sleep tight- ft Andeana

Au début il n’était pas certain que ce fût bien elle, mais il plissa les yeux et la reconnue bien. C’était cette fille croisée dans cette soirée…elle avait joué du ukulele et il l’avait accompagné à la guitare, bien que ce soit pas son premier instrument. Elle et lui avaient jamé un peu et tout le monde avait passé un bon moment à chanter des chansons. Il se souvenait même très bien qu’il était resté sous l’impression qu’ils finiraient leur soirée ensemble à vrai dire…mais quand les heures et les ombres avaient commencées à s’allonger au moment un peu étrange qui précède le levé du soleil, ils s’étaient enlacés, donnés la bise, un plus longtemps qu’à la normale et il l’avait embrassée. Sur le coup elle s’était laissée faire, mais rapidement elle s’était excusée et avait quitté l’endroit. Il ne s’était pas trop posé de question. Il ne la connaissait pas vraiment après tout et quelqu’un pouvait bien changer d’avis. Mais bon. Il avait été déçu quand même de s’endormir seul contre son oreiller.

Tout cela pour dire, qu’il l’avait reconnue. Elle. Andeana. La fille au Ukulele. En réalité, il avait pensé aller voler quelques ordinateurs, mais il trouvait cela beaucoup trop étrange de la voir là, au milieu de la rue, à une heure pas possible, en petite tenue de nuit et dû changer de plan. Il s’approcha, elle était de l’autre côté de la rue et avait l’air d’un mélange entre un zombie et un fantôme.

Doucement, il lui tapa l’épaule.

- Hey, Andeana, ça va ? T’es malade? T’as pas l’air bien.

Pour tout réponse, il reçut un coup de coude en plein nez.

- AOUCH, mais merde c’est quoi ton problème? s’exclama-t-il d’une voix nasillarde en s’agrippant le nez des deux mains.

Il la contourna, vexé, pour voir son visage, puisque celle-ci ne se retournait pas et fit le saut. Ses yeux étaient ouverts, mais complètement vides de vie. Son nez saignait un peu, rien de grave, il était super sensible parce qu’on le lui avait déjà cassé. Il laissa donc une main dessus, mais utilisa l’autre pour faire de petite vague devant les yeux de la jeune femme. Aucune réponse. Sa mère lui disait toujours qu’il ne fallait pas réveiller les somnambules et Neal était un peu superstitieux. Il continua donc à marcher avec elle, espérant qu’elle ne se rende pas trop loin. Il ne pouvait toujours pas la laissée seule dans la rue en pleine nuit.

La ville était silencieuse et on n’entendait que le bruit de leur pas sur l’asphalte résonner tout autour. Ses pensées divaguèrent, et les saignements de son nez finirent par se stopper, mais il s’était un peu tâché les mains et le dessus de sa bouche.  Enfin, le corps d’Andeana finit par s’écrouler, d’un geste leste, il l’attrapa avant qu’elle ne frappe le sol. Cette fois-ci toutefois, maintenant qu’elle avait retrouvé un sommeil normal, il n’hésita pas à la réveiller en la secouant alors qu’elle reposait toujours dans ses bras.

- Aller, debout là. Faut que tu rentres dans ton lit toujours.  

Ça se faisait de plus en plus souvent, ces crises, parce qu'elle était plus angoissée ces derniers-temps, même si ce n'était pas dans ses habitudes. Il lui arrivait de plus en plus souvent de finir sa nuit dans une autre pièce de la maison que de sa chambre. Ce n'était pas la première fois qu'elle sortait dehors en tenue de nuit, à vrai dire, elle avait échappé à la mort la dernière fois, à marcher sur la route alors qu'il y avait de la circulation. Mais elle ne s'en rendait pas forcément compte. Elle rêvait, marchait. Vivait dans son rêve tout simplement. Bon ou mauvais, en l'occurrence celui-ci était étrange. Elle fuyait doucement ce voile sombre, cette noirceur qui voulait s'emparer d'elle. Réfléchir dans ses rêves, ça n'était pas pour elle, elle avait simplement fait une conclusion rapide qu'elle ne devait pas rester là, à côté de cette chose qui ne présageait rien de bon. Son copain tout simplement. Et maintenant, elle se retrouvait à marcher le long des maisons. Puis un moment, des grisonnements venaient lui chatouiller l'oreille désagréablement, elle donnait un coup de bras, comme si ça pouvait faire quelque chose à ça, puisqu'elle pensait que ça se passait toujours dans son rêve, qu'aucun de ses gestes ne feraient répercussion sur la réalité. Comme tout le monde, au fond. La blonde continuait de “fuir” pendant un moment avant de tomber dans un son sommeil. Elle ne saurait trop dire ce qui se passait dans la nuit dans son rêve. Elle sentait quelque chose la toucher et rouvrait doucement les paupières. Le vent frôlait sa peau, mais elle ne comprenait pas tout de suite. En apercevant cette silhouette qu'elle connaissait, elle se pensait toujours dans son cauchemar, son rêve, qu'importe, tout ça n'était pas réel. Elle ne pouvait pas penser à lui alors que son copain était à côté d'elle. La vénézuéliennne tournait la tête avant de se rendre compte qu'elle ne dormait plus, qu'elle était dehors. Elle respirait doucement en retournant son regard vers lui. « Euh … tu es … ? » Bien sûr qu'elle se souvenait de lui, du moins de la personne qu'elle voyait mais qu'elle ne pensait pas réelle. Tous ses gestes lui revenaient en tête, tout ce qui l'avait fait fuir lors de leur rencontre resurgissait. « Neal ? » Si tout le monde se serait réveillé bien plus vite, elle, elle vivait toujours de réveil difficile, nuit de somnambulisme ou non. Il n'y avait qu'en état de danger qu'elle se précipitait dans les choses, mais son corps battait bien plus fort que maintenant. Même si là, l'angoisse la rongeait peu à peu. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Où ils étaient ? Est-ce qu'elle l'avait appelée ? Est-ce qu'elle était capable de ça ? La blonde se posait un grand nombre de question avant de vouloir se redresser pour ne pas l'embêter plus. Elle était mollassonne, elle aurait bien dormi quelques heures de plus. D'ailleurs, quelle heure était-il ? 

Il la regardait tandis que les traits de son visage se plissaient doucement, remués par des images quelle seule pouvait voir. Elle n’était pas tout à fait réveillée en réalité. Il la laissa rêver un peu encore, ses yeux s’ouvrant tranquillement à moitié. Il ne savait pas trop si elle avait conscience des mots qu’elle lui prononçait.

- Oui, c’est moi. C’est Neal.

Ses doigts la soutenaient toujours, il l’aida à se redresser, mais elle ne semblait pas encore tout à fait assez réveillée pour se lever complètement. Accroupi, il la supportait avec une jambe. Il laissa un sourire glisser sur ses lèvres. Qu’est-ce qu’il faisait là? Bonne question. Il ne savait d’ailleurs pas trop quoi répondre sans se compromettre. Il décida de s’amuser un peu, question de profiter au maximum de la situation…

- Tu m’as appelé. Je me rendais chez toi et je t’ai trouvée en train de marcher seule dans la rue…

Il lui flatta le dos.

- Tu es sûre que ça va? Tu es pâle. Tu m’as inquiété. J’avoue que j’ai été surpris…je pensais pas te revoir…

Il savait bien que ce n’était pas tout à fait correct de profiter du fait qu’elle était étourdie comme ça, mais il n’avait pas pu s’empêcher. Le fait de la rencontrer ainsi avait fait remonter à la surface les sensations vécues cette soirée là. Elle était belle oui, mais il s’était vraiment bien entendu avec elle…C’était comme naturel. Une rencontre fluide qui vous laisse un sentiment d’excitation satisfaite. Et d’ailleurs…il savait reconnaître un baiser qui fonctionnait quand il en vivait un. Il ignorait les raison qui avaient poussée Andeana à fuir, mais il se doutait que ce n’était pas lui. Un copain probablement…c’était toujours un copain, surtout avec ce genre de filles canons et amusantes avec qui ont pouvait passer toute une soirée sans s’ennuyer.

- Il s’est passé quelque chose?

Il l’aida à se relever complètement cette fois-ci. Il retira sa veste en cuir et la passa sur les épaules frêles d’Andeana. Il détailla son habillement. Elle portait de la lingerie fine dont la dentelle couvrait délicatement la peau. L’ensemble à la texture soyeuse glissait sous les doigts. Il pouvait pas mal bien deviner les formes de son corps sous le tissu, il détourna les yeux, question de pas abuser toute de même.

- C’est bien joli ce que tu portes…mais tu vas attraper la crève.

Le fait de savoir que c'était lui, lui arrachait un sourire, bien que léger, parce qu'elle était toujours dans les vapes. Parce qu'elle ne savait pas non plus que ressentir en face de lui, être heureuse ou avoir honte de ce qu'elle a fait. Elle ne le regrettait pas, elle l'avait même cherchée parce qu'elle était trop frustrée que son copain pense à tout le monde sauf à elle, qu'elle estimait compter assez dans son cœur pour qu'il lui porte de l'attention, qu'il lui demande si elle allait bien. Mais ce n'était pas le cas et les deux ne se voyaient pas beaucoup. Elle n'estimait pas pouvoir l'oublier et mettre ça de côté en virevoltant avec les hommes. Parce qu'elle avait un cœur, qu'elle, elle l'aimait lui, pas une autre personne, mais elle était amoureuse de l'amour et il fallait se rendre compte qu'elle en avait à donner à d'autres personnes qui sauront bien le lui rendre, même si c'est l'instant de quelques minutes, quelques heures. Puis elle fronçait des sourcils à ses explications, se demandant si elle avait vraiment fait ça, mais quelque part, ça ne l'aurait pas étonnée. Même si … ça semblait trop impossible, elle était avec son copain ce soir, elle ne pouvait pas avoir demandé à Neal de venir. Pourtant, sur le coup ça lui passait à côté de la tête, complètement, parce qu'elle ne voyait pas beaucoup son copain et qu'elle oubliait même quand il était là, maintenant. « Je … vraiment ? Et je t'ai appelée au milieu de la nuit ? » Elle lui lançait un regard un peu désolée. Parce qu'elle ne voulait pas que les gens la voient quand elle était en crise de somnambulisme. « Je vais bien, oui oui, juste un peu … endormie. » La blonde se mise à rire, passant une main sur ses yeux. Elle ne savait pas quoi lui dire non plus, elle ne pensant pas le revoir, mais son subconscient devait en avoir envie, si elle se fiait à ses paroles. Et tant bien même qu’il ne faisait parti que d’un plan pour rendre son copain jaloux, elle avait passé sans doute la plus agréable des soirées depuis ces derniers-mois. Depuis son retour à Bowen, sa fracture et son mal. Mais ce n’était pas pour autant que les autres n’étaient pas belle, Andeana est une personne bien trop positive pour se dire que quelque chose était moche, raté. Même sa relation aujourd’hui n’est pas ratée. C’est uniquement qu’elle essaye de se faire remarquer plus. En pensant stupidement que son copain viendrait plus vers elle. « Quelque chose ? Quand ? Maintenant ? » La blonde secouait la tête, il n’y avait rien de mal, rien qui ne clochait à son sens. Juste peut-être l’angoisse qu’elle ne savait pas reconnaître, le stress. Elle n’en savait rien. Elle ne pourrait mettre ça que sur le compte qu’elle ne faisait sans doute pas ce qu’elle voulait professionnellement, mais c’était un autre sujet. Et ça ne pouvait pas être lié. « Non il n’y a rien. » Elle regardait si elle avait des traces sur le corps, des sortes de bleus ou n’importe quoi pour qu’il puisse poser cette question. Puis elle se relevait doucement, tenant sur ses deux jambes finalement seule. De toute façon, ce n’était qu’un réveil, bien que compliqué. Puis quand il passait sa veste sur elle, elle souriait tendrement. « Je suis coriace, la maladie ne viendra pas vite à moi ! » Elle riait, même si elle devait avouer le vent qui caressait sa peau n’était pas forcément très chaud. Pour ce qui était de la tenue, sur le coup la honte ne lui venait pas directement, parce qu’elle avait l’habitude d’être en lingerie devant des gens, des amis ou bien des inconnus avec son boulot. Alors elle riait plus nerveusement cette fois. Puis elle se concentrait de nouveau sur Neal, plantant ses iris dans les siens. Puis elle le détaillait du regard avant d’avoir un mouvement de recul, une sorte de sursaut. « Oh, non, Neal ! » Elle restait regarder le sang sur son visage. « Qu’est-ce que tu as eu ? Quelqu’un t’as fait du mal ? » Elle zieutait les alentours, voir s’il y avait un coupable puis elle reportait son attention sur Neal. « Mon pauvre ... » Passant une main rapide et légère sur le visage du jeune homme, sans grande raison, ça n’allait rien le faire, même pas le soigner.

Il regarda Andeana vérifier si elle ne portait pas de blessures sur son corps. Il rit.

- Ça va Andeana, je disais pas ça pour ça…je suis juste surpris de te voir comme ça, en plein milieu de la rue au beau milieu de la nuit...

Ils se mirent à marcher tranquillement. Lui ne savait pas du tout vers où ils se dirigeaient. Probablement vers chez elle…elle devait connaître ces rues par cœur…il se doutait bien qu’elle n’avait pas marché trop longtemps dans son sommeil. Il jeta un œil aux maisons autour de lui. Le quartier avait l’air aisé…beaucoup plus que celui où il trainait, sous-louant des chambres, trainant ça et là…Il avait même passé quelques nuits dans des voitures volées. Le regard de biais il détailla la jeune femme qu’il accompagnait. Elle sentait bon, ses longs cheveux blonds devaient être entretenus souvent…même sa peau montrait qu’elle avait les moyens de faire attention à elle…Elle lui rappelait un peu Thiago…il se demanda si ce n’était pas pour cela qu’elle ne lui avait pas accroché le regard dès le début. Elles étaient toutes les deux mannequins d’un autre côté…ça faisait partie de leur job de prendre soin de leur corps.

Il avait oublié son nez. La douleur était passée depuis un moment en réalité. Il fut surpris quand elle lui demanda si quelqu’un lui avait fait mal. Ses doigts fins effleurèrent son visage, il regarda ses yeux qui montraient une inquiétude sincère.

- Mais c’est toi! Lança-t-il simplement, un sourire moqueur aux lèvres. Il avança quelques pas plus loin et se retourna pour lui faire face, marchant de reculons.

- Je sais pas à quoi tu rêvais, mais t’as pas apprécié que quelqu’un s’approche de toi. Mais à ta défense j’ai le nez sensible…comme tu n’es pas la première à avoir essayé de me défigurer.  Va falloir y aller un plus fort la prochaine fois si tu veux vraiment réussir ton coup.

Il parlait d’un ton léger, il se payait un peu sa tête, mais ne voulait pas non plus qu’elle ne le prenne trop au sérieux.  Il y eut un léger moment de silence. Son sourire un peu niais se dissipa lentement. Il passa une main sur sa bouche avant des les glisser dans ses poches. Ses épaules se raidirent légèrement sous un coup de vent. On n’entendait que leurs pas raisonner dans le quartier résidentiel. Andeana était déjà fait très petite, mais elle semblait encore plus minuscule dans cette veste. Qu’est-ce qu’il foutait là? Il n’avait pas vraiment de raison de glander près d’elle plus longtemps. C’était une grande fille amplement capable de renter à la maison par elle-même…mais quelque chose le retenait. Une envie de s’amuser un peu? L’impression d’être devant une occasion qu’il ne pouvait pas manquer ? Plus simplement l’attirance qu’il avait pour elle qui le faisait rester là, à marcher avec elle? Et bon…de toute façon qu’est-ce qu’il irait faire d’autre…Il avait assez l’impression de perdre son temps de façon générale ces temps-ci, aussi bien l’occuper en bonne compagnie…

- Je dirais pas non à t’emprunter ta salle de bain pour me nettoyer par contre.

Son regard se posait sur les maisons, elle tentait de se faire un chemin pour rentrer chez elle, est-ce qu'elle était encore loin de la maison ? Ça ne lui arrivait pas souvent, mais ça arrivait. Comme la fois où elle avait failli se faire écraser par une voiture, mais celle-ci c'était arrêté à temps. Elle ne savait pas vraiment où est-ce qu'elle avait atterrit, mais elle était rentrée chez elle, saine et sauve. Ce soir, ça allait se passer de la même manière, mais il y avait Neal avec elle, c'était un peu différent, l'histoire n'était pas la même et elle ne savait pas comment l'écrire, celle-ci. La fin semblait trop floue. Ce qu'elle se disait sur lui aussi. Puis elle détournait les yeux vers son visage à lui, chercher une réponse, mais elle ne vit qu'un nez ensanglanté et elle se mise à regarder autour d'eux. Quelqu'un lui voulait du mal ? Son sentiment de peur gonflait mélangé à de la rancoeur qu'on lui veuille du mal, avant qu'il se mette à rire en lui disant que c'était elle. Elle fronçait les sourcils, ne comprenant pas, regardant ses mains, cherchant une explication. « Moi ? Je ne frappe personne ! » Elle levait les mains en l'air pour son innocence. Les deux continuaient de marcher un instant, elle avait toujours ce doute de savoir s'il riait ou non, si c'était vrai. Elle ne s'imaginait pas violente, au contraire. Elle ne voulait qu'apporter de l'amour aux gens, elle n'aimait pas ça la violence que ce soit verbale ou physique. C'était quasiment impossible que cette situation arrive. Et pourtant, il s'arrêtait devant elle, soutenant que c'était de ses mains qu'elle avait fait ça. Elle se mordait les lèvres, le regard inquiet. Même s'il ne le disait pas méchamment, elle se sentait mal d'avoir produit ce qu'elle voulait le moins voir dans le Monde. « Je ne veux pas te défigurer ! Surtout pas ! » Disait-elle avec une certaine candeur. Elle préférait ne pas affirmer, ne le dire, que c'était elle. « Je suis désolée. » Soufflait-elle avant de reprendre ses pas d'un pas plus rapide, passant à ses côtés. Elle remettait la veste en place avant d'être refroidi par ses paroles. Sa salle de bain ? Elle n'y aurait vu aucun inconvénient si son copain ne trônait pas dans son lit à l'heure actuelle. « Je t'apporterais de quoi te nettoyer le visage. » Elle reprenait un beau sourire, maladroit, défiguré lui aussi parce qu'elle ne cachait pas ses émotions et que la gêne lui prenait la gorge. « Je reconnais la rue, j'n'habite plus très loin. » Sa veste lui reviendrait vite et ils se quitteraient bientôt. Quelques pas et ils arrivèrent devant sa porte. « Tu bouges pas, ok ? » La blonde riait presque. Ramener un homme devant la maison, presque dedans, tant qu'il ne se passait rien, c'était correct ? Elle n'en savait rien. Pourtant, elle s'était rapproché de lui pour rendre son copain jaloux et maintenant son coeur balançait parce que ce n'était pas bien, mais lui devait sans doute juste profiter d'elle. Elle voulait juste montrer qu'elle existait, qu'elle avait de l'amour à revendre. Elle secouait la tête ressortant de ses pensées, savoir ce qui était bon de faire ou non avant de caler un baiser sur le coin des lèvres de Neal et rentrer pour lui rapporter de quoi se débarbouiller. « J'peux pas te faire rentrer ... tu comprends ? Ma coloc à le sommeil léger. » Elle ne savait pas pourquoi elle mentait. Elle retirait rapidement sa veste puis replongeait son regard dans celui du jeune homme.

Le regard doux d’Andeana se posa sur son visage. Il avait oublié à quel point elle avait un caractère emprunt d’une sorte d’amour que lui avait du mal à trouver ne lui-même. Il regretta la façon dont il lui avait dit qu’elle était l’auteure de sa blessure. Elle semblait sensible. Il voyait de l’inquiétude dans ses yeux, malgré son geste amusant (les mains levées vers le ciel). Il tenta de la rassurer. Sa voix était douce et basse, comme s’il n’avait pas vraiment voulu briser le silence de la nuit.

- Ça va Andeana…je suis tâché, mais je n’ai pas vraiment mal… tu ne me l’as pas cassé, c’était qu’un accident.

Ensuite son pas s’accéléra. Peut-être est-ce le froid qui l’avait fait ainsi le devancer? Ou peut-être la hâte de rentrer chez elle et de retrouver son lit? Il pouvait comprendre, du moins pensait pouvoir comprendre. Il devait bien s’avouer qu’entre la prison et son automobile, cela faisait plusieurs années qu’il n’avait pas possédé un lit confortable qui était bel et bien à lui.

Il remarqua tout de suite la façon dont le corps de la jeune femme se raidit sous sa question, comme pris subitement d’un stress qui n’était pas prévu. Donc elle ne voulait pas qu’il entre chez elle…ses doutes se confirmaient peu à peu. Cette fille avait clairement un copain. Neal pinça ses lèvres en regardant ses hanches rouler sous ses pas et appréciant sa voix lui dire ce qu’il ne voulait pas entendre : « Je t'apporterais de quoi te nettoyer le visage. » Il n’aurait vraiment pas refusé de se glisser sous des couvertes, même pour une soirée «platonique» en fait. Son visage, complètement marqué par la gêne, se tourna vers lui, alors que lui, sans s’en rendre compte avait un sourcil dubitatif levé. Elle lui dit alors qu’ils arrivaient bientôt ce à quoi il ne répondit que par un hochement de tête. Il ne gaspillait rarement sa salive pour rien. Riant lui aussi, il répondit d’une façon semblable à son ordre de ne pas bouger.

«Je m’obstine pas moi» murmura-t-il quand même, les mains dans les poches, ses yeux levés sur elle. Sa tête semblait rempli de pour et de contre. Son cœur balançait probablement parmi des options qui lui étaient impossible à lui de connaitre. Il demeura silencieux, tout de même respectueux des questionnements de la jeune femme. Elle s’approcha alors, glissant ses lèvres sur la commissure des siennes. Il ferma les yeux tandis qu’un frisson lui parcourut le bas du dos.

Une coloc qui a le sommeil léger…vraiment. Neal leva le menton, d’un geste un peu large, puis laissa s’échapper un ricanement en levant les sourcils.

- Mmh mmh, lâcha-t-il du ton peu convaincu.
Elle se départit ensuite de la veste, découvrant sa peau parcourue de frissons au contact de l’air froid. Neal laissa glisser son regard sur son cou et ses épaules avant de poser ses yeux dans les siens. Elle lui tendit alors le vêtement qu’il attrapa d’un geste lent. Leur regard se croisèrent et s’attardèrent. Ils se mentaient alors mutuellement depuis le début de la soirée et il ne savait pas trop quoi en penser…d’un autre côté… ça l’arrangeait….dans l’ignorance…on ne pourrait pas le taxer de mal se conduire si jamais…bref. Sans quitter son regard des yeux, il déposa une cigarette sur ses lèvres avant de repasser la veste sur ses épaules. Il ne baissa la tête qu’une fraction de seconde pour regarder la flamme de l’allumette qu’il venait de frictionner. Une partie de lui avait eu envie de simplement attraper le bras d’Andeana alors qu’elle le lui avait tendu et de l’embrasser encore une fois, question de regoûter un peu à ce qu’il avait eu la chance d’avoir la dernière fois. Mais il était trop conscient du sang qui était toujours sur son visage. Il dégagea sa bouche en attrapant sa tope d’un geste leste avant de reposer son regard dans le sien.

- T’as maison est tellement grande, j’ai le temps d’en fumer une le temps que tu reviennes non?

Il laissa glisser son corps sur les marches du perron et ajouta :

- Fais attention à ne pas réveiller ….«ta coloc»…

Un accident qu'elle aurait voulu maîtriser, elle n'aimait pas faire du mal aux gens. Se dire qu'elle le faisait involontairement pendant ses crises de somnambulisme l'effrayait. Peut-être bien qu'elle l'avait déjà fait dans le passé mais que personne d'autres n'avaient voulu le lui dire, elle eut un serrement au coeur en y pensant. Elle avait peur que dans les rêves qu'elle ne se souvenait pas, il y ait finalement de la violence, que ce soit ce qu'il y avait au fond d'elle malgré toute la positivité qu'elle montrait, qu'il n'y ait que de la violence cachée quelque part et que ça ressortait dans les moments où elle devait être le plus relaxé, du moins, c'est ce qu'elle pensait du sommeil. Sans s'en rendre compte, sa cadence s'accélérait. Peut-être qu'elle avait peur que son copain se réveille, peut-être qu'elle s'en voulait trop par rapport à Neal qui n'avait pas mérité qu'elle le frappe et le fasse saigner. Elle s'en voulait d'un peu tout et avait peur de ne pas pouvoir gérer une crise de jalousie si William se réveillait, elle ne voulait pas qu'il pense que sa copine s'amusait avec d'autres, que vu sa tenue, elle aurait pu attirer d'autres. Même si au fond, c'est ce qu'elle voulait ; de l'attention de sa part, qu'il ne soit pas avec elle uniquement pour se dire en couple et pouvoir trouver du réconfort quand il voulait. Mais Andeana avait besoin de Neal bien plus qu'elle le pensait pour se sentir bien. Ils arrivèrent devant la maison de la blonde et elle restait bloquée en le regardant, ne sachant pas vraiment quoi dire. Elle s'inquiétait sans doute trop, se faisait trop d'idées, elle ne savait plus vraiment quoi penser. Andeana se contentait de déposer ses lèvres aux commissures de celles de Neal, elle l'aurait bien poursuivit en lui offrant un vrai baiser, mais est-ce que ça aurait été infidèle ? Sans doute. Avoir envie de se sentir exister et donc vouloir l'embrasser mènerait sans doute à la tromperie, quasiment sous les yeux de son copain s'il était réveillé. Elle n'avait jamais embrassé un autre homme alors qu'elle était en couple. Elle se reculait, sortant une excuse qui laissait à désirer et au geste que faisait Neal. Elle se mordait la lèvre, camouflant sa moue. « Elle s'appelle Jude, si ça t'occupe, tu peux aller voir la boîte aux lettres. » Soufflait-elle en roulant des yeux. Au fond elle mentait en disant une part de vérité, sa coloc s'appelait vraiment Jude, mais ce n'était pas elle qu'elle voulait réveiller. Et elle pensait qu'il le savait lui maintenant. Pour quoi devait-il la prendre maintenant ? « Ah ? T'es fatigué ? Car ce n'est pas si grand en vrai. » C'était une taille qui correspondait parfaitement pour deux personnes en fait, même si parfois elle y invitait une troisième. « Mais tu as le droit de te pourrir le temps que je revienne. » Question santé, c'était plutôt clair avec Andeana, elle mangeait sainement pas uniquement que pour son travail, mais aussi pour avoir une parfaite santé. Elle n'allait pas tout gâché en ramassant des poumons pourris par la clope. Elle fronçait les sourcils avant de partir dans sa maison, se précipitant dans la cuisine pour humidifier une serviette. Puis elle s'arrêtait, passant entrouvrir la porte de sa chambre. « Avec qui tu parlais ? » Elle le regardait les yeux brillants, souriant doucement. « Un homme est venu toquer à la porte après s'être blessé, je l'aide seulement. » « T'as vu l'heure ? Qu'il appelle une ambulance. » Elle soufflait en refermant la porte venant à la porte d'entrée rapidement. Elle tendait la serviette. « Tiens. » Sans doute que la panique se voyait sur son visage, son cœur cognait si fort dans sa poitrine. Puis elle tournait la tête quand elle entendit la porte s’ouvrir de l’autre bout du couloir. « Tu devrais rentrer chez-toi. »