Woody & Freja ∇ just the way you are.

Les sourcils froncés, Woody avait lu le texto de Freja avec une légère anxiété naissante au creux de sa poitrine. Ne s’étaient-ils pas tout dit au mariage ? Non, bien sûr que non. Woody et Freja n’étaient jamais honnêtes à cent pour cent l’un envers l’autre, et encore moins envers eux-mêmes. Sauf que cette invitation n’était pas dans les habitudes de sa meilleure amie, normalement, si elle avait quelque chose à lui dire, elle venait marteler sa porte de coups ou débarquait à son travail sans prévenir, prête à attendre qu’il ait ne serait-ce qu’une minute à lui accorder. Elle ne remettait pas à demain, Freja, elle vivait au jour le jour, un peu comme lui, dans cette indescriptible liberté qui les avait toujours qualifiés mais qui, depuis un moment, ne suffisait plus. Il avait répondu un simple ok, pour qu’elle comprenne qu’il n’aimait pas ça, qu’il n’aimait pas ce suspens, ce mystère, cette interminable attente alors que leur relation avait carrément pris une toute nouvelle tournure dans les dernières semaines. Si ça c’était d’abord fait d’une manière bien lente, la tempête Wolf avait carrément fait tourner la girouette du cœur de Woody lorsqu’il avait demandé Freja en mariage devant tout le monde. Elle tournait encore, la girouette, le plongeant dans un tourbillon d’incertitudes. Peut-être allait-elle se fixer demain, à ce rendez-vous mystère sur la plage. Le physiothérapeute s’y rendit donc pour quinze heures tapante, n’ayant pas envie de se tourmenter l’esprit une seule seconde plus. Il avait pensé à elle pendant toute la journée, avait souvent pensé à simplement lui téléphoner et lui demander ce qu’elle voulait, exactement. Mais si elle avait fixé cette heure, ça n’était sans doute pas pour rien. Quand il arriva, Woody balaya du regard l’endroit, mais Freja n’était pas là. S’il ne porta d’abord pas trop d’attention aux gens présents, puisqu’ils n’étaient pas Freja, son regard se stoppa net sur un homme, qu’il reconnaissait à présent bien mieux puisqu’il l’avait vu au mariage de Freja, aux premières loges, en tant que témoin. Son meilleur ami, celui de Norvège, celui avant lui. Il fronça les sourcils en se dirigeant vers lui. « Hé, Andreas, salut. Je devais rejoindre Freja ici, tu ne l’aurais pas vue ? » Demanda-t-il simplement, ne s’attendant pas du tout à avoir été pris au piège, victime d’un subterfuge dans lequel il n’avait rien à voir, au fond.

Woody haussa les sourcils en voyant un sourire s’installer sur le visage d’Andreas, un sourire que lui ne connaissait que trop bien, pour l’offrir à tout bout de champ. Il se moquait de lui, et Woody n’aimait pas cette inversion de rôle. Il regarda donc le norvégien d’un regard un peu plus dur, beaucoup moins ouvert qu’à son arrivée. Il n’avait fait preuve d’aucune animosité en allant à la rencontre de l’homme, et pourtant il avait maintenant l’impression qu’on se jouait de lui. Andreas ne tarda d’ailleurs pas à confirmer le tout, en lui prouvant même que c’était pire que ce que Woody aurait pu s’imaginer. Ça n’était pas que le sourire moqueur, c’était toute l’idée derrière. Freja ne lui avait jamais envoyé de message, le texto venait de lui. « Alors tu t’es dit que, pour y arriver, il fallait te faire passer pour Freja ? C’est … louche. » Et un peu enfantin, mais ça, Woody se retint pour le moment de le mentionner. Il ne savait pas quelles étaient les intentions de l’ami de Freja, et peut-être pouvait-il lui donner le bénéfice du doute. Drôlement, il avait comme l’impression qu’il se tromperait, et les prochaines paroles de l’homme le confirmèrent bien assez vite. Il le ressentait comme une attaque. Il n’avait pas tourné autour du pot, Andreas. « Tu crois pas que je le sais, ça ? » Demanda-t-il de manière empressée, lui coupant presque la parole. Il inclina sa tête sur le côté, assez dérangé par le fait qu’un parfait étranger vienne lui faire la morale sur sa relation avec la norvégienne. « Je le sais, qu’elle mérite pas ça. » Andreas voulait peut-être la protéger, mais il ne savait pas à qui il avait à faire. Surtout, surtout, il ne savait pas de quoi il parlait. Si même Woody ne comprenait pas tout à fait ce qui se passait entre Freja et lui, encore moins depuis le mariage, alors comme une tierce personne pouvait-elle prétendre détenir le savoir, la sagesse de lui indiquer presque poliment la porte de sortie de cette relation ? « Tu connais pas toute l’histoire. Freja et moi, on ne peut pas être ensemble. Mais on ne peut pas non plus ne pas être ensemble. C’est la seule manière qu’on peut continuer d’avancer, autant elle que moi. » Et si Woody mettait un terme à ce qu’ils avaient, tous les deux, alors ils tomberaient. Freja n’en souffrirait que davantage, surtout dernièrement.

Égoïste, c’était le mot qui décrivait sans doute le mieux Woody, même si ce défaut cachait tellement plus encore. Parce que s’il se montrait autant égoïste, c’était justement parce qu’il ne l’était pas. Ou alors il essayait de se convaincre que c’était ça, la vérité. Peut-être pour ne pas faire face au monstre qu’il était réellement. Woody se plaisait à justifier ses actes par le fait que sa maladie emporterait tôt ou tard toute l’humanité qu’il lui restait, alors aussi bien commencer dès maintenant à montrer aux autres ce visage qu’il aurait éventuellement. C’était inévitable, et nourrir les autres et lui-même d’espoir pour les berner quant au futur, ça ne servirait à rien. Mais avait-il dit que ça lui allait ? « Je n’ai jamais dit que ça me convenait. Ça me convient pas du tout. Mais j’sais pas comment faire autrement. » Il avait besoin de Freja. Il aimait Freja. Et il aurait dû l’aimer assez pour la laisser aller, mais la vérité était que Woody savait qu’il ne s’en remettrait jamais. S’il les obligeait à cesser ce manège dans lequel ils se confortaient, il ne s’en remettrait jamais. Et il ne savait pas si elle, elle y arriverait. Ses paroles ne semblèrent aucunement arranger la situation, pire encore, plus il parlait, plus ça déplaisait à Andreas. D’ailleurs, ce dernier s’approcha de lui et l’attrapa brusquement par le col de son chandail, animé par une hargne qui n’avait pas mis cinq minutes avant de se manifester. Comme quoi, il se trouvait à ce lieu de rendez-vous avec déjà l’idée en tête de le chercher. Et il le trouverait. « Et pour qui tu te prends, hein ? » Demanda Woody, le regard impassible, le corps droit. Pas intimidé le moins du monde par cet élan de colère à son égard. Il n’était pas le premier à le haïr, Andy, et il ne serait certainement pas le dernier. Alors Woody le fixa, se dégagea de son emprise, avant d’ajouter : « T’es plus son meilleur ami, Andreas. Ça fait des années que t’es plus aussi proche d’elle que tu le crois. Tu sais pas ce qui se passe dans sa vie, tu sais pas ce dont elle a besoin, non. You have no idea. » Cracha-t-il à son visage, sans scrupule. Woody et Freja avaient brave vents et tempêtes ensemble, ils s’accrochaient l’un à l’autre comme à une bouée dans une mer déchaînée. Ce ne serait certainement pas un parfait étranger sorti du passé de Freja qui viendrait lui dire comment se comporter. Ce fut toutefois la goutte de trop, et le vase déborda, se traduisant par une violence inattendue qui éclata sur le visage de Woody. Il recula, portant sa main à son nez qu’Andreas venait peut-être de casser, il n’en savait rien. Les larmes montèrent à ses yeux, en raison du point d’impact, mais il reprit bien assez vite le contrôle et tout ce qui coula sur son visage fut son sang s’échappant de l’une de ses narines. Il l’essuya rapidement avant de s’élancer vers Andreas à son tour. « What the fuck, man ? » Et son poing termina sa course folle sur la mâchoire du norvégien.

Rejoints-moi à quinze heures demain sur la plage s’il te plait, j’ai un truc important à te dire. Tu fronces les sourcils pendant un long moment, relisant encore et encore ce sms envoyé à Woody. Il ne vient pas de toi c'est une certitude. Tu retraces les événements de la veille et il n'y a qu'une seule et unique personne qui ait pu envoyer ce message à Woody. Andreas. Tu te sens trahie au plus profond de tes tripes. Au lieu de discuter d'homme à homme, il a préféré t'utiliser pour appâter l'australien et ça te laisse un goût amer en bouche. Tu ne pensais pas Andreas capable de ça, vraiment pas. Et tu ne comprends pas la démarche sauf si c'est dans le but de cracher sa jalousie au visage de Woody. Tu as essayé tant bien que mal de faire comprendre à Andy qu'il avait toujours une place privilégiée dans ton coeur malgré les années mais c'est comme si... il ne voulait pas comprendre. Comme si, il ne voulait pas comprendre que ta relation avec Woody est bien plus complexe qu'une simple amitié de meilleur ami à meilleure amie. Tu soupires un grand coup, attrapes tes clés pour refermer la porte de l'appartement et pars en direction de la plage. Tu jettes un coup d'oeil à ta montre, 14h55. Vu que tu as explosé ta voiture contre un arbre, tu es obligée d'aller jusque-là à pieds et ça te prendra environ 10 minutes. Tu soupires une nouvelle fois, consciente que ce sera peut-être trop tard. Mais trop tard pour quoi ? Qu'est-ce qu'Andreas attend ou désire en donnant un "faux" rendez-vous à Woody ? Tu n'en sais rien parce que pour le coup, tu ne reconnais pas du tout le norvégien. Après un peu moins de dix minutes de marche, tu arrives à la plage et cherches du regard les deux hommes. Juste au moment où ton regard se pose sur Woody, tu vois Andreas lui assener un grand coup au visage et ton coeur rate un battement. Tu commences à marcher dans leur direction, voyant Woody rétorquer avec un coup de poing bien visé en plein dans la mâchoire de l'ambulancier. Tu accélères, comprenant qu'ils ne vont pas s'arrêter là et arrives enfin à leur hauteur. Sans réfléchir, tu te positionnes au centre, entre les deux hommes. « Putain mais vous êtes complètement cons ou quoi ?! » Demandes-tu en dévisageant les deux hommes tour à tour. Tu n'as jamais cautionné la violence et encore moins entre tes deux meilleurs amis. Tu as été bien bête d'imaginer qu'ils pourraient s'entendre un jour. « Andy qu'est-ce qui t'a pris ? » Ta voix est cassante, froide. Tu te retournes vers Woody et, voyant son nez en sang, tu grimaces de colère. Tu sors un mouchoir de ton sac à mains, lui tendant. « Vous allez m'expliquer ce qui se passe ici et tout de suite. » Insistes-tu tout en les regardant l'un après l'autre, le visage figé par la colère.

On ne frappait pas Woody sans prévoir s’en prendre un à son tour. Il n’était pas du genre à ne pas répliquer. Il n’était pas du genre à se laisser marcher sur les pieds. Woody s’était toujours considéré comme étant une sorte de mâle alpha, une connerie du genre, peut-être parce qu’il savait que ce moment de gloire n’était qu’éphémère et qu’il devait en profiter au maximum avant que sa force ne s’effrite dans le vent et qu’une simple bourrasque menace de le faire s’écrouler. En profiter au maximum, c’était être une brute, et il jouait plutôt bien son rôle depuis quelques années. Andreas ne passerait pas à côté de cette formule pas si gagnante que ça. Son poing fracassa la mâchoire du norvégien, ajoutant ses jointures à la liste de ce qui lui faisait physiquement mal, là, actuellement. Son nez saignait encore, et le choc avait laissé place à un élancement au centre de son visage. Il chancela, reculant de lui-même de quelques pas mais ce fut davantage le bras tendu de Freja qui le força à s’écarter vers l’arrière. Elle était débarquée entre eux comme un ouragan de rage et ce n’était rien à comparer aux fusils qu’elle avait à la place des yeux. Au centre complètement, à même distance d’entre Andreas et Woody, elle les regardait un après l’autre. Aucun parti pris. Un équilibre parfait d’indécision. Au centre complètement. Comme incapable de faire ce choix qu’Andreas semblait attendre depuis un moment, et maintenant, Woody l’attendrait aussi. « Il est complètement taré ton ami ! » Lança Woody quand elle leur demanda s’ils étaient complètement cons ou … ou rien, c’était ça. Ils étaient cons, stupides, là sur la plage à se battre pour elle. À se battre pour prouver à tout et à personne qui avait la plus grande place dans son cœur alors qu’au fond, ce ne serait pas la force de l’un ou de l’autre qui réussirait à trancher. C’était Freja. Et était-ce vraiment quelque chose qu’ils pouvaient lui demander ? Non, et ils auraient dû le savoir. They should’ve known better. La norvégienne lui tendit un mouchoir lorsqu’elle remarqua l’état de son nez, et il le prit pour s’essuyer et compresser son nez. Elle leur demanda alors de lui expliquer ce qui se passait, et c’est Andreas qui prit la parole en premier. Freja le détesterait, Woody, de s’être mêlé de ce qui ne le regardait pas et, surtout, d’avoir avancé des paroles qui n’étaient pas celles de Freja. Et sans encore moins ses pensées. Quand il le vit abandonner, et s’éloigner, le physiothérapeute leva les yeux au ciel et secoua la tête. Woody posa son regard sur Freja. « Qu’est-ce que t’attends !? Va l’rejoindre, dis-lui que c’est moi qui raconte n’importe quoi pour le faire rager. Dis-lui que c’est moi qui suis le connard dans l’histoire, comme toujours. Choisis-le. T’as de toute façon bien mis au clair que je ne passerais plus en premier. » Lâcha-t-il, amer.

Taré ? Ce n’est pas un mot que tu utiliserais pour décrire Andreas habituellement mais après ce qu’il vient de faire, tu as l’impression que tu ne le reconnais plus. Qu’est-ce qui lui arrive ? Ce n’est pas dans ses habitudes de faire ça. Cela fait des semaines qu’il doute de toi, de vous, de votre amitié. Et pourtant, tu n’as cessé de lui montrer que tu tiens à lui plus que tout. Que tu ne délaisserais votre amitié pour rien au monde. Ses doutes sont légitimes après ton silence radio de deux mois mais tu pensais que ça s’arrangerait avec le temps. Visiblement, tu t’es trompée sur toute la ligne. Encore une fois. Tu soupires, préférant ne pas relever les paroles de Woody. Ca ne servirait à rien de toute façon, à part envenimer davantage les choses. Alors, tu préfères te concentrer sur les explications du norvégien. Tu secoues la tête en entendant qu’il doute une énième fois de toi. C’est la fois de trop, tu sens que toute ta colère explose à travers ton corps pour se glisser jusqu’à ta bouche, entre tes lèvres. « Depuis quand est-ce que tu doutes autant de moi ? Depuis quand, Andy ? J’ai toujours été sincère avec toi. Toujours ! Alors oui j’ai fait une erreur ou deux mais bon sang, qui n’en fait pas ? Pourquoi es-tu incapable de me pardonner ? » Tu hurles, c’est plus fort que toi. « Il a dit ça pour te provoquer parce que c’est comme ça qu’il fonctionne et toi comme un abruti tu l’as cru ! Lui plutôt que moi ! » Tu sens une boule se former dans ta gorge mais tu la retiens pour ne pas laisser cette explosion de larmes s’échapper. Tu ne veux pas te montrer vulnérable devant tes deux meilleurs amis, ils ne le méritent pas. Pas aujourd’hui. Et même si Woody n’est pas à l’origine du sms, tu aurais espéré qu’il se montre plus intelligent pour une fois et qu’il ne rentre pas dans le jeu d’Andy. Mais c’est sans doute trop lui demander. Après quelques secondes, le norvégien tourne les talons et prend la fuite. Tu soupires un grand coup, énervée de le voir s’échapper de la sorte. Tu n’avais pas terminé, tu as besoin de davantage d’explications. Il ne peut pas s’en aller comme ça. Mais alors que tu batailles dans ta tête pour savoir comment réagir, Woody t’intime d’aller le rejoindre. Tu fronces les sourcils sous l’incompréhension. C’est quoi ça encore ? Qu’est-ce qu’ils te font, tous les deux ? Qu’est-ce que tu as fait pour mériter ça ? Si tu ne tenais pas autant à eux, tu serais déjà partie de ton côté. Seule. Les laissant ruminer pour des conneries chacun de leur côté. « Qu’est-ce que tu me fais, là ? C’est quoi le rapport ? C’est pas une compétition pour savoir qui sera le meilleur ! Pourquoi vous ne voulez pas comprendre qu’il y a de la place pour vous deux ? » Tu cries plus que tu ne le voudrais pour qu’Andreas t’entende, étant donné qu’il n’est pas encore très loin. Alors tu cries après lui, pour qu’il revienne. Pour qu’il te revienne. « Andreas, revient ! J’te jure que si tu ne reviens pas, j’viens te chercher par la peau des fesses s’il le faut. Je veux discuter. » Tu tournes la tête vers Woody, le regard plus dur que tu ne le voudrais. « Et c’est pareil pour toi, hors de question que tu t’en ailles. » C’est un ordre mais connaissant Woody, tu n’es pas certaine qu’il le respectera. Il a toujours agi selon ses propres règles et tu connais bien ça étant donné que tu fais exactement la même chose dans ta vie quotidienne. C’est sans doute pour ça que vous vous entendez si bien tous les deux, vous êtes les mêmes.

C’est comme ça qu’il fonctionne. Il était réduit à ça, Woody, une simple victime de ses impulsions, un pauvre abruti qui n’a aucun contrôle sur lui-même. Et c’était la triste vérité. Woody n’obéissait à rien d’autre qu’à sa rage, celle qui l’habitait depuis qu’il avait appris qu’on lui volait sa vie morceau par morceau, comme un casse-tête qu’on prend le temps de démolir pièce par pièce, pour apprécier sa beauté qui s’envole. Il faisait du mal autour de lui parce que c’était moins douloureux que de prendre conscience de la souffrance qui le rongeait de l’intérieur. Il se mettait les gens à dos parce que c’était plus facile de les voir partir eux, plutôt que de les laisser le voir partir lui à petit feu. Et justement, voilà qu’Andreas exauçait ses souhaits et s’en allait. Pourtant, il savait le mal que cela devait infliger à Freja, alors Woody l’intima de le rattraper, d’aller réparer les pots cassés avec lui. Il laissa bien entendre que de toute façon, si elle tentait de le faire entre eux deux en restant auprès de lui, ça ne servirait à rien. Ils étaient irréparables. Elle le lui avait bien fait comprendre à son mariage, autant en se mariant à elle-même qu’en lui montrant qu’il était loin d’être le seul. Que bien d’autres hommes savaient se frayer un chemin jusqu’à son corps, jusqu’à sa tête, pire encore jusqu’à son cœur. « Peut-être pas avec lui, non. » Lâcha Woody sans trop insister. Ce n’était pas une compétition avec Andreas, à la base, c’est le norvégien qui avait décidé de rentrer dans la course. Mais pas pour les mêmes raisons. Pas dans le même objectif. La brune cria finalement au norvégien de revenir, parce qu’elle voulait discuter. Elle ordonna à Woody de rester, lui aussi. Il leva les yeux au ciel, laissant son bras retomber le long de son corps maintenant que son nez avait cessé de saigner. « J’ai franchement rien à voir dans vos histoires, Frej’. Clairement, il a besoin que tu lui parles, que tu le rassures, j’en sais trop rien de c’qu’il veut mais c’est pas moi qui pourrai apporter quoi que ce soit là-dedans. Je n’amènerais rien de bon, tu l’as pas encore compris, ça ? » Demanda-t-il, soutenant son regard jusqu’à ce qu’Andreas les rejoigne enfin, pour lâcher qu’il n’avait rien d’autre à dire. Qu’il avait tenté le tout pour le tout pour ne pas la perdre. N’était-ce pas ce qu’ils essayaient tous de faire, des pires manières possibles ? Ne pas la perdre. Freja. « Eh bien, c’était vraiment un plan irréprochable, genius. » Cracha Woody.

Maintenant que tes deux meilleurs amis sont réunis devant toi, tu n'as aucune idée de l'issue de cette situation. Tu ne sais même pas quoi dire ou quoi faire maintenant qu'ils sont tous les deux prêts à parler. Enfin, parler est un bien grand mot mais au moins ils sont là, ils sont restés. C'est que malgré leur dispute, malgré leur colère, ils tiennent à toi, au fond. Et il est peut-être là le problème, finalement ? Peut-être qu'ils sont trop proches de toi pour avoir envie de te partager avec qui que ce soit ? Toi, tu ne vois pas les choses de cette façon. Tu aimes penser que tu as autant d'amour à donner à l'un comme à l'autre. Tu ne vois pas pourquoi tu devrais choisir entre eux deux alors que tu peux les avoir tous les deux. Enfin, c'est ce que tu pensais jusqu'à aujourd'hui... Tu ne t'attendais absolument pas à devoir intervenir dans une bagarre entre tes deux meilleurs amis. Et encore moins une bagarre orchestrée par Andreas, c'est loin d'être son genre. « Au-delà du fait que c'était complètement con de provoquer une bagarre avec Woody, pourquoi agis-tu comme ça Andy ? J'ai de la place pour vous deux, tu sais. » Ton coeur est assez grand pour eux deux, ça ne fait aucun doute. Tu tournes la tête vers Woody, le regard un peu plus froid que tu ne le voudrais :« Et toi j'aimerais que tu arrêtes de le provoquer. Andreas fera toujours partie de ma vie, tu n'as pas le droit de lui faire du mal aussi bien moralement que physiquement. Compris ? » Parce qu'au-delà de la bagarre, c'était surtout les paroles de Woody qui avaient blessé Andy au plus profond de lui-même. Lorsque Woody reprend la parole, tu soupires, secouant légèrement la tête. « Tu sais très bien que tu ne pourras jamais me convaincre que tu es une mauvaise personne Woody. Ça ne sert à rien d'essayer de me repousser, ça ne marche pas. » Et pourtant, il avait essayé maintes et maintes fois l'australien. En vain. Puis, tu passes ton regard de l'un à l'autre avant d'ajouter : « J'aimerais juste vous garder tous les deux dans ma vie. C'est trop demander ? » Et tu attendais une réelle réponse. Tu voulais des solutions concrètes pour les garder tous les deux au plus près de ton coeur. Parce que la vérité c'est que, si un des deux s'en va pour toujours, tu ne t'en relèveras jamais.

Quand Andreas lui dit de se fermer la gueule, Woody siffla, avant de rire légèrement. « J’ai réveillé la bête. » Parce que de ce que lui avait dit Freja, Andreas était le genre de type doux, attentionné, gentil, bref gay – toujours selon Woody, ces pensées. Pourtant, de ce qu’il avait pu voir aujourd’hui, le norvégien n’avait rien de ça. Une animosité l’habitait, une hargne injustifiée envers lui. L’était-il vraiment, gay, en fait ? Non parce que sérieusement, cette malsaine jalousie vis-à-vis de Freja était certainement douteuse. Woody l’était, lui aussi, jaloux. Sauf qu’il n’avait pas de mal à admettre que c’était parce qu’il ne voulait Freja que pour lui. Il n’avait pas de mal à se l’admettre à lui-même, plutôt. À elle, c’était une toute autre histoire. Freja questionna alors Andreas sur son comportement, le rassurant quant à toute la place qu’il y avait dans son cœur. Le trentenaire leva les yeux au ciel, et rattrapa juste à temps le regard de la brunette quand elle s’adressa à lui. « Que j’arrête de le provoquer ? J’avais jamais parlé à ce type de ma vie avant que ce soit lui qui m’agresse ! Qu’il ne me cherche pas, c’est tout. » Se défendit Woody comme un enfant de cinq ans qui se fait gronder par sa maîtresse d’école. Mais Freja était une toute autre sorte de maîtresse, en fait. La discussion continua entre les deux norvégiens, et Woody écouta l’homme se plaindre de la distance qu’elle avait pris par rapport à lui. Pauvre petit. Freja ne demandait qu’une chose : les garder tous les deux dans sa vie. Sa demande sembla convaincre un minimum Andreas, qui s’excusa pour le coup, et le reste. Peu convaincu, Woody haussa quand même les épaules. Il s’en foutait un peu. « J’te pardonne, ou whatever. Désolé pour le coup aussi, même si, on va pas s’le cacher, c’était mérité. » Andreas l’avait frappé le premier. « Bon, c’est bon, c’est terminé ? Je peux partir maintenant ? » Il avait mieux à faire que ces conneries. Mieux à faire que de devoir, encore, être confronté à l’inarrêtable effet qu’avait Freja sur tous les hommes de cette putain de ville.