In this world, it's just us - Léo

PARIS - Juillet 2022 - La ville de l’amour. Je ne sais pas qui a trouvé ce surnom, mais visiblement cette personne n’a jamais mis le nez dans le RER A en heures de pointe. J’ai du mal à me remettre de cette agression envers l’intégralité de mes sens. L’odeur, le bruit, la proximité avec les autres : une horreur. Je me note de prendre un taxi à l’avenir. Option plus coûteuse pour mon portefeuille, mais pour mon confort et ma santé mentale cela n’a pas de prix. En sortant de ma station, je marche vers le Musée du Louvre d’un pas décidé en suivant l’itinéraire sur mon téléphone. Voilà trois jours que j’ai quitté Bowen en direction de l’Europe. J’avais envie de changer d’air alors, sur un coup de tête, j’ai pris le billet d’avion le plus intéressant. J’ai téléphoné à mes parents pour les prévenir de mon départ. Ils sont les seules personnes à qui j’ai besoin de signaler mes déplacements, sinon je suis libre comme l’air. Ils sont habitués à mes extravagances, mais quand même, je ne veux pas qu’ils s’inquiètent. Sans destination prise, je me suis laissé guider. Habituellement, je vise plutôt l’Espagne pour voir ma famille ou l’Italie pour manger de bonnes pâtes. Un peu de changement ne peut pas me faire de mal et puis la gastronomie française à bonne réputation. Je suis certaine de réussir à m’épanouir dans ces conditions. C’est la première fois que je viens en France, je suis plutôt curieuse de découvrir ce pays. Naturellement, je commence par visiter les endroits les plus connus de la capitale. Ayant passé ma première journée dans ma chambre d’hôtel à m’habituer au décalage horaire, le temps est venu que je bouge. Je suis cependant un peu découragée par la file d’attente que je découvre devant l’édifice en forme de pyramide. Je ne suis clairement pas la seule touriste désirant voir la Joconde en cette période de vacances. Je lâche un long soupir. Moi qui voulais profiter de la fraîcheur de l’édifice pour échapper à la chaleur collante de cette journée d’été. Pourtant, je ne porte qu’une légère robe aux couleurs claires et j’ai tout de même chaud. Grr… Je n’ai pas la patience d’attendre aussi longtemps pour pouvoir entrer. Je décide donc de continuer mon chemin. J’avance sans trop savoir où aller, je flâne un peu. Je me balade dans le Jardin des Tuileries avant de repérer un banc à l’ombre. Je me pose dessus les jambes croisées. Presque par automatisme, je sors un roman de mon sac et commence à lire. Je me sens à l’aise et détendue, contente d’avoir quitté ma maison pour échapper au stress de mon quotidien.

Juillet, vacances d'été pour les français, la meilleure période pour profiter de Paris, celle que Léo avait choisie pour s’enfuir de Bowen. Il avait pris son fils sous le bras, trois semaines loin de tout, alors que ce n'étaient pas les vacances en Australie, Alba avait hurlé, il n'avait pas écouté. Il avait juste promis d'être revenu avant fin août, avant l'anniversaire de Jonah, il n'était pas un monstre non plus. Ce n'était pas de sa faute, au photographe, si une bonne partie de sa famille vivait à l'autre bout du monde, il essayait de choisir les bons moments pour leur rendre visite. Et clairement, cet été, alors que l'un de ses cousins organisait une grosse cousinade lors du troisième week-end de juillet, c'était le moment parfait. Et puis il fallait qu'il quitte Bowen, qu'il s'éloigne de son ex, de tous les endroits de cette ville qui lui rappelait qu'il l'aimait, qu'ils s’aimaient et qu’ils avaient pourtant tout piétiné, foutu au feu. Elle l’avait trompé, lui, Léo Emerson, jamais on ne l'avait trompé, lui il avait trompé bien trop souvent, mais l’inverse, jamais. Néanmoins, Alba, elle s'en foutait pas mal et de toutes les femmes qui avaient partagé sa vie, elle était bien la seule à être capable de lui faire cet affront. Ça avait grandement égratigné son égo, il fallait l’avouer. Et il s’employait, depuis lors, à se prouver qu'il pouvait séduire le plus de femmes possible. Alors Paris, Paris ! Ville de l’amour et du romantisme, évidemment que c'était le meilleur endroit sur terre. Il était là, dans cette ville qu'il adorait, avec sa belle gueule un peu triste, mystérieux donc, avec son accent australien mais un français presque parfait, à faire tourner la tête aux jolies parisiennes. La journée, il était le papa attentionné qui passait du temps avec son fils, il lui avait fait visiter la Tour Eiffel, Versailles, la Cité des sciences,... Et le soir, souvent, il laissait Jonah à sa cousine chez qui il vivait, pour sortir, s’abrutir, danser, prendre un verre. Parfois il ne rentrait que le lendemain, au petit matin, il faisait toujours attention à être de retour avant le réveil de son enfant, il ne voulait pas l'inquiéter par son absence. Il avait l’impression d'être un père en carton, démissionnaire, qui se noyait dans l’alcool et les femmes. Alba le lui faisait ressentir quand il l’appelait pour lui donner des nouvelles de leur progéniture. Pourtant elle ne savait pas la moitié de ce qu'il vivait ici. Mais il n'arrivait pas à faire autrement, il avait toujours fonctionné ainsi quand ça n'allait pas. En cette fin d’après-midi, le petit garçon était au cinéma avec deux cousins, Léo en avait profité pour aller au Louvre. Il avait bravé la foule et filé voir l'un de ses tableaux préférés, Le Radeau de La Méduse, entre autres. En ressortant il passait par le jardin des Tuileries pour profiter de la douceur avant de rentrer. Paris en été c'était, certes, pas mal de touristes,  mais surtout moins de parisiens donc une certaine tranquillité, alors l’australien flânait, il profitait, la chaleur ne le dérangeait pas, au fond, l’été à Bowen était bien plus chaud. Il passa devant cette fille et son bouquin, ce fut d’abord sa robe qui dansait avec la brise, puis son air sérieux, presque boudeur quand elle lisait, toute l'attitude de cette inconnue qui le poussa à s'approcher. Emerson n'était pas timide, ça ne l'avait jamais effrayé d'aborder une parfaite étrangère. “C’est drôle, je pensais que tous les étrangers etaient dans le Louvre à cette heure-là.” Il avait parlé d’un bon français mais avec son accent qui le trahissaient néanmoins. Il y avait de fortes chances pour qu'elle soit étrangère, le titre de son roman était en anglais, mais rien ne disait qu'il ne se trompait pas. Dans tous les cas il avait attiré son attention puisqu'elle relevait la tête alors il lui offrit un sourire polie.

@Aleksandra Martillo

J’ai toujours aimé voyager. Partir seule à l’autre bout du monde : cela ne me fait pas peur. Bien au contraire. J’en ai besoin : Au moins une fois par an. Je m’envole et je laisse mes soucis, mon stress à la maison. Flâner et découvrir de nouvelles villes, c’est le meilleur moyen pour souffler, pour ralentir. Prendre le temps d’écouter mes envies et mon corps sans courir après la boucle infernale du quotidien. C’est un peu comme s’offrir une parenthèse où rien de compte à part soi-même. Je le recommande grandement à toutes les personnes qui peuvent souffrir d’anxiété. Enfin, cela fonctionne pour ma petite personne et ne remplace pas un vrai suivi médical, mais ça m’aide. Me croiser à Paris en ce mois de juillet n’est donc pas surprenant. Frustrée par la file d’attente présente à l’entrée du Louvre, je me rabats sur une promenade. Il va falloir que je me lève plus tôt, demain, pour être dans les premiers arrivés et pouvoir me faufiler à l’intérieur avant la masse de touriste. Il est hors de question que je passe à côté de cette visite. J’y tiens, pour ma culture. Abandonnant mes plans d’origine, je me pose sur un banc. Il y a moins de foule dans ce parc, je suis plus à l’aise. J’en profite pour me détendre et sortir un livre de mon sac. Je ne pars jamais sans un roman. Certes, il pèse parfois lourd et le trimballer partout tire un peu sur mon dos, mais cela en vaut la peine. J’aime bien ce genre de moment où je m’assois juste dans un coin ou dans un café pour me plonger dans une histoire. Cela aide à passer le temps dans les transports aussi. Du moins, quand j’ai assez d’espace. Je suis plongée dans une enquête policière palpitante quand une voix m’interpelle. Je suis à deux doigts de percer le mystère lorsque je lève la tête vers cet inconnu. Mon visage ne doit pas sembler très amical. Je n’aime pas être coupé dans ma lecture. Mais je m’adoucis alors que mon cerveau analyse ses mots, concentrée. Je réponds en anglais : « J’aimerais bien, mais justement. Ils sont trop nombreux. Je préfère éviter de me faire marcher dessus. » J’ai une assez bonne compréhension orale pour saisir le sens de la phrase, mais je ne suis pas suffisamment exercée pour répondre dans la même langue. Je préfère ne pas prendre le risque de dire n’importe quoi. Je trouve perturbant qu’on m’aborde en supposant que je sois étrangère, mais sans utiliser le langage international. « Comment vous avez su ? Que je ne suis pas du coin ? » Je demande curieusement. Physiquement, je suis plutôt passe-partout : pas si loin de la morphologie des femmes France. Après tout, j’ai des origines européennes et les Australiens ne sont pas non plus si différents. Je lève le regard vers mon interlocuteur. Ses yeux bleus attirent instantanément mon attention. Je lui offre mon plus beau sourire. « Je m’appelle Aleksandra, enchantée. » J’essaye en exerçant un Français approximatif.

@Léo Emerson  

Léo avait toujours considéré Paris comme sa deuxième maison. S’il adorait voyager, s’il avait vu les plus beaux endroits de cette Terre, ses photos en étaient le témoignage, La France et sa capitale avaient cette place particulière dans son cœur. Il aurait aimé y vivre au moins un temps. Il y avait pensé, quand il était plus jeune, faire ses études d'art à Paris, étudier les plus grands peintres, les photographes renommés, se servir des parisiennes comme modèles. Il se serait pris une petite chambre de bonne comme on voyait dans les films, il aurait bu du vin, mangé du fromage à tous les repas et fumé des cigarettes lors de longues conversations avec des personnes inspirantes. Il aurait fait l'amour à toutes les jolies filles de cette ville. Oui, il avait rêvé de cette vie de bohème. Mais la France était loin et à cette époque il ne se voyait pas vivre sans ses copains de Bowen. Ça ne l'empêchait pas de venir régulièrement, tous les ans ou tous les deux ans. Il avait un lien particulier avec ses cousins et il essayait de profiter de ses grands-parents tant qu'ils étaient encore là. Cet été c'était encore différent, il voulait juste échapper à sa vie, à son quotidien, profiter. Avec son fils comme compagnie, ce n'était pas toujours idéal, non pas qu'il n’aimait pas passer du temps avec lui, mais il lui rappelait toujours terriblement son ex. Jonah était le portrait craché de Léo, physiquement en tout cas. Pourtant dans son attitude, dans sa façon de parler parfois, il avait beaucoup d’Alba, ce qui n'était pas étonnant puisqu'elle l'avait quasiment élevée seule les premières années. Et encore aujourd'hui, mère et fils avaient ce lien vraiment particulier. C’aurait été plus simple de partir sans lui, mais le jeune papa avait aussi envie de passer du temps avec son garçon. Cet après-midi il n’y pensait pas, tandis qu'il sortait tranquillement du Louvre et qu'il se baladait dans les jardins. Encore moins lorsqu'il remarqua cette jolie fille sur son banc. Il la dérangeait, il le remarqua à son air peu aimable, tant pis, elle s’en remettrait. Et puis visiblement elle n'était pas contre lui adresser un mot. Ou alors elle était juste très polie. Emerson avait bien vu, elle n'était pas française, puisqu'elle lui répondit en anglais, dans un accent qui lui semblait bien trop familier. Il reprit lui aussi dans sa langue natale, pas besoin de trop en rajouter, il avait son attention. Il y a une entrée secrète, pour éviter la foule de la pyramide, si jamais ça peut vous intéresser ! Il sourit doucement en retirant ses lunettes de soleil. Elle le fixait avec curiosité. Peu de françaises lisent leurs romans en anglais. Qu'il répondit le plus simplement du monde. C'était une simple déduction, j'avais une chance sur deux. Léo ne cherchait pas à mentir ou à paraître trop malin. Un sourire faisait l’affaire, il en était convaincu. Le photographe était plutôt sûr de lui et de son charme. Et son sourire s’élargit lorsque la jeune femme, Aleksandra donc, se présenta en faisant l’effort de parler français. C'est charmant ! Enchanté Aleksandra, moi c'est Léo. Je peux m’asseoir ? A ce stade, elle pouvait évidemment refuser, auquel cas il passerait son chemin, mais il avait bien envie de faire la connaissance de cette fille.

@Aleksandra Martillo

Être coupée en pleine lecture, c’est un peu comme se voir voler la dernière part de gâteau. C’est frustrant et ça laisse un goût amer. Il m’arrive de m’énerver et d’envoyer bouler la personne qui ose me faire cet affront. Cette fois, je reste calme, intriguée par cet inconnu et son utilisation du français. Il y a un charme indéniable dans cette langue, les mots me semblent plus doux. Un simple « bonjour » devient presque sexy pour une oreille étrangère. J’aimerais parler cette dernière couramment pour en exploiter le plein potentiel. Sauf que je peine à en comprendre une simple phrase. Il me faut plusieurs secondes avant de répondre. J’ai abandonné l’idée d’aller au Louvre aujourd’hui et suis prête à renoncer à ma grasse mâtiné de vacances pour m’y rendre le lendemain afin d’éviter la foule. Comme par magie, Monsieur m’annonce qu’il y a une entrée secrète. Mon regard s’illumine. « Est-ce que vous dites ça dans le but de m’impressionner ou vous êtes sérieux ? » Je suppose qu’il y a un peu des deux dans sa démarche. Il veut se rendre intéressant, mais j’espère qu’il ne pousse pas le vice trop loin. Je serai déçue s’il n’existe pas vraiment de raccourci. « Bien sûr, que cela m’intéresse. » Je me pose de plus en plus de questions sur cet homme. D’où vient-il ? Comment peut-il connaître des astuces pareilles tout en ayant l’accent d’un étranger ? Un vrai mystère. Il a bien réussi son coup en attisant ma curiosité. Je n’ai plus envie de le remballer. Surtout lorsqu’il décide de retirer ses lunettes de soleil. Je découvre alors des yeux bleus. C’est définitif, je suis foutue. Je n’ai pas d’idéal en termes de physique masculin, mais ça, c’est en quelque sorte ma kryptonite. Je ne peux pas résister et tombe en pâmoison devant un regard clair. « Bonne remarque… » Le bougre est observateur en plus. Il est vrai que mon livre ne vient pas de la librairie du coin. J’aurai dû y penser avant de poser la question, c’est évident. Je cache ma légère gêne derrière un sourire avant de me présenter. Je fais l’effort de m’exprimer en français. J’essaye de montrer que je ne suis pas juste une touriste. « Enchantée, Léo. Non, ne prenez pas la peine de vous asseoir. » Il doit me prendre pour une folle. Je range le roman dans mon sac avant de me lever. J’enchaîne tout de suite : « Vous pouvez me guider jusqu’à cette fameuse entrée ? » Je ne perds pas le nord. J’espère faire connaissance avec lui sur le chemin. Le tout, en me laissant une porte de sortie pour l’abandonner s’il perd de son charme en cours de route. Ne jamais s’engager dans une discussion avec un inconnu lorsqu’on est une femme à l’étranger sans plan de secours. Aussi charmant soit-il.

@Léo Emerson  

Il fallait bien l'avouer, Léo adorait emmerder son monde, déranger un peu, jamais trop longtemps, jamais méchamment mais juste histoire de provoquer une réaction. Et déranger cette fille pendant sa lecture, ce n'était pas tellement un sujet, au pire, elle retirait sa dernière page, si elle avait vraiment été agacée, elle l'aurait envoyé sur les roses, mais il n’en était rien et au moins il avait obtenu son attention. Il savait bien que parler français avec son accent australien ça faisait réagir. Il fallait bien qu'il mette à profit ses années d’apprentissage de la langue de ses grands-parents maternels. Langue qu'on lui avait imposé gamin et dont il n'était pas vraiment fan au départ. À l'époque, enfant, Emerson ne réalisait pas tout le potentiel de séduction qu’il y avait dans le fait de parler la langue de Molière, pour lui c'était juste du travail en plus alors qu’il en faisait déjà beaucoup avec l'anglais, les maths,... ! À présent il était plus qu’heureux de pouvoir en retirer des bénéfices auxquels il n’aurait jamais songé avant. Évidemment lorsqu'il était en compagnie de sa grand-mère, elle trouvait toujours le moyen de le houspiller parce qu’à son âge, plus de trente ans, quand même, Léopold, il devrait être capable de parler français sans faire de fautes ! Elle était sévère avec lui, exigeante. Mais elle l’aimait tendrement, il le savait bien. Je suis parfaitement sérieux. Mais si ça vous impressionne alors c'est un bonus ! Ajoutait-il avec un sourire désarmant. Il n'avait aucun intérêt à mentir de toute manière. Et puis il n’avait rien inventé, ce passage était relativement connu des parisiens. Léo hocha la tête positivement lorsque la jeune femme affirma que ça l'intéressait. Avant de lui expliquer comment il avait compris qu’elle n'était pas d'ici. Visiblement elle était piquée, de mieux en mieux. Il savait qu'il pouvait avoir cette capacité à séduire et à agacer en même temps, souffler le chaud et le froid, c'était tout un art. En vérité tout ça l’amusait beaucoup, il avait besoin de légèreté, d’oublier ses problèmes et sa vie misérable pour quelques minutes, ça lui faisait du bien. Tandis qu'il tentait une approche, Aleksandra préféra ranger ses affaires et se lever pour le suivre. Emerson esquissa un sourire et n'ajouta rien de plus avant qu’ils se mettent en marche. Ça vous arrive souvent de suivre de parfaits inconnus dans la rue ?! Qu'il demanda innocemment en fourrant ses mains dans les poches de son jean tandis qu'il la regardait avec curiosité. Le photographe guida la jolie touriste jusqu'à la station de métro Palais Royal - Musée du Louvre. Il faut descendre ici. C'est pas un plan foireux, ne vous en faites pas. La plupart des visiteurs veulent entrer par la grande porte, la pyramide est certes impressionnante, mais si on passe par le Carrousel, on évite une longue queue. Il peut y avoir un peu d'attente par ici, mais jamais autant que par en haut. Il lui expliquait tout ça tout en s'engouffrant dans la bouche de métro puis en bifurquant pour se diriger vers l'entrée du carrousel. C’est votre première fois à Paris ? Léo ouvrit la porte pour que la brune puisse passer avant lui. Par ici ! Il la guidait avec un mince sourire sur les lèvres, c'était plutôt agréable de jouer le guide touristique.


@Aleksandra Martillo

Je suis une âme sociable. J’apprécie toujours de rencontrer de nouvelles personnes, même si je ne suis pas très loquace au premier abord. Les découvertes que l’on peut faire au détour d’une conversation me fascinent. Il y a toujours des informations à tirer d’un dialogue. Seulement, je fais rarement le premier pas. C’est difficile d’aller vers un inconnu pour entamer la discussion. Je ne sais pas faire, c’est comme ça. C’est dans ma nature. Alors quand un inconnu vient me parler, je lui laisse le bénéfice du doute. Même s’il interrompt ma lecture, ça me fait mal de l’avouer. J’ai souvent affaire à des hommes un peu lourds, qui me draguent sans aucune finesse. Or, ce Léo a les arguments. Je ne parle pas seulement de son physique avantageux, mais aussi de ses mots. De sa proposition. Me montrer une entrée secrète du Louvre. Et le placard secret aussi ? Ola, je vais trop vite en besogne et mon esprit s’égare pendant quelques secondes. Je suis tellement emballée, mais je reste sur mes gardes. Peut-être qu’il se fiche de moi. Je rigole doucement. M’impressionner n’est qu’un bonus, hein ? Pourtant, il sait s’y prendre ! Il est frustrant, je n’arrive pas tellement à le cerner. Et j’ai envie d’en savoir plus... Si bien, que je l’empêche de prendre place sur le banc à mes côtés. Si ça le perturbe, il n’en montre pas la moindre trace. Moi qui espérais le déstabiliser, c’est loupé. Je plie bagage avant de le suivre. « Tous les jours ! Comme Alice au pays des merveilles et son lapin blanc. Un vrai trip ! » J’essaye de faire de l’humour, mais je me sens un peu ridicule. Qu’est-ce qui me prend ? Je suis peu sûre de moi tout à coup. « Non, en vérité, jamais. Mais vous ne ressemblez pas à un serial killer. » Est-ce qu’ils ont vraiment un comportement ou un physique atypique quand on y pense ? Ils sont comme monsieur et madame tout le monde. Sinon, ils ne seraient pas capables de commettre autant de crimes. Je suppose. Plus j’y réfléchis, plus mon acte semble déraisonnable. Surtout lorsque le beau brun me désigne une station de métro. Je repense à mon expérience de proximité forcée avec tout un tas de gens le matin. Plutôt marcher que de remonter dans cet engin. « Pas un plan foireux ? J’attends de voir ! C’est vrai que la vue est belle là-haut. J’espère qu’on va pouvoir entrer sans trop attendre. » Ou je vais juste y passer, en fait. S’il a réellement de mauvaises intentions, je plonge dedans : tête la première. Ou plutôt : le pied. Car je descends prudemment les marches une à une. D’abord, pour ne pas tomber ensuite pour prendre le temps d’observer les environs. Je vois les indications qui mentionnent son fameux carrousel. Il ne se fiche pas de moi. Soulagée, je retrouve mon sourire. « Oui, première fois à Paris et en France aussi. Vous, en revanche, vous semblez être un habitué ? » Je suis curieuse d’en apprendre plus sur lui. Ses origines restent encore un mystère pour moi. Je passe devant lui alors qu’il me tient la porte. Galant, je note. J’exagère un peu le mouvement de mes hanches au passage, pour attirer l’attention, je suppose. Nous arrivons dans le hall commercial et j’aperçois la fameuse pyramide inversée. J’observe rapidement les lieux, impressionnée. « Superbe ! Et ensuite ? » Je continue d’avancer, mais sans vraiment savoir où me rendre. J’attends mon guide.

@Léo Emerson  

Léo était suffisamment bavard pour deux. Il ne manquait jamais d'idées, de sujets de conversation. Alors si cette fille lui souriait, c'était gagné, elle n'avait pas besoin d'être bavarde, il ferait le job. Et elle avait souri, un sourire timide mais qui illuminait son visage et la rendait terriblement charmante. Elle restait sur ses gardes pourtant l’australien pouvait voir qu'il avait piqué sa curiosité. Alors il s'engouffrait dedans, il ne la draguait pas, du moins pas directement, Léo n'était pas du genre gros lourd à mettre les deux pieds dedans, il savait faire preuve d’un peu de finesse et de mystère. Évidemment qu'il fut surpris que ce soit aussi simple de la faire se lever pour qu'elle le suive, mais peut-être que ça n’avait rien à voir avec lui et qu'elle était juste très intéressée par cette idée de passage secret. Espérons donc qu'elle ne soit pas déçue quand elle comprendra qu'il n'y avait rien de réellement secret dans tout ça, simplement un petit tip qui permettait de gagner un peu de temps. Léo était le roi de l’esbroufe, mais ça, elle l’ignorait encore ! C'est dangereux quand-même, Alice finit clairement droguée par son lapin et elle nous fait une sacrée hallu ! Libre interprétation du chef d'œuvre de Carroll par Emerson. Il fallait admettre que ce n'était pas son histoire favorite. Il esquissa un sourire amusé. J’imagine que c'est le cas d’à peu près tous les serial killers, non ?! Heureusement pour Aleksandra, en effet, Léo n’avait rien d’un tueur en série. Il remarqua qu'elle tiquait à la vue de la bouche de métro, effectivement il y avait plus glamour que ça, mais il fallait ce qu'il fallait. J’espère aussi, n’ayez pas peur, je ne compte pas vous faire prendre le métro. Léo lui-même détestait ce moyen de transport, il préférait marcher ou prendre un taxi. Il n'avait pas de problème d'argent alors autant profiter du confort et éviter la promiscuité autant que possible. C'était drôle comme, à l'autre bout du monde, au fin fond de l’Afrique ou de l’Amerique du sud, Léo ne pensait jamais à son confort, il vivait en véritable baroudeur et il adorait ça. Mais quand il se rendait dans les grandes villes occidentales, il faisait la fine bouche et passait pour un gosse de riche un peu trop tatillon, insupportable. Il y a avait une véritable dualité chez cet homme. Une partie de ma famille est française alors je viens régulièrement. Régulièrement, voulant dire une fois par an ou tous les deux ans, mais venant de l'autre bout du monde, ce n'était pas si mal comme fréquence. Vous avez fait un très bon choix, Paris est magnifique. Est-ce que vous aimez votre séjour ? Léo aimait Paris, c’était probablement l'une de ses villes préférées, pour diverses raisons, donc il ne pouvait que féliciter son choix. Ils arrivèrent aux portes du carrousel, le photographe n'avait pas menti, éternel galant, bien élevé, élevé pour séduire surtout, il ne manquait pas à ses principes et laissa la jeune femme passer devant lui. Il nota le mouvement de ses hanches, le langage corporel disait souvent plus que les mots. Ses lèvres s'étirèrent dans un mince sourire. Maintenant on marche encore quelques mètres et on sera arrivé à destination. Si vous avez envie de faire un peu de shopping en route, ne vous privez pas. C'était là tout le charme de flâner après tout. Et il y avait suffisamment de boutiques pour que la brune s’amuse si elle en avait envie. Ils se dirigeaient tout de même dans la direction de l'entrée du musée, marchant tranquillement, sans se presser.

@Aleksandra Martillo

Alice au pays des merveilles. Une belle œuvre, d’un auteur clairement talentueux. Seulement, il faut bien reconnaître que toute l’histoire ressemble à une belle hallucination collective. La chenille est particulièrement perturbante, sans parler de la dame de cœur qui est flippante à vouloir couper la tête de tout le monde. Je suis bien d’accord avec Léo sur ce point. Je rigole doucement. « Oui, ce n’est pas très malin. » J’espère ne jamais vivre une mésaventure dans ce genre, ne pas être attirée dans un lieu sordide. Habituellement, je suis prudente avec les inconnus, mais ce brun m’inspire confiance. Sa façon de m’aborder a éveillé ma curiosité et je ne peux m’empêcher de le suivre, pour voir où cela peut me mener. La première étape est le Louvre que j’espère découvrir. Je plaisante en expliquant qu’il ne ressemble pas à un tueur en série. « Je suppose. Je n’en ai jamais rencontré… » Du moins, je crois. Il est vrai qu’ils peuvent être n’importe qui. Est-ce que nous connaissons vraiment nos voisins ? Peut-être que le vieux monsieur qui promène son chien tous les matins à quelque chose à cacher dans le fond de son jardin ? Qui sait ? Je préfère me changer les idées alors que je suis justement en train de suivre une personne, je n’ai jamais croisé auparavant dans une bouche de métro. Surtout que je déteste cet endroit. Cela doit se voir sur mon visage, car Léo me rassure. « Heureusement ! » Pour rien au monde, je ne veux pas remettre les pieds dans les transports en commun de ce pays. Je suis déterminée à me déplacer en taxi à présent. J’ai fait l’expérience à la Française, je suis vaccinée. Nous avançons vers notre destination et j’explique que c’est ma première fois en France. Pour le moment, ce que j’ai vu du pays est plutôt sympathique. Je me suis surtout baladée dans la capitale, j’ai encore plein de choses à découvrir. « Ah ! Tout s’explique… Vous vous plaisez ici ? » Je comprends mieux sa capacité à parler la langue de Molière malgré son accent. Qu’il connaisse les astuces des locaux me surprend beaucoup moins tout à coup. « Oui, c’est vraiment beau. Mais je n’en ai pas encore assez vu pour me faire véritablement un avis. Je ne suis arrivée que depuis deux jours. » Il y a encore tellement d’endroits que je souhaite visiter… La galerie dans laquelle nous débarquons me coupe le souffle. Je ne m’attendais pas à débarquer dans un coin pareil au vu du chemin que nous avons arpenté. Mes connaissances de Paris sont encore approximatives et je suis contente de cette découverte. Je laisse mon regard se promener dans l’allée. Les lumières sont magnifiques. J’avance doucement, ne sachant pas quel couloir emprunter. Je souris au jeune homme. Si je commence à flâner dans les magasins, il ne sait pas dans quoi il s’embarque. Je suis capable de déambuler d’une enseigne à l’autre sans me lasser. Ce n’est pas le but de notre visite, alors je me contente d’observer. Lorsque nous passons devant une boutique souvenir, je ne peux m’en empêcher. Je m’arrête et enfile une paire de lunettes de soleil. La monture est énorme, rose et flanquée du légendaire slogan : I love Paris. Je me tourne vers le beau brun. « Elles me vont bien ? » Je lâche un petit rire en jouant avec mes cheveux. Bien sûre, je ne suis pas sérieuse. Je repose ma trouvaille et passe au portant suivant. Celui des cartes postales. J’en choisis trois. « C’est une tradition, à chacun de mes voyages, j’envoie un petit mot à ma famille. » J’explique à mon guide. Il m’en faut une pour mes parents et une pour chacune de mes sœurs. Il faut qu’elles soient différentes, car je suis sûr que les dames Martillo se les échangent autour d’un repas. Comme ça, elles peuvent découvrir plusieurs décors. Je règle rapidement à la caisse et remercie le vendeur. Je reviens vers Léo et nous reprenons notre chemin. Arrivé devant notre destination, je propose : « Vous voulez venir voir les toiles à mes côtés ? » Je n’ai pas vraiment envie que nos chemins se séparent tout de suite.

@Léo Emerson  

Cette fille était rigolote, elle avait du répondant, elle avait tout pour plaire à Léo, excepté le fait qu'elle ne soit pas blonde. Mais il ne recherchait pas l’amour, après tout, il ne cherchait rien en vérité, mis à part se changer les idées et passer du bon temps loin de Bowen. En vérité, l'amour il l'avait déjà, au plus profond de lui il le savait, il l’avait compris, Alba était la femme de sa vie, Emerson l'avait accepté. Actuellement il le subissait, il avait envie de la haïr mais au fond il en était incapable et quelque part il savait qu'ils finiraient par se retrouver, un jour. Mais pas aujourd'hui. Cet après-midi il jouait le joli cœur avec cette parfaite inconnue aux traits qui lui semblaient hispanique bien que son accent n’en ait absolument aucune résonance. C’est votre jour de chance, je n’ai encore tué personne. Que Léo affirmait avec un sourire angélique. On lui donnerait bien le bon Dieu sans confessions, il fallait l'admettre. Face à cette bouche de métro prête à les avaler, il remarqua qu’Aleksandra était hésitante, autant elle n’avait pas peur de suivre un inconnu, mais visiblement le métro ne lui plaisait pas. Mauvaise expérience ? Il hasardait, cependant il fallait avouer que les transports Parisiens n'avaient pas la meilleure réputation, il ne pouvait pas l’en blâmer. Le photographe en apprenait un peu plus sur cette fille qui venait en France pour la première fois. Deux jours seulement ! Mais vous avez encore tout à découvrir ! Dans la précipitation Léo aurait pu lui proposer d'être son guide, mais il ne le fit pas, ils ne se connaissaient pas après tout. Et vous êtes ici toute seule ? Pas de copine, de sœur, de petit ami ? Glissé comme ça, l’air de rien, entre deux questions, ça passait plutôt bien. Ils arrivèrent dans la galerie et le brun proposa à la jolie étrangère du lèche vitrine si ça lui chantait, il avait un peu de temps à perdre et puis il aimait ça lui aussi, surtout aussi bien accompagné. Elle semblait hésitante au départ, il voyait bien que son regard furetait mais elle se contentait d'avancer. Jusqu'à cette improbable boutique de souvenirs dans laquelle elle attrapa la plus hideuse paire de lunettes et les essaya comme une vraie fashionista. Léo lâcha un petit rire amusé, il la trouvait déjà charmante, mais si elle le faisait rire, alors il était foutu. Elles étaient faites pour toi ! Qu'il affirma faussement sérieux. Sans réaliser qu'il l'avait tutoyée.  Il la laissait choisir ses cartes postales sans faire de commentaires. Lui aussi écrivait à ses proches quand il était plus jeune. Mais il avait arrêté depuis longtemps déjà, il faisait un effort d’en envoyer à son fils, quand il y pensait. À présent il avait des carnets de voyage, qu’il tenait religieusement et illustrait de croquis. Puis ils reprirent leur chemin jusqu'à la file d'attente. L’après-midi touchait à sa fin alors il n’y a avait pas grand monde. Léo allait laisser Aleksandra ici, quand elle lui proposa de rester. Il avait déjà visité le Louvre un peu plus tôt, il ne comptait pas rester. Et bien que sa compagnie fut agréable, il avait d'autres choses à faire. Je suis attendu, je dois te laisser là, ma mission est terminée. Mais profite bien du musée. Content de t'avoir rencontrée ! Il s’éloignait déjà, un sourire aux lèvres. Avant d'avoir une idée, il bifurqua vers la boutique de souvenirs, y rentra brièvement, puis retourna auprès de la brune qui avait avancé de quelques places. Il lui tendit un sachet en papier dans lequel était glissé la fameuse paire de lunettes et sur le papier, il avait écrit son numéro. Ç'aurait été dommage de ne pas les prendre ! Si tu as besoin d’un guide, ou de compagnie, n'hésite pas à m’appeler. À bientôt ! Et cette fois-ci, il la quitta pour retourner chez sa cousine et retrouver son fils, la réalité.

@Aleksandra Martillo

Clairement, les transports parisiens, ce n’est pas pour moi. Léo s’en rend visiblement compte quand nous descendons dans la bouche de métro. En même temps, le lieu ne fait pas vraiment envie avec ses carreaux censés être blanc, mais qui tirent plus vers le gris verdâtre. L’éclairage aussi donne une ambiance lugubre, digne d’un film d’horreur à petit budget. Vraiment, il n’y a rien qui va. Mauvaise expérience ? C’est peu dire. « Ce matin. J’ai eu le malheur de l’emprunter en heures de pointe. Entre les gens peu aimables et l’odeur de transpiration... Je ne veux pas y remettre les pieds. » J’explique à ce presque inconnu. J’en apprends doucement plus sur lui. Il a des origines françaises, cela démystifie tout. Sa façon de m’aborder et son aisance dans la langue du pays s’expliquent à présent. Je reste convaincu que son accent m’est familier. Il habite peut-être en Australie ? Je m’interroge sans vraiment oser poser la question, la garde en stock pour plus tard. Je lui raconte ensuite ma petite vie et mon arrivée à Paris qui finalement est très récente. L’intérêt pétille dans ses yeux alors que nous continuons de marcher. J’aime bien sa façon naturelle de glaner des informations sur ma personne. Il ne fait pas du rentre-dedans directement, il est presque subtil et je trouve ça rafraîchissant. J’ai le sentiment qu’il s’intéresse à moi, mais sans être lourd ou instant. C’est agréable. Je choisis d’être honnête avec lui, de lui donner sa chance en lui avouant que je suis célibataire. « Je suis venue seule, avec ma valise et personne à qui rendre de compte. » En réalité, c’est ça que j’aime quand je voyage ou même plus subtilement dans mon quotidien. Ma liberté. Pouvoir faire ce qui me plaît, à toute heure de la journée ou de la nuit, avec qui bon me semble. C’est ça la vie que j’aime et que j’ai décidé de mener. « Et vous ? Vous venez rendre visite à votre famille ? En solitaire ? » Je suis curieuse et beaucoup moins habile dans l’art de la conversation. L’important, c’est qu’il me réponde après tout. Mes intentions sont aussi claires que les siennes. Lorsque nous arrivons dans la galerie, j’ai des étoiles dans les yeux : émerveillée par l’architecture et la décoration. Il n’y a pas de regret d’avoir suivi Léo, qui n'est pas un tueur en série - Hallelujah. Il ne m’a pas entraîné dans un plan bizarre et je remercie mon instinct de lui avoir fait confiance. Il me propose de faire les magasins et je suis tentée. Seulement, le but de ma visite n’est pas là. Les peintures du Louvre m’attirent bien plus que les pièces de mode. Alors j’avance dans les allées, mon regard se balade tout de même sur les portants. Une boutique attire mon attention. Elle est bien clichée, faite pour les touristes. Je fonce dedans, comme une abeille vers une fleur : prête à butiner. Je saisis des lunettes et joue ma petite comédie auprès du beau brun. La paire est hideuse, rose, mais cela nous fait rire. « Je ne sais pas comment je dois le prendre ! » Je souris sans relever qu’il m’a tutoyé. J’apprécie, mais passe à autre chose pour ne pas briser le moment. Je continue et lui explique ma tradition pour les cartes postales. Les femmes de la famille Martillo me tirent les oreilles à mon retour, si je manque à mon devoir de correspondance. C’est un peu leur moyen de partager le moment à mes côtés, sans être présentes. Une fois mes achats réglés, nous arrivons rapidement devant la file menant à l’entrée du musée. C’est notre destination. Je propose de prolonger notre moment à l’intérieur. Il refuse et je lève un sourcil par automatisme. « Pas de soucis, je comprends ! Merci de m’avoir guidée jusqu'ici. » La déception me gagne et j’essaye de ne pas le montrer sur mon visage. « Ravie aussi... C’était sympa. » Ma phrase est à peine terminée que déjà, il s’éloigne. Je m’attarde sur sa silhouette qui disparaît rapidement. Notre rencontre fut brève et j’en suis un peu déçue. Cet homme est fort agréable, à regarder, mais pas seulement. Son tempérament m’a bien plu. C’est dommage de ne pas donner suite à cette rencontre. J’avance dans la queue, prête à ressortir mon livre pour patienter quand Léo réapparaît au coin de l’allée. Intriguée, j’attrape le sachet qu’il me tend. À l’intérieur, les fameuses lunettes sont accompagnées d’un numéro de téléphone. J’affiche un grand sourire et un petit rire s’échappe de mes lèvres. « Il ne fallait pas... » Je trouve son geste assez comique, mais super original. « Avec plaisir, à bientôt. » J’ajoute en français. Bien sûr que je vais l’appeler... Peut-être le lendemain ? Cette affaire ne peut être laissée sans suite et je suis impatiente de suivre mon nouveau guide à travers la ville. Possiblement dans ma chambre d’hôtel aussi ?

@Léo Emerson  Tu veux continuer ou on s'arrête là ?

La jeune femme avait visiblement été bien traumatisée par son passage dans le métro ce matin, pour sa défense, il fallait avouer que ce n’était pas l’expérience parisienne la plus glamour qu’il soit. Mais ça restait aussi l’un des moyens les plus simples pour se déplacer dans cette grande ville. Avec de bonnes chaussures et si on a le temps, il est possible de faire pas mal de choses à pied. Léo lui souriait, c’était facile à dire pour lui, il connaissait bien cette ville, ce n’était ni la première, ni la dernière fois qu’il venait à Paris, donc il se moquait bien de perdre du temps à marcher. Et puis il adorait flâner au gré de ses découvertes, souvent poussé par une belle photo à prendre. Mais il pouvait comprendre qu’une touriste qui venait pour la première fois avait peut-être envie de se déplacer un peu plus rapidement pour être sûre de voir ou faire tout ce dont elle avait envie. En discutant ils apprenaient à se connaître, en surface au moins. S’ils étaient allés un peu plus en profondeur, ils auraient appris qu’ils étaient tous les deux australiens, de la même ville et qu’ils avaient en plus des connaissances communes. Le monde était définitivement très petit. Mais Léo n’avait pas forcément envie de creuser, simplement de passer un bon moment sans prise de tête, sans aucun engagement non plus. C'était plus simple de quitter quelqu’un qu’on ne connaissait pas. Et peut-être qu’Aleksandra pensait la même chose que lui. Il apprit quand-même le plus important, elle était seule ici, sans attaches, sans copain surtout. C’était toujours bon à savoir. Il esquissa un mince sourire en baissant les yeux et ne fut pas surpris qu’elle lui retourne la question, c’était parfaitement naturel. Mes grands-parents sont âgés, je profite de venir et de passer du temps avec eux tant que j’en ai encore la chance. Disait celui qui n’était absolument pas avec ses vieux à ce moment précis. Pour sa défense, il faisait trop chaud à cette heure-là pour qu’ils sortent de chez eux, ils avaient besoin de leur confort. Puis il hocha la tête. Je suis seul, oui. C’était un mensonge, il avait emmené son fils avec lui, mais la question de la brune n’était pas dirigée ainsi, elle voulait savoir s’il y avait une femme qui l’accompagnait et la réponse était non. Parler de Jonah à une étrangère n’était jamais dans ses plans. Une fois dans la galerie, ils flânaient sans se presser, ils arrivaient à leur but mais cela signifiait que c’était la fin du voyage pour Léo, alors il profitait jusqu’au bout. Ils avaient l’air d’un parfait petit couple de touristes et le brun, facilement séduit, était sous le charme de cette jeune femme pétillante qui avait un bon sens de l’auto-dérision. A sa question concernant la réponse d’Emerson sur les lunettes, il se contenta de hausser les épaules avec un petit sourire en coin, elle pouvait bien le prendre comme elle le voulait, en vérité elle était craquante, mais ça, il n’allait pas le dire. Une fois hors de la boutique il l’accompagna jusqu'à la file d’attente puis la quitta, pour mieux revenir, dans un geste parfaitement charmant, il en était conscient. Léo était un séducteur plutôt doué dans son domaine, lorsqu'il voulait plaire à une femme, il savait s'y prendre et il était rare qu'il n’arrive pas à ses fins. Et à son sourire ravi, incompris qu’Aleksandra était séduite. Elles étaient faites pour toi. Il la quitta une seconde fois, mais un peu plus léger à présent. Il était probable qu'elle n’appelle pas, c'était un coup de poker, mais il prenait le risque. Le lendemain, dans l’après-midi, il reçu un message d’un numéro inconnu qui lui demandait s'il connaissait un endroit où prendre un verre le soir, signé Aleksy. Avec un sourire satisfait, il lui donna rendez-vous dans un bistrot à Montmartre. Le soir même, il arriva les mains dans les poches à l’adresse indiquée, cherchant la jolie brune du regard. Quand enfin il l'aperçut, il se fendit d’un sourire avant de s'allumer une cigarette et de la regarder s'approcher de lui dans sa jolie robe. Bonsoir, tu es très belle. Lui il avait juste passé une chemise blanche dont il avait retroussé les manches et un jean brut. Outfit

@Aleksandra Martillo