Give me shelter, or show me heart part II + Violence

Que se passerait-il, après quelques nuits ensemble, une fois qu’ils se seraient lassé d’apprendre à découvrir le corps de l’autre, une fois qu’il n’y aurait plus rien de nouveau, quand ils se connaîtraient par cœur ? Parce que ce moment arriverait, demain, dans quelques mois, dans dix ans, il arriverait, inévitablement. Qu’avaient-ils d’autre, que cette attirance l’un pour l’autre, que ces sentiments naissants mais encore si fragiles, que cette soif de l’autre qui finirait pourtant par s’étancher. Et s’il n’y avait rien ? C’était peut-être la plus grande peur de Terrence, quand il pensait à Violet, alors qu’il s’attachait à elle, bien plus que ce qu’il voudrait, s’ils finissaient par comprendre qu’entre eux il n’y aurait jamais rien de sérieux et que ressortaient leurs vieilles querelles et la rancœur qui allait avec. Si tout cela n’était qu’un erreur, un gâchis magistral alors qu’ils auraient pu continuer à se faire la guerre comme ils le faisaient depuis des année. Pourquoi est-ce que le cœur se mêlait de cette mécanique certes peu plaisante mais néanmoins bien huilée ? Terrence n’était pas aventurier, il aimait son quotidien, ses habitudes à lui, il n’aimait pas les surprises ou que l’on bouleverse ses plans, il avait besoin de cette vie simple et sans embûches. Après en avoir bavé il se sentait équilibré dans cette existence là, habituellement il ne laissait pas de place à l’inconnu, ou rarement. Il ouvrait sa boutique le matin, se fumait ses clopes à heure régulière, il s'abîmait dans la contemplation de l’océan et ça lui convenait. Pourtant dans tout ce tableau Violet s’était imposée, depuis des années en figure désagréable et malgré tout présente, comme une évidence. Il avait pris l’habitude de se chamailler avec elle comme s’il cherchait sa présence, même de façon tordue. Leurs disputes le rassuraient presque. Mais il aimait davantage le contact de sa peau, il ne pouvait le nier. Ce soir il avait besoin d’elle et il était à présent bien loin de se soucier de leur avenir, celui-ci l’avait déjà assez torturé les jours passés, il faisait une pause, il profitait de sa douce chaleur et il s’arrangerait avec sa conscience un peu plus tard. Dans sa minuscule chambre, Terrence se laissait charmer par Violet, s’il affirmait qu’il gagnait la partie, il savait bien, au fond, qu’il était l’esclave de ses sens. Il lui sourit alors qu’elle susurrait à nouveau qu’elle le laissait gagner. Et puis se laissa faire quand elle le délesta de ses vêtements, il ne pouvait plus cacher ce qui montrait clairement qu’il crevait de désir pour elle. Mais qu’importe, ils étaient là pour ça, tous les deux. Lui, l’homme, aurait voulu la renverser sur le lit pour prendre possession de son corps mais elle se penchait déjà pour l’embrasser, enfin c’était ce qu’il pensait. Elle le prit une nouvelle fois de court en commençant à fredonner l’air de cette chanson connue. Violet était pleine de surprises et à nouveau il découvrait quelque chose d’elle, quelque chose de charmant, en cette voix mélodieuse. Il l’écoutait sans la quitter des yeux, telle la légende des sirènes qui perdaient les marins en mer, elle l’ensorcelait. Cette soirée n’était définitivement pas comme les autres et Terrence en appréciait chaque moment, cependant il n’en perdait pas son objectif et comprit totalement le message de la blonde. De ses grandes mains il dégagea ses longues mèches qui barraient son si beau visage, se redressa un peu et avec autant de force que de douceur il la fit se cambrer pour qu’il puissent enfin accéder à ce qu’ils attendaient tous les deux. A la fin de leurs ébats son grand lit n’était plus qu’un champs de bataille, une bataille charnelle, tendre et langoureuse de celle qui ne laissait aucun perdant. Terrence reposait paisiblement sur ses draps froissés et il n’entendit pas Violet se lever. Il avait le sommeil léger, celui d’un homme qui avait appris à être en alerte lorsqu’il était militaire et qui s’était méfié de tout durant ses années de prison, il ne dormait jamais vraiment bien, toujours d’un seul œil, comme on pourrait dire. Il ne lui fallut alors pas bien longtemps pour se réveiller et découvrir que la belle américaine avait quitté son lit, il fut parcouru d’un frisson d’angoisse, prenant peur qu’elle soit parti sans rien dire. Mais il découvrit bien vite ses vêtements encore intactes sur le sol et il entendit les bruits qui venaient de la cuisine, ceux qui l’avaient réveillé. Il se leva, encore ensommeillé, attrapa son caleçon qu’il enfila par pudeur. Il la rejoint sans bruit, la découvrant de dos, près de l’évier de la cuisine, portant son t-shirt, c’était une vision agréable et diablement sexy, alors que ses longs cheveux en bataille retombaient dans son dos et que ses jambes étaient nues. Violet était immobile, la tête renversée comme si elle fixait quelque chose, quelque chose que lui ne voyait pas encore. Terrence s’approcha d’elle et tressaillit quand il découvrit qu’elle avait son arme entre les main. Une arme énorme pour des mains si petites et si fines. Il aurait pu s’emporter, s’énerver, à cause de la peur et en voyant qu’elle fouillait chez lui en profitant de son sommeil. Mais il était préparé à ce genre d’éventualité, son pistolet n’était pas si bien caché que ça, simplement parce qu’il devait pouvoir être capable de le récupérer rapidement si toutefois il se sentait en danger, pas question alors de le mettre sous coffre. Jamais personne ne l’avait trouvé mais il n’avait jamais réellement laissé quelqu’un entrer chez lui comme il l’avait fait ce soir avec Violet. Une erreur ? S’en était peut-être une et en même temps il la referait s’il en avait l’occasion. Il soupira doucement, songeant qu’il arrivait là à une sorte de limite, s’il laissait quelqu’un entrer dans sa vie il prenait le risque de révéler ses secrets, de perdre gros, il risquait la prison à nouveaux. Il risquait surtout de voir la personne à qui il s’attachait prendre la fuite face à ces vérités qui faisaient de lui un homme complexe et paradoxal, cet homme qui disait aimer l’ordre et la justice mais qui donnait dans le crime et l'illégalité. Violet ne comprendrait pas et il la perdrait avant même de réellement l’avoir. La belle se retourna, levant son regard interrogateur sur lui. Il soutint son regard, sans sourciller, puis haussa les épaules. Je suis militaire, on n’est jamais trop prudent. Les vieilles habitudes ont la vie dure. Il s'approcha encore et lui pris l’arme des mains, sans geste brusque, il la posa doucement sur le meuble à côté. Ça t’effraie ? Il passa tendrement sa main sur le visage crispé de Violet. Je ne m’en suis jamais servi. il espérait que sa voix grave et posée la rassurerait, qu’elle serait suffisamment convaincue pour ne pas poser plus de questions.

Routinière, ce mot ne faisait pas réellement partie du vocabulaire de l'Américaine qui, très tôt,  avait décidé de partir à l'aventure en plantant derrière elle sa vie et ses habitudes. Depuis son départ de New York, chaque jour était différent. Certes, elle avait ses manies, ses habitudes, mais elle tâchait de laisser place à la spontanéité et de l'espace pour les imprévus. Bien qu'elle était du type en contrôle, à préférer planifier que de se faire surprendre, sa vie était telle une boîte à surprise de laquelle il était impossible de deviner le contenu. Esprit aventurier, lorsqu'un nouveau projet faisait irruption dans sa tête, que les graines commençassent à germer, il était impossible de l'en empêcher. Avec elle, il était impossible de s'ennuyer. Or, par amour, la belle blonde serait capable de tout, même s'il fallait qu'elle dompte son caractère frivole et ses envies de découvertes. Et non pas pour n'importe quel amour, non, elle en avait déjà eu la chance auparavant, mais plutôt pour celui qui le méritait réellement. Celui qui ferait battre son coeur à tout rompre, d'un seul regard, d'un seul sourire, jusqu'à contrôler son esprit. Jusqu'à dominer sa peau. Jusqu'à allumer un feu dans son ventre. Choses que Terrence faisait avec brio, lui qui ne tentait tout de même pas de représenter une si grande importance aux yeux de sa concurrente de longue période. Elle ne le savait pas encore, mais pourtant, pour lui, Violet serait prête à tout pour pouvoir avoir le privilège de se réveiller aux côtés de l'homme encore et encore. Pour toucher sa peau sans avoir peur d'être leur dernier contact. Elle n'avait pas peur d'envisager l'avenir à deux, elle avait peur de ce que Terrence voulait réellement. Puisque parmi les rumeurs absurdes qui circulaient à son égard, et celles qui étaient possiblement vraies, l'homme était plutôt dépeint comme un ermite solitaire. Plusieurs racontaient qu'aucune fille n'avait entré les zones interdites de sa propriété et qu'il n'était jamais aperçu plus de quelques soirs en file avec la même conquête. Il n'était pas décrit comme un coureur de jupons, bourreau des cœurs à faire la court à toutes les demoiselles de Bowen. Au contraire, il était perçu comme l'un de ces hommes solitaires et aigris par la vie, de prime à bord. Maintenant qu'elle le connaissait mieux, Violet voyait bien plus que cette piètre et fausse description en l'homme qu'il était. C'est pourquoi elle s'y abandonna, laissant son plaisir dominer son corps. Doucement, mais avec la fougue naturelle de Terrence, ils partagèrent l'extase de leur intimité.
Violet observait l'homme qui dormait. Elle comptait ses respirations, le son de son souffle était apaisant. Son corps somnolait alors que sa tête, elle, était en activité. Il n'y avait plus l'ombre d'un doute, Terrence lui faisait beaucoup plus d'effet qu'une simple histoire de couchette, qu'une histoire qui se terminerait après quelques rendez-vous lorsque les étoiles disparaîtraient. Elle ne connaissait pas le fond de sa pensée, au militaire, mais elle se surprenait à rêvasser d'une possibilité de le revoir. De ne pas effacer sa présence de sa vie. Même si elle ignorait encore tant de choses sur lui. Avait-il des frères et sœurs? Comment s'appelaient ses parents? Quelle était sa couleur favorite? Et son plat préféré? Avait-il une équipe sportive fétiche? Où était-il plus artistique? Que rêvait-il de faire comme métier lorsqu'il était petit? Tant de questions, autant importantes que ridicules, lui venaient en tête alors qu'elle aurait aimé le connaître par coeur, comme le fond de sa poche, dès cet instant précis. Il reposait paisiblement dans les bras de la blonde qui jouait avec ses cheveux en bataille, reste de leur étreinte charnelle qui s'était terminée en laissant derrière elle les couvertures et les oreillers partout sur le sol en signe de drapeau blanc.
Elle avait marché sur la pointe des pieds, simplement vêtue du t-shirt du commerçant, pour éviter de le réveiller. Il était si bien, Violet ne voulait pas le sortir des bras de Morphée. Et c'est à cet instant qu'elle tomba sur une chose à laquelle elle était loin d'être préparée. L'arme qui gisait dans ses mains, elle la regardait comme si elle avait fait quelque chose de mal, sachant pertinemment qu'elle ne devrait pas tenir cet objet dans ses mains. Perplexe, Violet hésitait entre être apeurée ou contrariée, elle qui ne croyait pas en la violence ni aux règlements de comptes par balles. Tout ce monde de crime, d'armes, d'armée lui était inconnu. Elle fixait l'objet, bien trop gros pour ses petites mains de femme qui n'en avait jamais manié un avant, comme si elle avait oublié comment bouger. Concentrée sur ce qui se trouvait entre ses mains, elle n'entendit pas Terrence arriver derrière elle. Ce fut le plancher de la caravane qui craque qui lui indiqua que, derrière elle, se trouvait les réponses à toutes les questions qui passaient dans sa tête alors qu'elle tenait une arme à feu dans le creux de ses paumes. Violet se tourna vers lui, le visage exprimant son incompréhension alors que l'homme soutenait son regard perdu. Elle fronça les sourcils en secouant frénétiquement la tête, corrigeant l'homme au passage. Étais...Tu étais militaire... C'était un premier mensonge, d'une longue liste, pensa-t-elle alors qu'il lui avait clairement expliqué qu'il avait pris sa retraite de la marine, qu'il était maintenant loin de ce monde archaïque qu'était l'armée. Terrence avança vers elle, Violet, vexée, recula d'un pas. Il ne lui fallut pas trop de temps pour retrouver une proximité avec la blonde qui, pourtant, avait une résistance. Terrence touchait son visage en reprenant possession de ce qui lui appartenait alors que la blonde n'avait pas défroissé son regard, encore incompréhensive face à la situation. Mais... pourquoi ? Elle soupira. Pourquoi avoir une arme planquée dans tes armoires, pourquoi ? Elle plongea son regard dans les yeux. Et Terrence, ne me ment pas cette fois, je t'en pris... t'as pas besoin d'avoir des secrets... t'as pas besoin de tout me dire non plus... mais, je t'en pris, ne me ment pas... Elle détourna les yeux, retournant son visage vers l'arme qui reposait maintenant sur le plan de travail derrière lui. Ça pourra pas fonctionner si tu commences à me cacher des trucs... qu'est-ce qui va arriver si j'ouvre ce placard, hein? J'vais tomber sur une bombe en voulant passer le balai, sous prétexte que tu as fait l'armée? C'était mal la connaître de croire qu'une réponse aussi évasive que celle-ci lui satisferait, celle qui avait toujours un mot à dire. Elle soupira de plus belle, croisant les bras sur sa poitrine en relevant les yeux vers le ciel. J'm'en fiche que tu t'en sois servit, ou pas, Terrence.. À mon avis, t'as fait pas mal pire que tenir une arme dans tes périples de l'armée... La question n'est pas là. La blonde, toujours intimidée par la trouvaille qu'elle venait de faire, mais aussi en manque de la présence rassurante de l'homme, s'approcha lentement de lui, en posant une main sur son torse nu. Bowen est loin d'être une ville dangereuse, pourquoi est-il nécessaire de posséder une arme.. je ne comprends pas...

C'était tout le problème de s’attacher à quelqu'un, on devait apprendre à laisser cette personne entre dans notre vie. Il fallait accepter qu’elle apprenne quelques détails que l’on souhaiterait plutôt garder pour soi, des mauvaises habitudes, des petites manies… ou des cadavres dans la cave. Terrence n’avait pas de cave et il n’avait jamais tué personne depuis qu’il avait quitté la marine, en vérité il ne savait pas vraiment s’il avait réellement tué un jour, dans ce genre de climat, dans des pays en guerre, on ne prenait pas vraiment le temps de compter les morts après la bataille et de s’en attribuer le mérite. Dans tous les cas, ses secrets à lui étaient presque aussi lourds à porter. Il ne pouvait pas être serein quand quelqu’un entrait dans sa vie comme Violet le faisait. Elle arrivait, tel un bulldozer, bousculant ses habitudes si précieuses et ses certitudes sur ses relations amoureuse. Elle était une brise légère qui le caressait mais aussi une claque monumentale dans le visage. Cette nuit, durant leur étreinte, il avait envie de la garder auprès de lui, de cette façon, pour toujours, autant que possible. Mais à présent, alors qu’il comprenait qu’elle fouillait chez lui, que ce soit volontaire ou non, il se retenait de la virer de chez lui, parce qu’elle entrait dans son jardin secret, il avait horreur de ça et aussi parce que les choses pourraient devenir dangereuses pour elle si elle en apprenait plus sur lui. Quand la blonde accrocha son regard, Terry compris que ce ne serait pas si facile que ça de la convaincre que cette arme n’était qu’un moyen de défense juste au cas où, elle voudrait en savoir plus, ou lui faire la morale. Mais il n’était pas du genre à s’ouvrir à ce genre de confidence à ce sujet là et il avait horreur qu’on lui dicte sa conduite. Pourtant il restait calme, impassible, comme s’il ne ressentait aucune émotion, cachant cette panique et son agacement qui montaient doucement en lui. Ex-militaire, si tu veux. Bien qu’on ne quitte jamais vraiment ce monde. Il baissa furtivement les yeux, faire l’armée c’était une éducation en soi, un mode de vie, être militaire c’était presque une religion, comme certains entraient dans les ordres, d’autres s’engageaient dans l’armée. On ne servait pas un dieu mais son pays et il y avait toute une discipline, tout un tas de sacrifices à faire pour ce genre de carrière. Ce n’était pas juste un métier choisi un peu par hasard, c’était bien plus que ça. Et entrer dans la marine avait changé Terrence, en bien ou en mal, c’était une autre question. Mais il n’empêche que même aujourd’hui, quand il ne faisait pas son lit le matin, il avait l’impression d’entendre son chef lui crier dessus qu’il était une feignasse. Et quand il cachait une arme derrière ses épices dans sa cuisine, il pensait à toutes ces fois où il s’était couché sur son lit de camps avec son couteau sous l’oreiller, parce que tous craignaient de se faire attaquer par l'ennemie en pleine nuit. Terrence avait remarqué que Violet reculait à chaque fois qu’il tentait de s’approcher d’elle. Mais il avait fini par attraper doucement l’arme de ses mains bien trop délicates pour ce genre d’objet et après l’avoir déposé assez loin pour qu’elle ne la voit plus, il avait caressé son doux visage de ses grandes mains qu’il voulait protectrices, rassurantes. Mais l’américaine n’était plus d’humeur conciliante et son visage exprimait toute la colère qu’elle éprouvait envers son amant. Alors qu’elle haussait le ton, lui tentait de garder ce flegme qui le définissait en toute circonstance. Si c’était un secret elle serait bien mieux cachée que ça… mais je ne vais pas non plus l’exposer en évidence. Cette réponse était bourrée de mauvaise foi et lui permettait, il l’espérait, de gagner un peu de temps. Il haussa furtivement les épaules, seule preuve réelle de son agacement face à cet interrogatoire. Visiblement Violet était au moins autant irritée que lui et elle ne s’en cachait pas du tout. Il laissa retomber ses mains, s’il avait porté un pantalon il les aurait enfoui bien profondément dans ses poches en serrant les poings mais là, vêtu de son seul caleçon, il se sentait à nu, un peu trop pour ce genre de conversation. Je ne t’ai pas fait venir ici pour que tu fasses le ménage, Cox. Cette fois-ci le ton était plus sec, il ne cherchait plus à mettre de la douceur dans sa voix, petit à petit la surfeuse l’exaspérait. A parler comme s’ils étaient déjà un couple, alors qu’ils ne savaient pas de quoi serait fait le lendemain ni où allait leur relation. Quelques heures plus tôt il en était encore à chercher par tous les moyens à se la sortir de la tête, puis finalement au fur et à mesure de la soirée il s’est ouvert à elle et acceptait de faire des efforts, si elle lui laissait le temps. Mais à présent il se fermait comme une huître parce qu’elle le brusquait, parce qu’elle posait trop de questions sur le sujets dérangeants. Parce qu’il prenait peur et que c’était presque une trop bonne excuse pour freiner un peu les choses et son cœur qui s’emballait bien plus que de raison pour cette fille. Elle n’avait pas tort, il le savait, mais il préférait faire machine arrière, c’était plus simple, personne ne souffrirait de ses secrets trop lourds à porter. Il se protégeait et il voulait croire qu’il la protégeait également, de lui et de toutes ses relations malsaines. Je t’ai dit qu’il me fallait du temps. Ce ne sont pas deux nuits ensemble qui font que tu me connais. Tu ne sais rien de moi et ce n’est pas cette façon de fouiller chez moi qui te fera me connaître davantage. Ni ton interrogatoire. Ca ne fonctionnera pas, non, comme tu dis, à juste titre, il n’y a rien d'évident entre nous. Il lui mentait, il se mentait à lui-même aussi, en voulant se faire croire qu’il ne ressentait rien pour Violet. Elle tenta d’ailleurs d’apaiser cette colère qui grondait en lui, faisant un pas vers lui pour déposer une main sur son torse. Ce fut au tour de Terrence de reculer, elle était allé trop loin, bien au delà de sa patience habituelle. Arrête de croire qu’on vit au pays des bisounours ! Bowen n’est pas une ville totalement sûre, aucune ne l’est vraiment. Toi tu ne connais que ta plage, mais vas te promener vers les bâtiments désaffectés en pleine nuit ! Tu verras…  On a toujours besoin de se protéger, on n’est jamais sûr de rien. En vérité c’était un mensonge, Bowen était certainement l’une des villes les plus sécurisantes qu’il connaissait en Australie et il avait une totale confiance en la plupart de ses habitants, si vous restiez respectueux des autres, les autres vous respecteraient. Mais voilà, Terrence menait cette double vie qui, elle, méritait qu’il se rassure avec un gros calibre, juste au cas où. Si au départ il avait voulu apaiser Violet, c’était maintenant son tour d’afficher une mine renfrognée et clairement, il n’était pas le plus commode ni le plus simple à dérider quand il avait décidé de bouder.

Les années filaient au gré des saisons, le temps coulait sur le visage de Violet qui approchait dangereusement la trentaine. Et cette trentaine, Elle n'était pas prête à l'affronter. Toute seule. Devant son miroir sur pied en fer forgé noir qui reposait sur le mur de sa chambre, délicatement apposé contre la peinture blanche de la pièce, elle s'était longtemps observée avant de quitter son domicile pour sa soirée. Son visage changeait, sa peau changeait, ses cheveux changeaient, son corps changeait. Rien ne lui allait comme avant, elle qui n'avait jamais eu de mal à s'habiller autant pour sortir que pour faire des courses un samedi matin. Elle n'avait jamais été complexée par son corps, se trouvant jolie comme elle l'était : pas la plus belle, mais pas celle qui était la plus moche. Mais ce soir, rien ne lui allait. Elle avait essayé des dizaines de tenues avant de s'arrêter sur la robe fine et ajustée qu'elle avait finalement choisi de porter, mais même en sortant de chez elle elle assumait difficilement son choix. Elle devenait plus complexée avec les années, plus soucieuse de ce qu'elle devenait. La blonde faisait nettement plus attention à son alimentation et elle qui était déjà sportive de nature redoublait d'efforts pour garder sa silhouette. Effets de la trentaine qui se faisaient ressentir, sans aucun doute possible. Et si l'Américaine n'avait jamais été pressée d'obtenir quoi que ce soit dans sa vie, parfois, il lui arrivait de se sentir seule dans sa demeure vide. Avec Terrence, elle se sentait belle. Il n'était pas de ces hommes qui couvraient les dames de compliments pour leur faire plaisir, presque de façon automatique, à tenter de les charmer à coups de belles paroles. Le barbu était différent puisqu'il réussissait à la regarder d'une façon dont personne ne le faisait. Un simple regard et elle se sentait mieux. Un simple sourire et elle ne regrettait plus le choix de ses vêtements. Un simple toucher et elle assumait le maquillage de soirée qu'elle s'était appliqué. Violet s'était rarement senti ainsi en la présence d'un homme. Elle, qui ne s'attachait jamais rapidement, avait l'impression de le connaître depuis toujours alors qu'en réalité elle ne connaissait que ce qu'il avait choisi de lui montrer. Et, même si elle avait promis de leur donner de temps, de s'accorder un moment de répit avant les prochaines tempêtes, elle ne pouvait s'empêcher de tomber plus amoureuse de lui à chaque regard. Sans le vouloir. Tout simplement parce qu'il avait pris en otage son coeur et que pour lui rendre il fallait le lui briser.
Quelques heures s'étaient déjà écoulées lorsque la blonde délaissa son amant pour se rafraîchir à la cuisine. Toute la petite caravane de l'homme était un champ de bataille. Les plats traînaient encore sur le plan de travail, les chaises étaient toujours installées près de la mer, Stan dormait sur le canapé enfoui dans le parka qui avait servi de réchaud à la belle et la chambre était en pagaille. Et malgré ce désordre qui l'aurait irrité en temps normal, Violet était heureuse. Blottie dans le t-shirt visiblement trop grand de Terrence, elle humectait son odeur qu'il y avait laissée en revoyant les scènes de leurs ébats. Elle voyait les baisers, les caresses, la tendresse qu'il avait entre eux sans même l'avoir forcé et sa peau frémissait à nouveau alors que son corps en redemandait encore. Avec lui, elle se sentait jeune à nouveau. Au début de la vingtaine, naïve et beaucoup trop amoureuse pour réfléchir de façon censée. Et elle ne pensait pas être sur le point de faire quelque chose qui le mettrait en colère, surtout pas après le moment qu'ils venaient de passé. Elle voulait seulement se désaltérer d'un verre d'eau inoffensif et retrouver ses bras pour le reste de la nuit. Violet n'avait pas demandé à trouver une arme, elle n'avait pas voulu fouiller dans ses secrets, mais sans le vouloir elle l'avait fait. Et la colère que Terrence avait grondait en lui. Il était facile de le lire dans son visage. Si ce n'est pas un secret, pourquoi tu ne me dis pas les raisons qui te motivent à en posséder une ? Violet répondait aussi sèchement qu'il le faisait. C'était une habitude chez eux de se lancer la balle, rétorquant plus aux réponses de l'autre jusqu'à ce que le meilleur gagne. Terrence laissa tomber les mains le long de son corps, Violet pouvait voir qu'il était tendu et que ses points hésitaient à se refermer. Sa mâchoire était resserrée. Seulement vêtue du chandail de son amant, Violet croisa les bras devant sa poitrine se sentant à son tour malaisée de sa tenue d'Adam. Et il rétorqua à nouveau, ouvrant le feu pour leurs anciennes hostilités. Ah! Et tu m'as fait venir ici pourquoi ? Elle soupira, ne cachant visiblement pas son irritation. J'm'excuse Terrence, vraiment, j'aurais dû te réveiller et te demander la permission de venir prendre un verre dans ton armoire. C'est clairement de ma faute si je suis tombée sur ton arme planquée là. Levant les yeux au ciel, elle secoua la tête en démontrant son amusement face aux accusations qu'il lui faisait. Violet savait que ces répliques, ces piques lancées l'un sur l'autre ne menaient vers rien de bon. Terrence, obstiné et trop fier, se refermerait aussi rapidement qu'il avait laissé une place, aussi petite qu'elle fût, à la surfeuse dans sa vie. Mais elle ne le comprenait pas. Elle était tombée sur son arme, elle n'avait pas cherché à la trouver. Elle n'avait rien demandé, d'ailleurs. Ses plans de le retrouver dans son lit, pour partager peut-être de nouvelles étreintes, étaient bien plus excitants que de se disputer pour une énième fois avec lui. Et elle commençait à se lasser de ce petit jeu qui ne les quittait pas. Elle n'avait plus de temps à perdre avec des disputes et des concours duquel grogne le plus fort. Franchement, elle en avait marre. Violet serait tout de même incapable de le quitter, beaucoup trop amouraché de son âme pour faire une telle chose. Ce fût plutôt Terrence qui l'énonça à voix haute, décrétant qu'elle ne le connaissait pas. Ce qui était vrai. Saisie, Violet se redressa. Que deux nuits ensemble ? Elle fronça les sourcils en le défiant du regard. Je pensais que c'était plus que ça, que ça représentait plus pour toi que deux simples nuits. Son pied fracassait le sol nerveusement. Tu as raison, je ne te connais pas. On se connait depuis quatre ans, mais jamais on n’a pris le temps de discuter comme on l'a fait ce soir... Elle s'approcha de lui pour tenter d'apaiser la tempête qui grondait dans la tête et le coeur de Terrence, mais il esquiva son geste résigner à bouder comme un enfant mécontent. Et il renchérit encore une fois, habité de leurs vieilles habitudes. J'ai vécu à New-York toute ma vie, Terrence... Tu ne m'apprendras pas ce qu'est une ville dangereuse.. Elle gloussa. La situation était ridicule et leur dispute l'était d'autant plus. Je ne planque tout de même pas une arme sous mon oreiller, sous prétexte que la ville est dangereuse. Elle soupira, reculant vers la chambre à coucher. Et comme je ne connais que ma plage, j'devrais surement y retourner. J'y serais nettement plus en sécurité. Une nouvelle fois, l'Américaine secoua la tête de désespoirs. C'est du temps que tu veux, Terrence ? J't'en donne. Je t'en donne autant que tu en veux... Quand tu seras prêt à me parler, à me présenter qui est réellement Terrence Kelly, je serai là. Prête à t'écouter. Parce que te connaitre, je ne demande que ça. Mais ça ne sert à rien de se lancer encore des tomates au visage. J'te l'ai dit, j'te laisse gagner. à contrecœur, mais surtout parce que la maturité et la raison lui revenaient, Violet avait prononcé les dernières paroles. Elle n'avait plus la force de se battre contre lui et contre sa nature.

Violet était belle, c’était un fait indéniable pour Terrence. Elle était belle et jeune, elle avait la fraîcheur qu’il manquait à notre homme qui approchait petit à petit de la quarantaine. Quand il la regardait il lui semblait qu’elle rayonnait, jamais il ne pourrait se douter qu’elle complexait de voir son âge avancer et son corps changer. Elle semblait si bien dans sa peau, elle qui avait tout plaqué pour venir vivre à Bowen, elle qui passait la plupart de ses jours en maillot de bain sur la plage à dompter les vagues, elle n’avait pas à rougir de sa plastique, elle cachait bien ses complexes. Dans tous les cas elle pouvait à présent compter sur Terrence pour la couver de ses yeux admiratifs, pour la trouver belle et le lui dire si elle en doutait, il ne pourrait plus jamais jouer le jeu de l’homme indifférent, elle savait à présent qu’il ne l’était pas. Pourtant rien n’était encore stable entre ces deux amants qui s’apprenaient encore. Terrence gardait toujours sa réserve comme une vieille habitude tenace, il n’offrait pas grand chose à Violet alors qu’elle était prête à tout lui révéler d’elle. Et cette nuit, alors qu’elle s’était levée à pas feutrés dans le seul but de se servir un verre d’eau et d’avancer cette vaisselle pour aider Terrence, la New-Yorkaise était tombée nez à nez avec l’un des secrets du ténébreux. Elle ne l’avait très certainement pas prémédité mais elle allait pourtant, par ce geste malencontreux, s’attirer les foudres de son ancien meilleur ennemi. Terrence n’était pas des plus sociables ne ceux qui faisaient preuve du plus de tact, il ne savait pas vraiment arrondir les angles et, quand il était en colère, il se laissait facilement emporter, laissant apparaître l’une des facettes de sa personnalité qu’il aimait le moins, son irascibilité. Il était la plupart du temps capable de la laisser en sourdine, de ronger son frein pour paraître le plus détaché et le plus calme possible, mais ce n’était qu’une façade pour ne pas montrer qu’il bouillait intérieurement. Il savait se contenir, jusqu’à un certain point. Et qu’est ce que j’en sais, moi, que tu n’as pas fouillé pour chercher à savoir ce que je n’étais pas encore prêt à te dire. Puis j’ai un permis pour cette arme, je n’ai pas à m’en cacher, j’ai le droit de l’avoir chez moi. Raison dont, nous n’en doutons pas, Violet se foutait totalement ! En vérité cette dispute était stupide, ils en revenaient toujours au même, se chamailler pour des bêtises, parce que Terrence refusait, obstinément, de s’ouvrir un peu plus à elle. Mais comprenez-le, si la brune apprenait son commerce, elle claquerait la porte de cette caravane et il ne la reverrait plus jamais. Alors qu’avant de s’endormir, juste après leur étreinte, lorsqu’il luttait encore pour que le sommeil ne le prenne, il songeait qu’il était bien avec elle, à la tenir dans ses bras. Assez bien pour imaginer tenir enfin tête à cette mafia à qui il devait des comptes. Pour tout régler et être enfin libre. Libre de travailler honnêtement et d’aimer qui il voulait sans plus jamais faire prendre de risque à personne. Briser ses chaînes pour mieu renaître et devenir enfin cet homme qu’il avait toujours voulu être. Ce pistolet elle l’avait trouvé trop tôt, elle ne lui avait même pas laissé la chance de régler ses dettes pour avoir la conscience tranquille. Et à présent il était obligé d’aller au conflit pour se protéger et la protéger également. Il serra les dents alors qu’elle tentait d'apaiser leurs tensions, alors qu’elle caressait son visage de sa main de la façon la plus tendre. Mais la colère grondait en lui, il était surtout en colère contre lui-même, bien qu’elle n’ait pas à le savoir. Bowen ce n’est sûrement pas New-York mais tu n’as pas mon passé, je n’ai pas fréquenté que des gens biens. Il ne savait pas comment cette dispute allait se terminer, pourtant il n’imaginait pas que Violet puisse quitter son nid au pied levé. Il n’était pas prêt à la voir partir, pas sur ces mots là, pas alors qu’ils s’étaient, une fois encore craché au visages. Il s’y prenait toujours mal avec elle il ne savait pas comment faire et sa maladresse la faisait fuir, une nouvelle fois. La surfeuse prenait donc le chemin de sa porte et celui qui avait pourtant revêtu son masque de boudeur n’avait qu’une envie, la retenir. Mais après une dispute comme celle-là il ne savait pas comment faire, tout ce qu’il pourrait dire serait gauche. Attends ! Où tu comptes aller là ? Il la rejoignit en quelques grandes enjambés et puis la domina de toute sa stature. C’est toujours mon t-shirt que tu portes… Il posa sur elle un regard qu’il voulait plus doux, même s’il était malhabile. Je t’accorde qu’il te va bien mieux à toi qu’à moi… Puis il soupira doucement. Je ne voulais pas qu’on se dispute au sujet de cette maudite arme. Elle ne définit en rien qui je suis, c’est juste… comme ça, au cas où, que tu comprennes ou non. Je suis désolé Violet, je ne sais pas quoi te dire de plus, je n’ai rien à dire, rien à t’apprendre à ce sujet qui te ferait mieux me connaître. Je ne suis pas un ange, je n’ai pas toujours bien agi et je n’en suis pas fier. Je n’ai aucune envie de t’en parler pour l’instant. Parce que tu dois d’abord connaître le Terrence que tu as devant toi, celui d’aujourd’hui, avant que je te parle de celui que j’ai été par le passé et qui n’existe plus. Il posa une main ferme et douce à la fois sur l’épaule de la jolie brune. Viens te coucher, il est bien trop tard pour que tu rentres seule. Sous ses airs d'homme sûr de lui qui en imposait, Terrence n'en menait en fait pas large, incertain quant à l'issue de cette nuit et plus encore de sa relation avec Violet.

S'il pensait être le seul à avoir des secrets, Terrence se trompait sur toute la ligne. Violet était pleine de surprise, mais surtout, elle ne lui avait pas encore tout dit sur elle, qui elle était vraiment et à quoi rimait son passé. Certes, ce qu'elle gardait en elle était pas mal moins effrayant que les fantômes qui hantaient l'ex-militaire, mais il en restait néanmoins des parcelles d'elle qui étaient encore inconnues aux yeux de l'homme. Il ne pouvait se douter que, parfois, derrière ce sourire enjoué et ce positivisme se cachait une femme qui était peu sûre de sa propre personne et des choix qu'elle avait faits dans la vie. Qu'il était définitivement plus simple de revêtir un sourire et une bonne humeur pour éviter d'expliquer aux autres qu'il arrivait, qu'à presque trente ans, de se sentir seule alors qu'on était entouré de million de personnes. Que parfois elle se demandait si elle avait fait le bon choix en quittant sa ville natale, laissant sa famille derrière elle, parce qu'ici, à Bowen, elle était franchement seule. Il arrivait à la belle blonde de sentir qu'elle avait fait une erreur, qu'elle finirait ses jours seule dans sa boutique qui était aujourd'hui sa plus grande fierté et pour laquelle elle avait tout donné : son temps, son argent et sa passion. C'est que Violet ne se vantait pas de ces démons qui l'habitaient, laissant croire qu'elle ne pouvait pas se faire atteindre par les obstacles de la vie. Elle avait choisi le positivisme. Et pourtant, elle pouvait comprendre qu'il ne souhaitait pas en parler, du moins pour le moment, mais il devrait confronter la réalité tôt ou tard pour que leurs disputes ridicules basées sur des anciennes habitudes de vie puissent prendre fin. Sans quoi, leur relation tournerait en rond comme un chien qui court après sa queue. Il demeurait impassible, froid comme à son habitude, alors que Violet ne demandait qu'un peu de vérité pour faire avancer le semblant de relation qu'ils bâtissaient ensemble. Alors qu'ils avaient à peine retrouvé le calme quelques heures avant, ils étaient maintenant repartis dans leurs querelles qui auraient pu facilement être évitées si l'un comme l'autre avait décidé de mettre un peu d'eau dans son vin. Bon sang, Terrence ! Tu crois sincèrement que j'aurais fait exprès de balancer ton arme sous ton nez pour que tu me dises la vérité ? C'est ridicule. Violet commençait à être franchement irritée par la situation, elle qui avait décidé de laisser l'homme rêvasser plutôt que de le réveiller pour se désaltérer. Tu as le droit de l'avoir chez toi, oui, mais j'ai aussi le droit de savoir la vérité. Dit-elle, cette fois plus fermement. Terrence avait ses secrets que lui seul connaissait. Au travers des rumeurs qui courraient sur lui et sur sa boutique, Violet avait choisi de ne croire que ce que l'homme lui dirait. Chose qui semblait plus difficile à rendre en pratique plutôt qu'en théorie. Et elle avait accepté qu'il prenne son temps pour le lui dire. À présent, elle était tombée nez à nez avec l'une d'entre elles, ces vérités cachées, dont il semblait encore vouloir se défaire en évitant de confronter la réalité. Et cette réalité, il aurait besoin d'y accéder, sans quoi Violet finirait par disparaître, fatiguée de devoir deviner qui était réellement Terrence Kelly. La discussion ne menait à rien, les deux amants se lançaient la balle sans compter de but, s'épuisant aux passages par leurs enfantillages. Je me fiche des gens que tu fréquentes, ou que tu as fréquentés. Ce qui m'importe c'est toi... Finit-elle par avouer à l'homme en baissant les bras comme si elle baissait son arme au combat. Ce qu'il avait été, précédemment, importait peu à la surfeuse. Elle voulait apprendre à le connaitre sous toutes ses coutures, aussi horribles ou malhonnêtes qu'elles pouvaient l'être, et pouvoir être en mesure de prendre une décision sur sa vision de l'homme. Éclairée par ce qu'il lui confirait sur lui. Il était face au mur et malgré ça, Terrence choisissait de contourner la simplicité de l'honnêteté. Violet en avait assez. Elle se battait, elle tentait de comprendre et d'accepter en vain alors qu'elle faisait toujours face à un mur de pierre. Un Terrence entêté et bien trop fier pour laisser quiconque entrer dans sa vie. Les bras de la femme étaient le long de son corps, de ses mains elle jouait nerveusement avec les coutures du long t-shirt qu'elle avait revêtis un peu plus tôt. Elle n'arrivait plus à le regarder, bien trop irritée par son attitude impartiale. Il l'avait repoussé alors qu'elle tentait de calmer le tir, de sortir les drapeaux blancs. Il faisait d'elle son ennemie à nouveau, comme ils en avaient l'habitude. Sauf que cette fois, Violet n'était pas d'accord. Elle baissait les bras, exténuée de passer tant de temps à se disputer pour des histoires qui ne mèneraient à rien. Une seule envie lui passait par la tête : retrouver sa plage et son bout d'océan qui, eux, ne l'avaient jamais laissé tombés. Retrouver les vagues qu'elle connaissait par coeur, les orteils frôlant la marrée montante et le vent océanique sur son visage. Parce qu'il avait besoin de temps, Violet voulait se retirer. La blonde était persuadée que l'histoire était écrite ainsi, loin des fins heureuses, et qu'il ne retourne plus vers elle bien trop déchirer pour daigner tenter de rassembler les morceaux. Elle avait lâché prise, faisant dos à Terrence afin de regagner la chambre à coucher où reposaient encore ses vêtements sur le sol, le t-shirt de l'homme frôlant la naissance de ses fesses nues chaque fois qu'elle faisait un nouveau pas, la déchéant de toute sa crédibilité. Il ne fallut pas de temps à Terrence pour la rattraper, malgré sa démarche bancale que la commerçante avait déjà oubliée et pour lui faire faire volteface. Violet ne quittait pas l'homme des yeux, qui lui imposait sa présence. Du haut de ses trois pommes, beaucoup plus petite et frêle que l'ex-militaire imposant, elle le défiait du regard alors qu'il lui demandait où elle croyait aller ainsi. Chez moi, où d'autre ? Il était près d'elle, beaucoup trop près pour la distance qu'elle tentait de créer entre eux. Cette fois ce n'était pas un jeu, loin de chercher à le séduire. Elle était réellement déçue de la situation et de leur dispute qui auraient pu être évitées s'il avait laissé tomber l'orgueil mal placé et s'il avait finalement choisi de lui parler une fois pour toutes. Je te le redonne si c'est ce que tu veux... Ajouta-t-elle d'une voix plus douce, mais tout de même moins chaleureuse qu'auparavant le laissant alors lui déballer le contenu de son sac. Un rictus finit par se dessiner sur les lèvres de l'Américaine qui attrapa les mains de son amant avant de reposer ses yeux sur lui. De ses doigts, elle jouait avec ceux du barbue pour détendre l'atmosphère tendue de façon permanente. Pour bien comprendre le Terrence Kelly d'aujourd'hui, il faut que je connaisse celui du passé... je te laisse le temps qu'il te faudra pour trouver la force de m'en parler, mais tôt ou tard tu auras à le faire ou alors je finirais par l'apprendre moi-même, d'une façon ou d'une autre... Et tu sais autant que moi qu'il vaut mieux que je l'apprenne par toi. Au delà de ce qu'il essayait de lui dire, de lui faire comprendre, Violet savait qu'il continuait pertinemment à lui cacher volontairement les détails de sa vie du passé. Elle serrait ses mains contre celles de l'Australien cherchant à combler ce besoin continuel de proximité avec lui et finit par secouer la tête. Je n'ai aucune envie de te quitter, Terry, mais je sens que je dois te laisser réfléchir à tout ça... Elle lui sourit timidement. Et je t'avoue que dormir avec une arme dans la maison ne me rassure pas spécialement... Même si elle ne voulait pas le croire, que toutes ces choses qu'il lui avait dit sur la ville et ses fréquentations n'avaient jamais effleuré l'esprit de la blonde, elles commençaient à germer la crainte dans sa tête. Ces gens... qui sont pas bien... ils t'en veulent ? Violet savait qu'elle franchissait la ligne de l'interdit, posant à nouveau des questions auxquelles elle n'obtiendrait pas de réponse ce soir pour la simple et bonne raison qu'il n'était pas prêt à se confier à elle. Non pas par manque d'amour, mais plutôt par manque de courage. Elle secoua à nouveau la tête. T'es pas obligé de me répondre...

Quelque part il savait qu’il était ridicule de penser que Violet avait délibérément cherché à trouver quelque chose sur Terrence en furetant dans sa caravane alors qu’il dormait. Que ce soit cette arme ou une autre, que ce soit autre chose comme une des rares photos de sa fille qu’il avait en sa possession et qu’il cachait comme des trésors d’une vie oubliée. Il ne possédait pas grand chose, il n’était pas matérialiste et il ne s’attachait pas vraiment aux souvenirs. Mais il avait quelques affaires auxquelles il tenait sincèrement, qui lui étaient chères et celle-là il ne les exposait pas à la vue de tous, il les dissimulait jalousement. Ses armes, il n’en était pas fier et il s’en passerait bien, mais elles lui étaient nécessaires si d’aventure les choses tournaient mal pour une quelconque raison. Et bien qu’il ne sache pas réellement ce qu’il ferait si quelqu’un venait lui chercher des noises jusqu’ici, il était bien incapable de se dire qu’il pointerait son flingue sur quiconque comme ça, de sang froid. Il savait pourtant qu’il était armé et donc, potentiellement protégé et ça le rassurait, d’une certaine façon. Il serra les dents, rendant son expression encore plus dure alors qu’il défiait Violet du regard sans dire un mot de plus pour justifier qu’il pensait qu’elle fouillait. Il fut pourtant incapable de rester plus silencieux lorsqu’elle affirma, avec tout son aplomb et ses seins nus sous son t-shirt qui pointaient fièrement dans la direction de son amant, qu’elle avait le droit de savoir la vérité. Il n’était pas de cet avis, il ne lui devait rien, encore une fois il restait ferme sur l’idée que seules deux nuits d’amour, quelques sentiments naissants, aussi forts soient-ils, et une fille diablement sexy en face de lui ne constituaient pas une relation en soi. Ils ne se devaient rien, Violet et Terrence, ils n’étaient pour l’instant pas grand chose l’un pour l’autre. Et même si toute histoire d’amour devait avoir un début, même hésitant, même si celui-ci devait être basé sur la confiance et sur des fondations solides, il n’était pas encore prêt à tout lui révéler. Pas ce genre de secret en tout cas, pas ceux qui la feraient fuir alors qu’ils ne révélaient rien de l’homme qu’il était réellement. Il s’emporta alors, plus que de raison, assez pour qu’elle n’ait plus envie de s’attarder auprès de lui. Oh non ! Non ma chérie -ce genre de chérie qui n’avait rien d’affectueux- je ne te dois aucune vérité. Elle était têtue, il était borné.
Il était plus que probable que Violet avait déjà entendu les rumeurs qui couraient sur Terrence, il fallait être sourd pour ne pas les connaître surtout si elle travaillait dans le monde du surf. Mais il fallait avouer qu’elle avait toujours été très correcte avec lui sur ce point là, autant aujourd’hui, qu’ils se connaissaient intimement et qu’elle pourrait vouloir être curieuse, que du temps de leurs querelles et qu’elle aurait pu l’ennuyer avec ces fameux bruits qui couraient, jamais elle n’avait posé de question. Jamais elle n’avait non plus alimenté ces rumeurs. Elle s’était toujours tenue à l’écart des ragots et il ne pouvait que l’en remercier. Cela ne voulait pas dire qu’elle n’y croyait pas, ou qu’elle ne doutait pas de son honnêteté, même encore aujourd’hui. Il voulait pourtant croire qu’elle était plus intelligente que ces idiots à la langue trop bien pendue et qu’elle n’écoutait pas tous les bruits qui couraient, ou qu’elle savait faire un tri entre vérité et commérage. Bien que, dans toutes ces rumeurs, il y avait toujours un fond de vérité et concernant Terrence cela se vérifiait bien. Pourtant il ne confirmait ni ne démentait jamais rien, il laissait dire, il restait détaché et quand on lui posait des questions il riait comme s’il n’en avait rien à faire, comme s’il n’avait rien à se reprocher. La réponse qu’elle lui offrit n’était pas réellement convaincante pour le barbu, elle n’était pas totalement vraie non plus, parce que si Violet en apprenait plus sur ses fameuses fréquentations et sur ce qu’elles signifiaient, elle ne le verrait sûrement plus du même œil.
Ils semblèrent enfin s’apaiser, non pas qu’ils hissaient le drapeau blanc, mais Kelly en avait assez de cette dispute qui ne menait à rien et Violet, elle, jetait carrément l’éponge en lui donnant l’impression qu’elle allait partir. Ce qu’il ne voulait pas, pas comme ça, pas sur cette énième querelle, pas après ce qu’ils venaient de partager. Il avait fait un énorme pas en avant, vers elle, ce n’était pas pour reculer et revenir à leurs anciennes rancœurs. Il tenta alors, maladroitement, de la retenir. Il réussi à trouver les mots pour au moins faire venir le calme et ceux de Cox trouvèrent un écho en lui. Elle avait raison, il le savait bien, si elle devait en apprendre davantage sur lui, il fallait que ce soit de sa bouche à lui, qu’il lui donne ses vérités, sa version des faits. Mais non, il n’était pas encore prêt et il prenait le risque qu’elle s'éloigne à force d’attendre, ça aussi il le savait. J’ai besoin de savoir où je vais, avant de savoir si je peux t’y emmener avec moi. Être certain qu’il ne l'entraînait pas dans quelque chose de trop dangereux, elle qui semblait si vite s’attacher à lui. Cette arme je peux la mettre dans mon abri de jardin si ça ne tient qu’à ça. Mais il sentait qu’il n'était pas question de ça, qu’en ayant tenu cette arme dans ses mains, Violet avait pris peur, de cette part sombre qu’elle découvrait à peine, peur de lui, peut-être. Et sa prochaine question le lui confirma, comprenant qu’il allait la perdre avant même de l’avoir vraiment, pas à cause de son sale caractère, pas à cause de ses silences. Mais lorsqu’elle saurait quelle homme il avait été, qu’elle connaîtrait ses erreurs et ses mauvais choix. Lorsqu’elle apprendrait que pour réussir à lui faire concurrence et à ouvrir sa boutique il avait fait un pacte avec le diable. Violet, si intègre, aurait peur de celui dont elle tombait amoureuse, il en était sûr. Sa seule chance était vraiment d’arrêter tout commerce parallèle. Ce ne sont pas ceux que je fréquente qui t’intéressent, c’est moi… c’est ce que tu m’as dit, non ? Il cherchait à la piquer gentiment avec ses propres mots, mais il comprenait que le temps était venu de la rassurer. Sauf que la vérité n’était pas rassurante. Il passa une main dans ses cheveux dorés, la fixant intensément, un faible rictus au coin des lèvres. Ils pourraient m’en vouloir un jour. Ca dépend de moi. Il soupira doucement, l’attirant à lui pour la serrer contre son torse. Ce n’est pas quelque chose dont tu dois te préoccuper, ça ne regarde que moi. Il ne tenait qu'à lui d'inverser la tendance. Il pensait à cette arme qui reposait dans la cuisine, juste derrière eux, celle qui effrayant tant Violet. Elle n’était que la partie visible de l’iceberg, il ne pouvait que penser à toutes les autres qui dormaient dans sa boutique. Il l’embrassa dans les cheveux. Je te raccompagne chez toi si tu veux. Il avait bien compris le message un peu plus tôt, elle ne voulait plus rester ici et même s’il aurait voulu la garder auprès de lui encore un peu, il respectait sa décision.

HJ:

Les rumeurs qui courraient au sujet de Terrence, elle les avait toutes entendues. Certaines étaient horribles, d'autres complètements tirés par les cheveux. Mais de tout ce qu'elle avait entendu sur lui, les horreurs qu'on pouvait bien raconter, Violet avait choisi d'en ignorer les retombés. Leurs querelles étaient personnelles et elles n'avaient d'affaire avec les salades qu'on racontait sur lui. Maintes fois elle aurait pu les utiliser pour l'achever, personnellement ou indirectement, mais elle avait choisi de vivre en faisait abstraction de ce qui était dit. Parce qu'on lui avait appris indirectement à connaître quelqu'un avant de le juger. Elle en remerciait d'ailleurs sa situation familiale peu commune pour cette leçon de vie qui l'aura suivi toute sa vie. Jeune, elle ne supportait pas de voir les autres se moquer de sa soeur et de ses préférences. Elle n'avait jamais été de ceux qui définissent l'humain à ce qu'il ressemble, ou à ce qu'il affectionne, mais dans ce monde où le jugement est rapidement adopté et où être différent ne cadre pas dans le moule de la normalité, la définition de l'humain prenait un tout autre sens. C'est parce qu'elle avait eu une haine rageuse envers toutes ces personnes qui avaient osé se moquer de sa soeur qu'aujourd'hui elle ne s'abandonnait pas aux jugements faciles. Même s'ils étaient ennemis depuis de longues années, la commerçante ne s'était jamais laissé influencer par ce qu'on pouvait dire de son compétiteur, bien trop occupée, de toute façon, à se chamailler avec lui pour une question de chiffre d'affaires ou de façon de faire. Aujourd'hui, heureusement, ils essayaient d'apprendre à cohabiter avec leurs vieilles habitudes, laissant les disputes de côté pour se permettre un peu de répit alors qu'une relation était sur le point de naître de cette amitié bancale. Mais ils avaient drôlement échoué, ce soir du moins, à s'accorder un répit. Avait-il peut-être raison, finalement, d'avancer que la blonde n'avait aucun droit sur les vérités qu'il choisissait de lui dévoiler. Peut-être que leurs deux nuits d'amour étaient, en effet, que deux nuits qui ne voulaient rien dire. Que leurs sentiments ne mèneraient à rien. Et qu'ainsi il valait mieux se protéger contre les retombées que ces vérités pourraient amener. Violet n'était pas aussi prudente que Terrence qui avait maintenu ses vieux réflexes de l'armée et elle avait bien du mal à accepter qu'il n'était pas prêt à lui parler, à lui dire ce qu'il cachait derrière tout ça. Parce qu'elle était persuadée que la vérité, la pure vérité, il la lui cachait volontairement. Peut-être que ces rumeurs contribuaient à son choix, ou étaient-ce son absence de sentiments envers elle ? Une nouvelle fois, alors qu'elle ne savait que faire ainsi ce soir, elle secoua la tête démontrant son mécontentement face aux répliques de l'homme. Il était insolant, culoté, comme il en avait l'habitude, mais cette fois ça en était trop pour la blonde qui commençait vraiment à perdre patience. Alors, je n'ai rien à faire ici. Décréta-t-elle, bien décidé à repartir bredouille chez elle malgré la petite voix dans sa tête qui lui suppliait de ne pas le quitter. C'était enfantin, comme toute cette dispute à vraiment y penser, mais elle n'y pouvait rien. Il l'a mettait en colère et elle ne pouvait le supporter encore longtemps. À peine retrouvés qu'elle voulait partir, trop bornée pour accepter qu'il garde ses secrets quelque temps encore pour lui seul, avant de s'ouvrir à elle. Elle voulait savoir, bien trop curieuse, mais aussi fatiguée de devoir porter des oeillets quand il était question de l'homme. Toutes ces années à se fermer les yeux sur ce qu'on racontait sur lui et maintenant qu'elle y faisait face, il lui tournait le dos en lui imposant, à nouveau, de vivre dans l'ignorance de sa réelle identité. Elle sentait qu'elle le perdrait si elle continuait ainsi, si elle le forçait à parler alors qu'il lui avait refusé le privilège de connaître la vérité. Et pourtant, Terrence, lui, n'avait qu'à demander pour que l'Américaine de confie à lui hâtive de lui confier qui elle était réellement.
Violet était fatiguée, la nuit était bien trop entamée pour continuer à se quereller sur des histoires de mensonges et d'honnêtetés, elle n'avait ni la force ni l'envie de continuer à se disputer. De loin, elle enviait la présence rassurante de ses bras et la chaleur de son corps qu'elle avait goûté quelques heures avant. La trentenaire jouait encore avec les doigts de l'homme, son visage plus doux à présent qu'ils ne se criaient plus dessus comme des hystériques. Je suis une bonne comparse de voyage, tu sais... Dit-elle, si bas qu'elle le disait presque pour elle, peiné par le doute qui planait encore entre eux. Pour elle, c'était si clair : elle avait envie de découvrir Terrence sous toutes ces facettes, d'apprendre à l'aimer malgré son sale caractère et sa défensive alors que pour lui toute cette histoire était encore un trou noir qui demandait à être éclairé.
Ce n'était pas de l'arme qu'elle avait peur, mais de la vérité qui se cachait derrière elle par les brèches qu'elle avait fini par découvrir. Avoir une arme, ce n'était pas si grave que cela. Plusieurs états n'avaient même aucune règlementation en la matière. Et si Terrence se sentait en sécurité avec l'outil de torture, Violet n'y voyait pas d'inconvénient. Mais, elle savait bien que l'histoire ne s'arrêtait pas là. Qu'il y avait une suite qui menaçait de se faire voir. Et c'était bien ça qui lui fichait la trouille. À partir d'aujourd'hui, rien ne serait pareil. Violet aurait la vision de l'arme et les paroles de l'homme qui hanteraient son esprit à se demander s'il était réellement en sécurité ou si le danger ne cessait de le menacer. Aux paroles de son amant, plus taquines qu’irritantes, Violet leva les yeux au ciel. Évidemment, il lui fallait reprendre ces mots, moqueurs, comme il savait si bien le faire. Le regard de l'homme posé sur elle, son sourire aux coins des lèvres, elle était figée là, dominée par sa prestance. Il lui fit faire des pas de danse, à nouveau, l'attirant contre lui, contre son torse dénudé, où elle y blotti sa tête, finalement en sécurité. C'est là que tu te trompes... Ça me concerne aussi, maintenant, d'une certaine façon... S'ils te font du mal, je ne pourrai jamais l'accepter... Lui confia-t-elle en trouvant le chemin vers son dos pour le caresser, fermant les yeux pour mieux apprécier le doux baiser qu'il déposa sur le sommet de sa tête. Elle l'aimait, de toute son âme, sans même le savoir encore et elle anticipait déjà la douleur de le perdre. Alors qu'il lui proposa de la raccompagner à sa demeure, bien trop tard pour laisser une femme marcher seule, Violet refusa. Elle secoua la tête frénétiquement, refusant de quitter son corps qu'elle venait de retrouver. Elle y resserra d'ailleurs l'étreinte qu'elle lui avait dérobée. Je n'ai pas envie de te quitter.. Laisse-moi prendre une douche et je te rejoins dans le lit.. Il aurait été plus sage de sa part d'accepter le raccompagnement, mais visiblement elle aimait jouer avec le danger.

Terrence n’avait pas vraiment peur pour sa vie, son commerce parallèle n’était dangereux que pour ses affaires. Il avait une carrure assez imposante pour qu’il n’ait pas grand chose à craindre physiquement. Et il savait que ceux avec qui il traitait n’étaient pas du genre à laisser de corps sur leur passage, ils agissaient de façon bien plus subtile, pouvant l’atteindre d’une façon bien plus destructrice, en s’attaquant directement à sa boutique. Ils avaient les moyens de lui faire mettre la clé sous la porte du jour au lendemain, de ruiner sa réputation, son réseau. Ils pouvaient lui faire perdre toute crédibilité dans le monde du surf et le griller totalement, en un claquement de doigt. C’était simple pour eux, rapide et ça ne laissait pas de trace. Terrence les craignait pour cela. Ces gens étaient intelligents, ils savaient utiliser les autres à leur avantage et se servir des faiblesses d’autrui. Hors, parmi toutes celles de notre homme, s’en ajoutait une nouvelle et pas des moindres. Violet, la belle, la sensible, celle qui ignorait tout ou qui avait choisi de fermer les yeux sur les rumeurs, celle qui était capable de le regarder avec tant de douceur qu’il en fondait sur place. Elle était son point faible à présent, elle à qui il ne savait pas résister. Lui qui s’était pourtant taillé une carapace sur-mesure depuis des années, tenant les autres suffisamment éloignés de lui pour que rien ne l’atteigne. Elle avait tout bousculé, fissurer la carapace et d’un sourire elle le rendait accro. Ils sauraient se servir de cette faille, s’ils en avaient besoin. Et cette simple idée terrifiait celui qui semblait si inébranlable. La jolie blonde était charmante, à tenter d’aider son amant, à vouloir prendre sa défense si les choses tournaient mal, mais elle n’avait aucune idée de ce dont il était question ni dans quoi elle mettrait les pieds si elle faisait une chose pareille. Il lui sourit, las, soudainement fatigué. Personne ne me fera de mal, tu n’as à t’en faire pour ça. Il accepta ses caresses bienfaitrices et en profitait pour piquer un baiser sur son front, proposant de la raccompagner chez elle. Il ne voulait pas la forcer à quoi que ce soit, surtout pas à rester auprès de lui si elle n’en avait pas envie ou si elle le craignait. Mais ce fut Violet qui balaya cette idée, elle qui, quelques minutes plus tôt, partait pour récupérer ses vêtements. Il la serra doucement contre lui, reconnaissant de cette chance qui lui était donner de partager cette nuit avec elle. Il ya des serviettes dans le meuble près de la douche…. Juste des serviettes, pas d’autre mauvaise surprise. Il faisait allusion à cette arme qui trônait encore dans la cuisine. Kelly laissa la jeune femme se diriger vers la salle d’eau. Il en profita pour remettre le pistolet à sa place et ranger quelques affaires. L’envie de la rejoindre sous la douche en lui manquait pas mais premièrement c’était impossible parce que sa salle d’eau était minuscule. Et puis il voulait lui laisser un peu d’espace, pour qu’elle digère doucement tous ces mystères qu’il faisait encore. Il sortit dehors et s’alluma une cigarette qu’il fuma sans se presser en regardant le ciel, le bruit des vagues dans les oreilles et son chien qui s’amusait sur l’herbe. Cette nuit il allait s’endormir avec Violet au creux de ses bras, il savait que c’était une mauvaise idée. Plus il se rapprochait d’elle plus elle devenait indispensable à sa vie, plus il en tombait amoureux. Il se mettait lui-même dans un pétrin monstrueux, pourtant depuis qu’elle était parti sous la douche elle lui manquait déjà affreusement et il avait hâte de la sentir à nouveau près de lui, il était foutu. Une fois sa cigarette écrasée il rentra son chien, qui ne se fit pas prier pour aller se coucher à sa place. Terrence éteignit toute les lumières et se coucha dans son lit, il fut rejoint par Violet quelques minutes plus tard, ils s’endormirent dans un silence apaisant.

Fin