hold on tight to these memories -r.

Emma, c'était un peu comme celle envers qui j'avais toujours eu des sentiments que je tentais de réprimer pour le bien de cette précieuse amitié. Celle avec qui j'espérais toujours que de simples mots étaient des sous-entendus. Je me faisais constamment de faux espoirs derrière ses regards et ses sourires. Je m'imaginais toujours des tas d'histoires, je me faisais des scénarios. Je rêvais éveillé. Depuis que j'étais tout petit ça avait été comme ça. Je lui offrais mes jouets et mes collations par amour. Je lui faisais des compliments parce que je la trouvais vraiment belle et gentille. Je me rapprochais d'elle parce qu'une proximité avec Emma, c'était le sentiment le plus exaltant que je connaissais. Victoria, c'était un peu comme celle à qui je pouvais absolument tout dire. Celle qui ferait tout pour moi, et pour qui je ferais tout. J'avais toujours été là pour elle, dans les pires comme les meilleurs moments. Là pour la rattraper. Là pour la projeter encore plus haut dans les airs. Là pour l'entendre parler contre les nouvelles copines de ses ex, là pour l'accueillir pleurer sur mon épaule lors de ses ruptures amoureuses, là pour la féliciter dans ses bons coups à l'école et en sport. Victoria et Emma, elles ont toujours été mes meilleures amies. Encore aujourd'hui. Le trio inséparable. Les trois mousquetaires avec certains changements de sexe pour deux de ses membres. Mes deux blondinettes préférées, les femmes de ma vie - avec ma mère. Et à chaque fois que nous nous retrouvions, comme ce soir, j'avais ce petit pincement au coeur de voir que le temps passé aussi vite. Encore hier, nous étions des gosses qui passions des heures à nous inventer des jeux étranges dehors. Des pirates, des guerriers, des monstres. Nous avions tout été. Pour au final n'être que trois adultes parfois perdus, mais qui savent toujours se retrouver une fois les trois ensemble. « Je savais pas à quel point vous aviez soif alors j'ai apporté euh ... quatre bouteilles de vin. » Dis-je en sortant ces fameuses bouteilles de vin rouge de mon sac. Un petit sourire un peu gêné s'afficha sur mon visage - j'avais peut-être abusé du vin. Ou peut-être seraient-elles ravies de cette soudaine ambition pour une soirée bien arrosée. J'espérais au moins qu'elles s'étaient autant données que moi sur leurs tâches. Emma s'occupait d'apporter de quoi s'amuser pour la soirée, et ce confortablement - j'imaginais donc musique, couverture pour s'étendre, jeux de plage ou je ne sais quoi. Victoria apportait la nourriture, et je l'espérais, bien des pâtisseries. J'adorais les pâtisseries de Vick. Elles étaient mauvaises pour ma ligne, mais ce soir, on s'en fichait complètement. Ce soir on redevenait jeunes. On retombait en enfance. Insouciants et cons. Avec un peu d'alcool en plus - il fallait bien que l'âge adulte ait ses avantages.

J'haussai les épaules quand Emma me demanda si ce n'était pas un peu exagéré, ces quatre bouteilles de vin. À vrai dire je n'avais pas vraiment songé au contexte actuel de vie de mes deux meilleures amies. On dirait que j'avais de la difficulté à suivre leur rythme, moi qui étais si loin derrière elles. Après tout, Victoria était une femme mariée et Emma était maman. Elles étaient toutes les deux rendues à des endroits bien différents du mien. J'étais célibataire, avec un avenir plutôt mal tracé, et je jouais encore avec mes consoles de quand j'avais cinq ans. C'était triste de voir à quel point je n'avançais et n'évoluais pas, mais au moins, Emma et Victoria ne me reniaient pas pour autant. Elles savaient que je prenais la vie au jour le jour et que je ne voulais pas m'en faire avec les trucs plus importants. Surtout pas le futur. Bref, tout cela pour dire qu'au point où j'en étais dans ma vie, quatre bouteilles de vin, ça passait encore. Au pire j'aurais l'air d'un mort demain au boulot. Emma et Victoria ne pouvaient se permettre ça. J'avais encore de la difficulté à avaler que nous étions adultes, malheureusement. Victoria renchérit en disant que si elle buvait trop, Donovan allait râler. Je me retins de lever les yeux au ciel - je me retins vraiment très fort. Après tout ce qu'il lui avait fait, il pouvait bien lui laisser un peu de liberté, non ? Être épouse, ce n'est pas être prisonnière. De la façon dont elle parlait, c'était comme s'il la contrôlait. Mais je ne voulais pas me disputer avec elle. « Au pire on en aura pour la prochaine fois ! » Déclarais-je finalement. Parce que même si on se voyait drôlement moins souvent qu'avant, on arrivait toujours à se trouver un petit moment. Même si ce n'était que deux ou trois heures, je prenais tout ce qui passait. Je les aimais tellement, ces deux-là. Emma posa finalement la question qui me brûlait les lèvres : Victoria n'avait-elle amené que du tiramisu ? Ou y avait-il un plat de résistance ? « Je dois avouer que je meurs aussi de faim. Je me suis rationné toute la journée parce qu'on sait tous que ta bouffe est la meilleure, alors j'voulais me garder de la place pour tout. » Si Victoria ne s'en était tenue qu'au dessert, elle allait se sentir affreusement coupable, surtout après nos remarques. « Sinon c'est pas grave hein, on ira au marché le plus proche et on prendra des trucs à grignoter. » La rassurais-je en étalant la couverture d'Emma sur le sable, pour que nous puissions commencer à nous installer. La radio au coin de la couverture, le vin dans un trou que j'avais rapidement creusé dans le sable, le sac à nourriture de Victoria au centre, et nous autour, dès que nous allions nous asseoir.

Emma acquiesça sur le fait que nous aurions des restes de vin pour une autre fois. Je souris, mais derrière ce sourire, j'eus la pensée qu'au pire, je les boirais tout seul pour oublier que ma vie n'était pas aussi accomplie que les leurs. Je chassai bien vite cette mauvaise idée de ma tête. Je n'étais pas alcoolique, ni sur le point de faire une dépression, quand même. Il ne fallait pas que je commence à broyer du noir ; je ne m'en sortirais pas. Victoria termina finalement de nous annoncer le menu, voyant bien que son annonce d'un simple dessert - même délicieux comme rien d'autre - ne nous suffisait pas, nous les gourmands. « Un cake aux olives ?? » Demandais-je avec un grand sourire. Victoria hocha vivement la tête en rigolant. Elle savait que c'était mon préféré - enfin, seulement quand c'était elle qui le confectionnait. « T'es la meilleure !! » Je me tournai vers Emma qui me faisait des yeux et une moue. « Égalité avec toi, évidemment ! » Je rigolai. Mes deux petites femmes d'amour, il fallait que je les aime de façon égale ! De toute façon c'était le cas. Elles étaient chacune bien uniques, et je les aimais tout autant dans leur façon d'être. Je m'assis finalement, sortant les verres et les brandissant devant moi quand Vic' me demanda si j'y avais pensé. « Évidemment. Passer la bouteille avec vous ? Beurk, je vous pas de vos microbes, ou pire encore ! » Lançais-je en grimaçant. Je tendis des verres à mes amies et les remplit de vin. Je n'avais même pas eu le temps de remplir mon assiette qu'Emma levait déjà son verre. Je suivis la cadence et fit de même. « À nous trois ! À cette amitié qui, encore une fois, a survécu à une autre année ! » Bon, ce n'était pas officiellement nos "un an" d'amitié. Je ne savais même pas quelle date cela devait être. Mais c'était une façon de dire que nous étions intemporels. La blondinette nous demanda finalement ce qu'il y avait de neuf dans nos vies depuis la dernière fois. J'haussai les épaules. « Pour ma part, pas grand chose ... ça va vous décevoir mais ... j'suis encore et toujours célibataire ! » Je savais que mes amies attendaient impatiemment le jour où j'allais trouver l'amour. Moi aussi, d'ailleurs.

Ne voulant pas donner un ton triste et déprimant à cette soirée supposée être justement tout le contraire, je ne répondis rien aux commentaires de mes amies comme quoi je ne tarderais pas à trouver chaussure à mon pied. Je savais que ce n'était que pour me réconforter puisqu'en réalité, elles n'en avaient aucune idée. Aux dernières nouvelles, il n'y avait toujours pas une seule fille qui intéressait à moi à Bowen. J'étais le geek, le drôle de bonhomme, le bon ou le meilleur ami. Jamais l'amant convoité ou le prince charmant. Ce rôle-là était réservé à des hommes comme celui de Victoria. Et lui avait trouvé sa douce - et quelle femme ! J'aurais tout donné pour avoir une femme comme Victoria. Ou Victoria elle-même. Bref, je chassai bien rapidement ces idées de ma tête. Ce n'était pas correct et je m'en voulais. Victoria était mariée, Emma avait un enfant, il fallait que je grandisse moi aussi et que j'oublie ces amourettes de jeunesse. J'écoutai donc Victoria nous dire à quel point elle espérait que ses démarches de fécondation soit un succès. Je lui adressai un sourire encourageant. « Je vais t'envoyer à chaque jour toutes mes ondes les plus positives. Tu vas voir, je suis tellement efficace que tout va bien se passer. » Je lui fis un clin d'oeil puis tournai la,tête vers Emma qui nous confia qu'elle fréquentait quelqu'un depuis quelques jours. On le connaissait. Ma bouche s'ouvrit grande. « Et t'attendais l'arrivée du messie pour nous en parler?? » M'exclamais-je. Avoir été elle, ce serait la première chose que j'aurais dite! Dans tous les cas, cette nouvelle ne fit que tourner le couteau dans la plaie, autant parce que cela me rappelait que j'étais seul, mais aussi qu'Emma ne me verrait jamais autrement que comme son ami. Quel plaignard j'étais ce soir ! J'avalai trois, quatre gorgées de vin. « Bah, alors, c’est qui ?? » Le suspens était trop long. J’étais curieux de connaître l’identité de l’homme ayant volé le cœur de ma meilleure amie.

Je pris la main de Victoria dans ma main libre - l'autre étant agrippée à ma coupe de vin - et la serrai en lui souriant, comme pour lui transmettre déjà toutes mes ondes les plus positives. Je n'étais pas non plus immature ; même si j'avais eu mes froids avec Donovan et que j'aurais bien aimé être à sa place d'ailleurs, j'étais capable de mettre ces sentiments de côté et d'être très content pour leur future famille. Dès que Victoria allait m'apprendre sa grossesse, j'allais célébrer comme un fou. Sans alcool, évidemment. Par solidarité pour ma meilleure amie.

Mon attention se concentra finalement sur Emma, qui venait de nous révéler le potin de la soirée : sa toute nouvelle fréquentation mystère. Je détestais les devinettes, j'étais bien trop curieux et impatient ! Et surtout très mauvais pour deviner correctement. C'était comme si mon cerveau s'arrêtait de tourner, le temps de trouver la réponse. « Je te crois alors. Mais bon tu nous as assez fait attendre, allez dis ! » Mais Emma ne lâcherait pas le morceau aussi facilement. « Non aucune idée, ça pourrait être n'importe qui j'ai tellement d'amis ! » Dis-je un peu à la blague mais en même temps, sans nécessairement parler d'amis, j'avais tout de même un bon nombre de connaissances du sexe masculin. La liste pouvait donc être plutôt longue. Avec son sourire espiègle, elle commença à nous donner quelques indices. Un beau brun un peu plus vieux que nous. Je réfléchis un moment, regardant le ciel comme si celui-ci allait m'écrire le nom en nuages. « Evan ? J'espère que non il est marié et avec une autre fille en plus ... Euh ... attends ... Liam ? Par contre il a mon âge donc pas plus vieux alors ça fonctionne pas ... Oh attends ... ce serait pas Tyson ? Ça correspond à tous tes critères et franchement j'ai pas d'autre idée !!! » Lançais-je, content d'avoir peut-être trouvé l'identité secrète du nouvel amoureux d'Emma !