Plus qu'un physiothérapeute... [Wooshka]

La cheville n’Annushka s’était vraiment bien remise. A présent elle pouvait marcher sans sa bottine. Elle l’utilisait toujours un peu, quand elle était vraiment fatiguée, ou bien si elle marchait beaucoup pendant une journée parce qu’elle faisait de nombreuses courses ou encore du tourisme, mais sinon elle se débrouillait sans. Elle savait qu’elle ne devait pas se reposer dessus et que dans peu de temps, elle pourrait définitivement la rendre à son physiothérapeute. Elle avait d’ailleurs un rendez-vous avec lui aujourd’hui, un rendez-vous de suivi. Il fallait toujours vérifier que tout allait bien, qu’il n’y avait pas une étape ratée dans son processus de guérison. Et puis, l’ex-ballerine n’était jamais malheureuse de voir Woody. Malgré son accident, elle n’avait pas développé une hantise des médecins ou quelque chose du même genre. Elle était même plutôt heureuse parce que leurs rendez-vous étaient souvent positifs. Elle aimait l’entendre dire qu’elle progressait et qu’elle allait mieux.
Elle était donc sagement assisse dans la salle d’attente quand la secrétaire appela son nom. Elle se leva alors, un large sourire aux lèvres, et entra dans la pièce de consultation de Woody.

-Bonjour ! Tu vas bien ? Tu as regardé les vidéos que je t’ai amenées la dernière fois ?

Woody lui avait demandé de lui emmener des vidéos de ses spectacles l’avant-dernière fois qu’ils s’étaient vu, et ça avait été chose faite la dernière fois. Elle se doutait que Woody n’était pas un grand passionné de la danse classique, mais peut-être avait-il apprécié la performance.

Il était rare que Woody ait hâte à un rendez-vous, parce que même s’il adorait son travail, même si voir le progrès de ses patients le rendait heureux, il ne sautait tout de même jamais de joie en passant le pied de la clinique. Il avait beau être fier de ses accomplissements et du succès de l’endroit, ça restait du travail. Aujourd’hui toutefois, il avait Annushka dans sa liste de patients, et ça faisait un moment qu’il ne l’avait pas vue. Depuis que ses visites s’étaient distancées, parce qu’elle était en mesure de faire tout le travail par elle-même sans ruiner son compte en banque, Annushka et Woody ne se voyaient plus beaucoup. Pourtant, la ligne était maintenant devenue mince entre la relation professionnel/patient et la simple amitié, ou même davantage. Quand ils se voyaient, ils prenaient des nouvelles, rattrapaient le temps perdu, et honnêtement Woody éprouvait une réelle affection envers la jeune femme. Assez pour qu’il se soit déjà demandé quand est-ce que ce serait raisonnable de la voir en dehors des rendez-vous de physiothérapie sans que ça ne soit jugé comme un manque d’éthique. Et maintenant que Woody semblait perdre ses amis et ses amours au compte-goutte, le jeune homme s’accrochait de plus en plus aux relations qu’il pouvait encore avoir. Et perdait un peu la tête, par la même occasion. À l’heure du rendez-vous de l’ancienne ballerine, Woody appela sa secrétaire pour savoir si sa patiente était arrivée, et comme c’était le cas, il demanda à ce qu’elle lui soit envoyée. Annushka ne tarda pas à pointer le bout de son nez dans la pièce de consultation du propriétaire de la clinique. Un large sourire se dessina aussi sur ses lèvres. « Bon matin ! Ça va, et toi ? » Demanda-t-il d’abord, avant d’hocher la tête avec enthousiasme suite à sa question. « Je les ai toutes regardées, oui ! T’as un réel talent, Ann’. T’étais magnifique à regarder, j’avais les yeux rivés sur toi. » Sur sa délicatesse, sur sa grâce, mais aussi sur ses muscles qui lui permettaient de tels déplacements, de tels sauts. Elle avait un corps d’athlète impressionnant, sur ces vidéos. « Ça m’a donné envie qu’on se surpasse pour que tu puisses me montrer ça en live. » Déclara-t-il avec un sourire.

Woody semblait heureux de la revoir, aussi heureux qu'elle et ça lui faisait chaud au cœur. Annushka avait toujours peur que son affection soit à sens unique, et elle était le plus heureuse du monde quand elle se rendait compte que ce n'était pas le cas.

-Oui très bien, enfin, de mieux en mieux je dirais.

Elle lui offrit alors un sourire ravi. Et les compliments ne firent pas rétrécir son sourire, par contre, ils lui donnèrent le rouge aux joues.

-C'est vraiment gentil... Mais je, tu sais, l'étoile danse mieux que moi.

Même si on lui avait toujours dit qu'elle était prometteuse, elle n'avait pas encore atteint, et à présent elle savait qu'elle ne l'atteindrait jamais, le niveau de danseuse étoile.
A sa dernière réflexion, elle ne put retenir un sourire attendri. Il y a quelques temps cette réflexion l'aurait sans doute attristée, mais elle commençait à faire son deuil.

-Tu sais, je pourrais te montrer certaines choses mais les médecins sont formels, je ne pourrais jamais redevenir ce que j'ai été.

Son regard vert se perdit un instant dans celui de Woody avant de souffler doucement.

-Mais, parfois je danse avec quelqu'un, il s'appelle CJ, il danse vraiment bien. On pourrait te faire une représentation privée.

Il hocha la tête quand elle lui dit qu’elle allait de mieux en mieux. Évidemment, elle progressait encore, et jour après jour. D’ailleurs, Woody allait bientôt reprendre cette bottine qu’il lui avait prêtée le temps qu’elle se remette solidement sur ses deux pieds, parce qu’il ne voulait pas non plus qu’elle devienne la voie facile. Annushka devait être arrivée à un point où elle n’en avait plus du tout besoin, maintenant, et le fait de continuer à l’utiliser pourrait peut-être même nuire à ses avancements. Toutefois, connaissant sa patiente, il se doutait fortement qu’elle ne devait pas la prendre si souvent. Mais, sait-on jamais. Annushka, pendant qu’ils étaient encore dans les salutations et les échanges de nouvelles, lui demanda s’il avait pris le temps de regarder ses vidéos de danse, ce qu’il avait fait. Il ne manqua pas de la complimenter sur son indéniable talent. La danse, ça n’avait jamais été trop son truc et pourtant, elle lui avait réellement vendu du rêve. Il haussa les épaules à la remarque de la jeune femme. « Je ne connais pas l’étoile alors pour moi c’est toi. » Il ne connaissait pas trop les termes, Woody, alors ce que signifiait danseuse étoile, ça n’était pas dans son répertoire. Il savait juste qu’Annushka avait un grand talent et c’était l’important. Se comparer aux autres, ce n’était pas toujours d’une grande aide. « Alors tu te redéfiniras, tu te redécouvriras à travers ce que tu pourras désormais accomplir. » C’est ce que Woody avait fait. On lui avait peut-être fortement recommandé d’arrêter le vélo de montagne suite à son diagnostic, mais ça ne l’avait pas empêché de s’adonner à de nouveaux sports, à se trouver de nouvelles forces. Puis, Annushka lui parla d’une personne avec qui elle dansait, CJ. Il n’y en avait pas trente-six millions. Woody haussa les sourcils à sa proposition, et soupira tout légèrement en commençant à préparer le nécessaire pour la séance. « Je suis pas certain qu’il soit vraiment partant pour une représentation privée devant moi. » Il jeta un regard à Annushka et lâcha, presque dans un soupir : « Longue histoire … » Ou alors il n’avait juste pas envie d’en parler, pas envie qu’Annushka le découvre sous son vrai jour.

Annushka eut un léger sourire à sa réponse. S’il ne connaissait pas le milieu, il n’était pas étonnant qu’il ne connaisse pas la danseuse étoile de la troupe. Et elle était assez flattée qu’il ne l’ait pas trouvé ô combien supérieur à elle alors que, pourtant, elle était bien plus mise en valeur dans les représentations.

-C’est gentil.

Ils parlèrent ensuite du fait qu’elle ne pourrait plus danser et Woody arriva à la conclusion qu’elle pourrait ainsi se redéfinir. Oui, c’était déjà ce qu’elle essayait un tant soit peu de faire. Cependant, ce conseil venait du fond du cœur, et Annushka ne put s’empêcher de se demander si lui, ou bien un de ses proches, avait vécu quelque chose comme ça. Mais c’était stupide parce qu’avec tous les patients qu’il avait, il devait juste en avoir vu des douzaines comme elle.

-Oui, je donne quelques cours de danse parfois, et maintenant je travaille dans une pâtisserie, c’est plutôt plaisant.

Elle proposa tout de même de danser devant Woody, avec CJ, mais il ne semblait pas totalement enthousiaste à cette idée. Elle le regarda alors, sans rien dire, pendant quelques secondes. Ils ne s’appréciaient pas ? Visiblement. La jeune femme était gênée d’avoir mis ainsi les pieds dans le plat.

-Oh, euh, je suis désolée, je ne savais pas que vous vous connaissiez.

Et maintenant qu’elle le savait, elle se garderait bien parler de Woody à CJ.
La brunette glissa une main dans ses cheveux avant de regarder ce que préparait son physiothérapeute.

-Qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui ?

Le fait que Woody n’ait pas su déduire qui était la danseuse étoile de toutes celles présentes sur scène, alors qu’effectivement l’emphase était bien mise sur l’une d’entre elles, ne faisait que prouver à quel point il n’avait eu d’yeux que pour Annushka. Comment en analyser une autre s’il n’avait été concentré que sur les pointés et les tours piqués de la jeune femme ? Il se contenta de sourire quand elle affirma que c’était gentil de sa part. Il hocha brièvement la tête, les bras croisés sur lui-même, avant de parler du fait que même si elle n’arrivait pas à danser à nouveau comme elle l’avait fait dans cette vidéo, elle se redéfinirait à travers sa nouvelle condition. Ses nouvelles limites lui ouvriraient peut-être d’autres portes, qui sait. Annushka confirma ses propos en parlant des cours de danse qu’elle donnait, mais aussi de la pâtisserie dans laquelle elle travaillait – un nouvel horizon. Mais cette information-là, Woody la détenait déjà. « Oui, la pâtisserie de Jake. Il m’en a parlé. En bien, hein. Tu fourres plutôt bien les beignets, à ce qu’il paraît. » Woody restait Woody, et c’était une blague à caractère sexuelle un peu trop facile à faire. Il avait beau se trouver en présence d’Annushka, si douce qu’il en venait bien souvent à s’assagir face à elle, il n’arrivait quand même pas à taire complètement sa nature. Les deux adultes avaient donc non seulement Jake en commun dans leur entourage, mais également CJ, de ce qu’il ne tarda pas à comprendre. Le physiothérapeute ne manqua pas de relever la situation plus que compliquée dans laquelle les deux hommes se situaient, pour ainsi éviter qu’ils aient à se retrouver dans une même pièce pour un spectacle privé. « Crois-moi, c’est préférable que tu en saches le moins possible. » Il soupira, se gratta la nuque, avant de faire le tour de son bureau pour ouvrir le dossier de la jeune femme, question de se remettre dans leur plan de réhabilitation. Comme si elle lisait dans ses pensées, elle lui demanda ce qu’ils allaient faire aujourd’hui. Il releva la tête vers elle. « Comme tu sembles avoir assez bien assimilé tes exercices sans poids et sans matériel, et que tu peux les faire chez toi, j’crois qu’on va commencer à se concentrer sur des exercices qui nécessitent du matériel particulier. Aujourd’hui, on va travailler ton équilibre. C’est important chez une danseuse, pas vrai ? » Surtout en ballet classique, si on se fie aux mouvements que les ballerines pouvaient faire sur la pointe d’un seul pied. « Suis-moi, on va aller dans la salle commune. » C’était là que se trouvaient toutes les machines, tout le matériel qu’il partageait avec les autres physiothérapeutes de la clinique. Une pièce ouverte où se trouvaient déjà deux patients avec des collègues.

Il connaissait Jake ? Annushka n'en avait aucune idée, elle ne se souvenait pas lavoir déjà vu Woody dans la pâtisserie, mais peut-être qu'elle n'avait juste pas fait attention. Après tout, il n'était pas rare qu'elle soit un peu distraite. A sa remarque sur les beignets, elle fronça les sourcils, ne se souvenant pas avoir déjà fait ce genre de choses.

-Euh... et bien, mon principal boulot est plutôt d'encaisser les clients en fait, et de faire du rangement en salle, je ne m'occupe pas tellement de la pâtisserie sauf si c'est vraiment facile.

Donc elle ne s'occupe pas des beignets. De toute façon, Annushka ne comprenait jamais ce genre de blagues, d'allusions, et si elle l'avait comprise, elle se serait sans doute mise à rougir à en de
venir pivoine. Autant elle était devenue un peu moins timide qu'avant, au fil du temps, autant le sexe ne faisait toujours pas parti de son vocabulaire. Il ne faisait aucun doute que 90 % de la planète trouvait cela dommage, mais elle s'en remettait plutôt bien.
La brunette baissa seulement les yeux quand il lui dit qu'il valait mieux qu'elle en sache le moins possible. Elle ne demanda don rien, ce n'était pas ses affaires après tout, elle ne voulait pas mettre son physiothérapeute mal à l'aise.
Ils enchaînèrent ensuite sur le déroulement de la séance et Annushka acquiesça d'un signe de tête quand il l'invita à aller dans la salle commune. Maintenant qu'elle y pensait, ils y étaient rarement aller.

-Oui c'est très important.

Elle eut une grand sourire, assez touché par le fait que Woody s'intéresse à sa condition de danseuse, ou ex-danseuse selon les points de vue.
Elle le suivit donc et ne put s'empêcher de jeter un regard sur les personnes déjà présentes dans la pièce, elle se demandait si elle allait être très à l'aise d'être en présence d'autres personnes pour constater ses capacités... Et en y réfléchissant c'était peut être pareil pour eux. Annushka leva ses yeux verts vers son médecin, un peu hésitante.

-On dirait vachement des machines de torture quand même.

Woody réprima un rire en baissant la tête, ne voulant pas montrer à Annushka qu’il se moquait tout légèrement. Pas forcément d’elle, mais de la situation. Elle répond tout innocemment à un commentaire qui se voulait tellement déplacé. Ça ne faisait que lui prouver à quel point la jeune femme avait un esprit pur, comme jamais il n’en avait rencontré auparavant, et ça ne faisait qu’attiser son désir de lui montrer tous les côtés de son corps qu’elle ne semblait pas connaître. Elle avait peut-être ce contrôle, cette droiture, que les ballerines démontraient bien souvent. Lui voulait qu’elle le perde, ce contrôle. Il voulait le lui faire perdre. « Oh. J’ai peut-être mal compris Jake, alors. » Conclut-il finalement, ne voulant pas avoir à expliquer son sous-entendu. Ce serait bien moins drôle et, surtout, il la gênerait plus qu’autre chose. Les deux adultes parlèrent brièvement de la relation houleuse de Woody et CJ, et Annushka comprit qu’elle n’avait pas besoin d’en savoir plus que ça, alors elle se contenta tout simplement de hocher la tête. Tôt ou tard, tout finirait sans doute par se savoir si elle posait les questions aux bonnes personnes, mais au moins il aurait repoussé ce moment le plus longuement possible. Ce moment où Woody allait devoir ajouter une personne de plus à la liste des personnes qui le percevaient tel le monstre qu’il était. Ils passèrent dans la salle commune où les derniers rendez-vous de la journée se déroulaient. Le bon côté d’être le patron, c’était que Woody pouvait dépasser les heures s’il désirait avoir plus de rendez-vous en une journée. Annushka avait d’ailleurs une plage horaire qui dépassait de trente minutes les heures normales. Au moins, ils n’auraient pas à partager les machines s’ils avaient besoin de faire plusieurs exercices. D’ailleurs, parlant de machine, Annushka ne semblait pas très à l’aise vis-à-vis celles-ci. Woody esquissa un sourire amusé. « De torture ou de BDSM, c’est au choix. » Mais, la connaissant, elle ne savait peut-être même pas ce que c’était que le BDSM. Il fit glisser entre eux une sorte de demi-ballon surmonté d’une planche ronde sur laquelle Annushka allait devoir monter, et se tenir en équilibre malgré la rondeur du ballon qui la forcerait à chercher son point central. « Monte là-dessus. Pour commencer, tu vas me tenir les mains et je t’aiderai à tenir. On pourra évaluer, à partir de là, ce qu’il faut travailler. » Et peu à peu, il la laisserait se tenir par elle-même.  

Annushka eut un doux sourire quand il lui dit avoir sûrement mal comprit Jake. C'était sans doute ce qui s'était passé effectivement, mais ce n'était pas bien grave.
Ils arrivèrent finalement dans "la salle des machines" et la brunette les regarda toute avec appréhension. Quand Woody évoqua le BDSM, elle le regarda quelques secondes sans comprendre. Ce qui n'était pas particulièrement surprenant parce qu'elle ne connaissait pas encore toutes les abréviations anglophones. Quelque chose devait lui échapper, elle espérait que ça ne fatigue pas son médecin.

-BDSM ? Bande Dessinée... Quelque chose ?

Elle faisait bien ce qu'elle pouvait pour se raccrocher aux branches. Elle n'avait absolument aucune idée de ce que ça pouvait bien vouloir dire.
Le physiothérapeute sorti un espèce de ballon et commença à lui expliquer l'exercice. Bien qu'elle appréhendait, Annushka acquiesça d'un léger signe de tête.

-Faudra pas me lâcher alors !

Elle essaya d'avoir un léger sourire, même si elle avait très peur de se casser la figure et commença par prendre les mains de Woody. Bon aller, faut essayer. Elle mit assez rapidement ses deux pieds sur la planche, parce qu'elle avait bien comprit qu'un seul pied ça n'allait pas l'aider à s'équilibrer, et commença à essayer de se stabiliser en s'appuyant sur Woody.

-Si je m'écrase par terre devant tout le monde, je me mets en boule et je ne me relève pas.

Elle essayait de dire ça sur le ton de la plaisanterie, mais elle avait clairement peur de se rétamer.

L’innocence d’Annushka était un miracle. Honnêtement, Woody ne comprenait pas comment elle faisait pour vivre dans ce monde corrompu sans jamais se laisser influencer par sa perversion. Peut-être parce que les gens autour d’elle ressentaient ce besoin de l’en préserver. Parce qu’elle était justement trop pure, trop douce, pour qu’on ose seulement même altérer ne serait-ce qu’un minimum son esprit. Quand elle parla de bandes dessinées, le jeune homme baissa le visage pour cacher son sourire naissant. Entre la moquerie et la tendresse. Il n’allait quand même pas lui mentir et puis, sans l’initier à la pratique, il pouvait au moins lui en faire prendre connaissance. Qui sait, peut-être serait-elle … tentée. « Plutôt bondage, discipline, domination, submission, sadism and masochism. C’est pour ceux qui préfèrent leur sexualité un peu plus … mouvementée ? » Il esquissa un sourire, conscient qu’il rendra sans doute les joues d’Annushka rouge pivoine, avec ça. Alors s’il proposait en plus de lui faire une démonstration, elle allait sans doute disparaître dans le plancher. Woody reprit donc un certain professionnalisme, d’autant plus qu’ils n’étaient maintenant plus seuls une fois dans la grande pièce. Il montra à la ballerine le premier exercice avec le ballon sur lequel elle allait devoir tenir en équilibre. Visiblement nerveuse, Annushka s’empara bien rapidement des mains de Woody et s’y tenaient fortement une fois montée sur la planche. « J’laisserai pas ça arriver. » Il lui offrit un sourire sincère et confiant. « Ok, maintenant, essaie de ne te tenir que sur le pied de la jambe que tu t’es cassée. J’te lâche pas, t’en fais pas. Si tu t'en sens capable, essaie la pointe des pieds. » Pour n’importe qui, se tenir à une jambe sur ce genre d’appareil était difficile, alors il n’oserait certainement pas la laisser s’en sortir sans son aide, le risque de chute serait trop grand.

Quand Woody explicita les termes de BDSM, la brunette resta quelques secondes sans rien dire, baissant le regard, fixant ses pieds. Ça n'avait effectivement rien à voir avec ce qu'elle imaginait.

-Ah...

Elle se mordit l'intérieur de la joue, un peu mal à l'aise. Elle ne connaissait vraiment rien à ce domaine, elle ne savait pas si elle devait... s'en inquiéter ? Elle n'avait encore jamais été mal à l'aise avec Xavier vis à vis de ça, il connaissait ses choix et savait que c'était un sujet délicat pour elle.

-Je suppose que toute sexualité est un peu mouvementée, pour moi.

Vu qu'elle n'avait absolument aucune activité sexuelle.
Pour ce qui était des exercices, Woody savait la mettre à l'aise. Elle hocha doucement la tête alors qu'il disait qu'elle ne la laisserait pas tombée et s'accrocha fermement à ses mains.
A sa demande, elle se mordit légèrement la lèvre, anxieuse, mais s'exécuta. Elle s'appuya un peu plus sur lui avant de relever sa jambe valide. Elle se sentait tanguer, à gauche, à droite avant d'enfin réussir à avoir un semblant de stabilité.

-La pointe du pied ça va peut être être un peu dur...

Peut être qu'elle s'en faisait une montagne pour rien mais elle ne se sentait pas capable de grand chose.

Un sourire se dessina sur les lèvres de Woody alors qu’Annushka, elle, baissait le regard jusqu’à ses pieds, les joues tout légèrement rosies. Ce qui lui donnait encore plus un air d’innocence, si cela était seulement possible. À son commentaire sur le fait que toute sexualité était mouvementée, pour elle, Woody comprit bien vite où elle voulait en venir. Ça ne le surprenait pas trop, en même temps, même si ça avait aussi pour effet de le charmer encore plus vis-à-vis d’Annushka, en quelque sorte. Si au départ il s’était dit que cette femme était bien trop pure pour lui, trop fragile pour lui qui détruisait tout sur son passage, il se disait maintenant que c’était dommage que la belle russe ne se laisse pas un peu plus aller. Et il aurait aimé être celui qui lui ferait découvrir tout ce qu’elle était en train de rater. « Ça n’a pas à être comme ça, tu sais. Ça peut être … deux êtres humains complètement en phase l’un avec l’autre. Ça a quelque chose de beau, au fond. C’est un peu comme une danse … » Et la danse, ça lui parlait, non ? Woody la regarda avec ce je-ne-sais-quoi dans le regard, cette nouvelle lueur qui l’habitait. Mais trop de gens se trouvaient autour, trop de regards, trop d’oreilles, alors il se recula tout légèrement et reprit un ton plus professionnel en parlant des exercices à faire. Annushka s’exécuta, doutant quand même constamment d’elle-même, de ses forces, de ses capacités, de ses limites qui étaient bien plus loin qu’elle semblait le croire. Pendant ce temps, les derniers clients de la journée quittaient, et les autres physiothérapeutes aussi, que Woody saluait d’un bref sourire et d’un hochement de tête, sans jamais lâcher la jeune femme. « Nous sommes seuls, maintenant. Tu n’as rien à perdre, Annushka. Essaie. » Elle ne se blesserait pas, Woody ne lui proposerait jamais un exercice pour lequel elle n’était pas prête. Et si elle perdait pied, si elle tombait, lui était là pour l’attraper.

Annushka leva les yeux vers Woody alors qu'il décrivait l'acte comme une danse. Il savait indubitablement où viser pour l'atteindre. Ses joues avaient toujours une teinte rosée, mais elle sembla un peu moins gênée.

-Mais il faut trouver le bon partenaire.

Comme en danse. Celui qui interprète la musique de la même façon, qui la ressent pareillement et qui sait le transmettre. La synchronisation entre deux danseurs était primordiale, tout autant que l'alchimie. Parce qu'il ne suffisait que d'un coup d'œil avertit pour faire la différence entre un duo nouveau et un qui se connait.

La brunette secoua la tête pour se sortir de l'atmosphère dans lequel il l'avait mise. Elle se mordit l'intérieur de la joue, écoutant sagement ses conseils. Alors qu'elle se concentrait sur son exercice, les autres commençaient à partir, ce qui ne l'inquiéta pas vraiment. Elle n'avait aucune idée des horaires, des dépassements.

A ses mots elle hocha seulement la tête. Rien à perdre... Et pourtant elle avait cette incroyable peur de tomber. Beaucoup de ses amis, de sa famille, l'aurait qualifiée de courageuse, et là pourtant, elle ne faisait pas preuve de beaucoup de courage. Elle se crispa pas un peu plus alors qu'elle se mettait sur la pointe des pieds, agrippant encore plus son physiothérapeute.

-Sans chausson de danse, c'est quand même moins facile...

Même si bien sûr il ne lui demandait pas là de faire une pointe de danse classique mais seulement de se mettre sur la pointe des pieds.

« Oui, mais … il en existe plus d’un. » Affirma Woody, la certitude dans la voix. Parce qu’il n’en avait aucun doute, de ça. Lui-même avait rencontré tellement de femmes qui lui avaient fait vivre des soirées inoubliables, chacune à leur manière. Ça lui avait permis d’apprendre à aimer d’un tas de façons. Annushka semblait prisonnière de sa seule et unique interprétation de l’amour, une vision bien trop fermée, bien trop restrictive, qui lui ferait sans doute passer à côté d’expériences qu’elle aurait pu juger d’indispensables. Et pourtant, en danse, on ne se confine jamais qu’à un seul partenaire. La brunette secoua la tête, comme pour se débarrasser d’idées infiltrées dans son esprit, et tout d’un coup l’ambiance presque alourdie par la tension venait de complètement s’alléger. Un retour à la réalité. Ils en revinrent à leur exercice et, s’agrippant à son physiothérapeute, l’ancienne ballerine s’éleva sur la pointe des pieds, lentement, petit à petit. Il sourit, s’approchant d’elle pour délaisser ses mains et plutôt poser ses mains sur ses hanches, lui offrant alors que meilleur soutien. « C’est moins facile, mais t’y arrives. Annushka, regarde, tu es sur la pointe des pieds. » Lui fit réaliser Woody, baissant le regard vers ses pieds. Elle tenait presque sur le bout de ses orteils, même si ça n’était pas comme dans un chausson de pointe, même si ça n’était pas un pointé comme elle aurait pu en faire autrefois, c’était quand même un signe d’espoir. Il releva le visage vers elle, fier de leur avancement, plongeant son regard dans le sien qui n’était plus qu’à quelques centimètres.

A sa remarque, Annushka resta muette un moment, le fixant, avant de secouer la tête de gauche à droite. Elle comprenait qu'il ne pense pas comme elle, qu'il ne soit pas comme elle. L'ex-ballerine ne voulait danser cette danse avec un unique homme pour le restant de sa vie.

-Non, il ne devrait y en avoir qu'un.

L'exercice avait commencé, et Annushka se hissait du mieux qu'elle le pouvait sur la pointe des pieds. Elle retint son souffle, sans le vouloir, juste inconsciemment, en sentant Woody la prendre par les hanches pour mieux la soutenir. Elle ferma les yeux quand il lui dit qu'elle était sur la pointe de pieds et expira enfin l'air retenu dans ses poumons.

-Sur la pointe...


Même si c'était loin d'être une vrai pointe, Annushka avait un incroyablement soulagement. Bon, elle n'allait pas mentir, Woody l'aidait vraiment beaucoup pour l'exercice. Mais peut-être était-ce.. normal ? Ses yeux se rouvrirent, rencontrant le regard de son physiothérapeute. Il était tellement prés d'elle. Auparavant, ça n'aurait absolument pas gêné la brunette qui savait à quel point il était professionnel mais peut-être que la conversation qu'ils venaient d'avoir l'avait laissée quelque peu perturbée. Elle resta immobile, rougissant légèrement à cause de son visage si prés du sien.

-Et maintenant ?