#06 Frères de sang | Johan

Sujet: #06 Frères de sang | Johan Lun 13 Oct 2014 - 13:33

Frères de sang

20h le téléphone sonne. Peter Emery au bout du fil, la voix grave, comme à son habitude, mais différente des autres jours, normalement c’était pour se donner un genre, une prestance, un air de JesuismonsieurEmery, pourtant ce soit on sentait qu’elle s’était faite plus profonde, presque tremblante, étrange pour cet homme inébranlable. Il avait eu un débit rapide, en deux minutes seulement Donovan avait vu sa vie chamboulée comme rarement elle avait pu l’être et surtout comme jamais il ne l’aurai cru. Non pas qu’il n’y ait jamais pensé, bien au contraire, le jeune homme avait bien compris que son père était un homme à femmes, qu’il avait probablement trompé sa mère autant de fois qu’il l’avait tenu dans ses bras au cours de leur relation. Peut-être s’était-il calmé avec l’âge, mais dans sa jeunesse, pouvoir et charisme avaient à coup sûr fait tourner les têtes de bien des femmes, sans que jamais celle qui partage sa vie ne le quitte, par peur de se retrouver seule, par cupidité, par fierté ou bien peut-être simplement par amour, qui sait au fond ce qui se trame dans la tête d’une femme, même trompée. Donovan n’avait jamais été dupe et il se doutait bien que son père avait dû mettre quelques-unes de ses maîtresses enceintes, mais combien avait-il forcé à avorter, avait-il des frères et sœurs ? Ces questions avaient hanté sa vie depuis l’adolescence, sans jamais avoir de réponse, jusqu’à ce soir. Donovan avait un frère.

21h la tête entre les mains, dans sa cuisine. Il tentait d’assimiler et d’accepter la nouvelle. Celui qui avait été fils unique pendant vingt-sept longues années, celui qui avait toujours rêvé d’un camarade de jeux, pour grimper aux arbres, se lancer une balle, se chamailler voir se foutre sur la figure, celui aurait adoré chaperonner une petite sœur un peu trop aventureuse, celui tout simplement qui avait ressenti le manque d’un lien fraternel toute sa vie venait d’apprendre qu’il n’était plus seul, qu’il ne le serait plus jamais, un grand vide s’était fait en lui, plusieurs sentiments contraires se mélangeaient et pourtant il avait l’impression de ne rien ressentir de concret. Le jeune homme sortait de prison, bien entendu Peter s’était retenu de lui dire pour quel motif il avait été incarcéré, il était plus jeune que lui et surtout, il était seul, n’avait aucun endroit où dormir et Donovan se devait de l’accueillir si celui-ci se présentait à sa porte. Il était certain que tout ce plan avait été bien ficelé par monsieur Emery et que ça n’était fait que pour servir ses propres intérêts, comme il avait dit à Donovan « Tu ne voudrais pas que ta mère souffre de l’annonce de cette erreur de jeunesse, elle est fragile, il serait inutile de lui faire plus de mal et de la décevoir encore une fois de plus… » Le lourd poids de ces paroles mettait clairement Donovan face à ses propres erreurs, qui avaient déçues ses parents et même si c’était totalement injuste que son père se serve de cette excuse, ça avait fonctionné. Quelle drôle de requête, qui en vérité n’en était pas une. De la part de son père rien n’était demandé, tout avait un motif plus ou moins obligatoire et sans appel, ça avait toujours été le cas et, à priori, même adulte, le jeune blond se trouvait encore sous les ordres de cet homme.
Donovan venait d’informer Victoria, sa femme, de la nouvelle, comme lui, elle fut plus que surprise et, tout comme lui, elle allait devoir se résoudre à voir débarquer un inconnu dans sa demeure, ils ne savaient pas quand il arriverait, ni combien de temps il resterait chez eux, quelle tête il avait, ni s’il était potentiellement dangereux ou même dans quel état d’esprit il se trouvait. Pourtant elle n’avait rien dit, elle l’avait pris dans ses bras et bercé comme pour le rassurer, ils verraient, ils en avaient vu d’autre, de pires histoires, ils s’en débrouilleraient très bien, après tout, ça n’était probablement pas un sérial killer… Tu as toujours tes réflexe de boxeur, au cas où ? Ils avaient ri, un rire jaune, bien entendu.

21h30 ou pas loin… on frappa à la porte. Le cœur qui cogne un battement de trop dans la poitrine, le regard inquiet, perdu, qui croise celui, tout aussi perdu mais bienveillant de Victoria. Elle l’embrasse sur les lèvres et lui indique qu’elle va préparer la chambre d’ami. Discrète, la jeune femme préfère laisser Donovan seul pour rencontrer son frère.
Il dénoua son nœud de cravate, puisqu’il n’avait pas eu le temps, ni l’esprit de se changer, l’homme d’affaire portait toujours son costume de travail, tiré à quatre épingles, mais se voulait un peu plus décontracter pour ouvrir la porte. Il prit encore quelques secondes pour se donner une prestance puis se dirigea d’un pas décidé vers l’entrée, il ouvrit la porte l’air serin, bouillant de l’intérieur, pleinement conscient que sa vie allait changer à la seconde où il croiserait le regard du jeune homme derrière. « Bonsoir… » Il ne trouva rien de plus à dire, après tout, il ne savait rien de cet autre, ni s’il se savait attendu. Il scrutait son visage, ses expressions, sa réaction.

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"Is that alright ?"

Maybe it's time to let the old ways die. It takes a lot to change a man, it takes a lot to change your plans. And a train to change your mind.

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Sortie de prison. Je n'avais plus rien, ma mère était morte, et ce n'était pas non plus comme si j'avais des amis. Je n'avais jamais été assez sympa pour en avoir ou alors toujours incapable de prendre des nouvelles des gens. J'avais plus d'affaires, j'étais les mains dans les poches, j'avais juste mon sac à dos. J'avais personne chez qui aller et, soyons logique, je n'étais pas du tout le genre de mec qui dormait sous les ponts. Je n'avais qu'une option, appeler mon père. La chose que je ne faisais jamais parce que je le haïssais trop profondément. Rapidement, je lui expliquais la situation. Rapidement, il m'envoya bouler, me disant que je ne devais pas exister, que je le savais très bien. Je n'avais rien à faire dans sa vie. Je partais au quart de tour, le petit voyou que j'étais resurgissant bien vite. Je lui expliquais donc calmement que, si il n'acceptait pas de m'aider, j'irais tout raconter à sa femme et que ça ne me dérangerait pas le moins du monde. Elle pouvait bien crever demain que ça ne changerait pas ma vie. Il me raccrocha au nez mais je savais qu'il allait faire quelque chose.

J'étais dans un bar, me noyant petit à petit dans mon café. J'étais frustré, un peu dérouté. J'étais enfin libre, enfin dehors mais je restais bloqué là. Je ne faisais rien pour faire avancer les choses, attendant gentiment que monsieur Emery daigne m'appeler. Je savais qu'il allait le faire, il n'était pas fou et il savait que je n'avais rien à perdre. En un sens, j'avais réussi à le soumettre à ma bonne volonté. La chose qui n'arrivais jamais. Un sourire en coin, d'amusement, vint éclaircir mon visage. Fallait bien que je m'occupe après tout. Mon téléphone sonna, ce qui me fit sursauter. C'était mon père. Je décrochais, écoutant attentivement ce qu'il avait à me dire. Je n'eus pas le temps de répondre qu'il me raccrochait déjà au nez, visiblement très énervé de mon comportement. Il l'avait cherché après tout, on n'abandonnait pas ses enfants comme ça.

Il m'avait donné l'adresse de mon frère, Donovan. Je savais deux trois choses de lui, mais rien de passionnant. Il avait l'air d'être très chiant comme mec. Je m'élançais dans la ville, marchant tête basse, de peur qu'on me reconnaisse. Je ne voulais pas retrouver mes anciens collègues, je m'en passerais très bien. J'arrivais finalement devant sa jolie petite maison. Avec sa petite femme. C'était le genre de choses que je n'aimais pas, lui avait eu le droit à tout et moi on m'avait pris ce que j'avais de plus cher. Je restais quelque secondes devant, un peu perdu, un peu perplexe. Mais je n'avais pas vraiment le choix en fait. Je toquais à la porte et pris mon air sur de moi, changeant du tout au tout en quelque sorte. Un sourire prétentieux, je me recoiffais rapidement, me préparant à toiser mon fameux frangin.

Le fameux Donovan. Il tirait une sale tête, il avait l'air en panique. J'étais content de provoquer autant d'ébats dans son pauvre petit coeur. Il me lâcha un "bonsoir" qui laissait un peu à désirer. Je lui décalais mon plus grand sourire, peut être un peu hypocrite. Non, c'était complètement hypocrite en fait. « Salut frérot ! » Je m'approchais de lui pour lui faire une petite accolade virile, c'était comme ça qu'on faisait dans mon quartier. Quoi que, lui peut être pas. Avec sa belle cravate et sa belle maison. Je me reculais rapidement, toujours souriant, sans même chercher à le détailler. Je savais déjà à quoi il ressemblait. « Alors, tu me laisses rentrer ou quoi ?! » C'était pas que j'avais peur qu'il me foute à la porte mais un peu quand même. Je ne savais pas non plus ce que mon père lui avait dit de moi mais ça devait pas être génial.

Sujet: Re: #06 Frères de sang | Johan Mer 22 Oct 2014 - 15:46

Frères de sang

Décontenancé, on peut dire que Donovan l’était. En ouvrant la porte il trouva un jeune homme avec sa tignasse en bataille, son air suffisant et son sourire aux lèvres, la parfaite tête du petit con. Il s’approcha sans ménagement pour une accolade toute fraternelle à laquelle notre blond ne s’attendait pas du tout, pris de cours il hésita un instant avant de rendre sa tape dans le dos à ce frère qu’il ne connaissait pas. L’autre se comportait comme s’ils avaient toujours vécu ensemble et Donovan commençait à haïr son père de lui avoir offert cet énième cadeau empoisonné. « Mais entre, je t’en prie. » Il se prit lui aussi au jeu de ton complaisant puisqu’il semblait que ça plaise au gamin. Il se poussa donc pour laisser cette nouvelle tornade entrer dans sa vie, l'observant du coin de l’œil. A le voir se comporter ainsi il sembla à Donovan qu’il observait son père dans ses jeunes années, aucun doute, il était bien le fils de Peter et il avait pris beaucoup de lui, cette prestance quasi théâtrale, cette aura qui faisait que lorsqu’il entrait dans une pièce c’est comme s’il entrait sur scène. Tout ce que Donovan n’avait pas, lui avait tout le côté de sa mère, la douceur, la gentillesse, la timidité quasi maladive, mais il se soignait de ce côté, et l’effacement.

« C’est Peter qui a arrangé ce petit tour de passe-passe pour ne pas que tu dormes dehors j’imagine ? Au fait, puisqu’on doit vivre ensemble, c’est quoi ton nom ? » Avant qu’il n’ouvre la porte, Donovan aurait tout donné pour connaitre son frère, cet autre qui avait le même sang, la même origine et dont il ne savait rien. Mais à voir le comportement du brun il commençait à regretter d’avoir été si enthousiaste. Il s'était attendu à beaucoup de choses, rien de précis bien entendu, ça faisait à peine deux heures qu'il n'était plus fils unique, mais dans son esprit beaucoup de scénarios avaient été envisagés... on ne s'attend jamais au pire. S’il n’était qu’une sangsue qui n’en avait rien à faire de rien, qui ne resterait chez lui que pour avoir un toit ou dormir et des draps propres jusqu’à son prochain tour en prison ? Même s’il voulait jouer le gars sûr de lui, Donovan avait peur. Sa vie était déjà bien trop compliquée pour qu’on vienne en rajouter. Et en même temps, s’il avait tort, si l’attitude du gamin n’était qu’une façade pour ne pas montrer qu’il était tout aussi effrayé que lui ? Finalement il attendait de voir, il jugerait plus tard, il espérait que sa première impression fut fausse.
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Il était complètement décontenancé par ma sale gueule, visiblement. Il était un peu plus grand que moi, ce qui ne m'allait pas vraiment. Je finissais par me sentir un peu inférieur. Cette incompréhension totale me tendait, et lui aussi visiblement. Sauf que je n'avais pas vraiment la maturité pour le voir et c'était bien dommage. Donovan s'écarta finalement gentiment pour me laisser rentrer, bien qu'il semblait vouloir me flanquer à la porte. Je m'arrêtais dans l'entrée, attendant gentiment qu'il me dise quoi faire. Je n'étais pas non plus mal poli, j'avais eu une éducation. Je me voyais mal me promener chez lui, déjà que je n'étais pas spécialement heureux d'être là. C'était ça ou un trottoir alors je n'allais pas me plaindre. J'haussais les épaules à ses petites questions, passant ma main dans mes cheveux en détournant les yeux. Un peu gêné, oui. « Ouais, fallait bien qu'il s'occupe de moi un jour. » Je lui souriais, un peu provocateur. « Je m'appelle Johan. » Je me détournais de nouveau de mon cher frère, enfouissant mes mains dans mes poches, me dandinant un peu. Je regardais autour de moi, identifiant les petites photos, tout ce qui pouvait décrire cette famille dans laquelle je m'incrustais. Ça n'avait pas l'air du tout passionnant, moi qui sortais d'une adolescence mouvementée. Drogue, alcool, sexe, excès, tous; Et je me retrouvais en prison. Et puis je me retrouvais là. Enclavé, comme un loup en cage, j'avais l'impression d'avoir seize ans et de me retrouver dans une famille d'accueil.

Sujet: Re: #06 Frères de sang | Johan Dim 26 Oct 2014 - 16:19

Frères de sang

Ce qui était rassurant en un sens c’est que derrière ses airs de gars sûr de lui, plein de petits gestes laissaient transparaitre que le gamin n’était pas si à l’aise que ça. Dans son métier, Donovan avait appris à reconnaitre ces signes, la main dans les cheveux puis dans les poches, le dandinement trop nonchalant, c’était fascinant. Donovan referma la porte d’entrée et s’appuya contre elle pour observer le dénommé Johan, il choisit de se détendre, de toute façon il fallait que ça se passe, autant que ça soit dans les meilleures conditions. « Moi c’est Donovan, mais j’imagine que tu le sais. Peter t’a donné d’autres informations que je devrais connaitre aussi ? » Sur ce point, le cadet avec l’avantage, il semblait qu’il en sache bien plus sur Don que l’ainé n’en savait sur lui, peut-être d’ailleurs sait il depuis un moment qu’il a un frère, peut-être est-il en contact avec leur père depuis longtemps, finalement Peter s’était montré assez discret jusque-là.

Johan observait les photos, Don aurait voulu être dans sa tête pour savoir un minimum de ce qu’il pensait. Il y avait peu de photos dans l’entrée, quelques-unes de la famille de Victoria, une de Don et sa mère, aucune avec Peter, le jeune homme pourra le remarquer, d’autres de Donovan et Victoria, bien entendu, une ou deux avec des amis, rien de bien extraordinaire je vous l’accorde, des photos bien cadrées, bien sages, toutes choisies par Victoria et son obsession du bien paraitre. Ca ne reflétait pas l’exacte vérité, juste celle qui arrangeait tout le monde, les autres photos, les vrais souvenirs, on les gardait pour soi et c’était bien plus acceptable. Le blond se redressa, passa devant les photos et en désigna une de sa Vicky. « Victoria, ma femme, elle prépare ta chambre. C’est une femme adorable alors peu importe ce qui t’a amené en prison, comment tu en es sorti, peu importe ton petit air supérieur envers moi, si tu lui manques de respect je te mets dehors. » Tout cela avait été prononcé avec calme et sérénité, pas une once d’agressivité dans la voix, juste une mise en garde qu'il n'hésiterai pas à concrétiser si ça tournait mal, Donovan devait beaucoup à sa femme, elle le soutenait en tout et il ne voulait pas lui imposer une présence désagréable. « On passe au salon ? Ça sera plus confortable que de rester dans l’entrée, je te sers un verre ? » Donovan accompagnait sa parole en dirigeant Johan vers le salon ou deux canapés confortables les attendait. Il se posta vers le bar en attendant la réponse de son frère, lui se servit un coca, il était certes accro à l’herbe mais compensait en ne buvant pas d’alcool.

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(désolée du retard )

Je reposais rapidement mon regard sur Donovan, ça ne devait pas être hyper agréable de voir un inconnu observer tout ce qu'il y avait chez toi. Je me tournais vers lui, les mains dans les poches, essayant de paraître calme et décontracté. Je souris à sa question. « Enchanté. Pas grand chose de très passionnant, enfin tu m'as l'air plutôt clean. » Un sourire amusé maintenant. Comme si c'était à moi de juger de ça, de toute façon il serait toujours plus clean que moi ce Donovan Emery. Je n'aimais pas les gens comme ça, ils m'agaçaient. Toujours propre sur eux, à pouvoir payer leurs factures, tout. Moi aussi j'aurai pu être comme lui si mon père s'était occupé de moi. Mais ce n'était pas le cas, j'avais été seul toute mon enfance. J'avais connu la galère qu'il n'aurait jamais dans toute sa vie. Les photos reprirent mon attention, toujours cette belle famille, ce faux sentiment d'équilibre et de perfection. Alors qu'on savait tous, qu'au fond, tout ne pouvait pas être aussi rose et aussi beau. Dans leur milieu social il fallait juste montrer et j'avais horreur de ça. La vraie vie ce n'était pas faire semblant tout le temps. Sa seconde réflexion me fit rire, insolent que j'étais. « J'ai tué personne hein ! » Sa femme n'avait rien de spécial à mes yeux, à vrai dire je m'en foutais un peu. Mais je pouvais comprendre qu'il se mette sur la défensive sur ce point-là, je ferais pareil à sa place. Sauf que je n'étais pas un mec violent, encore moins avec les nanas. Et encore moins avec ma belle-soeur. J'hochais la tête, oui le salon, très bien. Je le suivis discrètement, en fait j'avais envie de me promener partout mais j'attendrais qu'ils ne soient plus là pour visiter correctement. Je souris à Donovan, amusé par son verre de coca. « Tu me proposes quoi ? » Éternelle nonchalance adolescente...

Sujet: Re: #06 Frères de sang | Johan Lun 24 Nov 2014 - 14:59

(Ce orange est une catastrophe pour les yeux, navrée aha

)

Frères de sang

Assez clean. C’était intéressant comme conclusion. Certes, Donovan était quelqu’un de bien il payait ses factures, ses impots, allait travailler chaque jour et tentait de combler sa femme. Si c’était la vie dont il avait rêvé ? Non, absolument pas, il ne se voyait pas à la tête d’un empire financier à vingt-sept ans, coincé dans ses costumes bien taillés, à aller chez le coiffeur toutes les quatre semaines. Lui avait longtemps rêvé de liberté, d’espace, de grand air, de voyage, mais tout ça avait dû rester à l’état de rêve parce que quand on est l’unique fils légitime de Peter Emery, on ne vagabonde pas, on devient puissant. Il n’avait pas l’étoffe d’un meneur, il ne se sentait pas à sa place. Ni dans cette grande maison trop propre, trop vaste. Mais il avait rencontré une femme extraordinaire pour laquelle il avait accepté le faste et la grandeur, on accepte beaucoup par amour. Il avait eu sa période rebelle, pas de là à faire de la prison, non, et jamais il ne s’était trop éloigné du chemin tracé. Seul ses joints lui donnaient encore une sensation de liberté, ils lui procuraient le plaisir infini de pouvoir rêver à mieux, en mieux, mais cela était toujours éphémère, quand les vapeurs se dissipaient il redevenait le gentil garçon propre sur lui. « Content de l’apprendre. » Il se moquait bien de savoir ce qui avait conduit Johan en prison, il se doutait que Peter n’aurait pas pu l’y en sortir s’il avait tué quelqu’un. Le reste, ça n’était pas son problème, on était jamais à l’abri d’une connerie. Du moment que le gamin n’y retourne pas et qu’il ne fasse pas de vagues sous son toit, peu lui importait.

Alors qu’il se servait son coca, il remarqua le coup d’œil amusé de son frère et le rictus qui allait avec. Il passait vraiment pour un homme mou et prévisible à ses yeux, non, lui n’était pas un dur, il n’avait pas fait de prison ni assez de conneries pour y aller, il ne buvait pas d’alcool, il respectait les limitations de vitesse, et il ne comptait pas s’en justifier à celui qui prenait avec délectation un air suffisant. Il ouvrit le bar et fit étalage de ses nombreuses bouteilles, alcools forts allant de la vodka au rhum exotique, différentes variétés de whisky, toutes de meilleure qualité, Donovan ne buvait pas mais il savait recevoir. « Je te laisse le choix. » Après la réponse du jeune homme, il lui servit son verre, le lui offrit et vint s’installer en face de lui. Ça lui fit du bien de se poser, il se relâcha un peu, le fait est que Johan le rendait nerveux, il était tendu et faisait tout pour ne pas le montrer, c’était un exercice éreintant. « Alors Johan, tu n’as nulle part où aller à ce que j’ai compris ? Pas de famille, pas d’amis ? »

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(haha pas de soucis ça va mieux maintenant )

J'aurai rêvé, étant gamin, de vivre dans une maison comme celle-là. C'était grand, mais pas trop, propre, bien agencé. La décoration un peu classique mais pas trop, tout ce qu'il fallait pour élever des gamins en fait. Et je trouvais ça étonnant que monsieur Emery n'en ait pas encore. Il y avait probablement beaucoup de raisons à ça mais je n'étais pas encore en position de demander quoi que ce soit sur ce sujet. J'avais le pressentiment qu'il serait un bon papa, sans vraiment savoir pourquoi. Je le suivais donc gentiment, et en silence, dans la maison et dans ce qu'il appelait le salon. C'était toujours aussi coquet et pourtant je ne me sentais pas très à l'aise dans cette maison. Probablement qu'avec le temps, tout irait mieux, mais je n'en étais pas encore persuadé. Voir mon frère avec son verre de coca m'amusait et pourtant lui ça semblait l'agacer. À vrai dire je m'en fichais un peu. Et, en fait, je ne savais plus trop ce qui m'intéressait et ce qu'il me fallait. Mais je devais choisir ce que je buvais. « Un whisky, je te laisse choisir celui que tu veux. » Je n'avais aucune envie de faire le connaisseur, ce que je n'étais pas. C'était juste ma boisson préféré et je n'en avais pas bu depuis un petit moment alors n'importe lequel m'irait tout à fait. Je m'asseyais dans un sofa, essayant de paraître à l'aise, sans lâcher Donovan des yeux. Il était quand même bien beau gosse celui-là, j'espérais pourtant ne rien avoir à lui envier. Si j'avais plus rien ? Ouais, c'était à peu près ça. « J'ai expédié mes amis puisqu'ils m'ont conduit en prison, et ma mère est morte il y a quelques semaines. » Je détournais rapidement la tête, je ne voulais pas voir la pitié dans son regard. C'est comme ça que tout le monde me voyait maintenant. « Donc oui, en gros j'ai que toi et mon "père." » Je laissais planer des grosses guillemets sur ce papa qui ne s'était jamais occupé de moi et qui faisait semblant de le faire aujourd'hui. Je posais finalement mon regard sur Donovan, attendant gentiment le moment où j'aurai le droit à de la compassion. Pauvre petit garçon paumé que j'étais.

Frères de sang

Il y avait une sorte de paradoxe, on ne voyait jamais Donovan boire de l'alcool parce que ce n'était pas son fort, mais pourtant il était relativement connaisseur en ce qui concernait le vin, il allait de soit qu'il adorait les cépages français et certains italiens, il avait suivit quelques cours d'initiation à l'œnologie et il savait aussi apprécier un bon whisky, il avait appris à reconnaître les nuances, les parfums et lorsqu'il était bon, il ne refusait pas un verre. Mais lorsqu'on le voyait se servir un verre de soda, il comprenait que ça laisse dubitatif, l'idée était en fait qu'il ne buvait qu'en de très rares occasions, à table, le vin lui servait surtout à révéler un plat, par exemple, ou prendre une coupe de champagne ou un doigt de whisky lors de soirées entre gentlemans, mais il n'était pas tenté par les boissons alcoolisées, ça n'était tout simplement pas son truc et plus souvent il préférait rester au soft. Il observa son frère un instant avant de choisir pour lui un très bon whisky japonais, fruité et ambré, qu'il lui servit sec, sans glaçons. "J'espère que tu appréciera !" Il l'espérait vraiment, ça n'était pas un test ou bien une démarche sensée l'impressionné, il aimait satisfaire ses invités.

Il s'installa donc en face de son frère, prêt à discuter, parce qu'il n'allait pas le laisser s'installer ici sans en savoir plus sur lui, il était curieux de le connaître. Même si de premier abord ils semblaient froids l'un envers l'autre, se jaugeant, jugeant chacun de l'attitude de l'autre, il espérait qu'au fond Johan soit quelqu'un de bien et qu'ils s'entendrait, qu'à terme il puisse réellement le considérer comme son petit frère et puisse agir en conséquence envers lui. Le cadet lui confirma qu'il n'avait personne, plus d'amis et que sa mère était morte. Donovan resta stoïque, il comprenait mieux pourquoi Peter l'avait envoyé chez lui, il était vraiment seul, il faisait ce qu'il pouvait pour se montrer détacher en lui faisant cette révélation, mais notre blond se doutait qu'il devait passer une période difficile, perdre sa mère devait être une épreuve, pourtant il ne s'en émut pas plus que ça, il ne connaissait pas Johan, il ne pouvait pas se montrer touché, certes il éprouvait une sorte de compassion, mais pas au point de le lui signifier. Il fut par contre plus touché par le fait qu'il lui avoue qu'il n'avait plus que lui et leur père, il n'était pas obligé de dire qu'il l'avait lui, pourtant il l'avait fait. "Tu es ici chez toi, tu peux rester le temps qu'il faudra, je ne te demande qu'une chose, c'est d'être honnête envers moi et Victoria." Il s'enfonça dans le canapé, plus détendu. "Je ne juge pas tes actions passées, ça te regarde, j'espère juste que c'est derrière toi. Si tu as besoin tu peux me parler mais je ne te demanderais rien. Je ne suis pas Peter, j'ai le mérite de savoir écouter et de ne rien demander en retour. On est frères après tout, autant se connaître un peu." Il avait un regard bienveillant envers Johan, il espérait qu'il accepterait de baisser sa garde envers lui.

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