Oona & Hayden

Une fois assis, tu attends que la nacelle décolle et une fois en haut, tu ne peux t'empêcher de t'exclamer de comment c'était beau la nuit, de comment tout paraît si petit et à quel point tu aimes ce point de vue. Jusqu'à la remarque d'Hayden qui te fait rire. Une fois la rigolade passée, tu reprends un peu plus sérieusement. « Si tu souhaites épouser quelqu'un, je pense que ça peut être un bon endroit, et un bon moment, mais je dois t'avouer que moi et le mariage on fait pas bon ménage.. » Ce n'était pas le genre de demande que toi tu aimerais, mais c'était le genre de demande qu'on pourrait qualifier de romantique. Puis tu poses ton regard dans le sien avant de reprendre plus doucement. « Par contre, c'est le bon moment pour t'annoncer que j'ai un enfant, et que t'es le père ? » Tu essaies d'être le plus sérieuse du monde possible. Hayden est un peu comme toi, il t'aime bien, tu l'aimes bien, mais ce n'était pas suffisant pour fonder une famille et tout le tralala, mais tu voulais voir sa réaction. Ce serait un peu comme ta vengeance.

La demoiselle confirme. Si j’étais un brin romantique, c’est peut-être le genre de choses que je ferais pour ma petite amie. Enfin, encore faudrait-il que j’en ai une et que j’ai envie de lui faire plaisir. Je commence à avancer dans l’âge et pourtant, le fait de ne pas avoir de famille, et de ne pas être prêt d’en avoir ne me dérange pas plus que cela. Il n’y a que lorsque je suis avec Andrea et son fils que j’ai un léger sentiment de manque mais le reste du temps non… Je ne suis sans doute pas fait pour une vie de famille bien rangée. Déjà que ma vie n’a rien de rangée ou de stable… Je serais bien incapable d’offrir du bonheur à une jeune femme et encore moins à des enfants. Peut-être plus tard, qui sait… « Une demande en pacse alors ? Moi qui pensait que tu voulais passer ta vie avec moi… Tu me déçois. Je suis tellement triste. » ajoutais-je alors avec une petite moue attristée mais un sourire en coin qui vient détruire toute crédibilité dans mes paroles. Sauf que la suite des événements vient détruire tout ce que j’imaginais, lorsque Oona, d’un air des plus sérieux, m’annonce que nous avons soi-disant un enfant ensemble. Heureusement pour moi, je ne suis pas né de la dernière pluie et la connaissant particulièrement bien, je ne la crois pas une seconde, même si après quelques instants, un léger doute vient s’insinuer en moi. « Ça peut l’être oui mais comme c’est des bêtises, nop, mauvais moment. » lui dis-je alors. « Et arrêtes de prendre cet air sérieux, on s’y croirait presque… petite maline. »

Tu fais une petite moue en l'écoutant parler de pacs et du fait que tu ne voulais pas passer ta vie avec lui. S'il y avait bien un homme avec lequel tu serais prête à passer ta vie, c'était bien lui. Parce que tu savais que tu passerais ton temps à t'amuser, à vivre dans une folle spirale, et puis il ne te prenait pas la tête, tu ne lui prenait pas la tête. Et comme lui, tu approchais de la trentaine, et ta vie familial semblait si vide que le désert du Sahara semblait bien remplie à côté. « Je suis la plus sérieuse du monde, il s'appelle Thomas, j'aimais bien la consonance française et il va avoir 3 ans dans un mois ! » Tu n'affichais pas le moindre rictus sur ton visage, il ne fallait pas que tu fasses tout capoter, surtout que tu voyais bien sur son visage que le doute commençait doucement à s'installer. Tu poussais la blague peut-être un peu loin, mais c'était ton moyen de te venger un peu pour le poteau. Tu attrapas alors ton téléphone pour trouver la photo d'un petit garçon de trois ans, avant de la montrer à Hayden. « Tu trouves pas qu'il a tes yeux ? Et mes pommettes. » Tu lui adresses un doux sourire pour accompagner la photo, comme si tu t'extasier devant. Tu étais presque très fière de lui montrer cette photo pour achever ton coup.

Et alors que je ne m’y attends vraiment pas, Oona continue sur sa lancée en me parlant du petit Thomas qui apparemment, serait vraiment mon fils. Avec le sérieux dont elle fait preuve, je ne sais vraiment plus sur quel pied danser. Je n’arrive pas à comprendre comment une telle chose est possible, bien que je sais bien comment on fait des bébés, je vous rassure. Nous nous sommes toujours protégés, de ce que je me rappelle en tout cas et dans mes souvenirs, la capote n’a jamais craqué. Je sais pourtant que ces moyens de contraception ne sont pas fiables à 100% mais une question me taraude plus que les autres. « Mais si j’ai vraiment un fils, pourquoi est-ce que tu ne me l’as jamais dit ? Pourquoi est-ce que tu ne m’en as pas parlé avant ? » C’était vraiment ce que je n’arrivais pas à comprendre car mine de rien, il n’y a jamais eu aucun secret entre la demoiselle et moi, et elle sait très bien que j’aurais été prêt à beaucoup de choses pour elle, et quand bien même je n’étais pas prêt à avoir un enfant à l’époque, on en aurait parlé, on aurait trouvé une solution… « On a toujours été honnête l’un envers l’autre et je t’aurais aidé du mieux possible… » Ce n’est même plus du doute dans mon esprit quand je vois la photo du petit garçon. La jeune femme a réussi à me convaincre et je me sens réellement mal. J’ai envie de redescendre de cette roue, tout de suite et de me mettre à vomir. Elle semble pourtant s’extasier devant la photo. « D’ailleurs, comment tu as pu me cacher son existence ! Je ne mérite pas ça ! Et lui non plus. Il a besoin de connaitre son père… » Je suis à la fois effrayé par mes pensées et à moitié furieux par cette nouvelle que j’apprends trois ans trop tard. Pourtant, je prends le téléphone et je regarde la photo encore et encore, pour essayer de comprendre.

La roue continue son ascension, le paysage continue de s'éloigner, comme si vous étiez des géant et que le monde sous vous n'avait presque plus d'importance. Cependant tu étais bien trop occupée à te venger pour profiter du paysage. Tu poussais le jeu trop loin et tu ne savais pas comment amorcer la chute. Parce que tu voyais bien qu'il avait l'air déstabilisé voire bouleversé. C'était le moment où tu réalisais que ce n'était pas si drôle que ça, que ce n'était pas un sujet sur lequel t'amuser parce que si ça avait été vrai, il t'en aurait vraiment voulu. Et en même temps, si ça avait été vrai, tu aurais agis autrement, parce que tu n'aurais pas pu lui cacher. C'était trop important pour toi. Là tu lui donnais l'image d'une mère horrible qui cache son père à un enfant et inversement. « Relax, je rigole, c'est le fils d'une amie, anciennement cliente, qui a 6 ans en réalité, mais il fait tellement jeune que j'ai tenté ma chance ! » Tu ranges ton téléphone et regarde Hayden dans les yeux, tu le vois reprendre quelques couleurs mais tu ignores encore comment il va le prendre, mais avant qu'il puisse te dire quoique ce soit, tu en profites pour reprendre la parole. « Tu aurais vu ta tête, j'ai tout fait pour me retenir, mais c'était si difficile.. Hayden, je t'aurais prévenu si j'avais eu un enfant, surtout si j'avais pensé qu'il était de toi, je trouve ça horrible de cacher la vérité, surtout sur un enfant ! » Tu lui adresses un doux sourire pour accompagner tes propos, en espérant qu'il ne t'en veuille pas à mort, tu le regretterais un bon moment sinon.

Ce petit jeu aurait pu continuer encore très longtemps si la jeune femme n’avait pas décidé d’enfin atténuer mes souffrances. Mes doutes s’étaient faits de plus en plus insistants et j’avais fini par croire aux paroles de la demoiselle, même si je me demandais définitivement comment elle avait pu me cacher l’existence de mon fils pendant aussi longtemps. Alors qu’elle m’avoue que tout ceci n’est qu’une simple plaisanterie, j’ai du mal à revenir sur Terre. J’étais déjà en train de m’imaginer tout un monde où ma vie n’aurait plus été la même et bizarrement, même si je suis extrêmement soulagé, je ne me sens pas complétement mieux et je n’arrive pas à retrouver mon état normal. Je suis presque sous le choc et clairement, je n’arrive pas à décrire les sentiments et émotions qui me traversent l’esprit à ce moment précis. « Tu es sérieuse ? C’est vraiment une plaisanterie ?! » J’ai bien compris pourtant que c’est une blague et ça parait logique venant d’Oona mais je répète cela, comme si je voulais m’en persuadé. Puis, mon regard se fixe au loin et en quelques instants, j’arrive à peu près à remettre mes idées en place. Pourtant, je n’arrive pas à rire de la situation, ou pas encore en tout cas. Sans doute que dans dix ans, ou même demain tout simplement, je repenserais à cette scène et j’en rirais de bon cœur mais là tout de suite, ceci n’est pas possible. « Oui, ça aurait été horrible de cacher la vérité… » Je finis par dire. La roue descend et rejoint la Terre ferme. C’est à notre tour de descendre et je suis presque soulagé de pousser la barrière de protection et de regagner le sol. « Je pense que je vais rentrer si ça te dérange pas… » Cette histoire m’a visiblement chamboulé et même si je n’en veux vraiment pas à la jeune femme, ça m’a retourné l’esprit, ne me donnant ainsi plus envie de profiter de la fête foraine. « On peut peut-être se revoir demain… Ou lorsque tu auras le temps si tu veux… »