There's a part of me that you don't know | Tahlia Wates

Adilyn était en repos le temps d'une journée, elle en avait profité pour faire un peu le ménage chez elle, faire quelques courses et d'autres choses que tout Homme ferrait en dehors du travail. Mais sa journée était vite passée et elle n'avait pas envie de passer sa journée dans sa maison, elle avait envoyé un message à son amie Tahlia pour aller prendre un café en ville dans l'après-midi. Elle ne savait pas si elle travaillait, mais ça faisait un petit moment qu'elles ne s'était pas vu, et pour Adilyn voir ses amies c'est important, surtout après une si longue absence. Mais elle avait peur de dire indirectement à un de ses amis qu'elle avait fait de la prison, rester éloignée c'était la meilleure solution à ses yeux.

Milieu d'après-midi, elle prit sa voiture pour se rendre en ville. Même si elle connaissait Tahlia depuis longtemps, elle ne pouvait pas s'empêcher de stresser, elle était revenue en février et avait peur que son amie lui reproche de ne pas être passée la voir plus tôt, bien qu'elles s'envoyaient souvent des sms. Les deux années précédentes, Adilyn était partie faire une sorte de tour de monde arrangé à sa sauce pour voir d'autres horizons. Et elle s'était installée parfois, pour faire des stages en médecine de courte durée. À l'époque, son but était de devenir un médecin reconnu, maintenant, elle ne sait même pas si elle veut garder son métier, elle part la boule au ventre tous les matins, de peur de retrouver une énième personne morte dans son lit d'hôpital, sans compter sur Maisy, qui jure passer tous les mois pour la faire chanter.

Arrivée à l'endroit, elle se commanda un café puis partie attendre sur la terrasse, avec un temps pareil, elle ne voulait pas rester planter à l'intérieur. Le temps que son amie arrive, elle zieutait son portable envoyant des sms à ses proches.

Aujourd'hui, Tahlia s'était octroyée un jour de repos. Elle se rendait compte qu'elle travaillait énormément ces derniers temps, mettant parfois de côté sa famille et ses amis. La preuve avec Adilyn, qu'elle n'avait toujours pas revue depuis son retour à Bowen, un retour qui datait de près de deux mois. Les deux jeunes femmes discutaient, certes, par messages, mais cela ne valait pas une rencontre de vive voix. Elles avaient des choses à se dire... surtout Tahlia qui espérait avoir quelques explications face à la découverte qu'elle avait faite il y a deux jours. La jeune policière n'avait toujours pas le droit de se rendre sur le terrain. Elle avait donc continué la mise à jour des dossiers de Boweniens ayant eu affaire à la police. Quelle fut donc sa surprise lorsque le nom d'Adilyn lui sauta aux yeux ! Tahlia avait longuement hésité à ouvrir son dossier, ne voulant pas mêler vie professionnelle et vie personnelle -ce qu'elle ratait déjà assez bien avec Jackson - mais la curiosité avait été plus forte que tout. Elle avait donc découvert l'énorme erreur judiciaire subie par son amie, son incarcération pour homicide et le bref séjour qu'elle avait fait en prison. Tahlia était restée bête devant son ordinateur, puis l'incompréhension s'était mêlée à cette surprise. Pourquoi ne lui avait-elle rien dit ? Tahlia attendait donc énormément de cette rencontre.

Tahlia était venue à pied, estimant que cela lui changerait les esprits et la calmerait avant son arrivée au café. La brunette ne savait pas comment agir : faire comme si elle ne connaissait pas le secret d'Adilyn, ou bien foncer dans le tas, sans moindre mesure ? Tahlia optait souvent pour la deuxième solution, mais aujourd'hui, elle préférait la jouer fine. Montant divers scénarios dans sa tête, tout s'envola en poussière quand elle aperçut la jeune femme sur la terrasse. Tous les questionnements qu'elle se posait avait laissé place à la joie de voir son amie. Elles ne s'étaient pas vues depuis longtemps, bien trop longtemps. Lançant un "salut !" bien joyeux, Tahlia la serra ensuite dans ses bras, avant de lui adresser un grand sourire : "ça me fait trop plaisir de te voir ! J'ai l'impression qu'avec nos emplois de ministres, on n'allait jamais réussir à se croiser." Un rire ponctua sa phrase, avant de se tourner vers le serveur, à qui elle commanda également un café. Elle reposa ensuite ses yeux verts sur la jeune femme, lui demandant, alors qu'elle s'installa à sa table : "Alors, comment vas-tu ?"

La cuillère avait fait le tour de sa tasse une bonne dizaine de fois, les yeux de la jeune femme étaient rivés sur la tasse. Son amie devait arriver dans pas longtemps, et elle ne se ressoudait pas à boire sa tasse avant son arrivée. Adilyn avait rangé son portable dans son sac à main pour ne pas être tentée de le regarder pendant ses retrouvailles avec une de ses bonnes amies. Levant la tête, elle scrutait toutes les personnes qui passaient dans la rue, peut-être que Tahlia avait changé, mais elle espérait que non, elle voulait la reconnaître du premier coup d’œil.

Puis à peine cinq minutes plus tard, au loin elle voyait la brune arriver. Tout sourire, elle se levait pour aller prendre son amie dans ses bras. « Hey ! » Ça faisait des années qu'elles ne s'était pas vu en chair et en os. Elle se sentait plus soulagée après l'avoir vu, elle riait à sa remarque. « C'est clair, je me demandais combien de mois il allait falloir encore attendre ! » Elle mentait, c'était uniquement de sa faute si elle n'avait pas vu Tahlia entre février et aujourd'hui, passer un soir chez elle dans la semaine était tout à fait faisable. Adilyn touilla encore son café pour faire passer le temps et pour se détendre. « Un peu fatiguée à cause du boulot et d'Abygaël mais ça peut aller ! » La blonde lui avait vaguement évoqué le cas d'Abygaël, petite fille qu'elle héberge le temps que ses soucis s'envolent. « Puis je consacre mes seules journées de repos à faire du ménage, faire des courses et tout les trucs chiants et épuisant ...» Elle esquissait un léger sourire, en voyant le serveur revenir. Le service était rapide, elles allaient donc pouvoir parler sans pouvoir être interrompues. « Assez parlé de moi ! Toi, tu vas bien ? » Elle portait pour la première fois son café aux lèvres, savourant la seule boisson qui arrivait à lui donner de l'énergie pour ses journées bien chargées.

En l'espace de quelques secondes, l'appréhension de Tahlia s'était envolée. La jeune femme craignait, qu'après autant d'années sans se voir, l'amitié qu'elles se portaient avait disparu. Mais, finalement, c'était comme si elles se revoyaient après seulement quelques mois. Ce qui était rassurant, en soi. Tahlia esquissa un sourire à la réponse d'Adilyn, haussant les épaules nonchalamment, comme si elle tentait de dédramatiser le tout : "Nous sommes devenues des adultes, c'est pour ça !". Bien sûr, cela ne tenait pas la route. Elles auraient très bien pu se voir au détour d'un café, mais soit, il valait mieux en rire. Elles étaient toutes les deux fautives sur ce coup-là. Alors qu'elle s'installa à la table et qu'elle commanda à son tour un café, la jeune policière reporta ses yeux verts sur Adilyn et lui demanda rapidement comment elle se portait. Un sourire se dessina sur ses lèvres quand son amie évoqua Abygaël, cette petite fille qu'elle accueillait. Cela avait dû être un grand chamboulement dans sa vie. Mais quand elle continua sur les tâches peu réjouissantes qui animaient sa journée, Tahlia se mit à rire en répliquant : "On dirait une vraie petite mère de famille !" Le regard de Tahlia s'était fait taquin, bien évidemment. Quand le serveur revint, elle le remercia puis ramena son attention sur son amie, en répondant directement : "Oh ça va bien, comme d'habitude, toujours le même train-train quotidien. Certes, je m'ennuie un peu au boulot, ces derniers temps, mais je l'ai cherché." Tahlia se tut un bref instant, le dossier d'Adilyn lui revenant en tête, mais elle préféra contourner ses pensées en enchaînant : "Et du coup, avec Abygaël, ça se passe bien ?"

Elles étaient adultes, tout ce qu'il y avait de plus adultes, Adilyn avait passé la trentaine qu'il y a un an de cela, on ne peut pas dire qu'elle était une enfant ou une adolescente, époque qu'elle regrettait parfois ; aujourd'hui elle se réfugie dans le secret, elle a toujours une boule au ventre en arrivant au travail et elle n'a plus vraiment le temps de voir ses amis autant qu'elle le voudrait. « Malheureusement ! » Accompagnait-elle d'un léger rire sarcastique. La trentenaire lui disait comment elle allait sans donner trop de détails, elle aurait pu lui parler de Maisy qui jouait avec ses nerfs, mais Tahlia n'était pas au courant pour sa visite en prison qui aurait pu être définitive jusqu'à que par miracle on la juge innocente. « Si mon copain ne m'avait pas quitté avant mon tour du monde, peut-être que j'le serais. » En fait, c'était Adilyn qui l'avait quitté parce qu'elle l'avait retrouvé dans leur lit en compagnie d'une autre charmante jeune femme alors qu'elle allait lui offrir un billet pour qu'ils voyagent à deux, mais elle ne l'a jamais dit à personne et ce n'est pas plus mal. Mais devenir mère de famille a toujours été son rêve. « Tu es sanctionnée jusqu'à quand en fait ? » La blonde prenait une autre gorgée de son café, elle en avait besoin pour tenir debout, puis si elle avait besoin d'une autre tasse, elle en commanderait une autre. « Pour le moment tout se passe bien ! Du moins de mon côté, je pense que pour elle ça doit être compliqué de ne pas voir sa maman tout les jours … mais j'essaye de la rendre un peu plus heureuse chaque jour. Si tu savais tout ce que j'ai dépensé dans des bouquins. » Disait-elle en soupirant, elle qui pensait mettre qu'un bouquin dans une rangée dans son étagère, finalement il allait bientôt falloir acheter une étagère pour l'enfant. « Elle dévore plus de livres qu'elle n’abîme des jouets, ça me surprend encore … Moi qui pensais que tous les enfants préféraient décapiter la tête des barbies. » Son doux rire reprit, ce n'était qu'une image qu'elle avait en tête, mais la décapitation la fit soudainement grimacer, elle repensait encore à la prison.

Tahlia haussa les épaules à son "malheureusement". Finie l'époque durant laquelle seules les sorties entre amis comptaient. Maintenant, il y avait le boulot, le loyer et les factures à payer, le foyer à gérer, même si Tahlia vivait au sein d'une colocation à la Friends. La jeune femme posa ses yeux verts sur Adilyn, esquissant une légère grimace lorsqu'elle parla de sa rupture avec son copain, répondant simplement : "Avec des si, on changerait le monde... Mais ne t'en fais pas, un jour, ça nous arrivera aussi. Et on se retrouvera à ce café pour se plaindre de nos maris et de nos gamins, en se rappelant de ce jour." Tahlia se mit à rire. Pour cela, fallait qu'elle sache d'abord garder un homme plus d'un an... Soit ! La policière but une gorgée de café, soupirant à la question de son amie : "Jusqu'à ce que mon boss m'oublie ! Je vais finir par devenir folle. L'avantage, c'est que j'apprends beaucoup de choses... vraiment beaucoup de choses." Tahlia était tenue par le secret, mais c'était une brèche qu'elle ouvrait , un message subliminal qu'elle envoyait à Adilyn. Seulement, Tahlia ne voulait pas lancer une telle bombe aussi brusquement. Répondre "je sais que tu as fait de la taule" entre deux gorgées de café n'était décidément pas approprié. Elle voulait quand même ménager son amie. Elle dévia la conversation sur la petite fille, esquissant un sourire tendre en entendant ses paroles. ça lui donnait presque d'envie d'avoir un enfant rapidement. Presque. "C'est quand même un grand chamboulement pour elle. Ce n'est pas facile ce qu'elle vit, encore plus à l'âge qu'elle a." Tahlia en voyait pas mal des affaires de ce genre et ce n'était jamais facile de lancer les procédures pour qu'un enfant soit séparé - temporairement ou définitivement - de ses parents. La jeune femme se mit à rire quand elle évoqua les châtiments réservés aux fameuses Barbies. "Ou leur couper les cheveux, c'est récurrent. En tout cas, ça fait plaisir de voir une gamine qui dévore autant de livres plutôt que de rester les yeux rivés sur un écran. Qu'elle ne perde jamais ça !" Tahlia était une grande lectrice, forcément, elle ne pouvait qu'apprécier l'engouement cette petite lectrice. Elle but une nouvelle gorgée de café, reprenant : "Toi aussi, ça a dû te faire un grand changement. D'un coup, tu te retrouves à la charge d'une petite fille. C'est beau comme geste... mais tu ne te sens pas un peu... prisonnière ?" Le mot était subtilement choisi, peut-être inadapté à la situation - on n'est jamais prisonnier d'un enfant (quoique) - mais elle voulait guetter la réaction d'Adilyn.

Elle riait de plus belle, c'est vrai qu'avec des hypothèses, elle ne changerait pas grand-chose. Puis ce n'était pas plus mal qu'ils se soient quitté ces deux-là, maintenant elle allait pouvoir trouver quelqu'un qui voulait vraiment une famille. « Je note ton rendez-vous. Peut-être que dans dix ans on sera toujours là et seule. » Disait-elle avait un ton ironique, elle se sentait déjà parlée comme une vieille ; bien que tout ça était exprès. Adilyn ne comptait pas mourir seule entouré de chat comme tout le monde à tendance à dire, elle irait plutôt adopter des enfants pour combler son manque d'amour, puis c'est certain qu'Abygaël serait partie. « Tu attises ma curiosité. » Si ce n'était pas dans l'ordre du professionnel, la trentenaire l'aurait bombardé de questions pour savoir ce qu'on pouvait bien apprendre dans un commissariat. Mais c'était comme ses patients et le secret médical, tout ce qu'il se passe à l'hôpital reste à l'hôpital et ça doit être de même pour Tahlia. Elle acquiesçait d'un mouvement de tête ce qu'elle disait pour la pauvre Abygaël. C'était méchant de le penser, mais parfois elle se demandait pourquoi l'avortement était interdit dans l'état du Queensland, certains enfants ne devraient pas avoir des parents affreux. L'infirmière regardait les gens passer à côté d'elles tout en écoutant son amie qui parlait de découper les cheveux des poupées. « Ça sent le vécu. » Concluait-elle d'un rire. Pour ce qui était de son cas, c'était sa passion de découper les cheveux des poupées, mais uniquement pour faire crier sa mère qui ne voulait jamais lui racheter d'autres mais qui cédait toujours. « Chez moi, elle ne risque pas de perdre ça ! » Mit à part regardé la télévision et parfois pendant quelques petites minutes aller sur internet, l'enfant ne faisait rien de plus, Adilyn lui interdisait. Elle voulait bien être sympathique, mais elle avait une limite. « J'hésite à acheter un animal, j'ai vu partout que c'était bon pour les enfants et que ça évitait certaines allergies … mais je ne sais pas si j'avais le temps de m'en occuper comme je voudrais. » Elle esquissait un petit sourire. « Peut-être que j’achèterais un poisson. » Ça la changeait de vivre sans animaux, elle qui ne vivait que pour ça quand elle était plus jeune, c'était une vraie foire chez ses parents. « Prisonnière ? » Elle déglutit puis faisait un sourire forcé. « J'adore les enfants puis ça me prépare à une vie future peut-être ! » La blonde rêvait vraiment de devenir mère, un jour.

"Dans dix ans, on ne sera plus seule, voyons ! Si c'est toujours le cas, rien à faire, je fais un bébé toute seule." Tahlia se mit à rire, même si elle espérait clairement ne jamais en arriver à ce point-là. Comme quoi, quand elle disait qu'elle finirait seule avec des chats... Il valait mieux en rire, encore plus avec Adilyn, qui avait autant de chances qu'elle en amour ! Toutefois, la conversation prenait un tournant plus sérieux, notamment avec les sous-entendus que Tahlia envoyait. Elle attisait la curiosité de son amie, mais pourtant la jeune policière resta silencieuse, haussant simplement des épaules. Quoiqu'il en soit, la petite Abygaël était désormais le sujet principal et il suffisait de parler d'un enfant pour évoquer tous les châtiments causés à ces pauvres poupées Barbies. Tahlia éclata de rire à la réponse d'Adilyn, rétorquant directement, avec un ton faussement innocent : "Non non. Tu me connais, je suis aussi douce qu'un agneau !" La blague de l'année, bien évidemment ! Tahlia esquissa néanmoins un sourire plein de tendresse quand Adilyn lui confirma qu'elle ne lui fera pas perdre le goût de la lecture. La jeune Wates n'en doutait absolument pas. "En tout cas, il faudra que tu me la présentes, un de ces quatre. Je lui apprendrai toutes les bonnes bêtises à faire." La jeune femme lui adressa un grand sourire; hochant la tête quand elle évoqua l'idée de prendre un animal. "Le poisson, ça ne sert à rien. Pourquoi tu ne lui prends pas un chat ? C'est toujours plus indépendant qu'un chien. Et puis, ça lui permettrait de s'occuper de quelqu'un. C'est important pour un enfant." Le jour où Tahlia aurait des enfants, il était certain qu'il y aurait des animaux. Elle adorait les chiens. Quoiqu'il en soit, elle donnait son avis. Le calme avant la tempête... Parce qu'au fond, Tahlia voulait aussi savoir comment Adilyn vivait ce changement, le tout en glissant subtilement un "prisonnière" bien placé. Elle sentit un certain malaise chez son amie. Tahlia, elle, ne la quittait pas du regard. Pourtant, Adilyn détourna le tout avec brio. "Je l'espère pour toi. Vraiment.". Elle but une nouvelle gorgée de sa boisson chaude, restant muette de longues secondes. Fallait-elle vraiment qu'elle aborde le sujet tabou maintenant ? Elle ne savait pas si elle était capable de tenir davantage. "Bon écoute, Adilyn, je n'aime pas tourner autour du pot bien longtemps. Je sais tout." Tahlia reposa sa tasse de café et regarda de nouveau son amie. "Je sais ce qu'il t'est arrivé..."

Elle hochait la tête, elle voulait bien la croire que dans dix ans, les deux auront des maris et des enfants, de toute façon, si elle n'avait rien des deux, il est fort possible qu'Adilyn adopte un enfant. Ça a toujours été son rêve de fonder une famille qu'elle ne s'imagine pas à 41 ans sans rien. Puis si elle est trop désespérée, elle se dit qu'elle irait voir un de ses ex infidèles, si après tout ils sont capables de lui faire un enfant, c'était mieux que rien. Cette pensée la faisait rire alors qu'elle regardait son amie. La conversation devenait plus sérieuse, du moins, c'est ce que pensait la blonde, puis la tournure des phrases de Tahlia n'aidait pas vraiment à mettre à l'aise Adilyn, car elle parlait d'être prisonnière tout comme elle l'avait été, puis un tas de petits trucs qui l'angoissaient. Est-ce que ça avait fait le tour de la ville pour qu'elle soit au courant ? Est-ce que tout le monde le savait ? Adilyn sentait une chaleur monter dans tout son corps ; le stress était bien présent. « Bien sûr, plus douce, ça n'existe pas. »  Adilyn ne pensait pas être mieux qu'elle sur le coup, elle torturait aussi ses poupées et celles de ses frères et sœurs juste pour rigoler. Sa baby-sitter avait même pris l'enfant pour une folle à l'époque. « Tu viens quand tu veux ! J't'enverrais un message quand elle sera à la maison pour que tu fasses une arrivée surprise. »  Disait-elle, large sourire aux lèvres. « Mais pour les bêtises, j'suis pas trop ok. »  Un rire puis elle écoutait de nouveau sérieusement sa collègue de boisson.  

Cette conversation était trop bizarre, elle manquait de peu de s'étouffer avec son café quand la brune faisait référence à tout savoir. Elle savait tout. Cette phrase résonnait dans la tête de la blonde, son regard était devenu vide, elle était perdue dans ses pensées. Elle peinait à bredouiller deux mots. « Qu─ … tu … hein ? »  Elle posait sa tasse sur la table et noyait son regard dans le liquide noir. Un rire nerveux pris le dessus sur ses paroles. « Savoir quoi ? Je n'ai rien à cacher, voyons »  Elle passait une main sur son front, mentait très mal sur l'instant. Elle qui a toujours su se débrouillait perdait tous ses moyens. « Il ne m'est rien arrivé de grave. »  Son coeur faisait des bonds dans sa poitrine, elle commençait à palir, attendant une quelconque réponse de Tahlia. La question “comment tu sais ça?” lui restait sur le bout de la langue. Tahlia était une flic qui restait dans les locaux au lieu d'aller sur le terrain, il n'y avait pas de question à se poser, pourtant, Adilyn cherchait à attendre, elle ne voulait pas faire exploser cette bombe.  

Tahlia adorait plaisanter avec Adilyn, encore plus quand cela concernait leur vie sentimentale chaotique. Mais au fond, elles n'avaient pas de souci à se faire. Elles était encore jeunes et puis, tout pouvait aller vite. Très vite. Elles pouvaient très vite se retrouver mariées, avec trois gamins ! Quoiqu'il en soit, avec la petite Abygaël, Adilyn était parée pour une prochaine maternité. Elle prenait son rôle de famille d'accueil à coeur et cela se sentait qu'elle voulait faire les choses bien. Elle était maternelle, sans aucun doute. Toutefois, quand elle accepta de présenter la petite fille à Tahlia, la jeune policière esquissa un grand sourire. "Ce sera avec grand plaisir, dans ce cas !" Répliqua-t-elle joyeusement, esquissant ensuite une fausse moue de déception quand elle lui annonça qu'elle n'était pas ok pour les bêtises. "Bon, d'accord. Pas de bêtises. Enfin... j'essayerai." Un sourire amusé vint ponctuer la phrase. Mais voilà, il était désormais temps d'aborder les choses sérieuses. Cela commençait à peser sur le coeur de Tahlia, qui n'était pas habituée à garder de telles nouvelles pour elle. Si elle n'avait pas été sanctionnée par son chef, Tahlia n'aurait jamais su ce qu'il s'était passé pour Adilyn. Elle aurait continué d'agir sur le terrain, et non pas dans ce bureau de malheur, où elle faisait d'étranges découvertes. Tout aurait été plus simple. Mais voilà qu'aujourd'hui, elle était ici, devant elle, à attendre de lui lâcher une vraie bombe. Elle était aussi venue pour cela. Bien évidemment, elle avait lancé quelques perches à Adilyn, mais cette dernière trouvait toujours le moyen de détourner la conversation. De ce fait, elle n'avait pas d'autres choix que d'être directe. Lui dire qu'elle savait tout. Absolument tout. Ce fut la première fois qu'elle sentit une réelle nervosité chez son amie. Pourtant, cette dernière continua de garder contenance, en niant tout. Encore une fois. "Il ne m'est rien arrivé de grave." Tahlia soutint son regard, secouant la tête et rétorquant directement, en baissant néanmoins le ton pour pallier aux éventuelles oreilles indiscrètes : "Avoir été accusée à tord de meurtre, je crois que si, c'est quand même grave, Adilyn." Néanmoins, alors qu'elle prononça ces mots, le regard de Tahlia s'anima d'une lueur de douceur. Elle voulait vraiment lui montrer qu'elle ne la jugeait pas. Au contraire, elle était là pour la soutenir. "Qu'est-ce qu'il s'est passé réellement ?"

Ça ne pouvait pas être si mauvais de faire rencontrer Tahlia à Abygaël, la petite connaissait déjà la famille de la grande blonde puisqu'ils s'étaient tous précipités chez elle une fois que la petite était arrivée ; comme si elle était une attraction. Adilyn rigolait après la phrase de son amie, les bêtises ça allait s'il n'y avait pas de cassure ou de fugue, sinon ça risquerait grandement de frustrée la blonde qui tient à ses affaires. « Nous t'attendrons alors. »  Lançait-elle, large sourire aux lèvres. Au fond, l'infirmière avait hâte que la brune passe chez elle, son nouveau chez elle. Puis, la conversation entre les deux femmes changeait, elle devenait plus sérieuse, un peu trop pour la blonde qui voulait se détendre aujourd'hui et ne pas se remettre à stresser, mais faut dire que les mots qu'utilisaient Tahlia ne l'aidait pas à se mettre à l'aise et, l'instant de deux secondes elle regrettait sa venue. La blonde essayait de se défendre comme elle pouvait, changer de conversation, impossible. Elle ne pouvait pas retarder plus ce qui devait arriver un jour ou un autre. Mais elle ne pensait pas parler de ça dès leur retrouvaille. Elle perdait ses mots après la prise de parole de la brune. Adilyn fuyait son regard puis finalement regardait le ciel ; ravie d'être en terrasse juste pour ça. Ce qu'il s'est passé ? La réponse devait être évidente. « Ils ont jugés préférable d'enfermer quelqu'un plutôt que de chopper le vrai meurtrier, ça va comme réponse ? »  Disait-elle, blasée, rien contre son amie, elle était même ravie de la revoir, mais ce moment était pire qu'un interrogatoire et ça rappelait que les mauvais moments qu'avaient vécues la blonde. « On doit en parler ? »  Elle supposait que oui, combien de temps encore elle allait fuir la vérité ? Qu'elle devait cacher son secret et s'enfermer dans un cocon ? Elle aurait aimée attendre toute la vie, mais elle sait qu'elle finirait par fuir cette ville si jamais tout le monde finissait par être au courant. Elle baissait sa tête, changeant de direction pour voir les yeux de Tahlia.  « C'était juste un problème du passé, maintenant je suis dehors. »  Elle riait nerveusement, essayant de se détendre un peu. Ne voulant par lui dire pourquoi elle et pas une autre. Ce n'était pas professionnel de sa part de ne pas aimer une patiente, mais puisque c'était réciproque, alors ça s'est clôturé par la prison. « Les policiers doivent être en train de chercher le coupable, encore. »  Et elle avait peur, peur qu'il vienne la retrouver pour faire son boulot. Parce qu'il avait une bonne couverture en envoyant Adilyn en prison plus que lui et maintenant, il n'était plus en sécurité alors, il pourrait continuer à faire du mal à l'entourage d'Adilyn pour la faire retrouver en cellule.

La jeune femme s'était contentée de hocher la tête lorsque Adilyn approuva sa future visite chez elle, afin de faire connaissance avec la petite Abygaël. Le rendez-vous était pris, et Tahlia espérait sincèrement que cela renforcerait leur amitié qui avait, tout de même, pris un sacré coup avec les années. Enfin... si la conversation ne virait pas au vinaigre. Tahlia n'avait pas pu garder le secret pour elle. C'était bien trop lourd à porter, surtout lorsque cela concernait une personne de son entourage. Du coup, elle l'avait dit. Elle avait dit qu'elle était au courant des charges qui avaient été retenues contre Adilyn. Tahlia se sentit, d'un coup, allégée d'un poids. Il fallait dire qu'elle se montait la tête depuis quelques jours à cause de cela. Maintenant, il était temps de comprendre. La réponse d'Adilyn n'était pas suffisante. Tahlia avait bien compris cela. Ce qu'elle voulait avant tout, c'était en connaître les circonstances. Pourquoi était-ce elle qui avait été mise en examen ? Quelles étaient les preuves qui l'incriminaient ? Ce genre de chose qui intéressait les flics. Mais elle comprenait que cela n'était pas facile pour Adilyn et elle ne voulait sûrement pas la forcer à quoique ce soit. C'est pourquoi elle répondit simplement : "Si tu veux en parler, on en parle. Si tu ne veux pas, je le comprendrais aussi. Je ne suis pas là pour te mettre le couteau sur la gorge, ni pour te juger ou te faire subir un nouvel interrogatoire. Je veux juste comprendre." Elle croisa le regard de son amie, réprimant un frisson d'effroi en comprenant que le vrai meurtrier courait toujours. En tant que policière, c'était la situation la plus difficile à affronter. Même si, dans le cas de Tahlia, elle n'avait pas eu beaucoup d'affaires de ce genre à traiter. Bowen restait une ville relativement calme. Elle sentit tout de même la peur chez son amie et Tahlia se voulait rassurante : "ça peut mettre du temps, mais ils finiront forcément par lui mettre la main dessus. Il suffit d'un seul indice pour retourner la situation en faveur de la police." Tout pouvait aller très vite. Et heureusement. "En tout cas, si tu as le moindre problème ou quoique ce soit, tu peux compter sur moi, tu le sais, ça ?" Il était important de lui rappeler sa loyauté. Tahlia avait beaucoup de défauts, mais on ne pouvait pas lui reprocher de laisser tomber ses amis. "Du coup, tu as subi ça toute seule ?" Elle avait envie de comprendre pourquoi elle n'avait pas appelé, pourquoi elle avait caché cela. Par honte probablement. Une honte qui n'avait pas lieu d'être.

Une étrange sensation d'être trahie, d'être mise à nue et vulnérable traversait la jeune femme qui préférait refuser d'accepter que son amie aitdécouvert son secret ; bien que sa famille lui disait qu'elle ne devait pas porter ce passage de sa vie comme un fardeau, elle n'en restait pas plus convaincue et, ça ne lui rajoutait qu'un poids de plus sur les épaules ce secret. Pour s'en défaire et accepter ce qui lui était arrivé, il allait falloir faire du chemin, la route était longue et elle avait l'impression de marcher à reculons. Comment assumer devant le monde entier quelque chose qu'elle n'assumait pas elle-même, qu'elle pensait être un cauchemar, une mauvaise phase dans son sommeil. Quelque chose qui avait dérailler sûrement et, elle s'était réveillée il y a quelques mois, avec une sensation de réelle ; il fallait qu'elle ouvre les yeux, mais elle n'y arrivait pas. « Je n'arrive pas à comprendre non plus. »  Avouait-elle, tête baissée, affrontant le pire, cette conversation avec son amie, elle voulait l'imaginer autrement, ou alors ne pas y penser du tout. Et si tout le monde se trompait et, si les juges s'étaient trompés en la libérant ? Elle ne savait pas ce qu'elle avait fait de mal, mais elle aurait pu faire mal quelque chose, tuer cette pauvre femme sans y prêter attention. Pourtant, Adilyn ne voulait croire en rien, des juges la voulaient coupable, d'autres non, la jeune trentenaire ne savait pas où donner de la tête. Et si le meurtrier était une meurtrière et qu'elle se trouvait dans un café à Bowen, buvant un café face à son amie ? Un frisson traversait le crâne d'Adilyn qui fut soudainement prise d'un vertige. L'infirmière avait de croire que le second jury avait fait assez de recherche et qu'elle était vraiment libre pour ce qu'il pensant qu'elle était était ; une innocente. Touillant itérativement  la cuillère de son café, couper du Monde extérieur, ce sont les paroles de Tahlia la ramenait à la réalité, elle était là pour elle. « Oui, heureusement. » Un léger rire fuyait d’entre ses lèvres. « Merci. » La trentenaire était heureuse d’avoir une amie dévouée qui comprenait, qui n’avait pas peur d’elle, d’une femme qui sortait de prison, innocente ou non, la prison pouvait changer quelques personnes et, elle avait changé quelque peu son caractère, pas en mal, mais en devenant plus réservé, moins folle et ça en devenait presque ennuyant à ses yeux. « Je l’ai dis à ma famille mais, je refusais d’admettre alors même eux, je ne les appelait pas. » Alors qu’on l’avait emprisonné pour la perpétuité. Elle allait garder le silence et, renoncer devant cette bataille. Le dernier appel avait été le bon. « Appelez ses amis de prison, ça fait toujours peur. Je ne pouvais pas prévoir les réactions, alors passer pour morte était la meilleure des solutions pour moi. »

Tahlia avait beau faire partie de la police, elle se trouvait cependant totalement dépourvue face à Adilyn. D'ordinaire, elle savait gérer les personnes arrêtées, innocentes ou coupables. Mais aujourd'hui, c'était comme si ses réflexes de policière s'étaient faits la malle. De toute façon, elle n'était pas là pour lui faire passer un interrogatoire. Elle avait dû en subir bien trop. Mais la jeune femme voulait juste comprendre. Mais comment comprendre alors que la principale intéressée ne comprenait pas, elle-même, ce qu'il se passait ? C'était le serpent qui se mordait la queue. Elle murmura simplement : "C'est ça qui est le plus terrible." Elle était presque à dire "mais que fait la police ?", "que fait la justice ?" mais elle était bien placée pour savoir que, parfois, des enquêtes devenaient difficiles à mener. Tahlia observa son amie. Elle semblait complétement abattue. Perdue. Tahlia s'en voulait de lui faire subir cela. Elle aurait peut-être dû ne rien dire. Elle aurait dû attendre qu'Adilyn soit prête à lui avouer tout cela. Mais maintenant c'était fait et elle ne pouvait pas revenir en arrière. Il fallait qu'elle lui montre son soutien. Qu'elle était là pour elle. Et qu'elle serait prête à l'aider s'il le fallait. Pour Tahlia, Adilyn restait la même personne qu'elle connaissait depuis des années. Le regard des gens changeait dans une telle situation, mais pas celui de la brunette. Adilyn était innocente, elle en était persuadée. Elle ne la voyait pas faire du mal à quiconque l'entourant. Elle lui adressa un sourire quand elle la remercia, même si elle n'avait pas à le faire. C'était quand même le rôle d'une amie d'être là dans les bons, comme dans les mauvais moments. Et justement Tahlia avait besoin de savoir s'il y avait eu du monde à ses côtés, durant ces mauvais moments. La jeune policière pinça les lèvres quand Adilyn lui avoua qu'elle n'appelait même pas sa famille. Trop de personnes faisaient cela malheureusement. Elle hocha la tête pour lui montrer qu'elle comprenait. Après, elle n'était pas forcément d'accord avec sa façon de faire. "Certes, tu ne pouvais pas prévoir les réactions, mais au final, tu nous inquiétais encore plus. Enfin... c'est passé. On ne peut pas revenir en arrière. C'était pour toi la meilleure des solutions et je le conçois." Elle ne pouvait qu'accepter, elle n'avait pas été dans sa situation. Elle ne pouvait pas comprendre ce qu'il se passait dans les esprits à cet instant. Tahlia termina sa tasse de café et la reposa sur la table, avant de reporter son regard sur son amie. "Je suis désolée de t'avoir lâché ça comme ça. Je ne veux pas que ça fasse remonter tout ce que tu as pu vivre. Tu ne m'en veux pas, j'espère ?" Il y avait des vérités qui n'étaient pas bonnes à dire et elle espérait réellement que la façon de faire de Tahlia n'avait pas été trop brusque.

D'un côté, elle ne pouvait pas en vouloir à Tahlia, parce qu'elle faisait partie de la police, qu'elle avait fouillé un dossier pour arriver jusqu'à l'affaire de l'infirmière et, l'autre côté, il y avait le sentiment d'être trahie, puisqu'elle aurait pu passer à côté et ne pas se montrer trop curieuse. Elle ne voyait pas pourquoi quatre mois après, elle ne voyait pas ce qu'elle avait fait de mal pour avoir le droit d'être ressortie d'une boîte à archives ; si celle-ci existait. Parce que peut-être qu'eux avaient des doutes, alors ils enquêtaient toujours. Les idées fusaient avec la blonde, tellement qu'elle ne savait pas quoi penser. Et en même temps, c'était son amie depuis des années, elle ne pouvait pas faire filer ça sur un coup de tête, sur le fait qu'elle sache un secret qu'elle voulait garder pour elle. De toute façon, ça aurait été exposé aux yeux du monde, un jour au l'autre, que Tahlia soit une des premières à le savoir, ça la rassurait presque. « Les gens seront au courant, petit à petit … »  Parce qu'un jour il sera temps de leur dire pourquoi j'ai été absente pendant plus de trois ans, donc deux mois de bonus. Pourtant, en écoutant la phrase de Tahlia, elle se disait qu'elle aimerait revenir en arrière pour échapper au piège de se faire embaucher dans un hôpital de Brisbane, de se faire emprisonner ; malheureusement, c'est impossible et même en signant un pacte avec le Diable, rien n'y ferait, elle avait passé ces journées en prison. Elle finissait par boire l'intégralité de sa tasse, elle ne savait pas si ça sonnait l'heure de partir, vu la conversation. Mais sur le coup, elle se demandait bien si son amie ne s'était pas servi de ce temps juste pour parler de sa mauvaise période ou alors si c'était pour la revoir elle. « Je ne t’en veux pas non. » Un goût d’amertume dans ses phrases, parce qu’elle ne savait même pas si c’était un mensonge. Et forcément que ça lui avait fait remonter tout ce qu’elle avait pu vivre au cours de ses deux mois de prison, plus l’angoisse des dossiers quand elle était en jugement. « Tu es simplement trop curieuse ! Je vais devoir te trouver un vaccin pour ce soucis. » Disait-elle en riant pour détendre un peu l’atmosphère, elle ne voulait pas briser son amitié parce que des amis, il ne lui en restait que très peu, vu qu’elle a pris le choix de s’éloigner.

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