paralyzed (brooke)

Enterrée dans son mensonge qui décimait ses espoirs, elle avait de plus en plus de mal à garder le cap, à tenir sa tête hors de l'eau alors qu'elle ne touchait plus pieds, accablée par la marée haute de ses échecs qui ne faisaient que de la noyer, étouffant ses sourires qui s'éteignaient loin de Niels. Elle l'avait choisi, et pourtant, elle savait que ça ne pouvait pas être le cas puisqu'elle avait signé un pacte avec le diable, prisonnière de ses griffes acérées qui écorchaient son âme, ses blessures se voyant de plus en plus sur sa peau qui s'habillait d'ecchymoses, parce qu'Evan faisait tomber le masque maintenant qu'il comprenait qu'elle n'était pas si sage que ça, qu'elle était beaucoup trop heureuse ces derniers temps, surtout quand il lui disait qu'il partait. Il n'était pas dupe, et pourtant, elle s'était jusqu'ici fait violence pour ne rien laisser paraître du bonheur qui la submergeait à la seule pensée qui s'envolait vers Niels. Il n'y avait que Brooke qui était au courant, parce qu'elle avait voulu miser sur la discrétion bien qu'elle peinait à cacher ce genre de choses à sa meilleure amie. Elle se brûlait les ailes sous les flammes de la colère de son fiancé qui détendait ses nerfs comme bon lui semblait, ravalant la douleur de ses coups pour n'inquiéter personne, faisant parfois exprès de ralentir les rendez vous avec Niels pour ne pas qu'il s’aperçoive de ses bleus de plus en plus voyants, pour ne pas qu'il ne vienne à avoir des ennuis, parce que bon nombre de fois, son prénom avait été expié dans des menaces qui lui faisaient froid dans le dos. Tout lui faisait peur, et la blessait quand il s'agissait de s'en prendre à ses proches. Elle avait invité sa meilleure amie à son appartement après lui avoir envoyé l'adresse par sms, s'occupant l'esprit en faisant un peu de rangement, tentant d'oublier la peine qui lui rongeait le coeur, la frustration qui la prenait aux tripes alors qu'elle savait qu'elle devait tout bonnement accepter sa situation.

Elle avait fait en sorte de porter des manches longues, dissimulant les quelques hématomes qu'elle possédait sur les bras après être sortie de la douche, attendant que Brooke ne vienne briser ce silence mortuaire qui la plongeait dans un douloureux mutisme. Quelques minutes plus tard, elle entendit la sonnerie de sa porte d'entrée, l'invitant à arrêter ses activités pour se présenter à sa meilleure amie dont elle croisa le regard après avoir tiré sur la poignée.

- Hey ! Lança-t-elle, pour la saluer. Ca fait trop du bien de te voir, ajouta-t-elle en souriant tendrement, déposant un baiser sur sa joue.

Accablée dans un rôle qui te collerait à la peau jusqu'à la fin des temps, tu te caches derrière des opinions qui vont à l'encontre de celles d'Aelya. Niels, Evan, il semble que tu ne sois jamais d'accord avec les fréquentations de ton amie. Et, pourtant, ça n'a rien à voir. Les choses ont éclaté, avec Niels, et tu t'es juré de ne plus te mettre le nez dans ses histoires de coeurs et pourtant, te revoilà, au bout du clavier tactile de ton téléphone à lui refaire la leçon. D'abord pour son mariage qui sort de nulle part, bien trop expéditif et dont, tu sais, cache quelque chose. Quoi, tu ne le sais pas encore, mais ce n'est pas bien loin de te tomber sous le nez, détective Oxley en service. Pour que ta vieille amie choisisse de se passer la bague au doigt, c'est que quelque chose se trame derrière ses histoires d'engagement et d'affection. Puis, Niels. Niels qui revient. Encore et toujours. Tu pensais en être débarrassé, avoir prouvé à la brune à quel point il l'a faisait souffrir, à quel point elle était mieux sans lui, mais à la première brèche, à la première faille, à sa première rechute, il a su s'immiscer et s'injecter dans son sang, pire qu'une sangsue, il colle à sa peau, reste alors qu'il n'en a plus le droit. Et la voilà prise au travers d'un triangle amoureux, incapable de laisser l'un ou l'autre, au piège de ses sentiments, te demandant de l'écouter. Ce que tu fais, évidemment, ce que tu feras toujours. Mais la tentation de parler, la tentation de crier que tout ça n'a pas de sens est trop forte et sans même le réaliser tu te retrouves dans ces habitudes que tu tentes d'échapper : lui dicter comment vivre sa vie. C'est plus fort que toi, Brooke, elle le sait, Aelya, que c'est plus fort que toi. Tu ne peux la voir subir cette peine à nouveau, réparer le coeur que tu as passé des semaines à panser à coups de crème glacée, de pneus crevés et de longues soirées à picoler, au détriment de Sacha. Sacha qui n'a aucun problème à te voir trainé avec Aelya. Non. Sacha qui, cependant, ne supporte plus tes excès de whisky et de cannabis. Sacha qui grogne quand tu rentres éméchée. Sacha qui gueule quand tu sors te défoncer. T'es contre ce qu'elle fait. Contre le mariage et encore plus contre Niels. Mais tu fermes ta bouche, tu ravales tes opinions et tu tentes d'être là pour elle, parce qu'elle semble en avoir besoin, ta belle brune, tu ne vois pas ses yeux au travers de l'écran de ton portable, mais tu sens sa détresse, son besoin de toi. Et t'es là. Tu y seras toujours. Jusqu'à ce qu'elle te donne cette adresse. GPS en route, tu mets le contact dans ta voiture, une vielle Range Rover un peu bosselée, des taches de rouilles sur les côtés qui te rappellent celles de ton visage, presque la même forme, presque la même couleur, et tu laisses la voix te guider vers son nouveau chez elle, bien plus stylé que ta caravane. Complexe de luxe, tu te sens presque mal d'y mettre tes pieds sales, ta veste de cuir et ton vieux jean troué. Et tu sonnes, après avoir essuyé le but de ton doigt contre ton pantalon, c'est ce dont l'endroit t'inspire.
Aelya t'ouvre, tire la porte pour dévoiler le somptueux appartement dans lequel ils vivent, Evan et elle, tous les deux, comme un couple. Hey ma jolie, lui lances-tu joyeusement en retour, le sourire qui fragmente ton visage alors qu'elle pose ses lèvres contre ta joue. Tu la sens brisée, malgré ce sourire qu'elle met comme un masque, c'est dans ses yeux que tu vois la peine et, sans penser qu'il peut y avoir un problème avec Evan, celui que tu n'as pas eu la chance de rencontrer encore, tu penses tout de suite à Niels. C'est lui, l'investigateur de toutes les douleurs de ton amie. Et de loin, même, tu ne l'as jamais vu dans cet état avant qu'elle ne le rencontre, jamais de coeur brisé à recoller. Non, ça, au contraire, c'était vous qui le faisiez, briser des coeurs. Tu attrapes les bras de la brune, sans savoir que tes doigts qui se plantent dans sa chair la feraient tordre de douleur à force de presser sur ces hématomes transparents, tu la serres par les bras, plantant ton regard dans le sien. Comment tu vas ? Question simple, réponse définitivement complexe. Tu m'as l'air si fatiguée. Les sourcils froncés, tu sondes son reflet à la recherche de ce qu'elle peut bien te cacher.

Aelya savait que ça n'avait ni queue ni tête son histoire, elle qui avait toujours crié haut et fort qu'elle se refusait à l'engagement et qui se voyait habillée d'une somptueuse bague au bout de quelques semaines de relation avec Evan. Oui, cette histoire n'avait aucun sens parce qu'elle ne l'aimait pas, qu'elle ne voulait pas ce type qui avait débarqué dans sa vie en lui laissant d'abord penser au hasard avant de lui mettre la corde au cou, celle qui l’étouffait, la piégeait dans un jeu auquel elle n'avait jamais voulu jouer. Elle aurait voulu tout leur dire, à Niels, à Brooke, à tout ceux qui l'entouraient que ce n'était pas elle qui avait décidé de s'embarquer là-dedans, qu'elle était toujours la même au fond, mais simplement, ensevelie sous un masque qu'on l'avait obligé à mettre. Finalement, tout ce dont elle avait peur résidait en la perte de ses proches qui ne comprenaient rien à son comportement, qui ne l'aimeraient peut-être plus pour celle qu'elle était devenue malgré elle. Et même si Brooke n'avait jamais aimé Niels, Aelya restait persuadée qu'elle apprécierait sans doute moins Evan aux vues de son tempérament colérique et possessif qui venait de plus en plus fréquemment à marquer sa peau. Elle lui avait ouvert la porte, confrontant son regard lumineux quand le sien devait surement paraître terne, là où l'espoir dansait de sa flamme vacillante, affaiblie par la douleur physique comme morale.

Elle sourit légèrement, d'un sourire qui se voulait forcé tandis que ses yeux trahissaient tout ce qu'elle réprimait dans le fond de sa trachée, parce qu'elle n'avait aucun droit de parler de ses tourments sans mettre en danger la personne à qui elle se confierait. Elle grimaça quand elle senti ses doigts se planter dans son bras, à l'endroit même où elle avait un hématome, retenant un soupir de douleur en se réfugiant dans son étreinte, la respiration devenant plus superficielle sous l'effet de ce secret qui refaisait tout le temps surface dans ses pensées.

Aelya baissa les yeux en cillant à sa question, consciente que Brooke l'avait toujours lu comme un livre ouvert à force de passer leurs journées, leur vie ensemble avant son départ précipité.

- Ouais, j'ai du mal à dormir en ce moment, à cause du stress pour le mariage tu sais, se justifia-t-elle, presque gênée. Mais c'est une bonne fatigue j'imagine, ajouta-t-elle, relevant le regard vers elle. Et toi comment tu vas ?

Elle l'invita à entrer, fermant la porte derrière son passage avant de la conduire dans la pièce principale.

- Qu'est-ce que tu veux boire ? Maintenant que je suis plus enceinte, je peux te proposer tout ce que tu veux. Et l'avantage d'être avec un gars qui a de l'argent, c'est que de l'alcool j'en ai à revendre maintenant, s'amusa-t-elle, cherchant à détendre l'atmosphère.

Elle tirait instinctivement sur les pans de ses manches, dans la peur constante qu'on ne vienne à découvrir les marques qu'elle cherchait à dissimuler.

- Ca va comment avec Sacha ? Lança-t-elle, sachant qu'aux dernières nouvelles, ça n'allait pas si bien.

Dans le tourbillon de ta vie, t'avais été mise à l'épreuve maintes fois, celle de perdre ton amitié avec Aelya avait été de loin l'une des plus difficiles que la vie avait décidé de te mettre sur le chemin. Et tout ça à cause d'un mec. Tout le reste ne comptait pas, toutes vos disputes ne pouvaient valoir la puisse de celle qui relatait de la haine que tu as envers cet homme, Niels. Et, au fond, t'étais-tu vraiment trompée à son sujet ? T'avais eu des doutes, le ressentiment qu'il finirait par briser la seule personne que tu peux appeler ta famille. Et inlassablement, Aelya y revient. Peu importe le nombre de fois qu'elle s'y blessera, qu'elle y perdra son âme, qu'elle y laissera des plumes de ses ailes écorchées, Aelya y revient, entretenant une relation secrète avec son ex, toi seule au courant de leur mystère. La rage au ventre, t'as le sentiment de protection trop fort qui, cette fois, t'étouffe. Y'a Evan, y'a Niels, y'a toutes ses choses dont tes plus au moins en accord et y'a Aelya, au milieu de tout ça, perdue, brisée, prise au piège entre le coeur et la raison. T'as émis ton point, t'as lancé les alertes et maintenant t'es confinée à attendre, à regarder le spectacle se déployer devant tes yeux, les mots je te l'avais dit au bord des lèvres avec un goût amer. T'as pas envie. T'as pas envie d'être ce genre d'amie, de toujours t'opposer à ses décisions, de toujours douter, mais, là, encore, t'as cette impression qui te crie que cette histoire finira mal. Et c'est son coeur que tu cherches à protéger. Peut-être mal, peut-être avec tes défaillances, mais certainement pas pour la blesser. Alors t'as renoncé à tes opinions, à tes commentaires que tu gardes à présent bien cachés dans le fond de ton coeur et dans un coin de ta tête. T'es là, tout simplement, pour elle et quand elle en a besoin, comme aujourd'hui, où elle quémande ta présence au travers de vos deux vies tourmentées. Quand elle te demande, tu accours à son chevet, l'angoisse de se sentir séparé d'elle trop longtemps au ventre, l'envie de prendre toutes ses souffrances et de les vivre à sa place derrière la tête. Regard terne, elle t'inquiète à peine le pied dans la porte, tes mains qui viennent serrer ses bras dans un geste qui se veut chaleureux. Elle étouffe sa respiration, tu ne comprends pas bien pourquoi et elle se défait de ton étreinte, ne comprenant pas pourquoi la chaleur de ta peau contre la sienne n'apaise pas ses maux comme à l'habitude. J'imagine.., répètes-tu en écho à ses paroles. Tu souris aussi faiblement qu'elle, la suivant du regard quand elle ferme la porte derrière toi. Vous avez donc convenu d'une date ? Tu la questionnes, tu tentes de t'intéresser, de faire les efforts nécessaires, tu veux éviter que cette relation ne soit qu'une copie conforme de celle avec Niels où l'animosité régnait entre vous trois. Mais la question se retourne vers toi, tu esquisses un sourire triste aux coins de tes lèvres tachetées et de ta peau picotée. Mieux, réponds-tu simplement. Vous aurez bien l'occasion d'y revenir, à ton état, mais il serait d'une impolitesse de l'accabler de tes problèmes à peine arrivée chez elle, ou chez lui, à ce point, tu ne sais pas ce qu'il faut utiliser comme terme. Elle avance dans l'appartement qui ne lui ressemble pas, tu la suis jusqu'à la pièce principale où elle te propose l'élixir de vos débauches, tu souris, derrière la tête les images de Sacha qui grogne contre ton addiction aux plaisirs de la vie qui t'enveloppent, tu tentes de les chasser en clignant des yeux trois fois. Qu'est-ce que tu as de plus fort ?, demandes-tu, un peu à la blague, un peu pour noyer ta peine, maintenant que votre sevrage, à vous deux, est terminé. Aelya, malaisée, tire sur les manches de son gilet. Elle te pose une question, mais ton regard ne cesse d'obsédé sur les gestes vifs et anxieux de la brune. Tu fronces les sourcils. Enlève-le s'il te gène, c'est pas la première fois que je te verrais à moitié nue de toute façon. Touche d'humour dans l'air, atmosphère qui est lourde malgré vos tentatives. Oh..., réponds-tu quand elle implique Sacha dans l'équation des lourdeurs de la pièce. Tu te laisses rejoindre le sofa, ayant besoin d'un appui, tu fuis le regard de ton amie, Aelya qui n'a toujours pas retiré ce gilet qui lui pèse lourd. On a pris un rendez-vous chez un thérapeute. C'est sec, c'est franc. Y'a un problème entre vous. Ça claque dans ta bouche. Cette fois, même les meilleures baises ne sont pas en mesure de venir à bout de nos blessures..., souffles-tu en regardant le sol. Tu hausses les épaules, te résignant à accepter le sort qui est maintenant le vôtre. On s'en sortira.. Nouveau sourire faible. Puis, j'dois te le présenter avant le mariage. Tu poses un doux regard sur Aelya. Il fait quoi d'illégal, Evan, pour avoir tout ça ?, désignant l'appartement et les meubles luxueux qu'il contient.

Aelya savait qu'elle s'était enfouie dans le creux d'une tempête qui démolissait tout sur son passage, celle qui ne lui laissait aucun répit, même pas la nuit où elle voyait le visage de Niels tourner en boucle dans son esprit, l'invitant à le retrouver encore et encore, comme dans l'espoir de faire cicatriser les plaies de son coeur qui suintaient de douleur à mesure que sa peau se marbrait de tout ce qu'elle taisait à tout le monde, même à sa meilleure amie. Le besoin de les savoir en sécurité l'empêchait de parler, et c'était évidemment tout ce qu'ils avaient voulu dès le départ en la menaçant de la sorte. Parce qu'ils avaient tous réussi à mettre la main sur ses cordes sensibles, cette famille qu'elle avait réussi à se créer à mesure du temps, des sourires échangés et des souvenirs qu'on désirait lui voler. Il avait supprimé des numéros, des photos, des sms dans son portable afin de ne laisser aucune trace de son passé, Evan qui ne désirait qu'Aelya ne vienne se rattacher à personne d'autre qu'à lui, usant de ses mains pour déposer la marque de son appartenance sur sa peau violentée. Quand son regard rencontra celui de Brooke, elle aurait voulu tout lui dire, se vider de tous ses mensonges qui l'épuisaient, mais à la place, elle l'invita à entrer après l'avoir étreint, son esprit lui rappelant que sa vie serait mise à prix si elle osait ne serait-ce qu'émettre des indices.

- Ca serait prévu pour l'année prochaine, maintenant on est entrain justement de fixer une date vis-à-vis des déplacements d'Evan, c'est parfois compliqué, admit-elle, mentant encore, parce qu'il n'y avait aucun avancement de prévu au sujet du mariage. Je suis contente de sa voir que tu vas mieux, j'sais à quel point t'es attachée à lui. Ca m'inquiétait de te savoir déprimée, avoua-t-elle, plissant les lèvres.

Elle ne portait pas Sacha dans son coeur, mais Aelya avait bien compris que le bonheur de sa meilleure amie était corrélé à lui, et donc, à force, elle s'était faite une raison sur leur relation bien qu'elle gardait un oeil protecteur sur celle qu'elle considérait comme sa grande soeur. Elle sourit en coin à sa question, reconnaissant là sa Brooke, toujours prête à user d'intensité pour profiter un maximum de tout ce qui arrivait dans son quotidien, comme elle.

- Whisky ? Proposa-t-elle, légèrement amusée.

Elle tentait de s'imprégner de cette légèreté entre elles, bien que les plaies tiraillaient sur ses bras à cause du frottement de ses vêtements. Elle prit quelques secondes pour chercher une bouteille de Whisky afin de servir deux verres en s'éclipsant dans la cuisine. Elle pouffa de rire à sa remarque en revenant, entre la nervosité et l'amusement, secouant la tête avant de lever les yeux au ciel.

- J'suis pas reconnue pour mon côté pudique maintenant t'as vu, c'est tellement immense ici que t'as vite froid, se justifia-t-elle. A la tienne du coup, lança-t-elle en la regardant d'un air joueur, avant de boire d'une traite la liqueur qui la fit grimacer.

Elle reposa le verre sur la table de la salle à manger, voyant Brooke rejoindre le salon à sa question sur Sacha, fronçant légèrement les sourcils face à son air pensif. Elle fit quelques pas pour prendre place à ses côtés, hochant légèrement la tête à sa réponse.

- C'est bien la première fois que tu vas en voir un. Il était temps, la taquina-t-elle pour détendre l'atmosphère. C'est une bonne chose, ça peut pas vous faire de mal, surtout si vous êtes dans une impasse, ajouta-t-elle en souriant légèrement. Ouais tu dois me le re-présenter, faudra qu'il se vende un peu ce jour-là en tout cas, je m'inquiète toujours un peu mais bon. C'est ton choix, admit-elle en soupirant.

Elle lâcha un léger rire nerveux encore une fois à sa remarque, remarquant à quel point elle n'était pas si éloignée que ça de la vérité qui habillait les murs.

- Si j'te disais que j'suis avec un gars qui fait du trafic de drogues, qui travaillent même avec des gens qui font du trafic d'organes, et qui blanchit tout ça dans son entreprise parce qu'il est super doué dans la finance, ça ferait trop gros nan ? Tu me dirais surement "putain mais Aelya qu'est-ce que t'as encore foutu", rigola-t-elle, ironisant la vérité tant elle était hallucinante. Il est juste arrivé à s'en sortir par ses propres moyens. Légalement, assura-t-elle, croisant son regard une demie-seconde avant de le baisser. J'vais nous rechercher la bouteille, lança-t-elle en s'éclipsant dans la cuisine pour la ramener dans le salon, dans une grande envie de continuer à amoindrir sa peine.

Elle tendit son bras pour servir les verres au-dessus de la table basse du salon, ne remarquant pas que sa manche tirée en arrière laissait entrevoir un hématome sur l'avant-bras.

Ça cloche. Dans les yeux de ton amie, y'a quelque chose qui cloche. Elle ment, elle n'est pas heureuse, t'en sais rien encore, mais ça cloche. Cri du coeur presque perceptible qui, finalement, se faisait insonore, Aelya reste muette face à la vérité qu'elle te cache, sans équivoque. Et toi, t'as pas de preuve de ce que tu avances pour lui balancer tes suppositions. Manque de sommeil, excuse facile, alors que les yeux de la brune semblent plutôt rougies par la peine, excès de mélancolie qui l'habite. Ses traits sont longs, trop longs, ton coeur se brise en morceau alors que devant elle, tu te sens si impuissante. Petite, minuscule, brisée face à son malêtre. T'es incapable de l'aider. Et tout ça, parce qu'elle ne t'en laisse pas la chance. Même si tes yeux doux se posent sur elle, que tu attends patiemment qu'elle daigne te dire ce qui la rend dans cet état. Le mariage, sujet de discussion qui enchaîne, et ses yeux s'assombrissent un peu plus. Evan. C'est lui. T'as un doute, dès la seconde où t'as su qu'ils s'exposaient à plus qu'une simple relation anodine, quand ils ont choisi de s'unir pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur, il est où ? Parce que l'idylle de bonheur des premiers mois, tu l'attends encore pour elle. T'attends qu'elle te le raconte, ce bonheur envahissant. Mais y'a rien. Alors, pour elle, t'imagines que ce sera pour le pire et le pire. Et pire encore. Je vois, réponds-tu d'un ton beaucoup plus perplexe que tu ne l'aurais voulu. Si Aelya cache son jeu, toi, t'en es incapable. Irritation qui se lit sur ton visage, au travers de ces iconiques taches de rousseur qui te composent. Peut-être le sent-elle, puisqu'elle change de sujet sans s'attarder plus longtemps sur les festivités, te questionnant plutôt. Elle projette, fuit, t'es loin de te douter, qu'au fond, c'est qu'il n'y en a pas, de préparatifs, que tout est en suspend. Pourtant, les cloches te sonnent. C'est pas normal. Toutes les filles censées de ce monde auraient cette urgence d'en discuter avec leur meilleure amie. Parler robe, thème, fleurs et tout ce brouhaha de choses qui englobent les mariages. Mais pas Aelya. Aelya reste vague. Et toi, tu réponds. J'ai pas d'autre choix d'avancer, ajoutes-tu, la tristesse au bord d'exploser. T'as pas d'autres choix que d'aller mieux. Pour toi, pour lui, mais aussi parce que vous vous êtes unis, Sacha et toi, bien trop ultimement. Le travail, la caravane, votre vie sentimentale. Y'a plus de barrières, plus d'intimité possible. Jour, nuit, c'est lui, sans cesse. Lui et toi, toi et lui. Rien d'autre que ça. Et pour éviter les débris supplémentaires, vaut mieux se forcer à aller mieux. Le commentaire te fit tout de même plaisir, tu esquissas un sourire sur tes lèvres pour le communiquer à la brune, émue que ton bonheur compte bien avant ses opinions sur Sacha. Elle, elle faisait preuve de maturité. Alors que toi, face à Niels, t'étais pas prête de faire les mêmes efforts. Ça m'inquiète aussi de te savoir déprimée, tu sais. Nouvelle pique lancée, cherchant à la faire parler, bien que tu sais, au fond, qu'avec Aelya, ça ne fonctionne pas ainsi. Elle finira pas te parler, quand elle l'aura décidé. Tu te résignes, demandes ce qu'il y a de plus fort dans le bar personnel de ton hôte. Le plus fort pour panser les maux, le plus fort pour oublier, le plus fort pour catalyser. Whisky, répètes-tu en hochant la tête, partante pour n'importe quel élixir qui brûlera le fond de ta gorge. La réponse d'Aelya, te fait froncer les sourcils alors que la beauté, mélange hispanique et américain, se tord dans un rire nerveux, la suivant du regard entre le salon et la cuisine, verres et bouteille en main, bouteille non pas trop éloignée parce que vous savez bien que les remplissages seront nécessaires assez rapidement, spécialement si vous tombez dans l'intime. Intime qu'Aelya évite, elle. Il fait si froid ?, demandes-tu, à nouveau perplexe avant de claquer ton verre au sien. Santé. L'alcool descend dans ton oesophage, brûle les tissus aqueux de ta gorge, ton sourire revient alors que tes yeux se ferment et que tu te concentres sur l'apaisement que la boisson te procure, douce rédemption, douce pause bien méritée avant de reprendre la discussion, toi, la première à tomber dans les confessions. Tu avoues pour le thérapeute, ta voix trahit ta peur. J'suis trop bizarre, il arrivera pas à me sauver. Mais peut-être saura-t-il sauver ce qui reste de Sacha et toi. Une impasse, c'est pas le mot juste. C'est dans une grosse merde qu'on est. Une merde qui t'a poussé à le tromper avec un inconnu, à trahir sa confiance. Faut pas t'inquiéter. J'ai plus à craindre sur scène avec lui que dans notre vie intime. Et, encore là, Sacha, il ne rate jamais sa cible. C'était ce qu'on racontait sur lui. Et jusqu'à preuve du contraire, ça se veut plutôt rassurant pour ton amie. C'est mon choix. Comme c'est ton choix de marier Evan, n'est-ce pas ? Tu reviens sur lui, t'as pas tellement l'impression qu'il joue dans la légalité, ni même qu'elle soit totalement honnête avec toi sur quelconques informations le concernant. Ouais, j'te dirais sans doute ça, dis-tu alors que tu la sens tâter le terrain. Mais j'préfèrerais quand même le savoir plutôt que de me faire des films toute seule, avoues-tu. C'est que tu as peur pour elle. Et son explication finale ne t'est pas totalement convaincante. Je vois, répètes-tu comme dans un mauvais pli alors qu'en fait, tu vois rien du tout excepté le bateau dans lequel elle tente de te mener. C'est grand ici, t'as raison. Tu ne te perds pas trop entre les pièces ? Ça change de ce que vous aviez toujours connu, toutes les deux. T'écoutes à peine sa réponse alors que tes yeux sont portés sur les gestes de ton amie, la brune qui vous verse deux verres et dont la manche de ce gilet si gênant finit par se lever dévoilant une marque bleutée qui te fait sourciller. Je ne te crois pas. Le ton monte, t'es sèche. Et ça n'a rien à voir avec la réponse sur la superficie des lieux. Tu ne crois pas un mot de ce qu'elle t'a raconté sur Evan. Tu ne crois pas à son bonheur, ni à son mariage, pas même à ce qu'il est pu s'en sortir par ses propres moyens. Et encore moins à ce qu'il puisse traiter Aelya comme une reine. Tu attrapes son bras, heurtée par ce que tu y découvres, ton geste est si vif qu'il heurte la table basse et en fait tomber le contenu des verres sur les livres de salon qui y reposent. Qu'est-ce que c'est, ça. Tes yeux pointent la marque sur la peau de la strip-teaseuse.

Elle s'habituait à la douleur physique, à la peinture de sa peau qui se marquait au fur et à mesure que sa déprime délavait ses espoirs, rasant tout sur son passage. Elle aurait pu lui dire à Brooke, qu'elle risquait sa vie en revoyant Niels, qu'elle se tuait à petit feu dans les bras de son fiancé, mais elle se taisait pour sa sécurité, parce qu'elle savait bien qu'Evan n'aurait aucun mal à appuyer sur la gâchette que ce soit pour l'un ou pour l'autre. Ca la terrifiait, de se dire qu'en vérité, elle tenait entre ses mains le destin des êtres qu'elle aimait le plus au monde, pour qui il n'y aurait rien d'impossible pour les maintenir en vie. Elle n'avait pas tant de solutions qui s'offraient à elle, c'était bien pour cela qu'elle acceptait les coups dans lesquels son âme pâlissait, perdant de sa splendeur malgré le sourire qu'elle affichait. Ses cernes, son regard ne trompait pas, et Aelya le savait bien, même si elle se prenait à espérer qu'elle puisse tenter de dissimuler les frasques de son fiancé, jouant à un jeu dans lequel elle n'y survivrait peut-être pas, elle qui n'était plus rien, juste la copie de celle qu'elle avait été, quand Niels était là à ses côtés. Elle plissa les lèvres en l'entendant parler de sa vie sentimentale avec Sacha, ce qui lui faisait penser à quel point la sienne était aussi compliquée.

- T'as pas le choix de t'accrocher, si ce que tu veux c'est rester avec lui. Mais ça va le faire, crois en ce que vous avez, la rassura-t-elle.

C'était ce qu'elle avait essayé de faire elle, s'accrocher aux lambeaux de leur relation malmenée jusqu'à ce qu'Evan ne vienne arracher ce qui tenait difficilement debout. Et pourtant, son coeur battait toujours pour Niels, comme une symphonie inépuisable dans le creux de sa cage thoracique. Elle fronça légèrement sourcils à sa remarque, comprenant que sa déprime avait été démasquée malgré ses efforts pour donner le change.

- Ca va aller t'inquiètes pas. C'est juste que je suis à une période de ma vie où je dois réfléchir à pas mal de choses, genre à ce que je veux et à ce que je dois faire. Et souvent, ces deux principes sont complètement opposés, admit-elle en soupirant, se livrant un peu plus à sa meilleure amie.

Elle hocha la tête à sa commande, consciente que Brooke ne refuserait jamais un verre, surtout lors de leur retrouvaille. Aelya tentait de garder la tête haute, hors de l'eau, et il fallait bien avouer qu'elle ne faisait que de s'étouffer avec la mer salée de ses mensonges à mesure que les secondes défilaient. Elle revint dans le salon pour les servir, toujours emmitouflée dans ses secrets qu'elle taisait.

- Ouais. J'sais pas, j'ai toujours froid en ce moment, c'est pas grave en soit, je m'habille en fonction, mentit Aelya en versant la liqueur dans des verres, trinquant avec elle. A la tienne, répondit-elle en buvant d'une traite l'alcool.

Elle grimaça légèrement en sentant le liquide bruler son œsophage à son passage, réchauffant de surcroit ses cellules gelées par cette douleur insoutenable et indicible qu'elle portait dans les entrailles. Aelya se concentra sur sa meilleure amie, écoutant sa réponse qui lui fit secouer la tête de manière négative, cherchant à la contredire.

- T'es pas trop bizarre, c'est juste difficile tout ça pour toi, t'as du mal à t'y retrouver mais ça viendra, ajouta-t-elle, essayant de la rassurer, ayant un léger mouvement de recul vis-à-vis de ses déclarations qui l'inquiétait au sujet de Sacha. Sacha te ferait jamais de mal, rassure-moi ? Lança-t-elle d'une voix sérieuse. Ouais... Exactement. C'est nos choix, renchérit-elle, en hochant longuement la tête, pensive.

Elle tenta de tourner en dérision la vérité sur Evan, sachant pertinemment que c'était trop gros pour que quelqu'un ne daigne la croire, elle qui ne pouvait se confier à absolument personne, même pas à Niels.

- J'imagine ouais. Mais t'es pas obligée de te faire des films. T'es pas obligée de t'imaginer des trucs tout court sur lui, il gagne juste bien sa vie, répondit-elle en roulant des yeux, voyant le visage menaçant d'Evan dans sa tête alors qu'elle effleurait la vérité sur sa situation. Si, je me perds. Mais tout est une question d'habitude. Faut juste que je m'y habitue. C'est tellement... A l'opposé de tout ce que j'ai toujours connu... Ca fait pas mal parfois de changer, ajouta-t-elle en haussant les épaules.

Elle se redressa, occupant ses mains à les resservir sans s'apercevoir que sa manche dévoila en même temps sa peau violacée, Aelya s'arrêtant net en s'intéressant à la réaction si froide de Brooke qui vint attraper son bras dans un geste rapide, ferme, laissant les verres renverser leur contenu sur la table. Son coeur loupa un battement quand elle comprit qu'elle s'était trahie, qu'elle avait laissé entrevoir un bout de son secret.

- C'est rien Brooke, soupira-t-elle, tirant sur son bras pour le ramener à elle. Tu dois rien savoir. Je peux rien te dire, j'veux rien qu'il t'arrive, tu comprends ? Il est parfois en colère Evan... Donc... Lâcha-t-elle, sans parvenir à énoncer la fin de sa réflexion qui mettait sa vulnérabilité à vif. Je voulais pas te mentir. Mais... je tiens trop à toi pour t'impliquer dans mes histoires, avoua-t-elle, peinée.

Aelya parle de Sacha comme pour éviter que la conversation ne vienne sur elle. sur elle et Evan. Mais elle le sait, elle le sait très bien que tu ne la laisseras pas filer ainsi, que t'en as pas terminé avec tes questions. Tu te permets une pause, parce qu'au fond t'es pas ici pour agresser ton amie. Tu veux juste comprendre dans quelle merde elle s'est encore fourrée. Il te semble que les embrouilles, ça vous connaît, que vous n'êtes pas réellement en mesure d'en rester éloigné très longtemps. Pas du tout, même. Et quand c'est pas elle, c'est toi. Et quand c'est pas toi, c'est elle. Tes pensées dévient vers Sacha. Votre conversation qui n'arrivait pas à rester calme, vos émotions trop fortes qui vous ont animés, beaucoup plus que vous l'auriez voulu. Les mots dits qui ont fait mal, comme les couteaux qu'il lance contre le bois de la roue, si jamais ils venaient à heurter ta peau. Ils ont transpercé ton coeur, ces mots, et te l'ont arraché. Et ils ont mené à votre descente aux enfers, à un rendez-vous au-delà de vos envies, un rendez-vous qui vous fera, avec espoir, le plus grand bien. Un psy. Une personne qui vous apportera un peu de lumière dans les ténèbres sombres de votre quotidien. Lui au cabaret, toi à la caravane. Vous faites chambre à part, maison à part, vie à part jusqu'à le rencontrer, ce psy. Aelya tente de te rassurer, tu lui souris faiblement, remerciant le ciel de l'avoir mis sur ta route, ta meilleure amie. T'as bien raison.. Mais bien vite, tu laisses ton histoire de côté, l'inquiétude qui remonte parce que tout cloche. Elle, l'endroit, la situation. Y'a rien qui va. Et elle te le confirme, en quelque sorte, la brune, avouant que c'est un peu le chaos, le temps qu'elle réussisse à prendre de bonnes décisions. Est-ce qu'on parle de Niels et d'Evan là ou du mariage ?, demandes-tu en sachant la réponse. Niels, il hante les pensées de ta meilleure amie. Pas même un mariage arrivera à lui enlever de la tête. Si toi et toute ta bonne volonté avez échoué, ce mariage, lui, n'y pourra rien de plus. Et malgré tout, il y avait dans les yeux d'Aelya une lueur de désespoir, un cri à l'aide, comme si elle tentait, sans user la parole, de te faire comprendre qu'elle avait besoin de toi. Toi et pas un autre. Parce que les autres, ils ne pourraient pas comprendre. Et bien que cette lueur persiste au travers de son iris, ses mots, eux, en témoigne le contraire, mentent pour cacher qu'au fond quelque chose la ronge, quelque chose finira par la tuer si elle ne prend pas les bonnes décisions. M'ouais..., finis-tu par lâcher en guise de réponse visiblement incertaine. Tu cognes ton verre contre celui d'Aelya, la glace résonne, bruit sourd qui vous enveloppe le temps que tu demeures silencieuse pour mieux analyser ton amie. Amie qui, elle, ne semble pas en mesure de laisser ce silence s'installer, comme de peur que tu finisses par déchiffrer son secret. C'est louche. J'crois que l'amour, c'est pas fait pour tous, dis-tu en haussant les épaules. Certaines personnes ne sont pas faite pour aimer. C'est plus fort qu'elles, c'est destructeur. C'est peut-être ce qui explique les violences conjugales. À cet instant, t'as aucune idée que Evan a levé ne serait-ce qu'une fois la main sur Aelya. Tu supposes, simplement, que les violences de ce monde peuvent être, parfois, expliquées. Pas besoin de recevoir des coups pour être violenté, conclus-tu parce que t'es convaincu, qu'Evan, il violente ton amie par les mots, par les interdictions, par le contrôle. T'es encore bien loin de savoir qu'en fait, en plus de tout ça, y'a les coups qui s'y ajoutent. Puis, tu parles plus en connaissance de cause, toi qui as traîné bien trop souvent dans ce genre de relation, copains qui te martelaient le coeur, le cerveau et le corps des violences amoureuses. Et toi aussi, t'en étais capable. Je violente Sacha, en quelque sorte, parce que je ne sais pas aimer à proprement parler. Et, à force, on finira par s'éteindre. T'as pas envie d'en arriver là, mais en avais-tu réellement le choix ? Pas du tout !, t'empresses-tu d'ajouter alors que la brune se braque déjà, supposant que ton lanceur de couteau serait en mesure de te faire du mal volontairement. Pas volontairement, du moins, confirmes-tu à haute voix pour la rassurer. Il a déjà fait du mal à des femmes, je ne te le cacherai pas. Mais ça, c'était avant. Avant moi. Et y'a assez de conviction dans ta voix pour te convaincre qu'il ne toucherait pas à un seul de tes roux cheveux. Y'a quand même des choix pires que d'autres, finis-tu par ajouter pour conclure la conversation, avant de hausser les épaules faussement innocente et de porter ton whisky à tes lèvres. Conversation qui migre à nouveau vers Evan. C'est la seule sphère qui hante tes pensées, parce qu'elle monopolise la vie de ton amie qui tu as pourtant connue si libre, si volage. Elle n'est plus, depuis lui. Depuis que la tristesse a envahi le brun de ses yeux. J'suis pas obligée de m'imaginer des trucs tout court ?, répètes-tu en t'étouffant presque avant ta gorgée. Attends, t'es sérieuse là ? Ta tête se balade dans tous les sens. T'as surement mal entendu. C'est évident qu'elle plaisante. Tu ne peux fermer les yeux sur tes craintes. Elle le sait. Elle le sait trop bien. Elle se justifie, justifie l'organisation spatiale des lieux, mais t'écoutes plus. T'écoutes plus parce que ton cerveau est scotché à sa demande de ne pas te faire des films sur lui et tes yeux, eux, sont attirés sur cet hématome qui gâchent la beauté du tableau qu'est Aelya, comme si on avait jeté de la peinture sur la Joconde. Sacrilège. Ton bras agrippe le sien, t'es ferme. Impossible qu'elle te lâche. Ton regard est dur. Ta voix est sévère. T'es fâchée. Fâchée parce qu'elle t'a menti. Fâchée parce qu'elle a mal. Fâchée parce qu'il est horripilant. C'est rien !? Tu cries presque, t'es hystérique. Elle te prend vraiment pour une conne ? D'abord tu me dis de pas me faire de film et là tu me dis que c'est rien !? J'suis quoi, une putain de conne à tes yeux !? Tu me prends pour une tarée ou quoi !? Tu veux pas vraiment être insultante, tu l'aimes Aelya, mais putain que c'est plus fort que toi, que la colère monte trop vite. Tu bous, tu serres encore son bras bien trop fort, ça lui fait très certainement mal, mais tu ne peux pas la laisser fuir. T'as l'impression que de lui redonner ce peu de liberté lui fera prendre ses jambes à son coup. Il me fait pas peur Evan, j'en ai rien à faire de lui, dis-tu calmement. Ça dure depuis combien de temps ? Tu soupires, t'es en panique. Putain, Aelya, il pourrait te tuer. J'te laisse pas ici. Impossible.

Elle était défaite, à force de trop tirer sur son âme, on avait finalement réussi à la déchirer, à lui retirer toute l'espoir qu'elle avait su nourrir dans les bras de Niels. Parce qu'il avait réussi à colmater certaines fêlures invisibles quand Evan lui, les avait simplement révéler, arrachant les coutures de ses cicatrices qui ne faisaient maintenant que de saigner. Elle tentait de garder la tête haute devant sa meilleure amie, parce qu'elle n'avait aucune envie de l'inquiéter, elle qui avait toujours passé son temps à s'en faire pour Aelya, comme s'il s'agissait de sa petite soeur. Et quelque part, c'était le cas, toutes deux ayant grandit ensemble, se forgeant dans les travers de leur quotidien tourmenté par leurs déboires familiaux et leur impulsivité. Elle s'était construit une confiance indestructible grâce à elle, et c'était surement pour cette raison qu'à son départ, elle s'était écroulée.

- On parle... De tout, j'imagine, répondit-elle, hochant la tête de manière pensive. Je m'y retrouve pas trop, mais j'suis sure que t'aimerais pas m'entendre dire ce que tu sais déjà, ajouta-t-elle, son regard croisant le sien alors qu'elle pensait bien évidemment à son amour éternel pour Niels, celui que Brooke peinait à tolérer dans sa vie.

Elle essayait de contenir ses sentiments explosifs devant elle, parce qu'elle savait pertinemment que son affection pour Niels l'embarrassait, Brooke qui était persuadée qu'Aelya n'était pas faite pour Niels, quand elle, elle ressentait tout le contraire. Tout l'attirait vers lui, à chaque fois, comme si les battements cardiaques de son ex petit-ami résonnaient n'importe où en elle pour qu'elle ne vienne simplement à le retrouver. D'ailleurs, elle était aujourd'hui consciente qu'elle ne se ferait jamais à leur rupture, puisqu'à leur première retrouvaille tous ses efforts pour lutter contre cette évidence était tombés à l'eau. Elle voyait bien que Brooke sentait que quelque chose n'allait pas, cette chose qu'elle se tuait à morfondre dans le silence tant elle avait peur de sa réaction, préférant détourner son attention par l'appel de l'alcool qui savait toujours les détendre. Elle trinqua avec elle, buvant son verre d'une traite avant de frémir à ses dires qui faisaient douloureusement écho à ce qu'elle vivait dans les bras d'Evan.

- Y'en a certains qui savent pas du tout aimer, et qui veulent pas apprendre, émit-t-elle, ravalant sa douleur dans une gorgée de Whisky qu'elle se servit, croisant le regard inquisiteur et insistant de sa meilleure amie. C'est pour ça que l'alcool existe j'crois, c'est un bon moyen de supporter certaines choses quand on ne peut que les subir, ironisa-t-elle cyniquement, tentant de faire abstraction de cette tension qui se déployait autour d'elles.

Elle savait maintenant qu'elle comprenait qu'Evan n'était pas le gendre idéal, qu'il la maltraitait sous ses airs d'hommes parfaits, et ça, elle n'avait aucun droit de le lui confirmer de vive voix.

- J'vois surtout que tu fais tout pour que ça ne s'éteigne pas, et ça, c'est pas rien. C'est même le principal. T'es pas une mauvaise personne Brooke. Faudrait que tu arrêtes de partir de ce constat pour arrêter de toujours te saborder comme ça, lança-t-elle doucement, consciente qu'elle lui donnait un conseil qu'elle devrait elle-même suivre, fronçant les sourcils dans l'inquiétude alors qu'elle abordait un sujet épineux sur Sacha. J'espère juste que t'es en sécurité avec lui... Qu'il recommencera vraiment plus... Sinon, tu sais que j'suis toujours là, avança-t-elle, pas du tout rassurée à l'idée de la laisser dans les bras de Sacha qui maltraitait des femmes auparavant.

Elle avait raison. Il y avait bien des choix pires que d'autres, et Aelya était bien placée pour le savoir, elle qui dansait tous les soirs avec le diable en personne, son corps en faisant les frais. Elle s'était vendue, sans même s'en apercevoir, son bras se découvrant à la vue de Brooke qui comprit directement la cause de ses hématomes, laissant Aelya profondément gênée par la situation qu'elle ne pouvait plus rattraper. Elle n'osa rien dire quand elle vint à la questionner, voyant sa meilleure amie déjà entrain de bouillir de rage, attrapant fermement son bras comme pour lui faire réaliser qu'elle n'échappera pas à cette conversation.

- Nan, c'est pas du tout ça ! Lança-t-elle, tentant de l'apaiser. Tu comprends pas, je pouvais vraiment rien te dire, tu veux vraiment que je mette ta tête à prix ou quoi ? J'serais quel genre d'amie ? Demanda-t-elle, usant de mots forts pour qu'elle vienne comprendre la complexité de la situation, consciente qu'elle ne reculerait de toute façon devant rien. Tu me fais mal en appuyant dessus, lâche-moi s'il te plait, lâcha-t-elle, regardant son bras enveloppé dans sa main.

Elle soupira, baissant la tête, laissant éclater sa vulnérabilité à fleur de peau.

- Ca fait... Quelques jours. Depuis qu'il a comprit que je revoyais Niels. Tu dois me laisser ici, je partirai nulle part, je peux pas. Si j'le fais, j'suis morte. Tu comprends pas Brooke. Il aura aucun mal à me descendre et à balancer mon corps dans l'océan. Il aura aucun mal à corrompre des gens pour dissimuler ma disparition, expliqua-t-elle, plantant son regard dans le sien. Dis rien à Niels... S'il te plait. Ca s'arrangera, il faut juste que je trouve comment. Mais j'y arriverai, je te le promets.

Il l'avait rendu faible. Il l'avait rendue fragile, délicate, cassable. Tellement différente de la Aelya que tu connais. Celle qui s'en serait foutue du mec, qui aurait pris une bouteille de téquila par le col avant de repartir à la case départ, en enfilant peut-être même deux ou trois mecs nouveaux. Niels l'avait rendu faible. Et t'aimais pas ce que tu voyais. Parce que sa faiblesse affectait maintenant son jugement. D'un mec qui était l'homme de sa vie, elle passait è un autre à qui elle promettait l'éternité, bague au doigt, mariage prévu dans l'année. C'était d'un ridicule. Et t'étais là, avec tes conseils qui ne passaient pas parce que chaque fois que t'ouvrais la bouche c'était pour réfuter les choix de ta meilleure amie. Quelle amie t'es, putain ? T'es contrôlante, t'es pas possible. Et peux pas choisir pour elle. Mais y'a un truc en toi qui te fait dire qu'elle fait une erreur. Ça sent pas bon. Ça sent  le fric illégal, ça sent le faux amour, ça sent le faux-cul à plein nez, même si tu l'as jamais vu de ta vie. T'es ici, dans son trop grand appartement, et t'as envie de gerber sur la moquette qui lui a sans doute coûté une fortune. Ou pas, il l'a peut-être volé. Tout est possible. Tu soupires. Même si j'approuve pas, ça veut pas dire que j'veux pas l'entendre. Tu la mets en garde. Vous n'êtes pas forcé d'avoir les mêmes opinions sur tout. Puis, un jour, tu te fatigueras de critiquer ses choix. Et entre un mec aux aspects illégaux qui pourraient ramener Aelya vers ses anciens démons. Cette fois, si elle faisait de la taule, ça pourrait être irréversible. T'aimes mieux souffrir de perdre ta meilleure amie aux bras d'un mec que tu ne peux pas sentir que de la perdre dans ceux de la criminalité. Pour ça, vous avez assez donné. J'crois pas que le mariage soit une bonne idée. Tu crois pas non plus qu'elle l'aime. Mais t'en a déjà trop dit. Tu hausses les épaules, puis lâcha une dernière pique, incapable de te retenir. T'façon, tant que tu t'enlèves pas ce mec de la tête, toutes tes autres relations seront des échecs. Tu le sais, tu te mènes vers le gouffre. Et pour faire passer la pilule, tu gobes une longue gorgée de whisky qui te brûle l'oesophage lorsqu'elle s'écoule. Et pourquoi on aurait besoin de les subir, dis-moi ?, demandes-tu en fronçant les sourcils. Il se passe quoi avec toi, je t'ai connu beaucoup plus têtu que ça. Tu ne la reconnais plus. Faible, sous l'emprise de ces hommes. Putain, qu'est-ce qu'on a fait de ton amie? À une époque, t'aurais jamais dit une chose pareille. Depuis quand les mecs ont tous les droits sur les femmes? Elle est où, la Aelya battante que je connais ?, pestes-tu. Parce que là, franchement, tu me fais peur. Et c'est qu'elle te fait réellement peur, à croire que dans une situation comme celle-ci, elle se laisserait faire. Et si seulement c'était ça ? Ça ne pouvait pas être ça, dites ? Ça dérape. Elle profite de ton accalmie sur ta situation avec Sacha, ton parallèle pour lui montrer que les coups ne sont pas les seules violences possibles, pour changer de cible, pour te prendre comme mire. J'crois que là-dessus, on est deux à avoir du travail à faire. Tu penses pas ? Elle avait pourtant raison. Toi, tu sabotes tout. C'est ta faute si tout foire, si tout vol en éclat de verre. Mais là n'est pas la question. Peut-être. Ou peut-être pas, claques-tu quand elle te confie espérer que tu sois en sécurité avec lui. Tu hausses les épaules, incertaine. Mais ce que je sais, c'est que je resterais pas avec lui s'il ne me mettait pas en sécurité. Autre pique, couteaux qui volent bas. Mais quand tu vois ce qui se cache sous ces manches, quand tu vois les marques sur son corps, c'est plus des piques que tu lances, c'est carrément du feu. Tu hurles en empoignant son bras, pointe de tes yeux ce qui ne va pas. Et elle tente de s'expliquer. Mais ça ne sert à rien. C'est trop tard. La colère est lancée. Elle t'a menti. Elle t'a menti alors qu'elle est supposée tout te dire. Plutôt mourir que de te savoir dans une telle situation, oui!, craches-tu avec rage. Qu'il y aille, qu'il mette ta tête à prix, Evan. T'as pas peur pour ta peau, toi si tu meurs, on s'en fiche. Mais on ne touche pas à ta famille. Et ta famille, c'est elle. Elle et Theo. Tu bous, tes mains serrent sur les hématomes, Aelya se plaint. Tu soupires, pousse son bras que tu relâches dans un mouvement violent, la colère est trop forte. Tu te lèves, marches deux ou trois pas. Putain que tu saccagerais l'appartement, tu sais pas ce qui te retient. Tu me prends pour qui!? Tu ris, tu ris jaune. Tu penses vraiment que je te laisserai ici après ce que tu viens de me confier? Putain, c'est mal me connaître. Putain, Aelya, tu penses comment, là? T'as pas de cervelle? Tu ris à nouveau, donnes un coup de poing dans le mur. Merde, t'as fait quoi!? Tu pouvais pas juste vivre ta peine de coeur en te saoulant comme tout le monde? C'est mal, c'est blessant, tu sais. Mais t'y peux rien. Et là, faut que j'accepte de te voir accumuler des marques comme ça sur le corps parce que tu t'es foutue dans un merdier? Tu soupires, la tête entre les mains. Putain. Qu'est-ce que tu peux y faire?

hj:

 

Éraflée par le désespoir qui avait marqué sa peau au travers des hématomes, elle se tirait sur cette route délaissée, esseulée, l'âme refroidie par cette absence qu'elle respirait n'importe où, n'importe quand, rendant ses émotions sanguinolentes, son coeur ralenti par son manque. C'était dur de vivre sans lui, de faire comme si tout était acquis, comme si elle s'en était remise alors qu'on pouvait aisément lire les débris que sa rupture lui avait causé dans le creux de ses iris, ceux qui brillaient toujours un peu trop pour laisser penser qu'elle touchait du doigt le bonheur. Il était parti, envolé dans les bras de Niels où elle ne pouvait plus s'y réfugier comme elle le désirait.

- Je l'aime toujours, admit-elle d'une traite, coupant court à ce suspens qui n'en était pas un, parce qu'elle ne savait pas mentir, et encore moins à son esprit qu'elle cherchait à berner tous les jours pour lui faciliter les choses, Aelya haussant les épaules lorsque sa meilleure amie émit son avis sur leur mariage. J'ai jamais prétendu avoir de bonnes idées, j'fais juste en sorte que ça fonctionne, admit-elle en soupirant. Je... Ouais... Répondit-elle, baissant le regard en entendant ses mots qu'elle ne pouvait contredire. Faut bien que j'apprenne à faire sans lui. Sinon j'vais droit dans le mur, finit-elle par dire, consciente que dans tous les cas, elle fonçait droit vers l'échec, avec ou sans Evan, sauf qu'elle devait accepter d'être liée à cet homme qu'elle n'aimait pas. Il se passe rien. C'est peut-être normal de changer après une rupture douloureuse nan ? C'est juste "ça" qui m'est arrivé, et qui m'a changé. Peut-être qui m'est arrivé d'autres emmerdes beaucoup plus graves mais celle-ci c'est vraiment la plus grosse. J'fais que de la merde sans lui, avoua-t-elle, frustrée de constater que Brooke avait raison, qu'elle n'était plus que l'ombre d'elle-même, roulant des yeux lorsqu'elle vint confirmer leurs situations similaires lorsqu'Aelya vint parler de Sasha. Ouais, j'ai une tonne de travail à faire. On pourra s'entre-aider, répondit-elle en plissant les lèvres, s'inquiétant de la violence de son petit ami. J'espère que t'as raison. Que tu te serais vraiment barrée si t'étais pas en sécurité, ajouta-t-elle en croisant son regard, le sien empreint de sérieux, ses mots qui ne pouvaient que faire écho à ce qu'elle vivait au quotidien.

Et trop rapidement, Brooke vint s’apercevoir de ces marques qui lacéraient son âme, la tachant de violet, de bleu, de jaune, pleins de couleurs qui venaient recouvrir le noir de son être qui s'approfondissait au milieu de ces propres ruines.

- Dis pas n'importe quoi, je refuse de te lier à tout ça Brooke, c'est pas un jeu là, lança-t-elle en ramenant son bras près d'elle, désirant que sa meilleure amie ne puisse comprendre qu'elle risquait vraiment la mort si elle la cherchait, Aelya regardant la rousse se redresse vivement pour faire les cent pas, animée par la rage. T'étais pas censée le savoir de base. Et que tu veuilles l'entendre ou non, je te l'aurais encore caché, parce que j'ai aucune envie de te savoir en danger et encore moins morte, ouais, c'est ce que je ferais encore pour te protéger, assura-t-elle, serrant la mâchoire, tendue par cette conversation. C'est plus compliqué que ça ! Et il me faudrait plus que de l'alcool pour faire passer notre rupture, y'a rien qui peut marcher. J'ai essayé, j'ai échoué, et maintenant j'suis coincée, c'est comme ça, c'est ma faute et personne a rien avoir là-dedans, se justifia-t-elle, avant de soupirer à sa question, consciente qu'elle lui demandait l'impossible, accepter sa situation sans broncher. Je sais pas quoi te répondre. Parce que y'a rien que tu puisses faire.

Elle se redressa à son tour, se plantant devant Brooke, l'air complètement las.

- Tu veux que j'fasse quoi ? Appeler les flics ? Ils fouteront rien, parce qu'il est influent. Le tuer ? Pour que plus tard, on me règle mon compte aussi ? Fuir ? Donc tout abandonner pour qu'on me retrouve à la fin et qu'on me tue ? Parce que la finalité sera toujours la même. Je peux gagner du temps en passant quelques nuits chez toi, mais... A part attendre que je trouve une solution, y'a rien à faire.

Spoiler:

Ça grince dans tes oreilles. Pourtant, tu l'as demandé. T'as demandé qu'elle le dise. T'approuves pas. C'est hors de toi. Hors de tes fonctions. Elle l'aime et tu la vois dépérir à cause de cet amour qui lui fait bien plus de mal qu'autre chose. C'est mauvais, nocif. Et elle s'y plonge sans regarder derrière, sans se protéger. Pauvre Aelya, elle va tout perdre, elle va se perdre. Et elle va crever. Si elle crève, tu crèves. Tu peux pas. Pas maintenant. Pas maintenant que vous vous êtes retrouvé. Merde, c'est pas vrai, Niels ne peut pas te l'arracher de cette façon! Déjà, il te l'a extirpé durant sa relation, presque monopolisé, elle t'a presque oublié. Et là, maintenant qu'ils ne sont plus ensemble, il faudra te passer sur le corps pour qu'on te l'arrache à nouveau. Tu t'y opposes, tu refuses. Merde, t'es pas prête à ça. Nan, en effet, t'as pas prétendu avoir de bonnes idées, sauf que je suis là pour te le faire réaliser. Merde, Aelya, tu vas pas faire ça !? Elle se moque de toi ou quoi? Apprendre sans lui, ça ne veut pas dire marier le premier con venu juste parce qu'il a de l'argent. Tu soupires. Ça, c'est con. C'est terriblement con. Et t'es pas aussi paumée que ça. T'es pas aussi désespérer. Tu la connais. Y'a autre chose. Soit elle y est obligée, soit elle l'aime tellement et qu'elle en a honte au point de te l'avouer. T'optes pour la deuxième option. Parce que y'a Niels écrit partout sur son front. Et qu'elle n'a jamais honte. Sauf qu'elle change, Aelya. Et t'es plus certaine de rien avec elle. Y'a changer et y'a agir en stupide. À présent, tu ne pèses plus tes mots. J'vais pas faire semblant d'être ce que je suis pas Aelya, ça n'a jamais été moi et tu le sais. Mais, putain, tu penses que ça me fait plaisir de m'opposer à tout ce que tu choisis dans la vie? À nouveau, tu soupires. J'te reconnais plus, merde. Elle est où, ma Aelya? Y'a toujours Niels pour te changer, pour t'oppresser. T'étais avec lui et t'étais différente. T'es plus avec lui et t'agis comme une fille complètement dépendante. T'es qui, merde? T'étais pas ce genre de nana avant. Pis te lancer dans les bras d'un autre pour oublier, ça va, mais de là à te marier? Secoue-toi un peu, parce que je te laisserai pas te détruire comme ça encore plus longtemps. Peut-être que c'est cru, peut-être que ça fait mal. Mais il faut que tu lui dises. Parce que si t'oses pas parler avec honnêteté, qui le fera? Y'a jamais eu de gants blancs entre vous. Parfois, ça clash. Mais ça revient toujours à la douceur. C'est comme ça. Tough talk, et ça revient. Ouais. Moi j'ai pas changé au point de me foutre dans des situations comme ça. Et à ce moment, tu sais pas encore qu'elle est prise dans la violence. Peut-être que son visage aurait dû te le faire comprendre. Tu faisais plus référence à l'emprise qu'un mec peut avoir sur toi. Et, bien rapidement, tu te rends compte. Tu exploses, parce que tu la vois, vulnérable. Quelqu'un lui a fait du mal. Tu ne peux le supporter. Tu bous. Tu te déchires de l'intérieur. T'as envie de lui faire autant de mal qu'il a pu le faire à ton amie, à cet Evan. Ce putain de batteur de femme. Et s'il te tue au passage d'avoir tenté de défendre ta soeur, ta seule famille, t'en as rien à foutre. Tu te revois. Dans ces marques, tu te souviens de celles que des hommes avaient laissées sur ta peau. Souvent. Trop souvent. Mais chaque fois t'étais partie. Chaque fois t'avais claqué bien plus fort. Parce que personne ne te touchait. Tu ne comprends pas. Tu ne la reconnais pas. Aelya, elle n'était pas comme ça. Elle n'avait jamais froid aux yeux. Elle ripostait, elle n'encaissait pas. Et là, elle se montre si molle, un pantin dans une scène qui ne lui ressemble pas. Ça te tue. J'y suis déjà, mêlée, réponds-tu froidement. Tu veux rire!? Je croyais qu'on se disait tout. Que c'était terminé les secrets entre nous. Qu'on avait compris combien ça faisait mal. T'as pas assez souffert de mon départ, hein!? Tu veux que je te cache encore ce genre de truc? Elle plaisante. C'est sûre qu'elle plaisante. Elle ne peut pas être sérieuse. Non parce que si Sacha vient à me faire du mal comme ça, Aelya, c'est bon, j'ai compris, je t'en parlerai pas. T'es cruelle, t'es vache. Mais il faut qu'elle comprenne. Il faut qu'elle voit la douleur que ça peut faire de se sentir loin, aussi loin d'elle. T'as la tête entre les mains, tu l'entends te dire que y'a rien à faire. Que même les flics s'en fichent. Et tu rages. Tu veux mourir, c'est ça!? Tu relèves les yeux vers lui. Raconte-moi tout, ordonnes-tu. J'veux savoir ce que je dois raconter à la police si on te retrouve morte. Si tu dis les vraies choses, peut-être qu'elle comprendra à quel point son raisonnement est stupide.