout pareil à la maison qu’à l’école. » Sans pour autant que son comportement soit problématique, elle n’a peut-être juste pas la même attitude, c’est ce qu’il se dit. « J’me dis que j’ai pas connu ça avec Penny, ça doit être pour ça que ça me perturbe. » ajoute-t-il avec un rire.