Assis sur une table dans la salle de repos des infirmiers, Calisto relisait les premières page d'un livre qu'il devait lire aux malades. Pour ce mois-ci, ce serait Orgueil et Préjugés. Il avait un peu honte de s'être plongé dedans comme si sa vie en dépendait et n'assumait absolument pas le fait de l'avoir adoré. Après tout, c'était un mec, un vrai. Il passait son temps à réparer des voitures et à casser des gueules pour le compte de la famille Matteotti. Aussi, il ne pouvait dire à tout va que oui, il aimait les choses romantiques, sinon on allait le traiter de mauviette, de pétasse, et bien d'autres. Il finit d'une traite son troisième expresso, et alluma une cigarette sans se préoccuper du lieu où il se trouvait. La minute d'après, une infirmière venait le supplier de l'éteindre. Il présenta ses excuses en s'exécutant, puis quitta la pièce, le livre à la main.
Ce matin-là, il devait commencer par la 12. Calisto savait très bien qui se trouvait à l'intérieur. Camilla Jimenez et sa mère. Cette dernière faisait face à un cancer qui s'était propagé. Elles n'avaient pas beaucoup d'argent et c'était d'autant plus compliqué de faire face à ce qui se préparait. D'après les médecins, la mère de famille n'avait plus beaucoup de temps à passer parmi les vivants. Aussi, il devait trouver une solution pour réunir Camilla et Alejandro. L'italien était sûr et certain qu'ils étaient frère et soeur. Ils avaient les mêmes origines, le même nom de famille. C'était peut-être des coïncidences, mais il savait également que Camilla avait un grand-frère dont elle n'avait plus eu de nouvelles depuis des années ; du Alejandro tout craché.
Le mécanicien poussa la porte de la chambre d'un air presque timide, passant sa tête dans l'encadrement.
"Bonjour les filles, c'est moi, Calisto", lança-t-il d'une voix douce. "Je viens faire la lecture, mais si vous voulez, je peux repasser plus tard."
Le garçon agita légèrement le livre comme pour appuyer ses propos. Il ne voulait pas s'imposer. Depuis maintenant plusieurs mois, Calisto était bénévole à l'hôpital. Il faisait des lectures et des tours de magie aux patients du service de cancérologie. C'était un crève-coeur qui le vidait de son énergie. Aussi, il réservait cela aux lundis et vendredis matin, les deux seuls jours où il s'absentait du garage.