we found each other in the dark (eleanor)

Un mois. Un mois sans la revoir. Un mois sans seulement même rien que voir son regard brillant, son sourire éclatant, ses cheveux toujours parfaits même si elle n’y faisait pas grand-chose. Eleanor était une beauté naturelle. Elle n’avait pas besoin d’artifices pour être resplendissante, pour briller plus que toutes les autres. Ou alors était-ce que Maxence ressentait pour elle qui faisait en sorte qu’il ne voyait qu’elle ? Même que depuis la St-Valentin, depuis le bal masqué durant lequel ils s’étaient en quelque sorte fait comprendre qu’aucun avenir n’existait entre eux, Maxence n’avait vu aucune autre femme entre-temps. Pourtant, c’aurait bien pu être le contraire, lui qui oubliait ceux qui comptaient vraiment par du sexe avec d’autres femmes qui ne signifiaient rien de plus pour lui. Évidemment, il s’était déjà brûlé avec cette méthode, avec Artémis, mais depuis que celle-ci était partie, Maxence s’était imposé de plus grandes limites. Sauf que dans le cas d’Eleanor, Maxence avait envie de démolir le mur, de repousser les barrières, de se foutre des règles. Depuis un mois, il ne pensait qu’à elle. Dans ses rêves, dans ses fantasmes, dans ses pensées. Elle était l’objet de son désir, même si la réduire à un objet n’était pas à la hauteur de ce que représentait Eleanor pour lui. Pourtant, depuis le retour de la jeune femme à Bowen, ils n’avaient pas partagé énormément de moments ensemble. Même pas un baiser. Même pas une caresse. Pas même une simple étreinte. Maxence s’était montré distant, il s’était protégé ; d’elle, de lui, d’eux. Mais surtout des autres. Parce que c’était ce qu’il savait mieux faire, redouter les autres. Réfléchir trop à ce qu’on pourrait penser de lui. Aux risques. Aux dégâts. Aux conséquences. Pourtant, plus le temps passait, plus il réalisait que c’était l’absence d’Eleanor dans sa vie qui faisait le plus de ravages. Alors, un soir, incapable de dormir parce que son cœur à l’envers l’empêchait de fermer l’œil, Maxence enfila ses chaussures de course et alla courir un peu dans les rues peu éclairées de Bowen. Des jeunes dépassant leur couvre-feu jouaient sur les terrains de basketball. Des gens fumaient et riaient à l’extérieur des restaurants et des bars. Des amoureux marchaient main dans la main. D’autres coureurs incapables de trouver sommeil croisaient Maxence. Au bout de quelques kilomètres, les pas de Maxence l’avaient portés jusqu’à la maison d’Eleanor. Ils avaient beau ne pas s’être vus énormément, le juge avait quand même su où elle habitait. Cette ville était si petite, à sa manière, que l’homme n’avait pas eu à faire beaucoup d’effort pour le savoir. Le jeune homme cogna à la porte, d’abord trois coups. Personne ne répondait. Il cogna trois coups de plus, un peu plus fortement, aussi. Il se fichait de la réveiller. Il avait besoin de la voir. Il avait besoin d’elle. Les lumières du hall d’entrée s’ouvrirent, et Maxence jeta quelques coups d’œil autour de lui. La rue était déserte. Eleanor ouvrit finalement la porte devant lui, et il tourna donc rapidement la tête vers elle. Elle sembla assez surprise de le voir là, et à cette heure-là il ne pouvait que comprendre. « Bonsoir, Eleanor. » Il fronça les sourcils en secouant la tête, la regardant d’abord sérieusement, puis avec un mince sourire qui se dessina sur son visage, creusant des trous de chaque côté de ses joues. « Oh et puis merde, Ele’, j’arrête mes conneries. » Et il posa un pied bien décidé à l’intérieur de la demeure d’Eleanor, posant rapidement une main sur la joue de la jeune femme et l’autre contre sa taille, et en entrant dans sa maison sans même y être invité, il posa ses lèvres sur celles de la jeune femme, refermant la porte d’un coup de pied une fois complètement à l’intérieur.

C’était comme si tout le désir que Maxence contenait tant bien que mal à l’intérieur de lui s’était canalisée d’un seul coup pour jaillir hors de lui. Se déversant sur leurs êtres. Agissant comme un volcan en éruption, endormi depuis bien trop de temps déjà. Maintenant que le processus était enclenché, il ne pensait pas pouvoir faire marche arrière. Il ne le voulait pas. Il ne le pourrait pas. Les lèvres d’Eleanor étaient plus douces qu’il n’aurait pu l’imaginer, son parfum l’enivrait maintenant qu’elle l’étampait sur lui, ses cheveux étaient soyeux et sentaient les fleurs au printemps. Maxence était de plus en plus attiré par elle, plus ses lèvres détaillaient son corps. Eleanor l’entraîna vers le salon, sur le canapé encore réchauffé par le corps de la belle qui y était sans doute allongée avant son arrivée. Maxence se laissa pousser sur le divan, posant ses mains sur les hanches de la brunette quand celle-ci l’enjamba, passant une jambe de chaque côté de son corps. Maxence froissait le tissu de ses vêtements entre ses mains en la caressant, avant de relever son chandail pour caresser sa peau nue. C’est Eleanor qui fut la première à franchir le pas qui leur laissa comprendre à tous les deux quelle serait la suite des choses. Maxence n’avait pas à se plaindre, parce qu’avec tout le désir qui montait en lui et qui se faisait sentir dans tout son corps, il aurait sans doute trouvé difficile de s’en arrêter là. Tout son corps désirait Eleanor. Toutes ses pensées aussi. À ce moment-là, la logique et la raison de Maxence étaient bien loin. Elles avaient finalement décidé de lui donner un moment de répit. De lui permettre de s’abandonner à ses désirs les plus fous. Le juge se laissa faire, ne détachant ses lèvres que lorsque le chandail fut enlevée par-dessus sa tête, et reprenant possession de celles d’Eleanor dès que le chandail se retrouva au sol. Eleanor le regarda un instant, et Maxence lui sourit en lisant tout le désir dans le regard de la jeune femme. Elle le voulait autant que lui. Tout ce qui se passait en ce moment. Elle lui demanda, alors, après une certaine hésitation : « T'es sûr ? » Oui. Maxence était sûr et certain. En ce moment, il n’y avait pas d’autre option que de se lancer dans le vide avec Eleanor. Mais ça, c’était bien pour le moment. Qui sait ce que Maxence penserait demain, ou dans quelques jours, quand sa raison et sa logique décideraient que c’en était assez. Parce qu’évidemment, l’impulsivité ne serait pas reine pour le restant de ses jours. Maxence avait toujours été un homme très, trop, réfléchi. Et même si cet instant de faiblesse lui faisait réaliser à quel point il était bon de s’abandonner, il savait aussi que ça ne pourrait pas durer éternellement. Toutefois, pour le moment, il était sûr. « Oui. » Souffla-t-il après avoir hoché la tête et embrassé Eleanor, entreprenant finalement de la déshabiller à son tour. Et, une fois tous les deux en sous-vêtements, Maxence jugea bon à son tour de s’assurer du consentement d’Eleanor. Il était arrivé chez elle comme une fusée, rentrant dans sa bulle sans prévenir, faisant monter le désir sans qu’ils puissent vraiment prendre le temps de comprendre ce qu’il se passait. Il n’avait pas envie qu’elle le regrette. Qu’elle lui en veuille d’avoir ainsi tout chamboulé. « Et toi ? » Avait-il donc demandé à son tour, malgré les minutes qui s’étaient écoulées depuis.

Lui qui avait toujours été un homme droit, un homme qu’il croyait être bon et respectable, le voilà qui s’apprêtait à franchir les limites avec une femme mariée. Le tout en brisant les promesses qu’il s’était faites à lui-même, soit de ne jamais mettre en péril ce qu’il avait bâti si difficilement, à coup de nuits blanches et de privation. À moins que ça n’en vaille la peine. La question qui aurait dû être pensée bien plus longtemps était : Eleanor valait-elle la peine de renier à ce point qui il était, et ce qu’il voulait pour sa carrière ? Là, dans le feu de l’action, il était prêt à crier sur tous les toits que oui, Eleanor valait son imminente chute. Parce que pour être amoureux, il fallait auparavant tomber, n’est-ce pas ? D’où l’expression tomber amoureux. Maxence se laissait courir plus vite que jamais vers cette falaise d’où il s’effondrerait. Il remettait toute sa confiance entre les douces mains d’Eleanor, espérant qu’elle trouve la force de le reconstruire, morceau par morceau. Ainsi, Maxence se dévêtit au même rythme que la belle, après s’être assuré qu’elle le voulait tout autant que lui. Il profita un peu da poitrine dénudée, laissant ses mains et ses lèvres apprendre leur courbe par cœur, sur le bout de ses doigts. Maxence retenait ce désir et entretenait ce fantasme depuis longtemps dans ses rêves éveillés, que maintenant qu’il se trouvait devant le corps d’Eleanor, il avait du mal à se contrôler, à retenir ses pulsions. Sans pour autant s’être lassé du haut du corps de la jeune femme, le juge descendit cette fois vers le bas, retirant le peu de vêtements qu’il restait à Eleanor. Elle fit de même pour lui, et bientôt, ils ne firent qu’un. Maxence s’attarda autant au plaisir de la brunette qu’au sien, faisant en sorte que leurs gémissements s’harmoniaient les uns aux autres en une sérénade de plaisir. Quand ils eurent tous les deux été satisfaits, ou du moins Maxence le croyait fort bien, ce dernier se retira et vint s’allonger sur le canapé, sur le dos, attirant le corps nu d’Eleanor contre lui, par-dessus lui. Il embrassa la jeune femme sur sa tempe droite, avant de la laisser poser sa tête sur son torse et d’emmêler ses doigts dans ses cheveux de princesse. Parce qu’elle en était une. « Je n’arrive pas à croire que j’ai attendu aussi longtemps avant de vivre ça avec toi … » Déclara-t-il en un soupir de contentement. Maxence avait un sourire aux lèvres, ce genre de sourire qu’on ne peut retenir, qu’on ne peut voiler derrière un air grave. Il ne regrettait pas, pour le moment, que ses pas de course l’aient mené jusqu’ici, jusqu’à elle. Demain était certes un autre jour, mais pour l’instant, Maxence voulait s’accrocher à ces quelques heures de paix qu’ils pouvaient s’offrir. « Je ne veux penser à rien d’autre, cette nuit. Je ne veux pas réfléchir. » Ajouta-t-il, voulant peut-être à quelque part faire comprendre à Eleanor qu’il ne savait pas vraiment ce qu’il faisait, et qu’il ne voulait pas non plus le savoir. Pas maintenant.  

Un sourire se dessina sur les lèvres de Maxence aux paroles d’Eleanor. « Moi non plus. Tout ça semblait si... naturel entre nous deux. » Il caressait ses cheveux tout en hochant doucement la tête, avant de lui répondre, d’une voix calme et paisible : « Ça a toujours été naturel, entre nous, au fond … ça se fait tout seul … » Et c’était justement ce qui avait fait en sorte que Maxence avait autant mis les freins entre eux deux. Ça coulait trop naturellement, justement, alors le juge savait fort bien qu’il s’attacherait trop facilement à Eleanor, si ce n’était pas déjà fait. Il avait l’impression que depuis le jour où ils s’étaient involontairement échangé leurs téléphones portables, Maxence et Eleanor n’avaient fait que suivre le chemin qui leur était déjà tracé, et que le juge s’entêtait à mettre des bâtons dans leurs roues alors qu’il était inévitable qu’ils se rendent jusqu’au bout du chemin quand même. N’importe quels autres inconnus auraient procédé à l’échange des engins téléphoniques dès les premières journées de l’échange. Eux, non. Eux avaient décidé d’apprendre à se connaître, à se taquiner, à s’aimer. Tout naturellement. Mais comme Maxence avait encore bien des réticences face à cette relation, étant encore bien ancré dans sa position malgré cette nuit des plus déconcertantes, il déclara ne pas vouloir penser à quoi que ce soit d’autre. Entre eux, ça avait toujours été compliqué, et cette nuit d’amour ne venait que complexifier leur situation sentimentale. Heureusement pour lui, Eleanor sembla presque soulagée de l’entendre le dire. Comme si elle n’osait pas le faire d’abord. « Moi non plus, peu importe ce qu'il se passe demain. Je veux profiter de l'instant présent. Je ne pourrais rêver meilleur endroit que tes bras. » Lui aussi soupira de soulagement, parce que la réponse d’Eleanor était parfaite pour ses sentiments actuels. Maxence n’était sûr de rien sauf du bonheur qu’il ressentait dans les bras de la jeune femme, cette nuit. L’instant présent était tout ce qui lui importait, car le lendemain était encore trop confus pour lui. « Faites que demain n’arrive pas trop vite. » Déclara Maxence, s’adressant à un Dieu quelconque même s’il ne croyait pas vraiment en une quelconque force supérieure. S’il y en avait une, à quelque part, il désirait plus que tout que le soleil ne se lève plus jamais. Rien que pour Eleanor. Cette dernière releva la tête et déposa un chaste baiser sur les lèvres du juge, qui la regarda avec un sourire charmé. « Tu veux boire ou manger quelque chose ? » Maxence la serra un peu plus fort dans ses bras. « Encore deux minutes. » Déclara-t-il, fermant les yeux et posant son menton sur le dessus de la tête de la belle. Ils restèrent un moment en silence, jusqu’à ce que Maxence bouge légèrement. « Est-ce que je pourrais oser demander à passer rapidement sous la douche ? » Il avait couru jusqu’à ici pour ensuite faire l’amour à Eleanor, alors forcément, avant de manger, Maxence préférait se laver un peu. Aux côtés d’Eleanor, peut-être ; ce serait mille fois mieux.

Tout bon moment a une fin, et même si Maxence aurait voulu sentir les doigts d’Eleanor effleurer son torse toute la nuit, même s’il aurait voulu la maintenir contre lui à l’infini, il savait que c’était déraisonnable de croire qu’une éternité dans ses bras était possible. Maxence s’était jeté dans la gueule béante de l’irrationalité le temps d’une soirée, mais plus les minutes passaient, plus il réalisait que la Terre continuait de tourner sur elle-même et autour du Soleil, ce qui ferait en sorte que ce dernier se lèverait quand même, dans quelques heures. Qu’ils le veuillent ou non, la noirceur finirait par laisser sa place à la lumière et là, ils ne pourraient plus se cacher, dissimulés dans l’obscurité du divan d’Eleanor. Maxence demanda alors à la jeune femme s’il pouvait passer sous la douche. Tout en se sentant plus propre par la suite, l’eau sur son corps le réveillerait également, et ainsi il pourrait passer encore quelques heures les yeux ouverts, profitant de la présence de la jeune femme, de son sourire, de ses regards doux, de ses paroles ensorcelantes. S’il restait une seconde de plus étendu auprès d’elle, il s’endormirait, et Maxence n’était pas prêt à dire au revoir à ce précieux et éphémère moment. « Oui, mais seulement si je viens avec toi. » Un sourire se dessina sur les lèvres de l’homme alors qu’Eleanor se levait, lui tendant la main. « C’était sous-entendu. » Avait répondu Maxence sans hésiter. Il attrapa la main de la brunette et se leva, lui volant un baiser avant de la suivre jusqu’à la salle de bains. Elle alluma l’eau et se glissa la première sous la douche, et l’homme la suivit, refermant la porte vitrée derrière lui. Il s’approcha d’Eleanor, de sorte à ce que tous les deux puissent profiter des gouttes d’eau déferlant sur leurs corps nus. Après un moment passé à sourire et se regarder dans le blanc des yeux, Maxence attrapa le savon et lava son corps pendant qu’Eleanor faisait de même de son côté. Puis, après avoir terminé de son côté, Maxence attrapa le savon de la jeune femme et commença à passer ses mains savonneuses dans le dos d’Eleanor, s’attardant à chaque parcelle de sa peau. Il s’arrêta au commencement de ses fesses, déposant le savon dans son contenant, avant de commencer à donner des baisers sur le dos encore savonneux de la jeune femme.  Il aurait voulu lui faire l’amour, encore et encore. Il savait maintenant : Maxence n’aurait jamais assez d’Eleanor. Une nuit ne suffirait pas à l’effacer de ses pensées.

Puisqu’elle profitait de ces quelques secondes de silence pour regarder Maxence en détails, lui aussi se permit de profiter de la vue qu’il avait sur Eleanor, chaque parcelle de sa peau ruisselant de perfection sous l’eau qui coulait maintenant de sa tête à ses pieds. Le juge la repoussa légèrement sous le robinet afin d’avoir à son tour un peu d’eau tiède sur son corps, un mince sourire s’installant sur son visage alors que le jet trempait le visage de son amante. Elle inclina sa tête et Maxence passa sa main sur le front de la jeune femme pour y enlever l’eau de trop. Ils entreprirent finalement de se laver, d’abord par eux-mêmes, pour se prêter ensuite au jeu de l’affection en se savonnant le dos l’un et l’autre. Alors que Maxence déposait un baiser en bas de l’épaule de la jeune femme, cette dernière frissonna et se retourna pour lui faire face, et passa sa main dans les cheveux de l’homme avant de les empoigner et d’attirer leur visage l’un vers l’autre. Maxence goûta de nouveaux à ses lèvres maintenant mouillée, et il l’embrassa avec tout autant d’ardeur. Il ferma les yeux quand elle referma sa main sur son sexe, laissant un gémissement de plaisir sortir d’entre ses lèvres. Il ne les rouvrit que lorsqu’il sentit la bouche d’Eleanor contre son oreille, lui murmurer, ou plutôt le suppliant, de lui faire l’amour. Leurs joues se frôlèrent sur le chemin du retour de la tête d’Eleanor, et Maxence ne se fit pas prier pour s’emparer de nouveau des lèvres de la riche héritière. L’excitation entre eux deux étant déjà à son comble, le juge délaissa un instant le regard et les lèvres de l’italienne pour examiner la configuration de la douche, et trouver une solution de pouvoir lui faire l’amour sans risquer de se blesser. Il souleva Eleanor afin qu’elle enroule ses jambes autour de lui, et entoura d’une main le pommeau de la douche pour se donner un soutien, et son autre main se posa à plat contre le mur du cabinet. Les bras d’Eleanor autour de son cou suffisaient à la maintenir stable. Sans plus attendre, il exauça les souhaits de son amante et lui fit l’amour pour la seconde fois de la soirée, cette fois bien plus rapidement, plus sauvagement, surtout parce qu’ils ne tiendraient pas des heures dans cette position. Quelques minutes plus tard, il redéposait Eleanor les deux pieds au sol, et l’embrassa avec douceur, tenant son menton d’une main. « À ce rythme-là, je ne pourrai pas retourner chez moi à la course … » Dit-il en esquissant un sourire. C’était bien de cette façon qu’il était parvenu jusqu’à elle, mais depuis, elle épuisait toute son énergie. Et il ne demandait pas mieux. Les deux amants se lavèrent grossièrement de nouveau, avant de sortir de la douche. Simplement enroulé dans une serviette autour de ses hanches, Maxence suivit Eleanor jusqu’à la cuisine. « Si tu savais combien de fois j’ai rêvé, éveillé ou endormi, à ce moment. Avant même que tes paroles ne deviennent bien plus que de simples sms arrogants échangés de chaque côté de notre monde. » Il lui sourit, amusé par cette façon bien originale que le destin avait trouvé de les mettre tous deux sur le chemin de l’un et de l’autre.

« Tu peux rester ici autant que tu le désires. » L’offre d’Eleanor était certes des plus tentantes, mais Maxence avait cette petite voix dans sa tête qui le mettait en garde : cette idylle ne pourrait pas durer éternellement. Ils ne pourraient pas rester vautrés dans la maison d’Eleanor des jours durant, ignorant tout du monde extérieur. Cette perspective était fort alléchante, mais surtout bien peu réaliste. Ils avaient tous les deux des obligations, des responsabilités, auxquelles ils ne pouvaient aussi aisément déroger. Pourtant, l’envie de tout balancer en l’air était bien présente chez le juge, et c’était bien de ce sentiment trop fort, trop intense, dont il avait toujours eu peur en se rapprochant de la belle italienne. Cet amour passionné pouvait tout aussi bien être un baume sur son cœur qu’une plaie dans sa vie, sa vie si durement construite. Mais son cœur, lui, était si seul. « J’aimerais que ce soit aussi simple. » Avait finalement répondu Maxence, sa main descendant doucement le long du bras d’Eleanor, sa voix déçue par son propre écho. Il aurait aimé sauter à pieds joints avec Eleanor, vivre d’amour et d’eau fraîche durant les prochaines nombreuses heures, se déconnecter du reste du monde. Fermer son téléphone portable. Ce même téléphone qui les avait un jour unis et qui pouvait maintenant tout faire disparaître en poussières. Il ne suffisait que d’un appel, un seul, sommant Maxence de retourner à Brisbane, pour que tout s’effondre. Malgré cela, Maxence désirait que chaque seconde compte pendant qu’il se trouvait encore en la compagnie de l’italienne. Avant qu’il ne soit trop tard pour s’y accrocher. Une fois leur douche terminée, les amants maudits se dirigèrent vers le salon, adjacent à la cuisine, et Maxence parla de ces rêves devenus réalité cette nuit, et de cette transformation inopinée de leur relation au fil du temps. Qui aurait cru que cet échange de téléphones portables, d’abord insignifiante, allait prendre une tournure aussi déterminante dans leur vie ? « Quand on y pense, notre rencontre était tellement improbable. C'est un coup du destin, forcément. » Un coup du destin, oui, sans nul doute. Une force quelconque, allant des Dieux aux anges, avait fait en sorte qu’Eleanor et Maxence se rencontreraient, ce matin-là, à l’aéroport. Et que leurs vies serait à jamais liées dès lors. « Le destin qui, dans cette histoire, est à la fois bon et cruel. » Avait ajouté Maxence, puisqu’il avait beau se compter chanceux qu’on ait mis l’italienne sur son chemin, il savait également que ce ne serait jamais facile pour eux. Quel drôle d’humour il avait, ce destin, de faire tomber amoureux deux êtres humains qui ne pourraient s’aimer au grand jour. « Vous me rendez dingue, Monsieur le Juge, vous savez ça ? » Eleanor s’était approchée de lui et avait emprisonné son cou entre ses bras. Il sourit, l’embrassant furtivement, laissant son corps épouser la silhouette de l’italienne. « Je vous ai d’abord rendue dingue par mon indiscrétion et ma curiosité mal placée, dois-je vous le rappeler, princesse Milani ? » Releva Maxence, se souvenant bien de leurs conversations écrites où chacun d’eux relevaient les plus grands secrets de l’autre.

C’était plus fort que lui. Il devait tout calculer, tout songer, tout analyser. Rien n’était abandonné à l’oubli, rien ne lui filait sous les yeux, à Maxence. Il avait un esprit pragmatique et une raison qui prenait toute la place. Il ne se laissait jamais, ou trop peu, porter par ses sentiments impulsifs et dangereux. Des pulsions, Maxence, il en avait à la tonne. Au fil des années, il avait appris à les contrôler, à les apprivoiser afin de les calmer dès qu’elles arrivaient telles des bêtes sauvages. Eleanor faisait ressortir en lui toutes ces pulsions irraisonnées, irresponsables mais ô combien si bonnes. Il aurait aimé, plutôt que de les ranger dans un coin de son cœur pour les étouffer, les alimenter et se convaincre que ce n’était pas le mal, qu’au contraire c’était la clé tant attendue vers le bonheur, mais Maxence n’y arrivait toujours pas. Il n’arrivait pas à se rendre à l’évidence qu’Eleanor était ce dont il avait besoin, ce qu’il attendait, et ce dont il ne pourrait pas se passer lorsqu’elle ne serait plus dans sa vie. Maxence voulait croire que ce qu’il avait bâti était plus important que le reste mais, au fond, plus il apprenait à connaître Eleanor, plus il réalisait qu’il avait sans doute eu faux sur toute la ligne. Le juge avait toujours fait passer sa carrière avant ses amours, mais sans doute cela allait-il le mener à sa propre perte. « Je sais. Mais plus on avance et plus je me dis que je serais prête à faire n'importe quoi pour toi. » Lui aussi, mais ça, Maxence n’était pas prêt de le lui dire, car ce serait de baisser sa garde bien plus qu’il ne pouvait se le permettre. Ce serait se montrer vulnérable, montrer à Eleanor qu’il y avait bel et bien de l’espoir pour eux, alors qu’au fond il n’en avait pas lui-même la certitude. Il avait beau le vouloir de tout son cœur, il avait beau s’être écarté de son droit chemin cette nuit et y avoir pris goût, Maxence ne voulait pas lui promettre ce qu’il ne pouvait respecter. Elle comptait trop à ses yeux pour qu’il lui fasse un tel coup ; même si le mal était sans doute déjà fait depuis bien trop longtemps. « Je sais. » Avait-il répondu, lui offrant un sourire plein de tendresse. Ils parlèrent de destin, et Maxence releva à quel point celui-ci jouait des deux côtés, usant des forces du bien et du mal à la fois. Le juste et l’injuste. « Avant toi, j'ignorais qu'il était possible d'être incroyablement heureuse et malheureuse en même temps. » Eleanor le regarda, un regard intense, où la joie était bien entendu lisible, mais qui cachait également cette tristesse dont elle parlait. Le regard de Maxence lui ressemblait sans doute, à ce moment précis. « J’aimerais tellement pouvoir effacer la portion malheureuse de notre amour, Eleanor … » Pour la première fois, Maxence avait parlé d’amour, sans trop réfléchir aux conséquences que ce mot pouvait engendrer. Pour le moment, c’était bon, c’était bien, alors qu’ils se rapprochaient l’un de l’autre et ressassaient les drôles de souvenirs de leur rencontre, mais tôt ou tard cette affirmation lui reviendrait en plein visage. « En effet. Mais même lorsque tu étais insupportable, j'étais déjà raide dingue de toi. » Maxence rigola, son sourire ne s’étant toujours pas estompé lorsqu’Eleanor posa ses lèvres sur les siennes. « Ce n’était pas du tout l’impression que tu me laissais. Tu cachais bien ton jeu, Ele’. Et c’est exactement ce qui m’a fait craquer. » Il sourit, puis se détacha légèrement d’elle, conservant sa main dans la sienne. « Alors, ce repas nocturne ? » Après tout, elle avait bien proposé de manger quelque chose, après cette douche demandée par Maxence.