( #10 ) Fraises en chocolat.

Jack était dans son lit, nu, fixant le plafond tout en fumant son joint. Il était déjà bien défoncé, mais il s'enfonçait encore. Cela faisait deux jours qu'il n'était pas sortit de sa chambre, depuis dimanche en fait. Donc si vous savez bien compter, nous étions mercredi. Et à ce moment là, il était seul à l'appartement. Milo était partit faire quelque chose, il n'avait pas écouter. Non, il déprimait, simplement, purement. Il essayait de comprendre. De savoir pourquoi son cœur lui avait fait si mal dimanche. Pourquoi tout était si compliqué dans sa vie. Tout doucement, il lâcha un soupir mêlé à la fumée recrachée par ses poumons, tout en caressant du bout des doigts la cicatrice épaisse sur sa hanche, qui lui provoquait un frisson glacé dès qu'il y touchait. Soupirant une nouvelle fois, Jack écrasa ce qu'il restait de son joint dans son cendrier et il se leva pour ouvrir la fenêtre, lorsqu'on frappa à la porte. Inspirant doucement, le brun jeta un œil autour de lui, puis se regarda dans le miroir en plissant les yeux. Ouh, il n'avait pas bonne tête. Du moins, il ressemblait à un mec qui ne dormait pas depuis deux jours et qui faisait défonce sur défonce. Il était pâle, le teint un peu cireux, les yeux rouges mais cernés, la pupille éclatée. Lentement, Jack se dirigea vers le lavabo et aspergea son visage deux fois, avant de l'essuyer. Bon, il avait déjà l'air plus propre. Il mit un peu de déo, puis alla vers la porte, ayant considérablement oublié qu'il était nu. Mais il n'avait jamais été pudique, de toute manière. Inspirant doucement, il s'éclaircit la gorge avant d'ouvrir et aperçut une boite de fruits enrobés de chocolats. Méfiant, il saisit doucement le paquet avant de reculer, se demandant qui pouvait bien être là. Sidney. Lorsque celui-ci se montra à la porte, il lâcha un léger soupir. « Ah tiens, salut. Je ne m'attendais pas à te voir. » Il lui lança un faible sourire et posa les fraises sur la table du salon tout en attendant qu'il entre.

Jack vit la mine boudeuse de Sidney au moment où il posait les fraises, et il dut se retenir de lui envoyer un sourire mauvais. En fait, le genre de sourire qu'il lui a envoyer un retour lorsque son meilleur ami lui a sourit. Bon dieu. Ce sentiment d'avoir le cœur serré, d'avoir mal en lui, il l'avait en permanence depuis dimanche. Et ça le tuait. Lorsque Sidney lui demanda si il était accompagné, Jack devint un peu plus pâle et se tourna vers lui, les poings serrés.

- Pardon ? J'ai pas le droit de me promener chez moi comme je veux sans qu'il n'y d'arrières pensées ? Ouais je viens de me lever, mais j'ai pas dormi depuis samedi soir. Je.. J'arrive pas à croire que tu puisses me penser avec quelqu'un là !

Lorsque le sujet déviait vers le sexe, vers lui, Jack virait souvent au rouge. Il était très coincé sur le sujet et devenait encore plus impulsif. Il n'avait jamais aimé qu'on parle de ça, et le fait que son meilleur ami puisse le croire en compagnie d'un homme le dégoûtait. Il le regarda s'asseoir sur le canapé avec ce sourire satisfait, le genre de sourire qui montre qu'il ne partira pas. Tandis que lui, il était toujours prêt de la table, énervé, encore plus avec toute la drogue qui était dans son sang. S'emportant, il frappa sur la table.

- Toi par contre ! Toi tu te gêne pas pour ramener des inconnus chez toi ! C'est pas parce que toi tu baises tout ce qui bouge que tout le monde est comme toi ! Bouffe les tout seul tes fraises, j'en veux pas.

Secouant la tête, il partit dans sa chambre en claquant la porte et enfila un boxer, puis ouvrit finalement cette fenêtre. Il revoyait la scène de dimanche et ça le dégoûtait encore plus.

La colère qui le parcourait le rendait sensible, nerveux et violent. Il devenait beaucoup plus lunatique, et ne se rendait pas compte de ses gestes. Quand Sidney lui dit qu'il aimerait bien le voir avec quelqu'un, le brun serra les dents et secoua vivement la tête. La drogue dans son sang le rendait légèrement paranoïaque, et il se griffa l'intérieur des mains en claquant la table. Maintenant qu'il était énervé, et avec toute la drogue qu'il avait prit depuis dimanche, il devenait comme fou. Pas au point de faire un bad trip, mais pas si loin tout de même. « Non ! J'ai besoin de personne, je ne veux pas avoir quelqu'un, quand est-ce que tu vas le comprendre !? Vous voulez tous du sexe, tous ! C'est dégueulasse. Ouais, on s'est pas appelés de la semaine, par contre moi je t'ai vu, dimanche. »

Et il se mit à repenser à cette scène, lorsque la rage le prit de nouveau. Agacé, il partit dans sa chambre en claquant la porte, s'y enfermant, et s'assit dans un coin de la pièce tout en tenant son visage entre ses mains. Il se mit à se parler, à voix basse, essayant de chasser les images de ce qu'il avait vu, et de ce qu'il avait subit. Il entendit les coups frappés à la porte et là, le bad trip s'enclencha. Il grogna, serrant ses mains sur ses tempes. « Je t'ai vu ! T'es comme les autres ! Dimanche je.. » Il prit une pause, déglutissant avec peine. Il commençait à beaucoup saliver et ça en devenait gênant pour parler. Et il tremblait aussi, tout son corps était prit de tremblements. « J'ai voulu aller te voir. Et quand j'ai frapper à ta porte, il n'y a personne qui répondait, donc j'ai regarder par la fenêtre et.. Et je t'ai vu. Avec ce mec. Je t'ai vu lui faire tout ça, je vous ai vu faire la chose. Tu m'dégoûte ! Comment tu peux faire ça avec ce gars ! Et j'ai eu si mal. C'pour ça que je t'ai pas parler, parce que je veux pas te voir, je dors pas à cause de toi ! » Les larmes roulaient sur ses joues sans qu'il ne s'en rende compte. Il était ailleurs, il était avec sa souffrance. Il revoyait parfaitement la scène, Sidney qui se mouvait en l'autre, leurs visages tordus sous le plaisir ou la souffrance, il ne savait pas. Dans ce moment intime, les deux se ressemblaient. Mais il ne savait pas comment on pouvait éprouver du plaisir à faire ça. Il ne voyait que la douleur, partout. Et son cœur qui se serrait, qui lui faisait mal, en ce moment même. Il aurait voulu que cela cesse.

Dire qu'il avait seulement voulu rendre visite à son meilleur ami, le voir, passer du temps avec lui. Et à la place, il l'avait vu entrain de coucher avec un autre homme. Sur le coup, il était partit, n'ayant pas voulu en voir plus. Et il avait pleurer en rentrant chez lui, le cœur serré, comprenant qu'il ressentait plus qu'une simple amitié pour Sidney. Mais il n'était pas prêt à lui dire, surtout en le voyant coucher avec quelqu'un, ça le bloquait encore plus. Ce n'était pas possible d'avoir mal à ce point là, dans le cœur. Il n'avait jamais connu ça, même quand Alexzander l'avait quitté. Là c'était pire. Jack était tétanisé dans sa chambre, les scènes revenant en boucle et il lâcha un cri, rauque, tandis que ses membres étaient secoués de tremblements. Ce qu'il se sentait mal. Prendre du bon temps ? Il se foutait de lui. « Non, ça fait mal ! J-je voulais juste passer la soirée avec toi, t-te voir e-et.. Et je t'ai vu avec ce gars je.. Je voulais pas ! J-J'arrive pas à sortir les images j-je fais que te voir e-et je veux pas, je veux plus avoir mal ! »

Les larmes coulaient à flots de ses yeux, et son cœur se serrait encore plus, plaquant ses mains sur ses oreilles en serrant fort. Mais ça ne l'empêcha pas d'entendre ce que Sidney lui dit. Il ferma les yeux, sentant ses pupilles se dilater encore plus, et blêmit. Il redressa la tête, sous le choc en fixant la porte, et la scène qui parcourait son cerveau depuis tout à l'heure se modifia pour laisser la place à celle d'un homme âgé et rond, entrain de violer un jeune garçon brun aux yeux bleus. Il restait silencieux, tremblant tandis que les larmes ne cessaient pas, le cœur encore plus douloureux, le ventre contracté. Comment Sidney pouvait-il l'imaginer entrain de faire l'amour, comment pouvait-il, en couchant avec d'autres personnes, penser à lui ? Comment pouvait-il lui faire autant de mal en l'espace de même pas une heure ? Il se mit à respirer plus vite et plus fort, tremblant de tout son corps tandis que la sueur perlait de son front.

Le silence régnait dans la chambre, on entendait même pas les larmes de Jack, qui pourtant dévalaient ses joues. Il respirait vite, mais sans bruit, les pupilles dilatées, le ventre serré et le corps tremblant. Il ne pouvait plus parler tant sa gorge était nouée, il n'entendant même plus Sidney. Il avait juste mal, il revoyait simplement son viol encore et encore. Tous les mauvais souvenirs lui revenaient. Un bruit de coup se fit entendre, Sidney qui tapait contre la porte, mais il sursauta simplement. Il n'aurait jamais du se rendre chez son ami ce dimanche, ni voir cela. Mais c'était trop tard, et il se sentait si mal maintenant d'avoir vu ça. Pourtant, le coup contre la porte l'avait légèrement reconnecté, et il entendit le second dialogue de son ami, ce qui le fit blémir un peu plus. Lentement, avec difficulté, il réussit à articuler quelques mots. Il salivait beaucoup, et ça lui valu un dur effort que de parler.

C-C'est mal ! T-T'aurais jamais d-du faire ça.. E-En plus il a un c-copain.. Je te déteste..

Il avait toujours aussi mal et les larmes coulaient à flot de ses yeux. Il se tapa la tête contre le mur, violemment, puis recommença plusieurs fois. Il commençait à saigner, mais il ne sentait pas la douleur et continua plus fort. Le bruit résonnait dans la chambre, mais il n'en pouvait plus de la souffrance interne, il voulait y mettre fin.

Les bruits de la porte qui commençait à céder, Jack ne les entendait pas. Il se cognait inlassablement la tête contre le mur, essayant de se faire le plus mal possible pour vaincre l'autre douleur. Les yeux clos, il y allait de plus en plus fort et un voile blanc se mit lentement devant ses yeux, tant les coups étaient forts. D'un seul mouvement, il se retrouva bloqué contre un corps chaud et haletant, qu'il devina comme celui de son ami.. Ami ? Ou plus. Il ne savait pas, il n'arrivait plus à penser clairement. Faiblement il tentait de se débattre, mais il n'y arrivait plus. Jusqu'à ce que le bad trip le reprenne, le saisisse jusqu'aux os. Il se débattit avec violence, poussant Sidney sans hésiter une seule seconde, pour se défendre. Il grognait, il avait envie de s'échapper. L'homme qui le tenait lui avait fait du mal, il ne voyait plus son bel ami mais un homme âgé et gros, laid, qui essayait de l'amener sur le lit. Alors il se débattait fort, criant, grognant, envoyant ses pieds un peu partout pour se défaire de l'emprise de son ami.

Pourtant, tout s'arrêta aussi net que ça avait commencer. Jack se calma, son corps ne tremblant plus et il regarda autour de lui, perdu. Il se demandait où il était avant de reconnaître sa chambre, Sidney contre qui il vint se blottir, effrayé. Il n'arrivait pas à se souvenir de ce qu'il s'était passé, il sentant cependant son cœur serré, douloureux, tout comme chaque parcelle de son corps. Fermant les yeux, il enlaça son ami. « Sidney.. Sidney il s'est passé quoi ? J'ai peur.. » Après tout, il n'était rien d'autre qu'un enfant effrayé.

Jack avait chaud et respirait vite, tant à cause de l'angoisse qu'à cause de l'effort. Il se sentait bien, contre Sidney et c'était bien la première fois depuis longtemps qu'il acceptait une étreinte avec quelqu'un. Mais il avait besoin d'être rassuré, de se sentir apaisé avec celui pour qui son cœur battait. Il sentait d'ailleurs ce dernier cogner contre sa poitrine et celle de Sidney, et cela le fit déglutir de nombreuses fois. Il sentit un baiser contre ses cheveux et son ami les lui caresser, ce qui provoqua des millions de frissons contre sa peau. Qu'est ce qu'il se sentait mieux, maintenant, contre son ami. Il tenta de calmer son souffle, de se détendre contre Sidney qui lui montrait qu'il n'allait pas le laisser tomber, non, qu'il était là pour lui. Et cela lui fit chaud au cœur. Il était en sueur, et ça le dérangeait légèrement. Mais il était calme.

Un bad trip. Des images floues lui revinrent, mais il abandonna vite en voyant qu'il ne s'en souvenait pas. De toute manière, c'était pareil à chaque fois. Son souffle se calmait doucement et il ferma les yeux en se serrant contre Sidney. « J'suis désolé Sid.. J't'ai pas fais d'mal.. ? » Il se savait nerveux, mais devenait très violent pendant ses crises et il le savait aussi. Ca lui faisait toujours un peu peur, d'ailleurs. Il avait peur qu'un jour, il puisse tuer quelqu'un.