I've forgotten how it felt before the world fell at our feet -r.

Pour moi, aider Lola et ses collègues à tout nettoyer était la réaction la plus normale qui soit. Après tout, je n’allais pas rester là à les regarder, d’autant plus que j’avais extrêmement hâte de rentrer chez moi, avec Lola, chez nous en fait. Plus vite le ménage allait, plus vite nous étions partis d’ici. Le raisonnement était des plus logiques, alors je mis la main à la pâte comme les trois autres. Quand j’eus terminé, je rejoignis Lola qui terminait de compter son pourboire. En la regardant mettre le tout dans son porte-monnaie, je souris avec les sourcils haussés. « Je devrais peut-être songer à réorienter mon choix de carrière. » Lola faisait beaucoup d’argent en une soirée. À peu près la moitié de ce que je faisais en une semaine de trente heures. C’était plutôt déprimant. Je ne laissai toutefois rien paraître : ce soir était une belle soirée. Les finances devaient rester bien loin derrière.

Suppliant presque Lola de partir pour nous retrouver tous les deux, celle-ci lança à ses collègues qu’elle partait, qu’elle les laissait fermer le reste. J’imaginais que ça ne consistait qu’en la fermeture des lumières et le verrouillage des portes, alors ça me semblait assez correct de partir tout de suite. Je suivis donc la jeune femme vers la sortie et je poussai un soupir de soulagement en sentant l’air frais sur mon visage. « C’est définitif. Je n’aime pas du tout les boîtes de nuit. » En rigolant, je passai mon bras autour des épaules de Lola. Je lui adressai alors un petit regard charmeur, séducteur – un peu raté parce que, avouons-le, j’étais loin d’être le meilleur dragueur. « Alors, beauté, je te ramène chez moi pour la nuit ? » Plaisantais-je. Je me la jouais coup d’un soir alors que Lola et moi habitions ensemble, déjà. Ce serait sans doute une expérience assez étrange que de débuter une relation amoureuse tout en étant colocataire avec la femme qui habitait mon cœur et mes pensées. J’espérais que tout se passe bien. J’avais sauté dans le vide en venant déclarer mes sentiments à Lola, ce soir. Tout le reste n’était qu’incertitude. Il fallait laisser le temps faire son œuvre. Laisser la vie suivre son cours. Et nous, on allait se laisser porter par le courant.

Après la marche qui nous séparait de notre appartement, j’ouvris la porte et pénétrai dans notre logement, suivi de Lola. Elle referma la porte et, tout d’un coup, je me sentis gêné et nerveux, comme un gamin qui amène sa copine pour la première fois chez lui. Je ne savais pas trop quoi faire avec Lola. J’avais envie de l’embrasser passionnément, mais peut-être voulait-elle y aller plus tranquillement. Je la fixais donc, les joues un peu rosées et un sourire timide au visage. « Tu dois être fatiguée. Je vais te laisser aller dormir. » Et j’aurais aimé l’inviter à dormir avec moi, mais encore, je me freinais pour ne pas y aller trop vite.

J’hochai la tête en rigolant quand Lola m’affirma que la drague n’était pas mon point fort. « Je sais. Je sais. C’est ce qui fait mon charme, non ? » Lui demandais-je avec un petit sourire mi-amusé, mi-gêné. Dans mes jeunes années de collégien, mes lacunes de compétences sociales m’avaient souvent forcé à la solitude. Toutefois, depuis quelques années, je remarquais que c’était justement cette timidité et cette maladresse naturelle qui faisait en sorte que certaines personnes appréciaient ma présence et me faisaient confiance rapidement. À force, j’avais compris que ma personnalité n’était pas le problème ; ma retenue l’était. Manquant d’estime, j’avais toujours reculé devant les nouvelles rencontres, de peur de décevoir. Maintenant, j’allais de l’avant, et voyez le résultat : j’avais des amis, et la femme la plus belle de Bowen à mon bras.

Après avoir marché quelques bonnes minutes jusqu’à l’appartement, laissant l’air frais m’enlever les odeurs de bière et de sueur du bar de la mémoire, nous rentrâmes chez nous. Alors que Lola refermait la porte, je fis un autre faux-pas en lui disant qu’elle devait être fatiguée, que je la laisserais dormir. En même temps, si le moment était à refaire, je ferais sans doute encore le même commentaire. Je ne voulais pas être intrusif, ou trop rapide dans mes démarches. Je voulais être certain que Lola était à la même place que moi. Après tout, tout ça était si soudain, il fallait qu’elle s’ajuste à ce changement entre nous deux, j’imagine. Moi aussi, d’ailleurs ; mais j’avais hâte. Je lu rapidement la déception dans le visage de ma colocataire, qui s’attendait sans doute à une fin de nuit plus magique qu’un simple bonne nuit. La jeune femme enleva son mince manteau et ses chaussures et m’affirma qu’elle n’était pas pressée d’aller au lit. Je souris. Puis elle renchérit en disant que ça avait été une grosse soirée pour moi et qu’elle comprendrait si je voulais aller dormir. Dans le noir, je secouai la tête, mais elle ne pus sans doute pas distinguer tout à fait ce sourire et cette négation, alors elle s’approcha de moi et, n’effleurant que faiblement mes lèvres, elle vint déposer un baiser sur ma joue. « Tu crois vraiment que j’arriverai à dormir en laissant ça comme c’est là ? » Nous avions débuté quelque chose et j’irais au lit sans savoir la suite ? Non. Oh que non. Je posai mes mains dans le bas de son dos et je l’approchai plus près de moi. Je penchai la tête légèrement vers la droite et me penchai aussi vers elle, Lola était bien plus petite que moi, et je l’embrassai tendrement. Sans trop m’éloigner de son visage, je murmurai : « Je pourrais t’embrasser jusqu’à demain matin. Enfin … ce matin, plutôt … » Je souris. Nous étions déjà passé à une autre journée, vue l’heure tardive.

« C’est un défi ? » Demandais-je avec un sourire quand Lola mentionna sa curiosité face à ma capacité à l’embrasser aussi longtemps. Elle n’avait aucune idée ! J’étais l’homme le plus colleux de la planète, j’adorais être juste étendu sur le divan ou dans un lit et serrer l’être aimé dans mes bras, le couvrir de baisers, de caresses. Même pas besoin que ça aille plus loin que cela. J’adorais ce simple contact physique avec la femme que j’aimais. Je pouvais y passer des heures ; même les jeux vidéo n’arrivaient pas à m’en extirper. J’attrapai donc les deux mains de Lola et je la tirai vers moi, vers le fauteuil, reculant de quelques pas à la fois. « Essayons-le alors. » Dis-je à voix basse en m’asseyant sur le fauteuil et laissant Lola s’asseoir par-dessus moi. Je repris mes baisers d’abord furtifs, tout doux, souriant entre chaque contact entre nos lèvres, plongeant mon regard dans le sien. Comme pour profiter pleinement de ces tout premiers petits moments. Après un certain temps, je commençai à l’embrasser avec davantage de passion, me gardant une certaine retenue quand même, mais un baiser n’attendait pas l’autre. Quelques minutes passèrent, durant lesquelles mes mains s’étaient promenées sur le visage et dans le dos de Lola. Je m’arrêtai et la regardai en souriant. « Si t’en a marre tu me le dis, hein … Comme je t’ai dit, moi, je pourrais faire ça tout le reste de la nuit. » Et les nuits blanches, ça me connaissait, étant un joueur nocturne de jeux vidéo. Lola n’avait donc pas à s’inquiéter que je m’endorme devant elle. Je pouvais tenir le coup. Surtout que tout cela était tellement nouveau, et tellement agréable ; y mettre fin dès maintenant relèverait de la folie.

Quand Lola commença à descendre ses lèvres le long de mon cou, c’en était fini de ma retenue. Je ne pourrais plus résister longtemps à reproduire la nuit que nous avions passée ensemble des mois plus tôt. J’avais encore l’image de son corps nu gravé dans ma mémoire, et le goût de son corps dans ma bouche. Je voulais goûter de nouveau à Lola. À Lola toute entière. Alors je retirai ses vêtements, et puis les miens, le tout aidé de la brunette. Je souris pendant que nous nous mettions à nus l’un devant l’autre. « Techniquement, nous n’en sommes pas à notre première date, alors c’est pas défendu … » Blaguais-je. De toute façon, ce n’était pas réellement défendu, juste mal vu. Je m’en fichais bien. Lola et moi nous connaissions depuis deux ans maintenant et nous habitions même ensemble. Nous faisions tout à l’envers de toute façon, alors peu importe si nous faisions l’amour ce soir ou dans une semaine. Nous étions déjà passé à une autre étape. Bref, lui faisant d’abord doucement l’amour sur le fauteuil, cette position inconfortable eut bientôt raison de nous alors nous nous dirigeâmes vers ma chambre – parce que j’en avais décidé ainsi, marchant plutôt vers celle-là que la sienne -, sans rompre nos baisers afin de ne pas laisser l’ardeur nous quitter. Comme si mon désir pour elle pouvait réellement s’éteindre en ce moment. Non. Mais je ne pouvais quand même pas me garder loin de ses lèvres. Une fois sous les draps, Lola et moi fîmes l’amour pendant une période indéterminée – dans ses bras, j’avais perdu la notion du temps. Après mon soupir de satisfaction et le sien qui était arrivé quelques minutes plus tard, je m’allongeai à ses côtés et la tirai contre moi, l’emprisonnant entre mes bras. Je déposai un baiser sur sa tempe. « Et cette fois, tu ne repars pas. Tu restes ici. » Murmurais-je à son oreille, pour lui faire comprendre que cette fois, c’était du sérieux.

J’étais tout sourire quand Lola m’affirma qu’elle n’avait pas l’intention de partir. Voilà, ça y était, nous étions enfin sur la même longueur d’ondes en ce qui concernait notre relation. Il fallait avouer que ça avait surtout été moi le problème, mais ce soir, en me rendant à la boîte de nuit, j’avais eu peur qu’il soit trop tard. Que Lola ait réussi à passer à autre chose. Égoïstement, j’étais content que ce ne soit pas le cas, puisque maintenant je pouvais être avec elle. Nos corps collés comme s’ils ne faisaient qu’un, Lola changea finalement de position afin de revenir face à moi et de plonger son regard dans le mien. Je lui souris, les yeux tout aussi brillants que les siens. La jeune femme approcha son visage et m’embrassa, baiser que je lui rendis avec tendresse. Puis je reposai ma tête sur l’oreiller, bien confortable, et me collant encore un peu plus à elle si seulement c’était possible, je fermai les yeux. Je ne voulais pas forcément dormir, mais avec le confort et la chaleur de Lola, je ne pus résister et je m’endormis au bout de quelques minutes.