colors of the wind . pv scar

Je ne pus retenir une exclamation quand Scar évoqua le chaton qu’il venait de recueillir. C’est fou l’effet que ces petites bêtes ont sur nous. Leur pouvoir de nous rendre gaga en un quart de seconde me rendait admirative.
— Oh, une bébé chat, c’est tellement chooooou ! m’écriai-je alors avant d’entendre la suite de l’histoire.
Mon visage se déconfit tout à coup.
— Par la fenêtre ?!! Mais y’a vraiment des gros cons !
Je n’arrivais pas à comprendre comment une telle abomination était possible. Comment quelqu’un de censé pouvait-il faire cela à un animal. C’était tout simplement inhumain !
— T’as bien fait de le garder, Scar, au moins tu lui apporteras de l’amour, toi. Pauvre petite bête…
J’étais sure que l’animal allait être heureux avec mon ami, et que lui-même par ailleurs, trouverait du bonheur auprès de ce chat. On n’imagine pas à quel point leur simple présence nous est bénéfique. J’écoutai ensuite mon ami me racontait ce qu’il s’était passé avec Rosa. Je me doutais un peu de l’histoire, en réalité. Je grimaçai. Maddox, je le savais, considérait Rosa comme bien plus que sa meilleure amie, le problème était sans doute là.
— C’est pour ça qu’ils étaient un peu en froid alors…merde, Scar, ça me fait de la peine que tu te sois retrouvé au milieu. Comment tu le vis ? Vous avez discuté tous les trois ?

Cela m’embêtait que Scar se retrouve dans une telle situation. Je savais qu’il s’y trouvait bien malgré lui, je savais aussi qu’il ne pouvait s’empêchait de se sentir coupable, aussi préférais-je laisser de côté la conversation légère à propos de son nouveau chat et me concentrer sur le sujet plus épineux. Rosa et Maddox…il y avait de quoi écrire des centaines de pages à leur sujet, et la place de Scar dans l’histoire ne devait clairement pas être confortable. J’avais de la peine pour lui.
— Je crois que tu n’as plus qu’à attendre que le temps face son affaire, grimaçai-je.
Il n’y avait malheureusement rien de plus à faire. Scar devait s’armer de patience et faire profile bas. Par ailleurs, je savais que les choses finiraient par rentrer dans l’ordre.
— Maddox t’aime, il ne te fera pas la gueule indéfiniement…

À Bowen, tout finissait par se savoir, c’était vrai. Personnellement, cela ne m’avait jamais vraiment dérangée, je n’avais pas vraiment grand chose à faire des racontars, mais dans le cas de Scar, c’était un peu différent, et cela m’embêtait pour lui. Sa place n’était pas enviable, mais malgré tout, ce qui s’était passé entre Rosa et lui restait une erreur. Un égarement d’un soir, même si je ne pouvais m’empêcher de penser que ce rapprochement, même sous l’influence de l’alcool, n’avait pas eu lieu sans raison. J’allais même jusqu’à penser que cet acte pourrait rendre service à Maddox et Rosa. Cela leur permettrait de mettre les choses à plat, de parler, de comprendre les sentiments qu’ils avaient l’un envers l’autre, et peut-être même de les exprimer.
— Non, ils ne m’en ont pas parlé, répondis-je à Scar.
Je n’aimais pas l’expression qui se peignait sur le visage du jeune artiste. Je n’aimais pas le voir si triste, et encore moi sentir la culpabilité le tenailler. Pour moi, il n’y avait pas de quoi fouetté un chat. Il avait échangé un moment charnel avec Rosa, et après ? Je m’arrêtais de marcher pour lui faire fasse. Je lui souris et vins l’étreindre doucement.
— T’inquiète pas va, dis-je après un moment, je suis sûre que ce sera vite oublié.
Je me reculai, puis pouffai de rire, en réalisant ce que je venais de dire.
— Non mince, c’est pas ce que je voulais dire. Je suis sûre que c’était un moment mémorable…j’en sais rien, je ne connais pas tes talents dans le domaine, mais ce que je veux dire…c’est que ça va se tasser très vite. Maddox et Rosa vont être forcés de discuter, ce qui n’est pas un mal, et qui sait…tu leur as peut-être rendu un service. Malgré toi.

J’éclatai de rire quand Scar m’assura que toutes les nuits avec lui étaient mémorables. Les hommes aimaient le penser, en effet, et au fond, cela ne faisait de mal à personne qu’ils le croient. Je ne doutais pas des talents du jeune artiste, il ne pouvait pas être doué que dans un seul domaine, c’était évident. Je n’avais jamais eu l’envie de vérifier, cela dit, le considérant d’avantage comme un frère que comme un amant potentiel. Pour ce qui était de l’histoire avec Rosa, je n’allais pas jusqu’à dire qu’il avait bien fait, je disais simplement qu’il ne devait pas se flageller et qu’au fond, cela avait probablement amenés Mad et Rosa à discuter de leur sentiment plus tôt. Ce qui n’était franchement pas un mal. L’abcès percé, ils pouvaient enfin se dire ce qu’ils avaient sur le cœur. En parlant de cœur, Scar chercha à en savoir plus sur le mien, ce qui me fit aussitôt rire.
— Senti-quoi ? plaisantai-je, connais pas. Plus sérieusement, tu sais que je n'envisage pas ma...- comment tu dis ? - ma vie sentimentale comme tous le monde. Mais ça va.

Scar était malin, mais j’avais plus d’un tour dans mon sac moi aussi. Plissant les yeux, je lui souriais, amusée par la tournure que prenais notre conversation. Il pensait m’avoir ainsi ? Vraiment ? Je n’avais pas encore sortie la Lys de compétition, il devait le savoir.
— Oh, tu ne m’auras pas comme ça, Reynolds, j’arriverai à te faire peindre de toute façon…
L’idée était bien implantée dans ma tête et j’étais bien trop têtue pour laisser qui que ce soit, même Scar l’en déloger. Je la gardais simplement pour plus tard. J’étais patiente, très patiente. Quand mon ami décrivit sa vision du couple, j’éclatai de rire.
— Un mec de vingt-quatre ans, quoi ! plaisantai-je.
Puis je levai les yeux au ciel en réalisant ce que je venais de dire.
— Pardon, c’est affreusement sexiste, fis-je avec une grimace confuse. C’est vrai, il n’y a pas que les mecs qui pensent comme ça…
Cela faisait des années, pour ma part, que je ne m’encombrai pas de relations sérieuses, même si c’était un peu plus complexe que cela en réalité.
— Ceci dit, le sexe sans sentiments n’est pas forcement sans problèmes, tu en as eu la preuve. L’inverse est vrai aussi. Tu vois, par exemple, avec Azriel c’est simple, léger…je ne sais pas si on peut parler de…de sentiments. Probablement, même si ça n’est pas exactement ça non plus, tu vois ?
Pas exactement ça ? En étais-je seulement sûre ? Les choses évoluaient entre l’italien et moi, d’une manière que je n’osais pas encore appréhender. Ca c’était une autre histoire.

Mon caractère bien trempé était de notoriété publique, tout le monde savait ça. Maddox me le rabâchait d’ailleurs suffisamment, Scar ne s’en privait pas non plus. Les rageux me disaient têtue, je préférai me voir comme quelqu’un de déterminée, qui…ne lâchait jamais le morceau. Bon, ok…j’étais têtue mais c’était loin d’être un défaut ! Je rigolai quand Scar évoqua sa meilleure amie, je la connaissais peu en réalité, mais à sa manière dans parlé je pouvais déceler l’ambigüité que je retrouvai parfois aussi entre Azriel et moi.
— Je veux bien lui dire ce que tu veux, si ça peut t’arranger, pouffai-je.
La conversation dévia, et je me dévoilai un peu trop sans le vouloir. Oui, en effet, il y en avait un qui sortait du lot, je pouvais difficilement le nier.
— Bien sûr qu’Azriel sort du lot, ça a toujours été le cas, avouai-je avec plus de facilité que je ne l’aurais cru, pour autant ça ne veut pas dire que nous sommes un couple, lui et moi.
Mais nous n’étions plus de simples amis, non plus. Etait-ce important de mettre une étiquette sur ce qui se passait entre nous ? Peut-être pas.
— J’ai des sentiments, c’est sûr, comment ne pas en avoir ? J’veux dire, c’est un homme que j’estime beaucoup. Il est doux, prévenant, généreux, toujours à l’écoute et si ouvert d’esprit, c’est rare les garçons comme lui, tu sais ?
Comme souvent, lorsque je pensais à Azriel, un sourire fendait mon visage, incontrôlable. Je m’en rendis compte en voyant les yeux de Scar fixer sur moi.
— Quoi, j’ai un bouton sur le nez ?

Ce que j’avais avec Azriel était plus que de l’amitié, plus que du sexe, c’était même sans doute de l’amour, bien qu’aucun de nous deux ne le verbalise, ni même ne le réalise. Scar avait raison sur ce point, ce n’était pas parce que nous n’étions pas un couple, qu’il n’y avait rien. Foncer ? Pour aller où ? Ce que nous partagions était déjà magnifique, je ne voyais pas comme l’améliorer. L’attachement sans les attaches. Mais au fond, il n’y avait peut-être que nous qui pouvions comprendre. Certes, depuis quelques temps, je ressentais quelque chose de plus, mais je n’avais pas encore ressentis le besoin de le lui dire. Nous étions parfaitement bien comme ça. Peut-être aussi que j’évitais sciemment d’y penser, je me rendis compte, en effet, que le sujet me mettait mal à l’aise, en entendant Scar l’évoquer. Heureusement pour moi, mon ami m’offris de lui-même la meilleure des distractions. Je frappai Scar à l’épaule, tandis qu’il se moquait de moi en prétendant qu’une grosse pustule me poussait sur le nez.
— C’est toi la grosse pustule, répliquai-je en riant, quand tu lâches la sauce, ça fait des dégâts !
Ma blague salace était sortie le plus naturellement du monde et je la regrettai un peu, n’assumant qu’à moitié. Je ris néanmoins.
— Bon, j’avoue, elle est dégueulasse, mais tu l’as cherché !