That boy is bad and honestly he's a wolf in disguise + Tahlia

Quelques échanges de messages rapides et voilà qu'Asher avait repris contact avec Tahlia. Il ne se rappelait même pas la dernière fois qu'il avait vu la belle australienne, ça devait faire au moins cinq ans, peut-être plus. Avant son procès, c'était au moins sûr. Il lui avait envoyé son adresse et elle devait le rejoindre ce soir, chez lui. Il ne donnait jamais rendez-vous chez lui. En vérité, il ne voyait pas grand monde, depuis qu'il avait emménagé à Bowen. Mais encore moins chez lui. Il se préservait, d'accord pour être sociable, un minimum du moins, mais sans trop en donner. Il avait besoin d'espace, de solitude, il n'en pouvait plus de la foule, du regard des gens, de leur avis sur tout et n'importe quoi, de leur opinion mal placée, surtout quand ça le concernait . Il n'était plus tellement le même homme qu'avant, depuis qu'il avait été traîné en justice, il en avait bavé. Il avait découvert que n'importe qui pouvait vous trahir, vous salir, pour rien, juste pour faire du mal. Et ça l'avait changé. Lui qui était si facile à aborder avant, il avait l'impression d'être devenu comme un animal blessé, il était méfiant, distant. Pourtant, c'était lui qui avait fait le premier pas vers Tahlia, parce qu'avec elle c'était simple, il n'y avait pas de jugement. Il était difficile de qualifier leur relation, en soi, elle avait été surtout physique, ne nous mentons pas, ils avaient passé du bon temps ensemble, notamment à la salle de boxe. Mais il l'aimait bien, cette fille, il pourrait la considérer comme une de ses amies, depuis le temps qu'il la connaissait. Ce soir, il l'avait donc invitée chez lui et elle avait accepté, sans se faire prier, prête à se jeter dans la gueule du loup. Cependant, il n'était peut-être plus ce même loup avide de chair et puis, quitte à ce qu'elle fasse le déplacement, il avait même essayé de cuisiner un peu. Ce n'était pas une grande réussite, en grande partie parce qu'il devait faire avec les moyens du bord, dans sa petite caravane de fortune qui lui servait de toit avant que la maison juste derrière soit en état de le recevoir correctement. Aussi parce qu'il n'était pas vraiment connu pour ses talents de cuisinier. Il entendit des pas et passa une tête par la porte ouverte qui donnait sur le grand terrain sous les pins. Salut Tahlia ! Viens par ici, entre ! Un sourire franc s'était dessiné sur ses lèvres pour accueillir la jeune femme.

@Tahlia Wates

Il y avait des gens qui popaient, comme ça, de nouveau, dans vos vies. En voyant le prénom d'Asher s'afficher sur la notification de message, Tahlia fit abstraction du nombre d'années écoulées depuis leur dernière rencontre. Parce qu'elle était habituée à cela, Tahlia. Cela avait toujours été ainsi avec lui. Asher apparaissait à Bowen, puis disparaissait, puis réapparaissait avant de redisparaître. Alors, c'était tout naturellement qu'elle avait accepté l'invitation chez lui, la curiosité bien grandissante et des questions plein la tête. Et puis, pour être honnête, cela lui changerait les idées à la brune de partager une soirée avec lui, elle qui tentait de mettre de côté ses déboires amoureux et les questions sur ses sentiments. Arrivée à l'adresse, les mains chargées du dessert – parce qu'elle détestait venir les mains vides ! - ses yeux observèrent la demeure du boxeur. Mais la voix qu'elle entendit provint de la petite caravane devant la maison. La tête d'Asher apparut dans son champ de vision, ce qui fit sourire la brune qui s'approcha de la caravane. « Salut ! » dit-elle avec joie. Oui, elle était heureuse de le revoir. Tout avait toujours été clair entre eux. Il n'y avait eu jamais d'animosité, juste de l'amusement. C'était d'une simplicité déconcertante, et c'était tout ce que Tahlia voulait à l'instant présent. Face à lui, dans l'encadrement de la porte de la caravane, elle prit le temps de l'observer quelques secondes, reprenant en souriant : « Elles te vont bien, ces années en plus. Cinq ? Si mes souvenirs sont bons... » Sûrement. C'était bien avant la naissance de Thaïs. Elle n'était même pas sûre qu'il sache qu'elle était devenue maman. Elle lui tendit le dessert, une tarte aux fruits faite maison, qui signait peu à peu la fin de l'été, ici, à Bowen. « Alors comme ça, t'as officiellement posé tes bagages, ici ? »

Asher n'était rien pour Tahlia, juste une récréation épisodique, avant de repartir. Néanmoins, même si ses visites à Bowen se faisaient rares, il prenait toujours soin de la contacter, ou faisait en sorte de la retrouver quelque part. Cette fois-ci, il avait pourtant mis un peu plus de temps à retrouver. Peut-être parce qu'il savait qu'il n'était plus vraiment de passage, il avait tout son temps. Et puis, pour être honnête, il n'avait pas vraiment la tête à s'amuser au cours des premiers mois après son installation dans la forêt. Il ne retrouvait le goût des autres que depuis ce début d'année même et une charmante écossaise n'était pas totalement étrangère à ce changement. La maison qui s'élevait face à la brune était somme toute modeste, ses grands parents l'avaient habitée durant des décennies, elle avait accueilli les enfants, les petits-enfants, serrés dans des lits trop petits. C'était le temps du bonheur, les meilleurs souvenirs d'enfance du boxeur. Et puis la maison avait perdu sa superbe avant de ne ressembler qu'à une vieille coquille vide. Asher aurait pu s'offrir une belle villa sur la plage. Mais ce n'était pas la maison en soi qui l'intéressait, mais les souvenirs qui restaient, son âme. Alors d'ici quelques mois elle ne ressemblerait plus tellement à ça, mais pour l'instant ce n'était pas fameux. Et lui vivait dans quelques mètres carrés sur roues. Il se laissa dévisager par Tahlia avant de déplacer sa lourde carcasse pour venir prendre le dessert, le poser derrière lui et la prendre dans ses bras. Toi t'es toujours aussi belle ! Elle n'avait pas tellement changé pour être honnête, peut-être avait-elle l'air plus grave qu'avant, moins insouciante. Quelque chose comme ça, oui. Il ne comptait pas, le temps qui passait lui foutait le cafard. Merci pour le dessert, il y aura au moins quelque chose de bon à manger. Autant dire qu'il n'était pas très optimiste sur la réussite de son dîner. Ouais, on peut dire ça, j'ai au moins acheté ce petit lopin de terre. Qu'il précisa dans un sourire. Ce n'était pas si petit que ça, il y avait quelques hectares pour s'amuser. D'ailleurs, son chien, Jack, s'en donnait actuellement à cœur joie

@Tahlia Wates

Sans doute sa place ne devait pas être ici, mais plutôt aux côtés d'un italien qui tournait sans cesse dans sa tête. Mais pour cette soirée, Asher, c'était sa bouffée d'air frais, la simplicité à l'état pur, des discussions sans jugement, ni attentes l'un envers l'autre. Tout ce qu'il fallait pour que Tahlia mette son cerveau sur pause. Alors, elle n'avait pas réfléchi bien longtemps quand il lui avait proposé de se voir. Une fois sur place et en face du boxeur, la brune prit le temps de l'observer. Ce n'était pas le regard gênant, au contraire, on voyait juste qu'elle se réimprégnait de ses traits, près de cinq ans plus tard. Il avait changé. Il y avait une certaine gravité qui émanait de lui et qui le rendait encore plus mature. Il était beau et charismatique, Asher. Tout simplement. Quand il la prit dans ses bras, elle lui rendit son étreinte, esquissant un sourire à ses mots. « Avec quelques rides et des cernes, en plus, soyons honnête ! » dit-elle en riant. Elle avait juste passé la trentaine, Tahlia. Elle faisait plus femme, plus posée, plus mature. Elle s'était assagie. Enfin, un peu. Alors qu'il la remercia pour le dessert, affirmant qu'il y aurait au moins quelque chose de bon, elle rit de bon cœur : « Je ne l'affirmerai pas autant que toi. Ma petite commis a eu la main un peu lourde sur le sucre. » Mais ils n'étaient pas là pour se faire un remake de Top Chef. « Et puis, pour être honnête, je garde de bons souvenirs de tes plats de pâtes. » ajouta-t-elle avec un sourire amusé. C'était souvent après une bonne session de boxe, suivie d'un temps récréatif tout aussi physique. Elle posa son regard sur la maison qui se tenait près de cette caravane et qui semblait être le nouveau pied-à-terre du jeune homme. Ou son petit lopin de terre. Elle lui lança un regard amusé pour montrer que ce n'était pas qu'un petit lopin de terre. Pour l'instant, cela ne payait pas de mine, mais Tahlia sentait le potentiel. Et à première vue, elle trouvait que l'endroit correspondait bien à Asher. « C'étaient tes grands-parents qui vivaient ici, si je m'en souviens bien. » Elle n'avait qu'un vague souvenir de la famille qui vivait ici, n'ayant eu de lien qu'avec Asher, quand il venait dans le coin. Elle dévia son regard de la maison pour se poser vers Asher. « T'es revenu ici pour la maison ? » Tahlia y croyait vainement. Pour que Asher reste aussi longtemps sur Bowen, c'était bien parce qu'il y avait autre chose.

Il n’y avait jamais eu de gêne entre Tahlia et Asher, simplement parce qu’ils savaient parfaitement quoi attendre de l’autre et où se trouvait la limite. Jamais il n’y avait eu de sentiments, jamais d’attente autre que celle du plaisir et de bons moments partagés, avant de se quitter. En vérité, ils ne pouvaient pas dire qu’ils se connaissaient tellement non plus, parler ce n’était pas trop le fort du boxeur et écouter … disons qu’il était facilement distrait ! Alors ce soir, cette invitation, ce n’était pas tant l’affaire deux vieux amis qui se retrouvaient pour un dîner. Probablement qu’Ash avait quelque chose d’autre en tête, d’un peu plus… pimenté. Tout en étant parfaitement conscient que la brune avait une vie et qu’on pouvait changer en cinq ans, qu’elle s’était peut-être lassée de ce genre de jeu avec son sportif préféré. Néanmoins, elle avait répondu à l’invitation sans se faire prier et au vu de leurs brefs échanges, elle n’était pas vraiment différente de celle dont il avait le souvenir. Dans tous les cas, il était un tant soit peu gentleman, il l’avait invité à manger, alors il avait cuisiné. Une bonne odeur de légumes qui revenaient gentiment sur le feu se faisait sentir, pas encore d’odeur de cramé, tout n’était pas perdu. Et puis il était content de la revoir et la façon dont ils se regardaient, se redécouvrait, avec douceur et indulgence en était la preuve. Tahlia parlait de rides, elle qui était encore dans le début de la trentaine, que devait-il dire, Asher, qui avait déjà glissé dans les quarante ans et dont le visage était marqué par les excès et les coups. Il secoua donc la tête, pour balayer sa remarque. Il rit alors qu’elle lui parlait de son dessert probablement trop sucré. Ash n’avait encore jamais rencontré Taïs, ça n’arriverait sûrement jamais d’ailleurs, mais il savait qu’elle avait une fille. J’en reviens pas que tu sois maman, c’est ça les cernes ! Qu’il la taquinait gentiment. Avant d’ajouter : Je suis sûr qu’il sera très bon. Elle lui rappela ses plats de pâtes et il pouffa de rire, ils avaient quelques bons souvenirs ensemble mine de rien. Le repas du champion. Avec un bon blanc de poulet sans aucune matière grasse, hmm ! Cet aspect-là de sa carrière ne lui manquait absolument pas, à présent, il pouvait se faire plus plaisir dans ses repas, ajouter un peu de gourmandise, de sucre, de gras. C’était un bon vivant, Asher, il aimait ce genre de plaisir, mais il s’en était beaucoup privé, notamment lors des périodes de compétitions. Il remarqua son regard au sujet de son terrain, effectivement, il était modeste, mais la taille du lieu importait peu en soi. Oui, mon père et sa famille en ont hérité à leur décès, mais ça n’intéressait personne, la maison tombait en ruine. Alors, j'ai tout racheté. Sa question le troubla un instant, il la fixa quelques secondes avant de balayer le terrain du regard, cette maison, ces pins centenaires, son chien qui s’ébrouait dans les feuilles. C’était une raison suffisante, non ? Non, pas la maison, elle ne vaut rien, il y a tout à refaire. Mais pour les souvenirs. Ce n’était pas tellement la question, il le savait bien. J’ai vécu à New-York ces dernières années, j’me suis fait virer de mon appartement honteusement luxueux par mon ex pendant que j’étais en pleine tempête judiciaire. J’ai perdu quasiment tous mes amis. Il avait mimé des guillemets en prononçant le mot amis. Avant de hausser les épaules. J’avais besoin d’un endroit où me terrer, ou me sentir en sécurité. Et cette forêt, c'était l’évidence. Il ne s’attendait certainement pas à lâcher tout ça à Tahlia après à peine cinq minutes de retrouvailles, mais son regard l’y avait incité et il s’était confié. Je te sers quelque chose ? Une bière, du vin ?

Tahlia savait pertinemment qu'elle n'allait pas voir un vieil ami, ce soir. Ils étaient plutôt connus pour se distraire mutuellement pendant un moment, passant bien au dessus des conversations et de leur vie, en globalité. Ils connaissaient ce qu'ils devaient connaître l'un de l'autre. Pas plus. Pas moins. Et dans le respect. C'était leur forme d'amitié, à eux, et cela convenait bien à la brune, bien trop habituée aux relations amicales qui vrillaient à un moment ou un autre. Et ce soir, cela lui allait bien de mettre sa vie et son cerveau sur pause, juste pour un moment de partage avec le boxeur. Juste pour laisser sa rupture bien loin et l'italien qui hantait chacune de ses pensées. Quand ils se retrouvèrent, ils prirent le temps de s'observer, d'appréhender ces traits qu'ils n'avaient pas vus depuis des années. La brune rit joyeusement à la réflexion du boxeur : « T'es pas le premier à t'étonner du fait que je sois maman. Je devrais me poser des questions, à force. » Elle était amusée de tout cela, à vrai dire. Quand on voyait Tahlia, son indépendance et ses histoires d'amour qui capotaient, en effet, on ne l'imaginait pas en tant que maman. Et pourtant, elle en avait rêvé de cet enfant. « Mais oui, ça explique les cernes. » conclut-elle dans un sourire, haussant ensuite les épaules quand il affirma que le dessert ne pourrait qu'être bon. Asher n'avait pas l'air bien sûr de son repas du soir, ce à quoi Tahlia lui rappela les plats partagés ensemble. Des plats de champion, en référence à sa carrière professionnelle. « A chaque fois que tu étais à Bowen, je perdais deux kilos et prenais du muscle. Merci le blanc de poulet et les nombreuses séances de sport. » Son expression se fit taquine sur la fin de phrase, parce qu'elle englobait tous les types de sport qu'ils avaient pu faire ensemble. Elle reprit néanmoins son sérieux quand il évoqua son retour à Bowen et cet achat de maison. Un achat qui troublait Tahlia, dans le sens où elle ne pensait pas qu'Asher pouvait s'en faire, un jour, un pied-à-terre. Alors, dans sa question, elle essaya d'en savoir plus. Le boxeur fit du grand Asher, d'abord, en détournant plus ou moins le sens de la question. Les souvenirs ? Ok, cela pouvait paraître plausible, mais elle était sûre qu'il y avait encore quelque chose de plus fort. Elle pensa alors le cuisiner toute la soirée pour en savoir plus, mais le jeune homme l'étonna. D'un coup, il lui lâcha toutes les raisons qui l'avaient amené ici. Asher n'était pas du genre à se confier, aussi prenait-elle la confidence avec beaucoup de bienveillance et d'écoute. Il n'avait pas eu la vie facile. Rupture, des amis qui le laissaient tomber, une perte de confiance en lui sans doute, un besoin de s'exiler. Elle avait froncé les sourcils en l'entendant parler de tempête judiciaire, n'ayant pas eu vent de ce procès qui lui avait été collé. « En effet, c'était une évidence. » valida-t-elle alors qu'il parlait de cet endroit où se terrer. Bowen était déjà un bel endroit pour se terrer, mais la forêt apportait ce coin de verdure qui permettait de se régénérer. Elle ne rebondit pas de suite sur ses mots, se contentant de répondre à sa question : « Je prendrais une bière, s'il te plaît. » Elle lui emboîta le pas, prête à l'aider pour prendre les boissons, attendant de les avoir en main pour reprendre : « Tu parlais de tempête judiciaire? » Elle posa ses yeux verts sur lui et demanda : « Qu'est-ce qu'il t'est arrivé, Ash ? » Elle en était sûre : c'était cela qui l'avait complètement perdu. Pas la rupture. Encore moins les amitiés perdues.

Asher ne jugeait pas le fait que Tahlia soit maman, au contraire il trouvait ça attendrissant. il ne savait rien de cette histoire, bien qu’il ait compris qu’elle n’était plus avec le père de sa fille. En soi, ça ne le regardait pas et il n’avait rien à en dire. La vie était faite de surprises, parfois bonnes et mauvaises, il fallait savoir en retirer le beau. Il aurait pu faire une de ces blagues un peu lourdes sur le fait qu’il espérait que l’enfant n’était pas de lui. Ils auraient pu en rire, quand on pensait à leur passé plutôt ardent, mais il n’avait pas forcément envie de s’amuser de ça. Peut-être qu’il avait perdu son sens de l’humour, ou peut-être était-il devenu plus subtil avec le temps. J’suis étonné parce que j’ai l’impression que c’était hier que je t’apprenais à taper correctement dans un sac, ouais ! Et maintenant t’as une gamine. Asher avait un problème avec le temps qui passait, l’âge qui avançait, il n’avait pas l’impression d’avoir passé la bar des quarante ans, il se voyait toujours jeune, à draguer des minettes. Il lui adressa un sourire plus doux, il la taquinait pour les cernes, elle avait surtout l’air heureuse en parlant de sa fille et ça la rendait lumineuse. Et un nouveau sourire se dessina sur ses lèvres, celui-ci un peu plus joueur, il y avait cette flamme qui dansait dans ses yeux quand il regardait Tahlia. Je n’ai pas prévu de poulet ce soir, promis. Pour le sport, par contre, ça peut s’arranger. Si elle le prenait sur ce terrain-là, elle trouverait assurément du répondant. Pourtant, la conversation prit une direction plus sérieuse d’un coup, cette maison, la raison de son retour à Bowen. Asher avait pris tout le monde de court en plaquant toute sa vie pour venir se terrer dans cette petite ville. C’était un sacré revirement. Mais il en avait eu désespérément besoin. Il avait donné dans le faste, les paillettes, la célébrité. Il y avait laissé un peu de sa vraie personnalité, beaucoup de ses rêves et une bonne dose d’amour-propre. Sans parler de sa foi en les autres, de sa confiance envers ceux qu’il avait pu considérer comme ses proches. Et dire qu’il n’avait jamais voulu de tout ça, lui il voulait boxer, simplement boxer. Aujourd’hui il y avait juste ce goût amer, non pas que tout soit terminé, il n’avait jamais eu d’illusion sur le fait qu’un jour cette vie prendrait fin. Mais pas de cette façon, pas aussi brutalement. Alors il déballa tout, c’était si simple avec Tahlia, elle était cette oreille attentive, elle le laissait parler sans le couper. À la fin, il lui proposa naturellement quelque chose à boire, n’attendant pas de réponse particulière à ce qu’il venait de lui apprendre. Ils rentrèrent alors ensemble dans la caravane, Ash sortit deux bières du frigo, qu’il décapsula, il en tendit une à la brune et garda la sienne pour lui. En passant, il remua un peu sa poêle pour être sûr que rien en brûlait. Tandis qu’elle reprenait le fil de leur discussion. Il esquissa un sourire, au moins Tahlia ne lisait pas la presse à scandales. Une des personnes que je pensais être de confiance, un de mes anciens managers, qui était devenu ami, m’a trainé en justice, m’accusant d’avoir truqué des matchs, de m’être dopé aussi. Avec photos et preuves à l’appui, c’était criant de vérité. Mais c’était évidemment faux. Seulement le temps de rétablir la vérité, le temps du procès, j’ai tout perdu. Ma crédibilité, mes sponsors, mes titres, un temps. Maggie. Ç'a détruit ma carrière. Aujourd’hui, il avait réussi à prendre du recul sur cette histoire, à faire son deuil, mais ça restait douloureux. Et toi Tahli, j’ai cru comprendre que tu avais quitté la police. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Elle qui ne vivait que pour son job à une époque, il avait du mal à comprendre comment elle avait pu changer de voie.

Si certains n'imaginaient pas Tahlia maman, dans le sens où elle était bien fougueuse, à une époque passée, pour Asher, cela résidait davantage au temps qui passait. Elle hocha doucement la tête à ses mots, un sourire sur le bout des lèvres : « En même temps, ça fait tellement d'années qu'on se connaît. Mais oui, ça passe. » Et elle évoluait à son rythme. Si sur de nombreux points, elle avait encore à gagner en maturité, il fallait avouer que sa fille avait énormément calmé Tahlia. Avoir un enfant l'avait sauvé sur de nombreux plans de sa vie. Et ça, ça valait toutes les cernes, les nuits sans sommeil et les soucis du quotidien. La conversation se fit plus malicieuse, alors qu'ils se rappelèrent les repas partagés ensemble, les séances de sport et plus, si affinités. Et il y en avait eu, de l'affinité entre eux. Sans doute qu'il y en aura toujours, quand on voyait ces regards ardents et ces sourires provocateurs qu'ils arrivaient encore à échanger. « Oh, tu connais mon amour pour le sport. » dit-elle en haussant les épaules, amusée par le double-niveau qui arrivait toujours à colorer leurs propos. Seulement, cela leur arrivait aussi d'être sérieux. Et pour le coup, Tahlia le redevint assez rapidement parce qu'une question lui brûlait aux lèvres : pourquoi le célèbre Asher Robertson, qui pouvait avoir le monde à ses pieds, décidait de poser bagages dans une bourgade comme Bowen? Certes, il y avait les souvenirs familiaux, mais Tahlia était persuadée qu'il y avait autre chose. Chance pour lui, elle n'avait pas vraiment suivi la presse à sensation, ces dernières années. Elle le laissa parler, sans l'interrompre, laissant croire qu'elle n'allait pas vraiment rebondir sur le sujet. Mais il connaissait Tahlia. Elle n'était jamais dans le jugement, mais elle aimait creuser pour en savoir plus. Alors, une fois les bières en main, elle lui demanda ce qu'il entendait par tempête judiciaire. Elle n'eut même pas besoin de lui arracher les vers du nez, puisque Ash lui déballa tout ce qu'il avait vécu. Cette trahison qui lui avait tout arraché. Tahlia eut un pincement au cœur en entendant cette histoire si injuste. Asher était un passionné, la boxe, c'était un grand pan de sa vie. Lui enlever tout cela avait dû être terrible. « Pourquoi a-t-il fait ça ? Par vengeance ? Par jalousie ? Pour le fric ? » Elle en avait vu, des horreurs, dans son métier de policière. Mais Tahlia ne s'était jamais faite à l'idée que l'être humain puisse aller aussi loin, juste pour faire du mal. Asher avait tout perdu. De sa carrière à cette fameuse Maggie. « Maggie ? » demanda-t-elle, avec curiosité. Tandis qu'il lui retourna la question, sur sa carrière de policière abandonnée, la brune haussa les épaules : « On va dire que c'est le cumul de plusieurs choses. Je ne trouvais plus vraiment de valeur dans ce que je faisais, j'avais découvert certaines choses que je ne cautionnais pas. Et puis, il y a eu toute une histoire de sentiments qui m'a poussée à faire un choix. Je l'ai fait ce choix, mais aux yeux de la police, ça revenait à une faute grave. Mais je ne le regrette pas. Quelques mois après ma mise à pied, j'ai appris que j'étais enceinte. Alors, ça m'a aidé à tourner la page plus facilement. » Elle but une gorgée de sa bière, ses yeux se voilant de nostalgie. Elle s'était mise en porte-à-faux auprès de la police, mais Ciàran, lui, était désormais éloigné de toutes charges. Enfin, à sa connaissance. Ça avait été un beau deal. Une sortie magistrale, digne de Tahlia. Elle sortit de ses pensées, reposant son regard sur le boxeur : « Qu'est-ce que tu vas faire, maintenant ? » Boxait-il encore ou avait-il tout laissé de côté ?

Ça faisait en effet un paquet d’années que ces deux-là se connaissaient, Asher serait bien incapable de dire combien. Il se rappelait pourtant très bien de leur rencontre, quand il commençait à être vraiment connu par le grand public plus que pour la boxe. Parce qu’il avait accepté quelques contrats publicitaires et qu’il commençait à fréquenter le monde des arts, des peoples et pas juste des sportifs et que son nom se retrouvait de temps en temps dans la presse. Son grand-père était toujours vivant à l’époque et ça lui donnait une excuse pour revenir à Bowen passer un peu de temps au calme. Et comme il ne voulait pas louper d’entraînement, il s’était réinscrit dans cette petite salle de sport. Petite salle qui l’avait vu faire ses débuts hésitants, dont les profs étaient toujours les mêmes. Alors malgré ses résultats sportifs exceptionnels et son palmarès, quand il revenait sur ce ring-là, il redevenait le gamin de treize ans qui enfilait des gants pour la première fois et ça lui faisait un bien fou. Tahlia, il l’avait repérée rapidement, parce qu’elle était belle, mais aussi parce qu’elle frappait avec rage. Elle ne frappait pas comme une fille, comme le disait cette expression stupide, elle y mettait tout son corps, elle se donnait à cent pour cent. Alors, il s’était approché d’elle, visiblement cette brune ne lisait pas la presse, déjà à l’époque et c’était tant mieux, ça l’avait d’autant plus attiré, le fait qu’elle ne sache rien de lui. Et le reste leur appartenait. Donc oui, le temps était passé, elle avait une gamine à présent, lui, il avait tout perdu, mais certaines choses ne changeaient jamais, ils étaient toujours heureux de se retrouver. D’ailleurs, le ton qu’ils employaient, les allusions pas forcément subtiles, ça faisait partie du jeu aussi, ça non plus, ça ne changeait pas. Le boxeur afficha un sourire de connivence avant de répliquer. Je sais que tu as aimé ça, à une époque. Mais peut-être qu’il faudra une piqure de rappel. Il ne perdait pas le nord et il était évident qu’il ne serait pas contre recommencer, même si ce n’était pas le but premier de son invitation. D’ailleurs la séduction laissa place à quelque chose de plus sérieux. Ne pas se voir durant autant d’années impliquait qu’ils avaient du temps à rattraper, le fil de l’histoire qui s’était un peu perdu et des choses à se dire. Asher n’était pas particulièrement secret, pas avec les personnes en qui il avait confiance en tout cas. Et puis, au fond, ça lui faisait aussi du bien de vider un peu son sac en sachant qu’l n’y avait pas de jugement de la part de la brune. Alors, il lui raconta ce qu’il s’était passé, sans filtre, sans maquiller la vérité. Sa question était légitime, pourquoi son ancien manageur avait fait ça, pourquoi l’avait-il trahi. Le sportif se l’était longtemps posée lui aussi, il était tellement tombé des nues lorsqu’il avait compris d’où venaient ces accusations. Il haussa les épaules en buvant une gorgée de sa bière. Le fric oui, c’est sûr. Un peu de jalousie aussi, j’ai appris plus tard que j’avais passé la nuit avec une de ses ex, mais rien de bien sérieux. J’ai jamais tellement su. Je pense qu’il cachait bien son jeu, il y a des personnes comme ça, tu penses que tu peux tout leur donner et elles te poignardent dans le dos à la fin. Ça resterait probablement l’un des plus grands mystères pour lui et une des plus grosses déceptions, mais il avait fait le deuil de la vérité depuis longtemps maintenant. Il pouffa de rire lorsqu’elle répéta ce prénom. Mais où vivait-elle, Tahlia ? Bowen ce n’était pas non plus le fin fond de l’Amazonie ! Maggie. Il attrapa son téléphone et y trouva une photo de lui avec cette magnifique femme à son bras sur un tapis rouge. Tout le monde connaissait cette actrice qui avait tourné dans plusieurs blockbusters. Oui, lui, le gars à la gueule cassée, il avait eu cette femme-là dans son lit durant plusieurs années, quand il regardait les photos, ça lui faisait toujours un effet particulier. Elle est partie parce que ça faisait mauvais genre de s’afficher avec un sportif déchu à son bras. Il tournait leur séparation en dérision, mais on sentait bien qu’il y avait de l’amertume dans sa voix. Il l’avait trouvée si lâche, quand elle lui avait annoncé qu’elle le quittait. Et en même temps, il n’avait rien fait pour la retenir non plus. Il la questionnait à son tour sur sa vie. Et c’était bon d’entendre que tout comme lui, Tahlia ne mettait pas de barrières, elle se confiait sans détours. Il hocha la tête et afficha un sourire en coin. T’as choisi un mauvais garçon alors, c’est la conclusion qu’il faut en tirer ? Et il est parti ? Tout foutre en l’air, sa carrière, se retrouver enceinte et finir seule avec l’enfant au bout du compte, c’était rude tout de même. Asher se sentit mal pour Tahlia et il savait que son sourire de façade cachait bien des failles. Le repas était prêt, Asher éteignit le feu et sortit des assiettes, seulement, il ne fit pas attention et son coude frôla la poêle encore brûlante. D’un geste vif, il retira son bras et les assiettes volèrent pour finir par se fracasser sur le sol. Merde ! Ne bouge pas, j’voudrais pas que tu te blesses. Il pouvait être tellement maladroit quand il voulait. Heureusement, ce n’était qu’un tas de gros morceaux qu’il ramassa avant de se relever. Je vais déjà tenter de te faire un repas décent dans des assiettes en bon état et pour le reste, j’y réfléchirai plus tard. Qu’il affirma dans un sourire. En vérité, il ne savait pas vraiment ce qu’il allait faire de sa vie, retaper sa maison, oui, et après ? Il songeait à donner des cours de boxe, mais ça restait une idée dans sa tête.

Rien ne laissait présager que ces deux-là auraient pu se rencontrer. Elle, la petite bowenienne en reconstruction. Lui, le grand sportif en devenir. Et pourtant, ils l'avaient fait. A l'époque, elle ne savait rien de lui, de sa carrière, de sa célébrité. C'était leur passion pour la boxe, pour cet exutoire, qui les avait rapproché. Et c'était cela qui faisait sûrement que leur lien avait traversé les années, qu'ils retrouvaient chaque fois plaisir à se revoir. Entre temps, Tahlia avait su qu'il était Asher Robertson, le boxeur qui se faisait une place, le beau gosse à la gueule cassée qui qui attirait le regard. Mais cela n'avait rien changé. Quand il revenait à Bowen, il était Ash, son mentor, son ami, sa référence pour la boxe, celui avec qui elle passait la nuit à refaire le monde, terminant de nombreuses fois dans ses draps. Puis elle le laissait repartir, vivre sa vie de paillettes, suivant d'un œil sa carrière, en se demandant quand il reviendrait la prochaine fois. Alors oui, les années passaient, ils vieillissaient, mais certaines habitudes avaient la dent dure. A l'image de cette séduction qui venait toujours colorer leurs mots. « Une piqûre de rappel, ça ne fait jamais de mal ! » confia-t-elle, sourire malicieux sur le bout des lèvres. Tous ses soucis, tous ses questionnements, tout ce qui faisait que sa vie était un tourbillon, elle les laissait à la porte de cette caravane. Au moins pour la soirée. Mais avant toute chose, ils avaient des années à rattraper. La vie d'Asher semblait avoir été particulièrement bouleversée, les derniers mois. Pour cette soirée, Tahlia lui prêtait l'oreille et l'épaule qu'il méritait, prenant chacune de ses confidences sans jugement, avec bienveillance. Dans le monde du sport et de la célébrité, il y avait le risque de tomber sur des requins. Voilà ce qu'il s'était passé pour Asher. Une mauvaise rencontre avait décimé sa carrière. C'était encore plus terrible quand cela venait d'une personne dite de confiance. Tout cela était une sombre histoire de fric et de jalousie. Tous les vices de l'être humain. « Avec toutes les femmes que tu peux charmer, il fallait tomber sur l'une de ses ex ! » Mais elle se doutait que ce n'était pas que cela. Comme le disait Ash, c'étaient des personnes qui cachaient bien leur jeu, attendant le bon moment pour frapper et tirer tous les profits possibles. « C'est malsain. » dit-elle en soupirant. Mais des ordures, il y en avait pas mal sur cette vaste Terre. Mais celle-ci avait arraché pas mal à Ash, dont cette fameuse Maggie. Le Robertson semblait étonné que ce prénom ne fasse pas son chemin dans l'esprit de Tahlia. Alors il lui montra une photo de cette actrice reconnue, au bras d'Asher. « Ah mais Maggie, l'actrice ?! T'es sorti avec elle ? » dit-elle, surprise, avant de dire, amusée : « T'es devenu une vraie célébrité, dis-moi ! » Mais oui, c'était bien loin de Tahlia qui, clairement, était à mille lieues des histoires d'amour des acteurs et compagnie. Elle avait déjà du mal à gérer ses histoires, alors s'intéresser à celles de personnes qu'elle ne croiserait jamais, ce n'était pas pour elle. Elle grimaça quand Ash lui confia la fin de leur histoire. « Au lieu de te soutenir, elle a préféré te quitter ?! » demanda-t-elle, outrée. Parce que pour elle, qu'il y ait des casseroles ou non, on ne lâchait pas une personne de la sorte. « Tu l'aimais ? » se permit-elle de demander, un peu sur la réserve. Ash n'était pas le genre d'homme à ouvrir son cœur, aussi facilement. Un peu comme elle, finalement. D'ailleurs, quand elle raconta son histoire, elle se rendit compte qu'il y avait eu quelques similitudes. Une carrière gâchée, une histoire d'amour perdue, une perte de valeurs, une confiance en soi bafouée. Oui, ça faisait beaucoup. La façon dont Ash résuma son histoire la fit rire. « Presque ! Il y a eu le gentil garçon, que j'ai quitté pour le bad boy. J'ai fait un déni de grossesse, j'ai appris que j'étais enceinte du gentil garçon, que j'avais quitté entre temps. J'ai eu ma fille. Je me suis mise avec le mauvais garçon après être tombée enceinte de lui. Ça s'est mal fini. On s'est quittés. Fin de l'histoire. » Fin de l'histoire ? Vraiment ? Elle ne pouvait pas dire que le mauvais garçon était de nouveau dans les parages, pas si mauvais que cela, finalement. « Je te rassure, tout ça, ça s'est passé sur trois ans, hein ! » dit-elle en riant, avec l'impression d'avoir vécu mille vies en une. Elle s'approcha d'Asher pour lui prendre les assiettes, mais c'était sans compter sur l'accident domestique le plus commun. Une poêle brûlante et voilà que les assiettes étaient à terre. Elle ne l'écouta même pas et s'empressa de venir l'aider à ramasser les morceaux. Ses mots la firent sourire, ne répondant pas de suite. Elle s'approcha de lui et lui attrapa doucement le bras pour examiner sa brûlure. Elle en profita surtout pour rebondir à ce qu'il disait. « Tu ne sais pas encore ce que tu vas faire, c'est ça ? » Pourtant, il avait une voie toute tracée. Il fallait juste qu'il l'intercepte. « Tu devrais passer la plaie sous l'eau. Tu risques d'avoir une belle marque les prochains jours. » souffla-t-elle, sans le lâcher. « Une de plus. Mais ça te va bien. »

La célébrité était arrivée presque par accident pour Asher. Il n’avait jamais cherché à être connu. Lui, tout ce qu’il voulait, c’était boxer, c’était gagner ses combats et être reconnu par ses paires, le reste n’avait pas d’importance, au départ. Puis finalement il avait joué le jeu de la presse, de la pub, de l’argent un peu facile. Pour un petit gars de Brisbane qui venait de la classe moyenne, c’était assez fou et grisant de voir s’aligner les zéros sur des contrats juste pour y montrer sa gueule. Et de fil en aiguille, il avait été de plus en plus reconnu dans la rue, il était devenu intéressant, invité à des soirées auxquelles il n’aurait jamais pensé mettre les pieds, serré dans des costumes de bonne facture taillés sur mesure pour ses épaules imposantes. C’était comme une sorte de cercle vertueux ou vicieux, selon comment on arrivait à gérer tout ça. Lui, il donnait l’impression de maîtriser, il s’était entouré d’une bonne équipe, d’un bon manager. Pourtant, il avait besoin de temps en temps de rentrer au pays, à Bowen ou chez ses parents, de ne redevenir que Ash, le gamin bagarreur et pas Asher Robertson à qui on faisait des courbettes. Heureusement qu’il avait gardé la tête sur les épaules, parce qu’il n’osait imaginer comment il aurait pris les choses si ça n’avait pas été le cas, quand son manager lui avait planté un couteau dans le dos, quand tous ses soi-disant amis s’étaient détournés de lui. C’était beau, les paillettes et le show-business, quand tout allait bien, oui. C’avait toujours été important pour ‘le boxeur de garder des repères loin de cet univers, des personnes comme Tahlia qui se moquaient totalement de son palmarès ou qu’il connaisse telle ou telle célébrité. Et il avait eu raison, parce que lorsque tout s’était écroulé, il n’avait pu compter que sur ce cercle réduit qui ne lui avait pas encore tourné le dos. La brune en était le parfait exemple, il avait l’impression que malgré le temps qui passait, leur relation ne s’étiolait pas. Ils n’avaient pas besoin de prendre des nouvelles régulièrement, ni de se voir beaucoup, pour qu’à chaque fois ce soit tout de même un plaisir de se retrouver. Les années pouvaient passer, ils revenaient rapidement à leurs vielles habitudes, à ce flirt sans conséquence, à ces conversations sans langue de bois. Il esquissa un sourire en coin en lui lançant un regard plein d’envie. Effectivement, une piqure de rappel pourrait être envisagée. Plus tard, pour l’heure, Asher s’était donné pour mission de remplir leurs estomacs et la discussion tendait vers des sujets plus sérieux. Le barbu conta à son amie ses mésaventures avec son manager, il trouvait des réponses, mais sans qu’elles soient forcément les bonnes. Il ne saurait jamais vraiment pourquoi cet homme l’avait trahi, il avait eu beau chercher, subir le procès et toutes les preuves, les témoignages, les aveux, les accusations. Il avait eu beau le gagner, ce foutu procès, ça n’avait pas apporté de réponses claires, alors à présent, il ne cherchait plus, de toute façon le mal était fait, ça ne changerait plus grand-chose à présent. Enfin, dans le mot ex, il y a ex, tu vois. À un moment, je ne demande pas leur CV ou leur livret de famille à toutes les personnes avec qui je passe la nuit ! Parlant de ça, peut-être qu’il devrait, ça lui éviterait par exemple de coucher avec la meilleure amie de la fille qu’il aimait bien, ou même avec l’ex d’un de ses meilleurs potes. Mais ça, c'était une autre histoire ( ). Elle avait raison, Tahlia, c’était malsain, c’était le bon mot pour clore le sujet. Heureusement pour lui, ce n’était pas douloureux de parler de son ex. Il avait eu beau passer quelques années avec Maggie, bâtir une vraie relation avec elle, avoir eu des sentiments, évidemment, aujourd’hui, elle ne lui manquait pas tellement. On a vécu quelques années ensemble oui. On avait un appartement à New-York et un projet de bébé qu’on n’a jamais réussi à concrétiser. C'étaient des faits, simplement, Maggie était actrice, mais elle aurait pu être sportive ou coiffeuse, ça n’aurait pas fait de différence pour lui. Il n’avait jamais voulu sortir avec une célébrité, ce n’était pas son critère de sélection. Mais il fallait avouer que cette femme était charismatique, magnifique et diablement sexy, c’était ça qui l’avait fait chavirer. Il est temps de t’en rendre compte, d'ici quelques mois tout le monde m’aura oublié, t’en fais pas ! Ça faisait un sacré moment qu’il n’avait plus participé à une campagne de pub ou fait d’interview. Dans un monde dans lequel tout allait trop vite, où une réputation pouvait se faire ou se défaire en un claquement de doigt, où tu pouvais devenir célèbre grâce à une vidéo virale et puis disparaitre quelques jours plus tard, Asher ne se faisait aucune illusion. D'ici à quelque temps, il aurait disparu, on se rappellerait peut-être de lui comme d’un ancien champion de boxe, mais rien de plus. Il avait accepté cette fatalité bien avant de sortir avec sa belle actrice. Et il refusait de devenir ce genre de vieux qui court après la gloire en participant à des émissions revival, ou bien des combats d’anciens champions juste pour faire de l’audimat. Il avait sa fierté, son temps était passé, point. Il haussa les épaules à la question de Tahlia, oui, elle l’avait quitté au lieu de le soutenir. Mais au fond, ce procès avait été le bon prétexte, peut-être que leur histoire battait de l’aile depuis un moment, mais que ni l’un ni l’autre ne voulait l’admettre avant. Il fut cependant surpris par sa question. Est-ce qu’il l’avait aimé, Maggie ? Pour être honnête, il n’en était pas bien sûr. Autrement dit, elle n’était très probablement pas la femme de sa vie. Il y avait eu pas mal de passion entre eux, particulièrement sur l’oreiller, de la tendresse aussi, mais de l’amour, profond ? Il en doutait. Peut-être que le boxeur était un peu cynique à ce sujet, pour lui le grand amour n’existait pas et ses plus de quarante années sur cette terre ne lu avaient pas encore prouvé le contraire. Je l’aimais beaucoup. J’aimais l'idée de savoir qu’on avait quelque chose ensemble. Mais on ne faisait que se croiser, difficile de vraiment construire quoi que ce soit. On n’arrivait même pas à le faire, cet enfant, c’est pour dire. Alors ça nous pendait au nez, avec ou sans le procès. Il l’aimait beaucoup, ça résumait la situation. Effectivement, il y avait pas mal de similitudes entre son histoire et celle de Tahlia. Cependant, elle ajoutait le combo gagnant du triangle amoureux, c’était encore une autre dimension. Il l’écouta lui faire un résumé de cette histoire bien complexe, Asher plissa les yeux pour essayer de comprendre. T’es tombée enceinte une deuxième fois alors ? Il ne posa pas plus de questions, si elle disait n’avoir qu’une fille, c’était probablement que ça s’était mal terminé, pas juste entre ce garçon et elle. Wow, dis-donc, mon histoire d’actrice et de procès, est mille fois moins palpitante que la tienne ! Elle avait raison de le rassurer, parce que dit comme ça, il aurait pu croire que tout ça s’était déroulé en quelques mois. Bon, si elle avait eu sa fille entre temps, il était évident que non, mais la précision était nécessaire. Ils auraient pu continuer longtemps, mais c’était sans compter sur la maladresse du quarantenaire qui venait de se brûler avec la poêle et fait voler les assiettes. La brune n’écouta rien de sa mise en garde et l’aidait déjà à ramasser les bouts tranchants. Fais gaffe à toi. Ce n’était que de la faïence brisée, mais il ne voulait pas qu’elle se coupe. Une fois les morceaux ramassés, Tahlia examina sa plaie avec soin et Asher se laissa faire docilement. J’ai encore besoin de temps. Pour le moment, abattre des murs et faire du ciment, ça me fait le plus grand bien. Autrement dit, il avait besoin de se défouler, de ne pas penser à sa carrière, à son avenir. Il voulait se recentrer sur lui-même, panser ses blessures. Évidemment qu’il avait des idées pour la suite, mais il ne se sentait pas prêt. Il lui sourit alors qu’elle usait de beaucoup de douceur avec lui. Ça te va bien ce rôle d’infirmière. Il la fixa avant de regarder sa bouche, puis ses courbes, elle était proche de lui et ça lui faisait un petit quelque chose, il brûlait, mais ça n’avait rien à voir avec la brûlure de son bras.

Les années avaient beau passer, certaines choses ne changeaient pas. La relation entre Asher et Tahlia en était la parfaite représentation. Même s'ils ne se parlaient pas pendant des années, quand ils se retrouvaient, c'était comme s'ils ne s'étaient jamais quittés. Il y avait cette complicité qui renaissait à chaque fois, ce flirt incessant, cette curiosité bienveillante envers l'autre. Elle aimait connaître les péripéties d'Asher, lui qui avait une vie tellement plus palpitante que la sienne (bien qu'elle ne l'enviait pas). Il avait beau évoluer dans un monde de paillettes, c'était également un monde de requins. La preuve ? Asher avait tout perdu en un claquement de doigts. Pour une question de jalousie, d'ex, de fierté mal placée. Elle se mit à rire quand Asher affirma qu'il ne demandait pas le livret de famille des personnes avec qui il passait la nuit. « Faut quand même avouer que, pour le coup, le monde est vraiment trop petit ! » Et Tahlia ne savait pas encore que, d'ici quelques temps, le monde lui paraîtrait bien trop petit, à elle aussi. Mais pour l'heure, son attention se posait sur cette fameuse Maggie, cette actrice avec qui il avait passé plusieurs années de sa vie. Tahlia était complètement passée à côté de l'information. Dans sa petite bourgade bowenienne, les histoires des grandes stars ne l'intéressaient pas tellement, pour être honnête. Elle était plus terre-à-terre. Les potins, ça lui passait au-dessus. Mais là, maintenant qu'elle avait le principal intéressé devant lui, elle allait avoir tous les tenants et aboutissants de cette histoire qui s'était mal terminée. Il y avait eu ce projet d'enfant. Ce projet d'enfant inabouti. Ces carrières à mener. Ces absences. Et le procès. Un vrai cocktail pour mettre fin à une histoire. « C'est triste. » dit-elle, d'abord, même si Asher semblait bien détaché. « Une histoire d'amour, c'est déjà compliqué à construire, mais je suppose qu'avec vos carrières, cela devait ajouter une bonne couche de complexité. Pour toi, c'est terminé, vraiment terminé ? » Il y avait parfois des petits brèches, des petites portes qui laissaient croire qu'il y avait encore quelque chose. Mais la présence d'Asher à Bowen remettait cela en question. A son tour, Tahlia raconta son histoire, elle aussi bien complexe. Elle hocha la tête à sa question, sur sa deuxième grossesse : « Oui. Mais ce n'est pas allé jusqu'au bout. » Elle n'en dit pas plus. Il avait l'essentiel. Elle ne voulait pas remuer le couteau dans sa plaie, encore à vif. Heureusement, Asher rebondit en disant que son histoire était plus complexe que la sienne. « Mais la mienne, au moins, elle n'était pas scrutée par des millions de personnes. » dit-elle en riant. Mais au fond, ils en étaient au même point. Seuls. Tahlia ne put lâcher plus d'info puisque la maladresse d'Asher frappa à cet instant. Il se brûla. Les assiettes tombèrent et éclatèrent en morceau. Sans même l'écouter, la brune se dépêcha de l'aider à ramasser les morceaux, esquissant un sourire aux mots du jeune homme : « Je suis plus solide que tes assiettes. » Elle rit joyeusement, terminant de ramasser les assiettes cassées sans la moindre coupure. Puis, Tahlia s'approcha de lui pour, d'abord, observer la plaie du boxeur, mais pour intimer aussi un moment plus propice aux confidences. Sur l'après. Elle comprit que, pour l'instant, Asher n'avait pas envie de penser à cela, qu'il avait juste envie de mettre son cerveau sur pause, de s'accorder le temps de prendre le temps. La jeune femme hocha la tête, compréhensive. « Si tu as besoin de quelqu'un pour casser des murs, tu as mon numéro. » Pour casser des murs et prêter l'oreille, aussi. Reportant son attention sur sa plaie, ses lèvres s'étirèrent en un sourire alors qu'il l'affubla du rôle d'infirmière. « C'est drôle que tu dises ça... » dit-elle, doucement. « … ça me trotte en tête. De devenir infirmière. » C'était dans un coin de sa tête depuis de longues années, depuis qu'elle avait quitté la police, pour être honnête. Seulement, la vie avait fait qu'elle avait laissé cela, de côté. « T'es le premier à qui j'en parle. »Peut-être parce qu'ils étaient dans le même cas, à ne pas savoir quelle voie prendre. Tahlia avait son emploi chez Andrew. Elle adorait ce job. Mais elle savait aussi que son truc à elle, c'était d'être là pour les autres. Elle releva le regard vers Asher, sentant son regard sur elle, sur sa bouche, sur ses courbes. Elle ne pouvait renier qu'elle l'aimait ce regard. Qu'elle l'avait toujours aimé. « Ne me regarde pas comme ça. » dit-elle, avec un sourire. « Tu sais que ça me fait toujours craquer. » Elle n'avait pas besoin de grands mots, de grands discours,Tahlia. C'était plutôt le langage corporel qu'elle utilisait le mieux. Et à cet instant, malgré ses mots, elle ne recula même pas d'un pas...

En vérité, cette histoire de coucherie avec l’ex de son manageur, Asher n’était pas certain que ce soit la raison à ce que l’autre l’ait poignardé dans le dos. Peut-être avait-il simplement parié sur le mauvais cheval, cru que cet homme pouvait être de confiance, alors que l’autre avait juste attendu qu’il soit à l’apogée de sa carrière pour le faire tomber. Probablement que cette histoire de femme, ce n’était qu’un détail, ou bien le déclic qui lui avait fallu pour mettre tout son plan à exécution. Ou peut-être bien au contraire que cette femme l’avait séduit dans l’exact but de servir le dessin de son ex et empocher, elle aussi, une partie du pactole. Il fallait bien comprendre que dans cet univers tout était fait de faux semblants, d’alliances et de pactes avec le diable, Asher l’avait lui-même appris à ses dépens et à présent, il ne faisait plus confiance à personne. Du manager véreux, on passait à Maggie, tout ça était lié, mêlé, dans un sacré nœud bien sordide, comme si le sort s’était acharné sur lui dès lors que la sentence était tombée. En vérité, c'était un peu ça et ç’avait été un sacré coup de massue sur le moment. C’est pas triste, non. C’est… dommage. Ouais, il aimait penser comme ça, parce qu’il n’était pas triste quand il pensait à tout ça, en colère oui, encore pas mal, déçu et dégouté, énormément. Parce qu’il avait encore de belles choses à faire, dans le sport, dans différentes associations qu’il parrainait, différents contrats qu’il avait à cœur d’honorer. Dommage donc que tout se soit arrêté aussi vite et que dès que le mot accusé avait été prononcé, on lui ait aussi violemment tourné le dos. Même la femme qui partageait sa vie. Oui, c’est fini. Si la personne qui partage ta vie n’est pas là pour te soutenir dans les pires moments, il faut savoir la laisser partir. L’amour, c'est pas seulement quand tout va bien. Il était plutôt catégorique sur ce sujet. Peut-être que c’était plus simple de résonner ainsi parce qu’il n’avait pas de sentiments aussi fort, si ç’avait été une autre histoire, une autre femme, il aurait réagi différemment. Si sa vie était à une époque faite de flashs et de glamour, celle de Tahlia était loin d’être tranquille non plus, Ash avait ainsi bien compris, elle était tombée enceinte une deuxième fois, mais avait perdu le bébé. C’était un sujet très personnel dont elle lui parlait, il ne chercha pas à être plus intrusif, il posa simplement sa main sur celle de son amie et la serra doucement. C’était toujours une épreuve. Mais il ne laissa pas la gêne s’emparer d’eux, il fit un peu d’humour auquel réagit en riant. La mienne ne l'est plus non plus. Et c’est très bien comme ça. Ça ne lui manquait pas, les paparazzis, les commentaires non sollicités, les désagréments de la célébrité. C’était fou comme on retombait vite dans l’anonymat, ici à Bowen, il arrivait qu’on le reconnaisse, que certaines personnes se soient montrées curieuses, mais il n’avait pas subi grand-chose. Peut-être aussi parce que c’était une petite ville, mais il appréciait grandement cette tranquillité. C’était paisible, exactement ce qu’il attendait de cette nouvelle vie, la paix. Ils auraient pu continuer, mais le boxeur était, comme souvent, un vrai éléphant dans un magasin de porcelaine, tout vola dans sa minuscule cuisine. Une chose en plus qui l’agaçait en vivant dans cette caravane. La brune se sentit obligée de l’aider, de prendre soin de lui, de regarder sa plaie et il finit par se laisser faire. Parce qu’après tout, ce n’était pas si désagréable. Il sourit à sa réflexion. Péter des murs, ça vaut une bonne séance de boxe ! Ça te changerait. Tu vas toujours à la salle ? Elle était si douce, dans ses gestes, comme si elle faisait ça tous les jours. Peut-être parce qu’elle était maman à présent. Oh vraiment ? Ça t’irait bien. Surtout la blouse blanche. Qu’il ajouta en haussant un sourcil, c’était un vrai gamin. Mais il ne mentait pas, il pensait réellement que c’était une bonne idée. Et il reprit son sérieux quand elle lui avoua qu’il était le premier à qui elle en parlait. Ton secret est sauf avec moi. Puis c’est pas comme si j’allais en parler à quelqu’un, je ne connais plus personne ici. Enfin presque, le monde était tout petit, mais il n’était pas du genre commère de village. L’ancien champion initia un rapprochement en laissant ses yeux s’attarder sur le corps de Tahlia. C’était plus fort que lui, quand elle était trop proche, il s’embrasait. Elle lui sourit en lui demandant de ne pas la regarder ainsi, mais lui ne souriait pas. Pourquoi ? Il connaissait la réponse, mais il avait envie de l’entendre, tandis que son regard plongeait dans celui de la jeune australienne. Il hocha furtivement la tête et se rapprocha de quelques millimètres. Et c’est un problème ? C’était un problème pour le plat qu’il avait réussi, par miracle, à ne pas faire cramer. Mais à ce moment-là, il s’en foutait parfaitement.

Après tant d'années sans se voir, Asher et Tahlia avaient eu leur lot de casseroles, de désillusions, de déceptions, de hauts, de bas, d'histoires d'amour passionnels et parallèlement, de chagrins d'amour. La brune esquissa un sourire aux mots du boxeur, hochant doucement la tête quand il disait que l'amour, ce n'était pas seulement quand tout allait bien. « C'est dans ces moments-là, malheureusement, que l'on voit si c'est la bonne ou non. » De son côté, elle avait eu la bonne personne, celle qui la soutenait alors qu'elle était au plus bas. Mais elle avait fui, elle l'avait abandonné, lâchement. D'ailleurs, elle en parla à demi-mots, de ses histoires de cœur, de ses grossesses, de l'épreuve terrible qu'elle avait vécu et qui planerait à jamais sur elle. Son sourire se fit ému quand Asher serra sa main, le remerciant intérieurement de ne pas rebondir, de juste écouter. Elle n'en parlait pas souvent, Tahlia. Mais avec Ash, elle se sentait en sécurité, sachant très bien qu'il ne franchirait pas la limite du voyeurisme ou de la curiosité malveillante. Ils s'écoutaient et se respectaient mutuellement. Alors qu'ils comparaient leurs vies (un poil misérables), Tahlia lâcha un rire, plus léger, alors qu'elle confiait que la sienne, au moins, n'était pas scrutée par tous. La réponse du quarantenaire réveilla d'autres questions en elle. « ça ne te manque pas du tout, tout ça ? La célébrité ? Les paillettes ? » Elle se doutait déjà de sa réponse. Ash, c'était le gars qui vivait simplement (enfin, c'était celui qu'elle connaissait, elle!), qui voulait simplement mener sa passion sans faire de vagues. Elle se demandait si la célébrité lui était monté à la tête et s'il venait à la regretter. S'il était venu à Bowen, c'était sans doute parce qu'il n'y avait aucun regret : il fallait accepter de venir se perdre dans un patelin comme celui-là ! Mais Bowen, c'était le symbole de la tranquillité, de la sérénité. Ce n'était pas très grand. Ils se connaissaient en majorité. C'était bien pour recommencer une nouvelle vie. Une nouvelle vie qui naissait dans cette maison à rebâtir, dans cette caravane, pour l'instant, bien trop petite. S'il y avait une chose qui ne changeait pas avec les années, c'était la maladresse d'Ash. Des assiettes cassées et une brûlure plus tard, la jeune femme s'empressa d'aller observer la plaie. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire alors qu'il parlait de péter des murs. « C'est un bon exutoire. » Elle hocha doucement la tête à sa question : « Je recommence tout juste à y aller. Ça me manquait beaucoup trop. » Ces dernières années, sa vie et son état d'esprit l'empêchaient de s'adonner à cette activité. Maintenant que tout reprenait place chez elle, elle pouvait s'octroyer ces moments précieux. Elle réfléchissait à du renouveau, beaucoup de renouveau. A commencer par ce projet de reprise d'études. Elle rêvait d'être infirmière, Tahlia. Elle éclata d'un grand rire joyeux aux mots d'Asher. « C'est surtout pour la blouse blanche, évidemment ! Après l'uniforme de policier, il ne me manquera plus que celui de pompier et j'aurai fait le trio gagnant des fantasmes. » Même si en vrai, elle savait que la tenue réelle des infirmières était bien loin de celle si fantasmée. Elle rit de plus belle, reportant son attention sur la plaie, se faisant plus sérieuse quand il reprit la parole. Elle releva les yeux vers lui et dit : « Ce n'est pas un secret. C'est juste que le dire à voix haute, ça donne plus de corps à ce projet qui, pour l'instant, n'était que dans ma tête. » Et c'était beau qu'elle le dise face à lui. Elle s'en fichait qu'on l'ébruite ou non. C'était une belle envie. Il y en avait une autre, de belle envie. Si proche de lui, elle sentit son regard sur elle et cette alchimie qui reprenait vie. Elle sentait cette douce chaleur en elle, son corps qui se rapprochait du sien, comme un aimant.Cela ne changeait pas, en dépit des années. Elle était toujours aussi sensible au charme du beau Robertson. « Parce que ça me plaît toujours autant quand tu me regardes comme ça... » Parce qu'il avait ce regard à la fois mystérieux, à la fois de braise. Et cela la faisait craquer. Etait-ce un problème ? Oui. Oui, parce qu'elle venait de quitter son petit ami. Oui, parce que sa tête, son corps et son cœur réclamaient son italien préféré. Elle aurait pu le dire à voix haute, tout cela. Mais de ses lèvres franchit un : « Non... ce n'est pas un problème. » Et sur ces mots, elle plaqua son corps contre le sien et déposa ses lèvres sur celles du boxeur. Au diable la raison. Au diable le cerveau qui tournait toujours à mille à l'heure. A cet instant, il n'y avait que lui qui comptait. Ash, c'était sa liberté, la plus belle des pauses dans une vie trop trépidante...

tw : tension sexuelle

Est-ce qu’Asher s’était seulement dit une seule fois que Maggie pouvait être la bonne, la femme de sa vie ? Il était fort probable que non, il avait mis le nez dans cette relation et s’était laissé porter. Il fallait bien admettre que la première fois qu’elle s’était retrouvé dans ses bras, il avait un peu halluciné, il avait eu du mal à y croire. Elle, l’actrice ultra-glamour que tout Hollywood s’arrachait, que les autres femmes enviaient, que les hommes désiraient, elle avait passé la nuit avec lui. Lui qui, à l’époque, ne connaissait pas grand-chose au glamour, mis à part les quelques contrats publicitaires auxquels il était lié, on l’habillait bien, on le faisait paraitre plus beau que ce qu’il était. Il était assez mal à l’aise dans ce milieu, il avait l’impression d’être un pantin. Maggie lui avait appris à évoluer dans cet univers, elle lui avait façonné une image, avec patience et douceur, sans jamais le forcé. Il s’était trouvé beau quand elle défilait à son bras, elle l’avait rendu beau. Mais ça ne faisait pas d’elle l’amour de sa vie. Ils avaient cette relation particulière qui leur convenait à tous les deux. Il hocha donc la tête pour répondre à Tahlia, il savait déjà que l’actrice n’était pas la bonne, mais il n’aurait pas pensé qu’elle puisse avoir si peu de considération pour lui, ça, c'était sûr. Visiblement, pour l’ancienne flic, il y avait bien plus de sentiments en jeu, donc plus de dommages à subir. Il était toujours là pour écouter, sans jugement, sans insister, il la laissait lui confier ce qu’elle avait sur le cœur. Heureusement, ils arrivaient toujours à finir par en rire, il fallait bien avouer que leurs vies amoureuses étaient de sacrés chantiers, mais, après coup, ²il valait mieux le prendre avec le sourire. Le meilleur restait à venir, au moins pour la brune. Asher prit quelques secondes pour réfléchir à sa question, est-ce que sa vie glamour lui manquait ? Mais il finit rapidement par esquisser un rictus et secouer la tête. Je t’avoue que me faire bichonner par des maquilleuses, habiller par des fringues qui valent le salaire de monsieur tout le monde, faire la fête avec DiCaprio, c’était plutôt stylé. Mais c’est quoi… une infime partie de cette vie. Le reste, franchement, c’est pas des paillettes tous les jours, ce sont surtout des emmerdes et des gens sur ton dos. Alors nan, ça ne me manque pas. Au fond, ce qui lui manquait le plus c’était la boxe, la compétition, c’était ça, sa vie, c’était ce à quoi il avait été arraché bien trop tôt à son goût. C’était le deuil de cette vie-là qu’il devait faire. Depuis, en effet, il s’en prenait aux murs de sa maison, c’était un exutoire comme un autre, oui. Il sourit en hochant la tête. C’est une bonne chose, on s’y croisera peut-être ! Tu connais le chemin des vestiaires, des hommes en plus. Qu’il ajouta avec un mince sourire, rappel de leurs premières rencontres, quand ils ne prenaient pas la peine de se voir en dehors de la salle. À quoi bon quand leurs corps à corps pouvaient se faire dans l’espace confiné d’une douche après le sport. En parlant de fantasmes et de corps à corps, assurément que quand Tahlia évoqua son rêve de reconversion, Asher ne pu rester sérieux au sujet de la blouse blanche. Et elle réagit sur le même ton, ce qui le fit rire un peu plus. C’est vrai que je n’ai jamais connu la Tahlia policière avec l’uniforme. Tu as toujours tes menottes ?! C’était évidemment une blague, il était joueur, mais pas forcément dans le délire de la soumission. Il redevint sérieux lorsqu’elle osa avouer que ce projet restait un rêve, qui lui faisait un peu peur. Tu peux tout accomplir, ça ne fait aucun doute. Elle pouvait d’ailleurs tout aussi bien le rendre fou, tandis qu’elle rivait ses grands yeux à ceux du boxeur. Il avait initié ce rapprochement, ils se doutaient tous les deux que la soirée se terminerait ainsi. Mais il était encore tôt, ils auraient pu dîner, se parler encore, se retrouver autrement que physiquement. Seulement la tension était toujours trop forte et Asher n’était pas connu pour sa patience. Il esquissa un sourire quand elle avoua que son regard sur elle avait toujours autant d’effet. J’peux arrêter de te regarder alors. Il passa sa langue sur sa lèvre inférieure, sans la quitter des yeux pour autant, ajoutant à ça sa main qui s’invita sur la cuisse de la brune et remontait dangereusement. Ash n’avait jamais été mauvais pour montrer qu’il désirait quelqu’un. Et Tahlia, ce soir, était exactement celle qu’il voulait. Il sentait bien qu’elle se retenait dans un ultime recul, qu’il y avait énormément de bordel dans sa tête, mais elle céda néanmoins, elle se plaque contre lui. Ses lèvres avaient un goût sucré qui se mélangeait à celui du houblon. Il lui rendit son baiser en refermant ses bras autour d’elle, en remontant ses mains dans son dos, dans sa nuque, ces retrouvailles étaient trop bonnes et le désir du brun montait en flêche, balayant tout sur son passage.