(cleo) chasing a starlight

Tu tentes de discerner les constellations lorsqu'un nuage passe, se traîne lentement devant les étoiles que tu contemples tous les soirs, comme si tes journées à l'observatoire ne suffisaient pas. Tu dors peu, parfois pas du tout, une habitude qui a la vie dure, alors tu grimpes ici, sur le toit de l'immeuble. Parfois, il y a plus à voir en bas que dans le ciel. Tu observes le monde, toujours à distance, presque effrayé à l'idée de t'y fondre. Le rôle d'observateur extérieur te va bien, et il te plait. Ce n'est pas de l'arrogance, tu ne te penses clairement pas supérieur à un autre, il s'agit réellement de crainte. Alors tu regardes, tu analyses, tu t'inspires parfois. Tu n'as jamais été très doué en société, tu ne saurais dire comment tu en es arrivé à te marier, la séduction et la conversation te faisant cruellement défaut. Mais tu t'en sors, de mieux en mieux, assumant depuis ton divorce le fait qu'il te faut t'ouvrir au monde et oser, ce que t'a maintes fois répété ton ex-femme. Avant, elle sociabilisait pour vous deux, tu n'avais qu'à sourire derrière elle tandis qu'elle se lançait sur des sujets probablement passionnants - tu as toujours eu tendance à décrocher au bout de deux phrases. Déclic, la porte s'ouvre alors que tu es plongé dans l'étude d'un couple, dans la rue en contrebas. Tu as pris place au bord du toit, seul risque que tu prennes dans ta petite existence tranquille. Tes yeux clairs tombent sur la nouvelle venue: tu l'as déjà vue, sans doute êtes-vous voisins. « Bonsoir... » Appelons cela un bel effort, et peut-être même un bon début si elle se montre encline à discuter.

Ses cauchemars sont de plus en plus fréquents, de plus en plus réels, à tel point que Cleo redoute chaque soir le moment où elle est censée se coucher. Assise en tailleur dans son canapé, elle regarde Eleven roulée en boule au pied de celui-ci. Doucement, elle glisse une main dans ses poils en prenant soin de ne pas réveiller sa chienne, puis détourne son attention vers la fenêtre. Il fait déjà nuit, les étoiles doivent être magnifiques vues du ciel. Appuyée contre l'accoudoir, elle se perd un instant dans ses pensées et songe à une énième tasse de café afin de rester éveillée encore quelques heures. Non, mauvaise idée. Prendre l'air lui ferait bien plus de bien qu'encore plus de caféine dans son sang. Après avoir quitté son canapé, Cleo enfile une paire de chaussures usagées et un gilet qu'elle met par-dessus le t-shirt qui lui sert de pyjama. Un haut bleu foncé avec des motifs des planètes dessus. Quittant son appartement, elle prend l'escalier de secours menant au toit et le grimpe. Rapidement, elle se retrouve face à la porte menant au lieu tant convoité. En la poussant, elle découvre une silhouette installée au bar du toit. Un homme, un visage peu familier mais pas inconnu non plus. Il lui lance un bonsoir et, dans un premier temps, elle se contente de serrer les pans de son gilets contre elle pour l'empêcher de voir son t-shirt un peu enfantin. « Bonsoir, » répond-elle avant de s'avancer dans sa direction. Elle garde une assez bonne distance, debout près du bord, les yeux rivés vers les étoiles. En effet, le ciel est beau ce soir. « Moi qui pensais être la seule à venir ici, » souffle-t-elle avec un demi-sourire, toujours sans le regarder. Cleo n'a jamais été très douée pour les relations sociales. Elle est maladroite avec ceux qu'elle ne connaît pas et, du coup, panique toujours un peu à l'idée de dire quelque chose qu'il ne faut pas. « Passion pour les étoiles ou insomnie ? » ose-t-elle demander en tournant finalement la tête dans la direction de l'homme.

Le son émit par l'arrivée d'un autre locataire te surprend, car tu n'as jamais croisé personne depuis que tu as pris cette petite habitude. Cela dit, la jeune femme qui fait irruption ne t'est pas totalement inconnue, tu reconnais tout du moins ses traits. Mais, que tu saches, tu n'as jamais entendu le son de sa voix avant ce soir, et inversement. Deux êtres discrets se croisant au détour des couloirs de l'immeuble, rien d'étonnant au fait que vous n'avez jamais pris la peine de discuter. En réalité, tu ne connais pas grand monde dans l'immeuble, et ce n'est pas exactement une chose à laquelle tu comptais remédier. Mais elle est là, l'ombre connue, et tu lui souris, oses un salut. Tu crains un instant qu'elle ne fuit, mais elle s'avance au contraire après t'avoir rendu ton bonsoir. Pas trop près, et depuis le bord du toit où tu as pris place tu observes silencieusement la silhouette se découpant sous l'éclairage de la lune. Tu esquisses un sourire, tout aussi surpris qu'elle l'est face au fait de ne pas être le seul occupant à grimper jusqu'ici. « J'étais dans le même cas. » C'est un peu cliché, digne d'un film, visiter le toit lorsque le sommeil fuit. C'est sans doute là que vous avez piqué l'idée, plutôt que d'attendre dans le confort de vos appartements que le marchand de sable fasse - ou non - son travail. Il semblerait qu'il t'oublie fréquemment, alors te voilà ici. « Un peu des deux, à vrai dire. Je suis astronome, alors quand je ne dors pas je fais ce que je fais le mieux. » Tu observes. Tu te perds, un peu, aussi. « Angus », tu tends la main, légèrement hésitant, tout en te présentant.