will you come back? no one knows (belmo)

sorrento, italie
Dix-huit heures de vol plus tard, l'avion se posait sur le territoire européen. Bella, assise du côté du hublot, regardait le paysage apparaitre autour d'elle, paysage qu'elle n'avait jamais vu autrement que sur les milliers de photos qu'elle avait regardées avant d'enfin se décider à acheter ses billets. C'est qu'il lui en avait fallu, des jours, à se décider de prendre un vol, de surprendre l'homme qu'elle aimait bien trop silencieusement, pour passer la nouvelle année avec lui, pour échanger ce fameux midnight kiss, le premier baiser de l'année, sous le décompte de minuit qui lançait les premières minutes dans le futur. Il lui manquait, Elmo. Il lui manquait terriblement. Il était parti, presque une semaine avant Noël, laissant derrière lui un grand vide dans la chambre de la Costaricaine, ou dans son lit, plus précisément. Et dans son coeur, aussi. Il n'avait pas émis de date de retour, il n'avait pas précisé quand il comptait retrouver la capitale des kangourous. Et si tout était vague dans sa tête, dans celle de Bella tout était clair : il fallait qu'elle le retrouve pour commencer l'année en beauté. Alors elle avait fait ses recherches, s'était renseigner sur le prix des billets qui, évidement, étaient une fortune à ce temps-ci de l'année - voir toujours, vu la destination de rêve qu'était l'Italie. Quinze-mille-cent-trois kilomètres, dix-huit heures de vol, neuf heures de décalage horaire dans le corps et la voilà arrivée, descendre de l'avion, récupérer ses valises et mettre les pieds dans la province de Naples, là où le soleil tapait sur les épaules dénudées de la brune et où l'air goûtait franchement meilleur qu'à la maison. Il y avait peut-être un peu d'excitation, d'énervement, derrière le goût de la ville, derrière le sourire beaucoup trop étiré sur ses lèvres alors qu'elle appelait un taxi, sur le bord du trottoir de l'aéroport. 255 Via Del Mare, per favore, baragouina-t-elle dans un italien de base qui faisait un peu trop ressortir son accent espagnol natal, trahissant qu'elle n'était, au fond, qu'une touriste comme ces autres. Le chauffeur du taxi lui répondit dans un anglais parsemé de coquilles, ce qui fit rire la brune alors qu'ils s'engloutissaient dans les routes napolitaines vers l'adresse qu'elle lui avait donnée. Adresse que Bella avait été trouvé dans son historique de recherche internet, après qu'Elmo lui ait annoncé qu'il passerait les Fêtes de fin d'années avec sa famille. Il lui avait montré leur maison, sa ville, les endroits qu'il avait l'habitude de fréquenter, tout ça avec la fonctionnalité street view de Google qui avait permis à la brune de reconnaître la maison des Santavenere, sans même l'avoir déjà visité.  Belle grande villa qui lui coupa le souffle alors que le chauffeur se garait devant, concluant leur discussion passagère. Joyeux Noël en retard, Santavenere, lui envoya-t-elle simultanément, lui faisant croire qu'elle était prise dans les festivités australiennes, loin de lui. Nerveuse, elle l'était un peu, Bella, maintenant qu'elle se trouvait face à la maison, maintenant que c'était bien réel. Valise et bagage à main dans chaque main, elle s'avançait vers la porte qui la séparait d'Elmo, sa respiration qui se faisait maintenant plus rapide, plus ardue. Et si elle avait fait une erreur? S'il n'était pas aussi content qu'elle de la voir arriver ici, de la voir débarquer dans son monde? Devant cette porte, la Costaricaine replaça le haut de sa  robe soleil, ébouriffa ses longs cheveux et inspira, les yeux fermés, le courage qui lui revenait. Ding dong, la clochette de la sonnette retentit dans une mélodie, suivi de l'attente que la grande porte noire laisse apparaitre le sourire de son Italien. Si, seulement, c'était lui qui allait venir lui répondre.

Sorrento, Italie.
Retrouver la famille, ça avait été un énorme soulagement, pour Elmo. Il ne l’avait peut-être pas beaucoup laissé paraître, mais les derniers mois à Bowen avaient été quelque peu éprouvants. Lâcher l’université, se retrouver avec un boulot plus ou moins intéressant et à temps plein en plus, avoir des relations un peu tendues avec bon nombre de ses potes, et entretenir une relation secrète avec Bella … tout cela avait fait en sorte qu’Elmo avait vécu pas mal de stress qu’il avait gardé en lui, ou évacué en faisant un peu trop la fête. Ce retour à la maison avait donc été plus que nécessaire, et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il était parti de manière plutôt précipitée, plus tôt que prévu aussi. Il avait prévu s’y rendre pour Noël seulement, et pourtant il avait décidé de partir une semaine entière avant le vingt-cinq décembre. Et il n’avait pris qu’un billet aller, sans en parler à qui que ce soit. Si la raison avait d’abord été qu’il ne savait pas encore à quelle date fixer son retour, ses retrouvailles avec sa famille lui laissaient de plus en plus croire que c’était parce qu’au fond de lui, il ignorait s’il allait même retourner à Bowen. Ça n’était qu’un séjour pour les études, à la base, et les études s’étaient étirées en années, mais maintenant qu’il n’était plus inscrit à l’université, il ne savait plus trop ce qu’il foutait. Ce qu’il foutait à Bowen comme dans sa vie en général. Ce qui le retenait, c’était ses relations, c’était ses amis, ses colocataires, et c’était Bella. Mais tout était tellement compliqué. Sa relation avec Bella, si elle demeurait secrète, n’aboutirait jamais à quoi que ce soit d’autre. Alors à quoi bon ? Puis, en revoyant ses parents, ses nombreux cousins et cousines, et ses potes de Sorrento, Elmo avait réalisé qu’il avait encore une belle vie, ici. Et bien plus confortable qu’à Bowen, où il était on his own, sans l’aide de papa et de maman. Elmo vivait donc dans le doute depuis son arrivée chez ses parents, mais cela ne l’avait pas empêché de profiter des fêtes avec sa grande famille italienne. Ils avaient bu, mangé, dansé, ri, festoyé. Ça lui avait fait un plus grand bien. Et en cette fin de journée du trente-et-un décembre, Elmo avait le sourire facile. Comme si tout d’un coup, il était en paix avec tout. Quelqu’un sonna à la porte alors que toute la famille prenait l’apéro sur la terrasse, face à la mer. Le rêve, celui qu’il avait pourtant fui il y avait quelques années de cela. N’ayant plus l’impression d’habiter véritablement ici, il laissa son père aller répondre à la porte. Il était une copie presque conforme de son père, Elmo. Dans quelques années, il lui ressemblerait encore plus. Giovanni Santavenere se rendit donc à la porte et tomba sur une jeune femme qu’il connaissait pour l’avoir vue sur toutes les photos que son fils leur avait montrées, à toute sa famille. Il leur avait cassé les oreilles, avec Bella. « Bella Garcia ? » S’exclama-t-il dans son accent italien, avant d’avoir un rire gras et chaleureux.

Son téléphone portable avait vibré,Joyeux Noël en retard à toi aussi, Garcia. Elle sourit, s'empressant d'y répondre pour faire durer le suspense, évitant de trahir qu'en réalité elle se retrouverait devant lui dans les prochaines minutes, surprise de Noël quelques jours en retard, livraison spéciale pour la nouvelle année. Il ne lui manquait que le chou sur la tête, un ruban autour du corps, pour prétendre réellement être son cadeau. Mais Bella se contenta que d'appuyer sur la sonnette qui résonna dans toute la maison et qui laissa apparaître un grand homme aux cheveux bouclés, copie conforme d'Elmo, quelques années en plus et qui fit perdre le sourire de la Costaricaine. Bella Garcia ?, s'enquit l'homme en riant chaleureusement. Elle y avait pensé, à la possibilité qu'un autre vienne ouvrir la porte, un autre qu'Elmo, mais naïvement, elle s'était dit qu'il s'agissait d'un faible pourcentage, qu'il serait celui à l'accueillir, comme si, inconsciemment, il devait se douter qu'elle était là, chez lui, dans son Italie natale. Surprise, Bella hocha la tête. Il n'y avait pas de doute, elle n'avait pas la mauvaise adresse. Et il s'agissait du père d'Elmo. Buongiorno, lança-t-elle dans un italien boiteux dont la prononciation devait être honteuse avant de lui tendre la main. Elle n'osa pas lui demander comment il avait fait pour deviner son nom, intimidée par l'accueil qu'il lui avait livré. Pardonnez mon Italien, je connais plutôt l'espagnol ou l'anglais, décréta-t-elle en guise d'excuse à son parlé qui avait dû le faire rire. Et pardonnez-moi d'être arrivée sans être annoncé... À quoi avait-elle bien pensé, Bella. Est-ce qu'Elmo est là ? Parce qu'il pouvait bien être partout, sauf ici. En ville, à la plage, avec des copains avec des amis. La possibilité qu'il soit avec une autre fille, cependant, ne lui traversa pas l'esprit. Bien qu'elle aurait pu y penser, quelques mois avant. L'homme l'invita à entrer, s'occupa de ses valises qu'elle avait traîné jusqu'ici, bien trop pressée de retrouver son amant, plutôt que de les laisser à l'hôtel qu'elle avait réservé, elle n'avait tout de même pas prévu s'imposer dans une famille qui ne la connaissait pas. Cependant, ils en connaissaient certainement plus qu'elle le pensait, au sujet de la belle Costaricaine, à en croire l'accueil qu'on lui avait livré. Giovanni laissa les valises près de la porte d'entrée, puis guida Bella vers la terrasse où la famille s'était installée. Ce que Bella ignorait, jusqu'à entendre les bruits sourds des conversations et les claquements de verres. L'homme fit apparition le premier, suivi de tout près par la brune qu'il annonça, presque heureux de la rencontrer. Toute la famille était réunie, tous beaux, bronzés, les couleurs du sud de l'Italie qui se lisait sur leur teint, des dizaines de paires de yeux qui se braqua sur l'intrus de la soirée, Bella, vêtue d'une robe soleil un peu trop décontractée pour l'apéro du Nouvel An, son regard qui sonda la scène à la recherche de celui qu'elle était venue surprendre. Et quand, enfin, elle le croisa, un sourire sur ses lèvres se dessina. Surprise!?, lança-t-elle, à la fois comme une exclamation que comme une question, sans vraiment se douter qu'au fond, cette surprise, leur couterait surement leur coeur.

Alors que son père s’était levé pour aller répondre à la porte, Elmo, lui, envoya un second message à Bella. Tu me manques aussi. Profite de ta famille aussi ! Incapable de parler d’un éventuel retour à Bowen, incapable de lui mentir s’il avait à ne jamais y retourner, Elmo s’était contenté de ces quelques mots, ceux qu’il savait véridique peu importe sa décision finale. Bella lui manquait. Il suffisait de l’entendre parler d’elle à ses cousins pour savoir qu’elle lui manquait, terriblement. Qu’il l’aimait bien plus que ce qui aurait été raisonnable. Il ne savait pas que ce message-là, Bella ne le lirait que plus tard, parce qu’elle était présentement occupée à parler … à son père. Le père d’Elmo. Giovanni Santavenere, dont le rire particulier parvint jusqu’à leurs oreilles, sur la terrasse. La mère d’Elmo fronça les sourcils en demandant, à voix haute, qui cela pouvait-il bien être. Elmo haussa les épaules en riant, avant de baisser les yeux sur son téléphone et constater que son message n’avait pas été vu. Il ferma donc l’écran et rangea l’appareil dans la poche de son pantalon propre gris charbon. Si Elmo avait toujours des allures de garçon de plage en Australie, c’était sous un tout autre jour qu’il se présentait, à Sorrento. Comme si c’était une toute autre vie qu’il menait, ici. De l’autre côté de la petite villa, Giovanni regardait Bella Garcia avec un grand sourire, écoutant ses excuses en les balayant de sa main élevée entre eux deux. En anglais, il lui répondit : « Les amies de mon fils n’ont pas à s’annoncer. » Lorsqu’elle demanda si Elmo était là, justement, ce dernier lui fit signe de le suivre. Il referma la porte derrière elle et l’invita à passer à la terrasse avec lui, où toute la famille Santavenere tourna la tête vers eux lorsqu’ils firent leur entrer sur le grand balcon. « Elmo ! De la grande visite ! » Lança-t-il en italien. L’ancien étudiant écarquilla les yeux. Il était bouche-bée, verre de mousseux dans sa main. « Bella !? » Et quand tous eurent confirmation qu’il s’agissait bien de Bella, tout le monde se rua vers elle. C’est qu’elle était maintenant connue, la costaricaine. On lui fit la bise, on se présenta à elle, jusqu’à ce qu’Elmo réussisse à se frayer un chemin jusqu’à elle après avoir posé sa coupe sur la grande table basse. « Ok, ok, ragazzi, vous me la laissez quelques minutes ? » Il prit la main de Bella dans la sienne et l’entraîna à l’intérieur de la villa, au grand salon. Le silence les enveloppa enfin. « Qu’est-ce … qu’est-ce que tu fais ici ? Tu me textais y’a deux secondes, je pensais que tu étais chez toi … » Demanda-t-il, son grand sourire se dessinant finalement sur son visage, signe que cette surprise était réussie. Signe, aussi, qu’il n’avait aucune idée que dans quelques heures, cette joie de se retrouver se transformerait en détresse de se dire adieu.

Nouvelle vibration sur l'appareil que Bella ne regardait plus à présent que la porte de la maison s'était ouverte, laissant un homme chaleureux s'y présenter, son coeur qui battait aussi fort que le brandissement de son téléphone portable. L'homme portait une chemise en lin, un verre de mousseux à sa main, visiblement il n'était pas seul et beaucoup plus élégant qu'elle ne pouvait l'être dans sa tenue d'avion, une robe ample kaki et ses slip on vans blanches qui criaient confort plutôt qu'élégance, son visage exempt de toute traces de maquillage possible, seul son teint naturellement basané pour lui donner un peu de vie. Ça et un gloss qu'elle avait appliqués un peu trop rapidement dans le taxi, se servant de la caméra de son portable comme miroir. Bella, elle n'était habillée pour rencontrer les Santavenere. Pas le père, ni la mère, ni tout le reste de la famille dont elle ignorait la présence dans la cour arrière, à moins de quelques mètres d'où elle se tenait, dans l'encadrement de la porte qu'elle n'avait toujours pas traversée. Elle s'excusa de son arrivée surprise, ce que monsieur Santavenere refusa, décrétant que les amies de son fils n'avaient pas besoin d'être invité. Des amis, c'était ce qu'ils avaient convenus. C'était ce qu'il avait raconté à ses parents, bien qu'ils étaient à des milliers de kilomètres de Bowen et donc pas du tout forcés d'être bernés, eux aussi. Bella afficha un sourire gêné sur son visage, quand monsieur Santavenere lui fit signe de le suivre et qu'elle s'avança dans la villa vers la cour extérieure, non pas déçue qu'il ait parlé d'elle comme une amie à ses parents, c'était ce qu'ils avaient convenu, après tout, tous les deux, mais plutôt nerveuse à l'idée de faire apparition ainsi dans la maison de son amant. Parce que dans sa tête, elle s'était imaginé la scène parfaite : Elmo qui ouvrait la porte pour la découvrir, une étreinte chaleureuse, un baiser émotif. Mais ce genre de chose, ça n'arrivait qu'aux héroïnes de films romantiques hollywoodiens. Contrairement à ce qu'elle s'était imaginé, Bella suivit le propriétaire de la maison jusqu'à un grand balcon extérieur qui surplombait non seulement le jardin, mais aussi la baie de Naples dont le bleu de l'eau était bien plus vibrant que la mer qu'elle connaissait, qui lui donnait des airs d'ange perché au sommet d'une balustrade non seulement face à Elmo, mais aussi à tout un tas de gens qu'elle ne connaissait pas du tout, mais qui, eux, semblait la connaître. Puisque lorsque Elmo confirma l'identité de la mystérieuse invitée non invitée à la réception, ces gens se précipitèrent vers elle. Bise de la part de Carmela, salutation de la part de Fabrizio, accolade de la part de Sergio auxquelles elle répondit avec le plus grand des efforts. Piacere di conoscerti* (enchantée de faire votre connaissance). Et, enfin, un sourire venant de Elmo qui avait réussi à se frayer un chemin vers elle. Bella échappa un rire quand il demanda à avoir une petite minute avec elle, lorsqu'il s'empara de sa main pour la guider vers le salon intérieur, juste assez loin pour que les conversations qui reprenaient dans la cour, et qui devaient certainement les concerner, ne leur soient pas dérangeantes. J'ai d'ailleurs pas eu le temps de lire ta dernière réponse, affirma-t-elle en imitant Elmo, un grand sourire qui se posait sur son visage fatigué par les longues heures de vol et le décalage horaire qui s'imposait entre l'Australie et l'Italie. Je pensais à la nouvelle année et il n'y a personne d'autre que toi avec qui j'avais envie de la fêter, avoua la brune avec un peu plus de sérieux, cette fois, quant à la raison de sa visite surprise. Alors, 20 heures de vol plus tard, j'suis prête à faire la fête ce soir. Un doux rire s'échappa de ses lèvres, alors qu'elle replaçait maladroitement les longues mèches brunes qui tombaient sur ses épaules. Mais j'avais pas pensé à la possibilité que les Santavenere fêtent la nouvelle année en famille. J'ai un peu gâché la réception, lança-t-elle en haussant les épaules. Tu m'expliques cet accueil? Elle ignorait encore qu'il avait parlé d'elle, beaucoup parlé d'elle.

Elmo ne répondait jamais à la porte, même à l’époque où il vivait aussi, alors c’aurait été un miracle qu’il abandonne les festivités de la terrasse pour aller ouvrir à un inconnu, dans une maison qu’il n’habitait plus. Ou qu’il n’avait plus habitée durant des années. Qui sait, désormais, s’il y viderait officiellement ses valises pour remplir à nouveau les tiroirs de cette commode qui attendait patiemment dans sa chambre d’adolescent ? L’italien ne savait pas de quoi demain était fait, et cette nouvelle année était peut-être l’occasion d’un tout nouveau départ. Laisser le drame derrière, à Bowen, et essayer de devenir un peu plus sérieux. Je dis bien essayer. Mais c’était difficile, de conserver cette idée, cette résolution, quand Bella se tenait face à lui, le soleil faisant brillant son teint basané, le vent s’engouffrant dans ses cheveux bruns et dans sa robe kaki ample. La main de la jeune femme vint instinctivement se poser sur le bas de sa robe, d’ailleurs, pour ne pas laisser le vent se montrer trop malin. Elmo esquissa un sourire, automatiquement, avant que cette image éthérée ne disparaisse lorsque les Santavenere au grand complet se faufilèrent jusqu’à son ange. La costaricaine tenta tant bien que mal de survivre à cette vague chaleureuse, se présentant et se montrant ravie de rencontrer tout ce beau monde qu’elle ne connaissait pas. L’ancien étudiant arriva enfin à se faufiler jusqu’à elle et à la libérer de cette symphonie cacophonique d’hospitalité. Il l’entraîna jusqu’au grand salon où ils purent enfin souffler, mais surtout se retrouver. « C’était pas important. Enfin, ça ne l’est plus maintenant que t’es là. » Parce qu’il lui avait dit qu’elle lui manquait, et il lui avait dit de profiter de sa famille. Ça n’avait plus le même sens. Plus maintenant qu’elle n’avait plus à lui manquer car il pouvait l’avoir dans ses bras à la seconde près. Plus maintenant qu’il savait que ce ne serait pas de sa famille qu’elle profiterait mais de sa présence à lui, et de la beauté de Sorrento. « Et ta famille ? Ils n’ont rien dit ? Ils t’ont laissé venir jusqu’ici ? » Jusqu’à lui? » Connaissant Bella, elle était peut-être partie sur un coup de tête, sans en aviser qui que ce soit. Peut-être ses parents avaient-ils appris son départ via un message texte envoyé lorsque ses pieds avaient frôlé le sol italien. C’est ce qu’il aimait, chez elle, cette fougue, cette impulsivité, même si ça se retournait parfois contre lui. Pas cette fois. Cette fois, il était tellement heureux qu’elle soit là. « T’as rien gâché du tout. Au contraire. Tu rivalises presque avec l’arrivée du messie, j’crois, pour eux. » Il rit. D’ailleurs, à ce propos, Bella demanda quelques explications sur cet accueil. Elmo détourna le regard, gêné, et fis quelques pas à gauche et à droite en se grattant la nuque. « J’ai … peut-être … un peu parlé de toi à toute ma famille. » Il haussa les épaules. « Et par un peu je veux dire beaucoup. Et j’ai montré des photos, aussi. Bref, tout le monde est un peu Team Bella. » Dans toute cette saga Milo-Bella-Elmo, les Santavenere avaient plutôt écouté ce que le cœur du jeune homme criait. Alors ils avaient voté pour l’amour.

En matière de grandes familles, Belle s'y connaissait. Les Garcia donnaient aussi dans les grandes réceptions. Seulement, elles avaient tendance à avoir lieu dans le pays de ses parents, leur originaire Costa Rica. Et le Costa Rica, Bella n'y allait que très rarement. Depuis qu'elle avait l'âge de rester à la maison seule, sans la surveillance de personne, elle avait choisi d'éviter les voyages dans sa famille. Parce que sa vie, elle était à Bowen. Et qu'elle avait choisi, contrairement au reste de sa famille proche, de se contenter de son présent, de ce qu'elle construisait à Bowen, plutôt que de chercher à accéder à quelque chose qui ne lui appartenait pas. Ses origines étaient importantes, elle les avait tatouées sur le coeur, mais la Costaricaine pouvait aussi bien être fière de son côté hispanophone sans avoir à y retourner tous les deux mois. Les Santavenere lui rappelait sa grande famille à elle, réunion dans le jardin, verre de mousseux en main, ils s'étaient tous arrêtés de parler, s'étaient tous précipités vers elle, tentant de s'accaparer un petit bout de Bella, comme pour s'assurer qu'elle existait réellement, sans que la brune sache d'où cet engouement venait. Elle avait appris quelques mots en italien, ce qui n'avait pas été difficile avec son historique de langue latine, l'espagnol n'était pas si loin de l'italien. Et même si elle s'était vaguement préparée, dans l'avion, son dictionnaire anglais/italien comme lecture de vol, vingt heures pour apprendre les mots qui lui seraient les plus utiles, elle semblait tout de même désemparée quant aux salutations qui s'accumulaient jusqu'à faire face à un Elmo, souriant. Souriant et abasourdi. Et il l'entraina avec lui, dans un endroit plus calme. Et t'as de la chance, je suis là pour encore une semaine, lui annonça-t-elle quand il lui mentionna que ce n'était plus important maintenant qu'elle était là, un sourire satisfait se dressa sur ses lèvres alors qu'il semblait toujours aussi surpris, comme s'il ne croyait pas que toute cette scène était possible. Et pourtant, elle était aussi vraie que le ciel était bleu, Bella n'était pas un mirage, elle était là, en chair, en os, pour lui. Juste pour lui. C'était probablement une erreur, ils en souffriraient sans doute, parce qu'ils s'enfonçaient dans des sentiments qu'ils ne pouvaient pas se permettre de vivre en revenant à Bowen, tous les deux toujours des amis aux yeux de tous, pas prêts à affronter de nouvelles tempêtes quant à la possibilité de s'aimer. Il n'ont rien eu à dire, gloussa la brune quand il fut question de sa famille. Ils ne le savent pas encore. Parce qu'elle avait prévu les avertir quand elle regagnerait sa chambre d'hôtel, sans quoi sa mère se serait fortement opposée à son départ, l'aurait sermonné durant des heures sur l'importance de passer Noël en famille et non à poursuivre un coeur qui n'avait pas envie d'aimer. C'était un coup de tête. Un coup de tête à moitié réfléchi. La seule personne au courant, c'était Holly. Et même à sa meilleure amie, Bella avait attendu à la dernière minute pour le lui dire. Parce qu'elle ne voulait pas tuer la surprise, parce qu'elle ne voulait pas se laisser convaincre qu'il s'agissait d'une erreur. C'était du Bella. De l'impulsivité signée Garcia. Et tant pis pour les regrets. Quand elle regardait le sourire d'Elmo, quand elle le voyait, quand elle sentait son odeur, c'était tout ce qui comptait, c'était tout ce qui la convainquait qu'elle avait fait le bon choix. Elle questionna ensuite le batteur sur l'accueil à laquelle elle avait eu droit, autant par son père que par sa famille. Elmo, visiblement gêné, grouillait sur ses pieds, se grattait la nuque, gestes qu'elle reconnaissait. Il finit par lui avouer. Il avait un peu, beaucoup, parlé d'elle. Et avait montré des photos à sa famille. Bella se permit de rire. Il était adorable, sans même le savoir. Il était terriblement adorable. Et elle était flattée. Flattée qu'il ait parlé d'elle. Elle et pas une autre. J'espère que c'était de belles photos, au moins, blagua-t-elle, faisant comme si elle ne retenait que cette information de ce qu'il venait de lui avouer. Un sourire moqueur finit par remplacer son rire perçant. Team Bella, hein?, s'interrogea-t-elle, l'oeil luisant. Si j'avais su, je serais passée à l'hôtel pour me changer avant de venir rencontrer tous mes fans histoire d'être un peu plus... présentable? C'était une blague pour masquer la vérité, elle se sentait si peu présentable dans sa tenue de vol, ses cheveux défaits, sa peau exempte de maquillage, elle qui, pourtant, portait toujours une attention particulière à son look. Et, qui est team Elmo? Elle. Elle, elle était team Elmo. Elle aussi, elle votait pour l'amour. Bella s'avança vers Elmo, eux qui avaient eu une distance chaste pour discuter, pour recoller les pièces du puzzle justifiant sa présence, ici, en Italie, dans sa maison familiale. Elle attrapa sa main. Tu me fais visiter?, demanda-t-elle en caressant le revers de la main de l'Italien. À moins que t'aies envie qu'on retrouve ta famille. Seulement, si tu choisis l'option numéro deux, j'te demanderais de me laisser deux petites secondes pour enfiler quelque chose de plus... chic. Elle pointait du regard sa valise qui reposait dans l'entrée, à quelques mètres d'eux.

Une semaine complète avec Bella, dans son chez-lui, cet endroit qu’il connaissait mieux que n’importe quel autre. Une semaine complète avec Bella, cette femme qu’il avait aussi l’impression de connaître mieux que n’importe qui d’autre. Et le contraire était aussi vrai. Bella le connaissait, dans ses qualités comme dans ses défauts, et c’était bien ça la plus grande menace de sa venue ici. Elle était celle qui pourrait le convaincre de revenir à Bowen, de ne pas délaisser tout ce qu’il avait construit là-bas en trois ans. « Tu vas passer toutes tes vacances ici ? » Demanda-t-il avec un sourire à la fois heureux et touché. « Ça nous laissera le temps de te faire découvrir ma ville mais aussi toute la pointe de la péninsule. Si tu veux, je t’emmènerai voir Pompei. Et Naples, aussi, si t’as envie de voir autre chose que son aéroport. Tu sais quoi ? On pourra même aller à Rome. J’prendrai la voiture de papa pour la semaine, ça lui fera plaisir. » Il lui montrerait les points de vue moins touristiques mais ô combien magnifiques, il lui ferait découvrir l’Italie sous un autre angle que celui vendu dans les livres de voyage. Ils s’arrêteraient, en chemin, dans des endroits inusités mais dont elle garderait les plus beaux souvenirs. Tout se faisait à une distance raisonnable de voiture, ils n’auraient qu’à se prendre deux journées pour que Bella puisse voir quelques facettes de Rome avant de revenir. Il la traiterait en reine avant de la laisser repartir. Elmo s’emballait déjà mais certaines choses demeuraient encore à clarifier avec la costaricaine, d’abord. Lorsque l’étudiante lui confirma que ses parents n’étaient pas au courant de sa venue en Italie, il secoua la tête en riant. « On n’te changera pas, toi. » Et on ne changerait pas non plus Elmo. C’était peut-être ça qui aurait raison d’eux, en bout de ligne. Pourtant, à première vue, ces retrouvailles étaient les plus belles. Encore plus alors que l’italien révélait à son amante secrète qu’il avait parlé d’elle en long et en large à sa famille, jusqu’à leur en briser les tympans. Mais ils avaient été réceptifs, très réceptifs, sans doute parce qu’ils n’avaient jamais vu le regard du jeune Santavenere s’illuminer à ce point. « J’me suis contenté de celles sur ton Insta. Les autres, elles sont que pour moi. » Dit-il en parlant de celles de son téléphone, secrètement classées dans un dossier qui n’avait rien à voir, que personne ne chercherait à aller fouiller. Il pensait à tout, Elmo. Probablement parce qu’il avait l’habitude de mentir. Lorsque la brunette parla de son hôtel, l’italien fronça les sourcils. « Ah, non, on va téléphoner tout de suite pour annuler ta réservation. On a un tas de chambres d’invités de libres, tout ce beau monde ne dormira pas ici. Tu t’installeras dans l’une d’elle. » Avec vue sur l’océan, pensa-t-il. C’est drôle comme tout d’un coup, Elmo passait de l’ex-étudiant un peu paumé à un jeune fils de riche qui profitait de tous les avantages. Ce changement de décor était frappant. À propos de la team Elmo, il eut un léger rire. « Personne n’est Team Elmo. C’est pas un bon parti. T’auras qu’à leur demander. » Bella s’approcha de lui et il laissa ses doigts glisser entre ceux de la belle. « J’vais te faire visiter, ensuite tu pourras choisir ta chambre et prendre le temps de t’installer et te changer, puis on pourra revenir célébrer. Si tu te sens d’attaque. » Parce qu’il comprenait qu’une horde de Santavenere, ce n’était pas facile à affronter pour une première rencontre de la famille. En même temps … elle n’avait pas trop le choix.

Il faisait déjà des plans, avait des idées de grandeur, élaborait leur itinéraire possible passant de Sorrento à Pompéi, Naples et Rome, tous des endroits qui faisaient élargir le sourire de la brune sur son visage. Sourire qui s'était d'autant plus perché sur ses lèvres alors qu'Elmo s'emballait à l'idée de passer toute la semaine avec elle. Surprise qui avait été bonne, finalement. Bella aurait pu être un nuage sombre sur les vacances de l'ex-étudiant dans sa famille. Elle aurait pu représenter une barrière face à ses retrouvailles avec les siens. Elle aurait pu être de trop, être trop imposante, se voir s'immiscer dans un endroit où, peut-être, il n'avait pas souhaité la voir le faire. Mais, au contraire, Elmo le prenait avec le sourire, planifiait leurs prochaines aventures alors que la première était à peine entamée. Et c'est bien pour ça qu'elle l'aimait. J'veux voir tout ça, lança-t-elle enjouée. Elle s'imaginait déjà, côté passager dans la voiture de monsieur Santavenere, le vent méditerranéen dans les cheveux, à la découverte du monde. Ils pourraient tout plaquer, s'enfuir, tous les deux. Mais ça, ce n'était que des rêveries. La réalité leur réservait bien d'autres choses que de s'enfuir pour vivre leur amour comme ils l'entendaient. Tu m'apprendras encore mieux l'italien, au passage, parce que ma courte session d'étude dans l'avion n'était visiblement pas suffisante, affirma-t-elle en riant, pointant les vingt-heures de vol au passage qui lui avait servi à se familiariser avec la langue, oui, mais aussi à s'imaginer comment se passerait son arrivée surprise. Et elle n'avait visiblement pas été en mesure d'estimer à quel point Elmo semblait heureux de la retrouver. Possiblement parce qu'il était le seul à savoir, à cet instant, qu'il s'agissait très certainement de leur dernière semaine ensemble. On pourra s'arrêter manger dans tous les restos typiques que tu connais et... Bella s'arrêta là, s'accordant une pause pour sourire à son amant avant d'ajouter : Et on a clairement déjà trop planifié de trucs pour les vingt-quatre heures que comportent une journée. Si on veut faire tout ça, on risque de manquer très certainement de sommeil. Et pas que pour ces raisons, pensa-t-elle sans oser le dire, comme si c'était interdit dans ce terrain qui lui était encore inconnu. La maison des Santavenere, ce n'était pas Bowen, ce n'était pas ces repères. Et loin de là l'idée de paraitre impolie devant les oreilles possiblement curieuses de la famille. Sa famille à elle, d'ailleurs, la trouverait sans doute bien impolie. Elle n'avait pas répondu aux messages de sa mère, des sms envoyés en dernier recours parce que Bella n'avait pas daigné répondre à ses multiples appels. À sa défense, elle n'en avait pas eu la chance, elle avait été prise vingt heures dans un vol en direction Naples. Mais ça, sa mère ne le savait pas encore. À cette remarque, Elmo secouait la tête, moitié réprobateur, moitié amusé. Bella haussa les épaules, se joignant au rire de l'Italien avant de l'écouter se confier encore un peu plus sur sa famille à lui. La sienne pouvait attendre, ça lui était égal. Et il fallait avouer qu'elle se montrait d'autant plus curieuse puisque sa famille semblait très familière à l'appellation de son prénom. Je vois, fit sa réponse quand le jeune homme précisa qu'il ne s'était que contenté de ses réseaux sociaux pour faire l'éloge de sa Bella. Encore heureux, puisque les dernières semaines avaient été teintées de photos tout aussi secrètes que leur relation à travers les multiples sms échangés. À ce sujet, lança la brune, joueuse, t'auras peut-être droit aux versions italiennes des autres photos. C'était plus fort qu'eux, une certaine alchimie ne semblait jamais les quitter. Elle aurait pu ajouter que le décor de sa chambre d'hôtel ferait un beau fond pour ces clichés, mais Elmo réfuta l'idée qu'elle s'installe ailleurs qu'ici. Une chambre d'invité..?, répéta l'étudiante en fronçant les sourcils. Non, non, c'était pas le plan! Elle ne s'était pas présentée ici dans le but de s'y faire inviter. Elle n'avait seulement pas pu attendre une heure de plus avant de le surprendre. Voilà tout. Bella ne voulait pas déranger ni s'imposer. Puis, il y avait quelque chose de magique de s'accorder une distance. Elmo pourrait la rejoindre, quelques nuits, loin du regard inquisiteur de ses parents. Elle secoua à nouveau la tête, mais Elmo se montrait impartial. J'imagine que tu ne m'en laisses pas le choix?, demanda-t-elle en sachant très bien la réponse. Ça lui ferait sans doute étrange de dormir dans cette maison, beaucoup plus luxueuse que ce qu'elle pourrait jamais se permettre. Son hôtel, des photos qu'elle avait pu voir sur le net avant de faire sa réservation, ne ressemblait en rien à la demeure des Santavenere. Son appartement non plus. Elle en était même à des années-lumière. Mais elle accepta. Ce n'était pas tellement strong independent woman, comme elle aimait bien dire à Elmo, mais ça semblait lui faire plaisir. Et, au fond, ça n'était pas si mal de se dire qu'ils dormiraient si près, en étant tout de même si loin, hors de question pour Bella de s'infiltrer dans la chambre de son amant en sachant que ses parents dormaient à quelques portes d'eux. Pour eux, ne fallait-il pas rappeler qu'elle était l'amie, Bella. Pas encore l'amoureuse, Bella. En attrapant ses doigts, elle osa mettre en relief le sujet, apprenant qu'ici, ils étaient team Bella. Et que personne n'était réellement team Elmo. J'ai jamais aimé les bons partis, de toute façon, confessa-t-elle avant d'ajouter : J'suis prête, fais-moi visiter. Elle le laissa embrayer le pas dans la maison qui, à chaque pas s'avérait plus somptueuse qu'elle ne l'était déjà, en récupérant sa petite valise au passage d'où elle pourrait extirper une robe un peu plus habillée pour le reste de leur soirée.

Plus le sourire de Bella s’élargissait, plus Elmo avait envie de déballer une liste longue comme son bras de destinations de rêve. Pour la faire rêver, elle. Et qu’elle garde ces souvenirs-là gravés dans sa mémoire à tout jamais, peu importe ce qui se passerait ensuite, peu importe par quoi se solderait ce voyage improvisé. « J’veux que tu vois tout ça. » Répondit-il en souriant. Il irait parler de ces projets-là avec ses parents dès le lendemain. Ou ce soir, peut-être, quand le champagne aurait coulé à flots et que son père serait plus enclin à accepter de lui laisser la voiture pour toute la semaine à venir. De toute façon, Elmo ne se sentait pas trop mal de passer son temps en Italie avec Bella, même s’il ne voyait que rarement ses parents depuis quelques années. Après tout, il pouvait bien prolonger son propre passage en Italie. Peut-être même que ce ne serait pas qu’un simple passage. Aucune contrainte d’horaire universitaire ou de travail ne l’attendait à Bowen. Même que les contraintes, elles étaient plutôt par rapport à son retour en sol australien, quand il allait devoir gérer toute la paperasse concernant son visa étudiant maintenant échu, puisqu’il n’avait pas renouvelé son inscription. Il n’osait plus y penser, pas alors que Bella se trouvait devant lui et qu’il n’avait plus à penser à elle comme un souvenir qui risquait de s’effacer. « J’t’apprendrai quelques mots par-ci, par-là, mais t’auras pas trop besoin de le parler, si on va à ces endroits touristiques. » Mais si elle désirait dialoguer, alors il l’aiderait, si ça pouvait lui faire plaisir. N’importe quoi pour lui faire plaisir, maintenant qu’ils étaient à l’autre bout du monde et qu’il n’avait plus à se soucier d’être pris la main dans le sac avec l’ex de son meilleur pote. Elmo rit alors que Bella faisait remarquer qu’ils planifiaient une escapade bien trop grande pour le peu de temps qu’ils avaient. Surtout que ces deux-là, les connaissant, allaient passer le plus clair de leur temps à flâner à deux. « Comme t’auras plus besoin de te préparer à parler italien, t’auras vingt heures de vol au retour pour dormir et rattraper les heures de sommeil perdues. On va y arriver. » Lâcha-t-il avec légèreté, alors que pourtant le fait de parler de ce vol auquel il ne prendrait pas part, du moins pas en même temps qu’elle, évoquait subtilement l’idée qu’il ne revienne pas à Bowen de sitôt. Lorsque la costaricaine annonça qu’Elmo aurait sans doute droit aux versions italiennes des photos coquines cachées dans son téléphone, il arqua un sourcil, amusé, allumé. « Ah bon ? Faudra se faire discret … C’est grand, ici, y’a beaucoup d’écho … » Il rit, taquin, se doutant fort bien que Bella aurait du mal à s’abandonner entre les murs de cette demeure, sachant qu’une bonne partie de la grande famille de l’italien s’y trouverait au même moment. Il ne doutait pas qu’ils trouveraient le moyen d’avoir un peu d’intimité. Ils ne manquaient pas d’imagination quant aux lieux pour se retrouver. À ce propos, Bella ne tarda pas à comprendre qu’Elmo ne la laisserait pas dormir à l’hôtel alors qu’elle pourrait avoir un séjour tout-payé ici-même, à la villa Santavenere. « J’crois pas que t’avais un plan, Garcia. Alors moi j’t’impose celui-là. » Ça ne laissait donc pas de place à l’argumentaire. « Non, t’as pas le choix. De toute façon y’a pas que moi dans c’t’histoire, et mes parents ne te laisseraient pas non plus repartir à l’hôtel. Et ils sont encore plus insistants que moi. » Et en plus d’être insistants, ils étaient hyper accueillants. Ils dérouleraient le tapis rouge pour Bella. Pour le moment toutefois, ce ne fut qu’Elmo qui fit visiter la place à la costaricaine, lui montrant la grande cuisine, la salle à manger tout près d’une baie vitrée, le salon de réception, le salon de jeux, les salles de bain, et puis les chambres, bureaux et autres salles de bain à l’étage. Il était un peu gêné qu’elle apprenne de la sorte qu’il provenait d’une famille italienne si fortunée, lui qui ne s’en était jusqu’alors jamais vanté, mais il était aussi fier du chemin tracé par ses parents. Finalement, Elmo posa la valise de Bella dans une chambre toute propre, toute fraîche, qui n’attendait qu’un visiteur, qu’un invité, pour redonner de la vie à son décor. « Voilà, on t’installera ici. C’est pas trop loin de ma chambre. » Il lui fit signe de le suivre et il ouvrit une porte qui les plongea dans le monde adolescent d’Elmo. Il y avait des affiches de vieux groupes de rock, des trophées et des médailles de sport, un couvre-lit ringard, et tout ce qu’on peut s’imaginer d’une chambre délaissée par son occupant dès qu’il eut atteint l’âge de dix-huit ans. « Je t’interdis de te moquer. » Dit-il dans un rire.

Les endroits les plus paradisiaques de l'Italie, Elmo les avait énumérés. Et, déjà, Bella s'en réjouissait. Et les endroits inusités aussi, ajouta-t-elle pleine d'espoir. Elle ne s'était pas fait de plans, parce que ce voyage était, en premier lieu, l'occasion de surprendre son amant. Et tant qu'elle ne savait pas comment tout ça allait se produire, elle n'avait pas pu faire d'itinéraire de son séjour. D'autant plus qu'il y avait un avantage à visiter un pays avec un local : l'accessibilité aux recoins les moins touristiques de son pays. J'veux découvrir d'où tu viens. Où t'as grandi, à quoi ressemblait le parc de ton enfance, où vous ameniez des filles pour rouler des pelles à l'adolescence, tout ça, tu vois? Tout ça, il le connaissait de Bowen. Il avait l'avantage d'être expert dans les deux villes. Mais s'il connaissait les recoins de sa nouvelle ville Australienne, Bella, elle, ne connaissait rien de l'Italie, encore moins de Sorrento. C'était la toute première fois qu'elle y mettait les pieds, qu'elle y respirait l'air marin qui ressemblait, un peu, au leur. Puis, comme ça, t'aurais pas à m'apprendre l'italien pour rien, ajouta Bella comme un argument pour le convaincre de lui partager un peu plus sa vie ici. Il se montrait adorable avec elle, succombant au moindre de ses désirs pour voir un sourire se poser sur les lèvres de la brune. Et elle l'aimait pour ça. Tendrement, elle lui accorda un sourire qui n'avait rien des autres, avant de le transformer en une moue joueuse alors qu'il avait parlé des photos qu'il avait gardées pour lui, bien caché des yeux curieux. Elmo parla d'être discrets, ce qui fit rire l'étudiante. Discrets, c'était pourtant ce qu'ils étaient, à Bowen. Et, jusqu'à présent, personne n'avait su découvrir leur secret, ils avaient été assez efficaces au jeu du secret maintenu. Grande maison ou pas, ils trouveraient le moyen de l'être. D'autant plus que les parents de l'Italien se trouveraient sous le même toit qu'eux. Et, à leurs yeux, bien que leur fils ait venté les mérites de la belle Bella Garcia, elle était l'amie d'Elmo. Et les amies, ça ne s'abandonnait pas dans les bras de leurs amis. Sans quoi, les titres étaient à retravailler. T'as raison, lui concéda-t-elle, sans pour autant lui laisser crier victoire aussi facilement. On devra se priver de ce genre de choses, alors, dit-elle en haussant les épaules, comme pour montrer qu'ils n'en avaient pas le choix, que c'était le seul et ultime sort. À moins que l'on passe à ma chambre d'hôtel, tenta Bella. Mais Elmo refusa, parlant évidemment d'une chambre d'invité et des plans qu'elle n'avait pas réellement. Ce n'était pas qu'il avait tort, en réalité Elmo avait bien raison, elle n'avait pas de plans prédéfinis, seulement une chambre louée pour la semaine et qui lui avait coûté un peu - beaucoup - la majeure partie de son budget voyage. C'est de là que tu retiens ton pouvoir de persuasion?, demanda la jeune femme en riant quand il ajouta ses parents à l'équation. Ils sont gentils, tes parents, finit-elle par dire avec plus de sérieux. Ils ne la connaissaient que de nom, Bella. Et, déjà, elle se sentait incluse dans cette grande maison, une chambre à elle et une invitation à passer le réveillon de la nouvelle année avec eux. Ou, du moins, ce qui en restait de l'apéro. Pour le reste, elle ne connaissait pas les plans d'Elmo. Peut-être avait-il prévu sortir en ville avec des amis ou regarder le feu d'artifice de la région perché sur les rochers près de la mer. Elle ne lui avait pas encore demandé. Et elle aurait l'occasion de le faire, surtout en restant sous le même toit que lui - et que le reste de la famille Santavenere  dont la maison était époustouflante. Le séjour était de la grandeur de l'appartement de Bella, et peut-être même de celui d'Elmo qui, à Bowen, vivaient des vies bien différentes que la fortune à laquelle ils étaient confrontés à l'instant. Ils font quoi, tes parents?, demanda-t-elle, curieuse, en scrutant le détail décoratif de la dernière salle de bain qu'ils visitaient, celle avant de passer au couloir des chambres à l'étage. Dans tous les cas, ta maison est trop trop belle. Je ne comprends pas pourquoi tu as choisi Bowen avec un paradis comme ça. Et il ne pouvait pas dire pour elle, puisqu'ils ne se connaissaient pas, à l'époque. Parfois, les paradis cachaient de vilains défauts. En terminant la visite, Elmo ouvrit la porte d'une chambre où un lit double y trônait fièrement au centre, entouré des bribes de l'enfance de son propriétaire. Alors qu'Elmo installait la valise de Bella près du lit, elle s'avançait dans la pièce pour analyser les différentes pièces du puzzle de sa vie. Me moquer? C'est mal me connaître!, assura-t-elle en se tournant vers lui. C'était bien tout le contraire. C'est des trophées de quoi, ça ?, pointa la brune. Du meilleur frencheur de ton lycée? Bella glousse. Il la connaissait bien, mieux que personne même. C'était la chambre de toute son adolescence, de toute une vie avant sa vie à Bowen. Et d'y être, de s'y retrouver les deux pieds dedans, c'était complètement fou. C'était comme si Bella découvrait un tout nouveau Elmo, bien différent de celui qu'elle avait rencontré à l'université. Elle s'approcha de lui, la séparation de leurs corps avait assez duré. Elle attrapa à nouveau les mains du brun, en caressa le revers. Merci, souffla-t-elle, pour la visite, pour la chambre. D'avoir eu une aussi belle réaction quant à son arrivée et non pas d'avoir été malaisé de la voir débarquer, totalement à l'improviste. On a assez fait attendre tes parents et toute ta famille, tu ne crois pas?, demanda-t-elle. Elle connaissait la réponse. Et, pourtant, elle espérait qu'il lui réponde à la négative pour ne pas être obligé de casser, à nouveau, la chaleur de leurs mains entrelacées. C'est pourtant ce qu'elle fit, se dirigeant vers sa valise pour en extirper une robe un peu plus présentable aux manches trois quarts dans les teintes de bordeaux et deux paires de chaussures. L'une dont les talons étaient si haut perchés qu'elle serait à la même hauteur que son cavalier, les autres, bien au contraire, à l'absence de talons qui lui ferait avoir trois têtes de moins. Je te laisse choisir les chaussures pendant que je m'habille, lança la brune. Sans gêne, elle retira la robe temporaire qu'elle avait portée durant le vol, dévoilant des parties de son corps sous les yeux de l'Italien. Oups, dit-elle, faussement désolée, Je t'ai pas demandé si ça te gênait que je me change devant toi. Toute ta famille croit que l'on est seulement amis, pas vrai?

Elle devinait sa pensée avant même qu’il ne la dise. Comme quoi, Bella et Elmo étaient réellement sur la même longueur d’ondes, même s’ils tentaient le plus souvent de cacher aux autres cette symbiose. « Évidemment. L’avantage d’être avec un local c’est de pouvoir découvrir les endroits secrets qui ne sont pas bondés de touristes. » Et qui, bien souvent, regorgeaient d’aussi beaux paysages en toute intimité, contrairement aux autres. En plus, si les locaux s’y rendaient d’eux-mêmes, c’était bien la preuve qu’il s’agissait d’endroits qui en valaient la peine. Bien plus la peine que ces monuments pris en photos sous tous les angles possibles et qu’on a déjà l’impression de connaître par cœur avant même de se retrouver devant. Le Colisée de Rome était bien beau, mais au fond, lui restait-il un mystère après tous ces regards posés sur lui ? L’italien sourit et s’autorisa même à rire quand la costaricaine évoqua ces endroits où ses amis et lui emmenaient les filles pour leur rouler une pelle, à l’adolescence. « J’étais pas comme ça, voyons. » Bien sûr qu’il était comme ça. Si Elmo était autant player à vingt-et-un an, il ne faisait nul doute qu’il l’était tout autant – sinon plus – quelques années auparavant. Bella avait toutefois su le calmer, parce que même s’ils continuaient de jouer aux charmeurs auprès des autres pour détourner l’attention de sur leur relation secrète, il n’en restait pas moins que l’italien avait de moins en moins l’envie d’aller voir ailleurs. Ces filles qu’il complimentait pour l’image, pour dissimuler le secret encore plus creux, Elmo n’avait plus de réel intérêt pour elles. Il pensait tout ce qu’il leur disait, mais c’était sans l’intention que ça aille plus loin. Au bout de la nuit, les images qu’il regardait, c’était celles de Bella sur son téléphone. Alors, de savoir qu’il aurait droit aux versions italiennes de celles-ci, ce n’était pas pour déplaire à Elmo. « Se priver ? Nah. Et oublie ta chambre d’hôtel, tu veux bien ? Depuis quand tu sous-estimes à ce point notre capacité à l’faire en douce ? » Ils avaient pourtant bien de la pratique, quand ils allaient dans l’appartement de l’un ou de l’autre. Il fallait à tout prix s’aimer en silence, pour ne pas éveiller les doutes des colocataires pas toujours endormis. L’italien insista donc à nouveau pour que la costaricaine reste à dormir à la villa. Si elle lui disait non à lui, elle serait incapable de dire non à ses parents, de toute façon. Il rit en entendant la réplique de Bella. Les Santavenere étaient effectivement connus pour obtenir ce qu’ils voulaient. Heureusement, ce pouvoir de persuasion était généralement utilisé à bon escient. Généralement. « Ça doit être ça. J’ai appris des meilleurs. » Il sourit, avant d’hocher la tête à propos de la gentillesse de ses parents. « Ils sont parfois un peu too much mais c’est pour bien faire. » Bella allait très vite se rendre compte qu’ils la traiteraient à la fois comme une invitée royale, à la fois comme un membre de leur famille. Alors que les deux jeunes adultes déambulaient dans les couloirs de la maison, Bella demanda à Elmo ce que ses parents faisaient. « Ma mère est à la tête d’une entreprise de céramique et mon père est producteur de limoncello. » Il eut un petit rictus, Elmo, parce que ces deux domaines-là étaient typiques de la région. Ses parents l’avaient joué safe mais ça les avait plutôt bien réussis. À la question de Bella concernant son choix de se retrouver à Bowen, l’italien haussa les épaules. « Y’a certaines choses que l’argent peut pas acheter. » Répondit-il, évasivement. Il avait pourtant l’air de provenir d’une famille aimante, de ne jamais avoir manqué de quoi que ce soit, d’avoir été entouré d’un tas d’amis toute sa vie. Après avoir laissé la valise de Bella dans la chambre qu’elle occuperait, il lui ouvrit la porte sur une partie de sa vie qu’elle ne connaissait pas encore : son adolescence. Il eut un sourire gêné à la voyant regarder les affiches sur ses murs et les trophées sur ses étagères. « Non, ce prix-là il est juste écrit dans l’album de fin d’année. » Dit-il en riant. Il s’approcha de Bella et, du même coup, de ses trophées. « Des trophées de soccer. J’étais le capitaine de l’équipe. » La brunette se tourna vers lui et attrapa ses mains avant de le remercier pour la visite. Il hocha la tête concernant tout ce beau monde qui les attendait en bas. « Ouais, on devrait redescendre. » Bella retourna à sa chambre d’invitée pour se sortir une robe mauve – les différents ton, Elmo ne les connaissait pas ; le Bordeaux, pour lui, c’était du vin – et deux paires de souliers. « Comme les Santavenere ont la réputation de ne pas seulement entrer dans la nouvelle année mais plutôt de la fracasser, je te conseille les plats. Moins de risques d’accidents. » Il sourit en reposant les talons hauts sur la valise ouverte. Il ne manqua pas de laisser ses yeux déshabiller Bella au même rythme qu’elle se déshabillait elle-même. « Ils vont continuer de croire ça malgré ça. Après tout … ils ne sont pas là pour voir ce qu’on fait, pas vrai ? » Elmo rejoignit le corps de la belle et laissa ses mains parcourir son corps avant de déposer des baisers sur sa nuque et le haut de son dos. Ce serait difficile de faire perdurer la supercherie, quand ils avaient ce pouvoir d’attraction l’un envers l’autre.

Ouais, c'est ça, gloussa Bella en levant les yeux au ciel lorsque Elmo lui assura qu'il n'était pas comme ça, à l'adolescence. Tu me montreras alors les endroits où vous ameniez les filles pour... Évidemment que c'était pour les embrasser, peut-être même plus, mais après un nouveau gloussement, Bella laissa s'échapper : .. les regarder dans le blanc des yeux. Elmo, éternel dragueur, Roméo de ces dames, coureurs de jupons, il avait la réputation de draguer, de coucher, sans jamais maltraiter les femmes, ça non, mais sans pour autant les rappeler le lendemain. Dans leurs normes de visites secrètes, Bella était sans doute la seule à qui il avait filé un coup de fil le lendemain. Et le surlendemain. Et, en réalité, elle était peut-être la seule qu'il avait réellement vue depuis Brisbane, depuis le BigSound. Ça, elle n'en était pas certaine. Non pas qu'elle doutait d'Elmo. Seulement, ils ne s'étaient pas promis exclusivité. Si elle n'avait pas ressenti le besoin de trouver réconfort ailleurs, trouvant la chaleur dans les bras de l'italien quand ils se donnaient secrètement un nouveau rendez-vous, elle n'avait pas demandé des comptes à celui qui faisait battre son coeur. Quand ils se retrouvaient, elle ne pensait pas à ces questions idiotes. Il n'y avait que lui. Lui et elle. Le reste, elle s'en fichait. Comme à l'instant, d'ailleurs. Bowen et Sorrento, c'était la même chose, le paysage un peu dépareillé, mais l'essence restait la même : eux, sans le reste. Peu importe ce qu'ils feraient, elle était là pour lui. C'était tout ce qui comptait. Et, peut-être, aussi, respecter l'hospitalité de ses parents. Il parlait de se faire discrets, d'écho dans cette grande maison. Bella, elle, parlait de privation. Ce que l'Italien refusa. Nah, qu'il lâcha en secouant la tête, arrachant un rire à la brune. Tu sais, faire languir les désirs, ce n'est pas une si mauvaise idée, proposa-t-elle alors qu'il dénotait leur capacité à se faire invisibles et silencieux. S'abstenir, se faire languir? Eux? En étaient-ils capables? Même s'ils le voulaient, ils n'y arriveraient pas. Déjà à peine arrivés, ils se mangeaient du regard. Et s'ils avaient été pudiques jusqu'à présent, il ne serait que tarder pour que leurs lèvres retrouvent enfin le chemin les unes vers les autres, que leurs corps ne s'enlacent à nouveau dans une danse qu'ils savaient si bien partager, à deux. Se montrer discret, se montrer discret, en avaient-ils réellement besoin? Les parents d'Elmo n'étaient pas dupes. Quelle fille, simplement amie, aurait parcouru le monde, vingt heures de vol, que pour fêter le Nouvel An avec lui? Qui d'autre qu'une fille amoureuse? Bella, évidemment. Bella, l'amie. Je te laisserai trouver un moyen de te glisser dans mon lit sans attirer les soupçons des tiens, conclut-elle, finissant par accepter son sort, le seul et l'unique, qu'elle devra contacter l'hôtel La Badia pour annuler la réception de sa chambre, accusant au passage maman et papa Santavenere d'avoir transmit leur pouvoir de persuasion à leur fils unique, lui aussi doué pour convaincre les autres, surtout les filles. Ça aussi, t'en as hérité, gloussa la brune quand Elmo décrit ses parents d'intenses. Too much, il lui arrivait de l'être, oui. Comme la fois où il avait choisi d'oublier leur première nuit pour protéger sa relation amicale avec Milo. Comme celle où il avait proposé de faire une lise des sujets à éviter ensemble. Comme celle où il avait cru à des mots d'amours. Bella aussi, elle avait hérité de l'intensité de sa famille. Elle n'en était pas en reste. Et ses comportements pouvaient, eux aussi, dénoter de ce trait de personnalité. Elle vivait ses émotions jusqu'au fond de ses tripes, parfois bien, parfois mal. Souvent, surtout, en se montrant plus forte qu'elle ne l'était réellement. Elmo profita de l'interlude pour parler un peu de sa famille, ce que ses parents faisaient pour vivre alors que la visite de la maison se terminait et que Bella la complimentait avec une admiration sincère. Elle n'avait pas grandi dans une belle maison comme celle-ci. Ni même eu une famille qui réussissait aussi bien. Ses parents avaient immigré pour offrir une meilleure vie à leurs enfants. Ils avaient tout donné pour leur payer des études. Des quatre Garcia, Bella était sans doute celle qui faisait les études les plus dispendieuses et malgré le fait qu'elle tentait de voler de ses propres ailes, à présent, ayant pris son appartement, ses parents insistaient toujours pour acquitter ses frais de scolarité. Et, pourtant, tout ça, c'était très cher. Sa mère était femme de ménage, son père, quant à lui, travaillait pour une compagnie ferroviaire. Rien de luxueux ou de glamour à énoncer. L'Italien mentionna un dicton assez connu, supposant que le bonheur, lui, ne s'achetait pas avec tout l"argent du monde. À sa phrase, Bella laissa une moue songeuse se poser sur son visage. Non, en effet, l'argent n'apportait pas tout. Puis, elle transforma sa moue en un sourire moqueur. T'as raison, Santavenere. Moi, on m'achète pas avec de l'argent, dit-elle en faisant bouger ses sourcils, avant d'éclater en rire. Un peu pour se moquer, beaucoup pour calmer l'atmosphère dramatique. Mais elle retrouva son calme assez rapidement. T'étais pas heureux?, demanda-t-elle plus sérieusement en épiant les photos sur les murs jusqu'à entrer dans son ancienne chambre et prendre connaissance des différentes parties de sa vie passée qui étaient encore habitées par la pièce. J'demande à faire partie du jury pour les nouvelles qualifications, lança-t-elle alors qu'il confirmait que ces prix, ils les avaient remportés, mais plutôt dans un album des finissants. Et, pour avoir le titre du meilleur frencheur, y'avait pas un endroit particulier où tu emmenais les filles?, le questionna-t-elle à la blague, reprenant leur discussion sur les attraits non touristiques qu'ils pourraient visiter et les endroits secrets qu'il niait avoir. Bella se déplaçait vers les différents trophées, un peu plus sérieuse, ses doigts les frôlaient, elle ne savait pas si elle avait le droit d'y toucher, mais elle le faisait tout de même, caressant les engravures alors qu'Elmo lui expliquait d'où ils provenaient. Ouais, ça te ressemble, mentionna-t-elle quand il décréta avoir été le capitaine de son équipe de soccer avant de se tourner vers lui et de caresser à nouveau ces mains qui lui avait manquées l'instant d'une seconde qu'elle aurait voulu une éternité. Mais il brisa ses espoirs, confirmant qu'ils devraient redescendre, éviter d'égayer les soupçons qu'il y avait déjà sur eux, mauvais menteurs qu'ils étaient, surtout Elmo. Elle le laissa en charge des chaussures alors qu'elle dénudait son corps, laissant que sa lingerie épouser les formes de sa peau matte, Elmo qui s'avançait vers elle, apposant des baisers dans sa nuque, les yeux de Bella qui se fermèrent, sa respiration qui était saccadée, il la rendait folle. Mais ils ont la notion du temps, souffla-t-elle entre deux baisers sur sa peau, elle qui cherchait ses lèvres alors qu'une voix retentissait dans l'escalier. « Elmo! Che stai facendo? », cria un cousin de l'ex-infirmier, son corps se séparant de celui de Bella qui s'efforça à enfiler sa robe plus habillée en la vitesse de l'éclair.

Un rire franc s’échappa d’entre les lèvres de l’italien alors que Bella reprenait sa phrase pour en modifier la fin, remplaçant le french kiss par se regarder dans le blanc des yeux. Oh, ils savaient fort bien, autant l’un que l’autre, que ce n’étaient pas les yeux de ses conquêtes qu’Elmo regardait. Il avait le regard un peu plus bas que ça. C’était toutefois un peu plus classe de l’imaginer comme Bella l’imageait. « Alors … de toute l’Italie, ce qui t’intéresse le plus … ce sont les parcs pour enfants pollués par les mégots de cigarette d’adolescents rebelle ? » Même à Sorrento, où les endroits romantiques pullulaient, les jeunes dans son temps traînaient plutôt dans les parcs de la ville au beau milieu de la nuit, en riant trop fort et en lançant des blagues salaces. Ils n’avaient pas le souci de la beauté des paysages, à cet âge-là. Ils étaient trop occupés par la beauté des filles de leurs classes. Les temps n’avaient pas trop changés, d’ailleurs, dans les dernières années. Jusqu’à tout récemment, en fait. Jusqu’à ce qu’Elmo Santavenere rencontre Bella Garcia et qu’elle fasse basculer tout son univers sans prévenir. Il aurait aimé être prévenu, pourtant, Elmo. Il aurait aimé être prévenu qu’une femme s’apprêtait à changer toute la trajectoire de sa vie. En temps normal, pour assouvir ses désirs, Elmo se serait juste éclipsé de cette demeure avec une amante parmi les autres, pour coucher avec elle à peu près n’importe où. Mais avec Bella, il n’avait pas envie de l’amener dans des endroits inappropriés pour la retrouver. Il voulait bien faire les choses, lui qui se foutait généralement de ce qu’on pouvait penser de ses actes. La costaricaine jouait toutefois avec sa patience puisqu’elle releva que faire languir les désirs pouvait être une bonne idée. Il secoua la tête. « Perso’ je pense que c’est une très, très mauvaise idée. » Dit-il avec un sourire espiègle. Il allait évidemment taire les vraies raisons devant cette opinion tranchée. Il aurait pu se retenir, Elmo, même si son désir envers Bella était grand, pour elle il aurait su se montrer patient. Mais il savait trop bien que cette attente se transformerait peut-être en arrêt. Cette visite en Italie n’était peut-être pas qu’une parenthèse à leur histoire débutée à Bowen, mais peut-être bien le point final. Il ne supporterait pas de ne pas avoir pu goûter à son corps une dernière fois. La brunette finit par accepter l’inévitable. « Ce sera pas difficile. On les entendra tous ronfler comme des ogres une fois la dernière goutte de champagne servie. » Ils dormiraient tellement dur qu’Elmo aurait pu se rendre à la chambre d’invitée occupée par Bella en marchant comme un éléphant. Aucun soupçon ne serait éveillé cette nuit. Pour les autres nuits, là, ils s’arrangeraient. « Moi, tu me trouves too much ? » Demanda Elmo, surpris mais amusé. Puis, en finissant de faire visiter la demeure des Santavenere, l’italien parla de sa famille, de ses parents, de ce qui les avait conduits jusqu’ici. Et malgré l’abondance qui les entourait, Elmo n’avait jamais été à sa place, ici. « J’espère bien qu’on t’achète pas avec de l’argent … Ma note serait élevée. » Cette conversation dérapait. Le sérieux les regagna bien assez vite quand Bella lui demanda s’il n’était pas heureux, ici. Elmo haussa les épaules. « I just always felt like something was missing. » C’était peut-être toujours le cas, d’ailleurs. L’italien courait toujours après l’inconnu. Il cherchait sans savoir ce qu’il cherchait. Alors, au final, il tournait en rond. Un peu comme un chien qui court après sa queue. Elmo renversa la tête vers l’arrière en poussant un gémissement d’exaspération quand la brunette revint sur leur discussion d’un peu plus tôt, en parlant de son titre du meilleur frencheur. « J’t’assure encore une fois que y’avait rien de glamour à ces endroits-là. J’te réserve mieux, à toi. » Reprit-il en ramenant son visage en position normale pour sourire à Bella. Délaissant les trophées, la jeune femme se redirigea vers la chambre d’invité pour changer de vêtements. Elmo en profita pour déposer des baisers sur sa nuque. Leurs respirations changèrent. La température aussi. Un grondement de mécontentement s’échappa d’entre ses lèvres quand son cousin lui demanda ce qu’il était en train de foutre. « Ils l’ont trop, cette notion du temps, oui. » Soupira-t-il avant de laisser Bella terminer de s’habiller. « Stavano arrivando ! » S’exclama-t-il en tournant le visage vers le couloir. Ils redescendirent une fois Bella prête, retrouvant tout ce beau monde sur la terrasse. Deux flûtes de champagne les attendaient déjà, et Elmo en avala la moitié d’un trait.

Elle savait bien que le brun ne lui disait pas tout, qu'il lui cachait l'endroit où il emmenait ses conquêtes dans l'espoir d'obtenir bien plus qu'un sourire de leur part. C'est dans un rire qu'il finit par avouer. Je savais qu'il y avait un endroit!, s'exclama-t-elle, sans pour autant dénoter la question que son amant lui avait posée. C'est seulement par la suite qu'elle lui sourit en adressant son questionnement. Évidemment, qui ne rêve pas de visiter des parcs souillés dans l'un des plus beaux pays du monde ?, renchérit-elle. Mais de toute l'Italie, ce n'était ni les parcs pollués, ni les attraits touristiques populaires, ni les beaux paysages à couper le souffle qui l'intéressait, c'était l'homme qu'elle était venue rejoindre. Mais ce genre de choses, ça ne se disait pas tout haut. La dernière fois qu'elle avait laissé s'échapper une phrase qui sonnait comme une déclaration amoureuse, Elmo avait fait ce qui lui avait semblé un arrêt cardiaque. Depuis, Bella ne s'était pas laissé égarer, choisissant plutôt la subtilité comme façon de lui démontrer ses presque sentiments. C'était plus prudent. L'envie de lui était pourtant bien présente. Et l'envie de bien plus que son corps, aussi. C'était l'envie de tout son être qui l'enivrait. Des amants, Bella aurait pu en trouver bien d'autres à Bowen, elle n'en était pas en reste. Elmo et elle avaient en commun leur tableau de chasse jadis bien élaboré. Mais ce n'était pas une question de sexe. C'était bien plus que ça. Le manque d'Elmo lui avait fait parcourir des milliers de kilomètres dans le but de le retrouver. Je pense surtout que tu en serais incapable, le taquina-t-elle. J'ai presque envie de te mettre au défi de me résister, Santavenere, prononça-t-elle dans un murmure, presque frileuse à l'idée qu'un autre puisse partager leur échange. Des deux, elle ne pouvait dire qui aurait le plus de mal à résister à l'autre. Et bien que l'envie de jouer à ce jeu de séduction attisait l'imagination de la Costaricaine, pour ce soir, elle avait envie de retrouver la chaleur de ses bras, ayant la fantaisie de garder cette idée pour un autre soir. Le manque de sa peau, le manque de ses bras, le manque de leurs étreintes était bien trop grand pour lui permettre de lui résister. Et à ce jeu, elle perdait déjà, Bella, décrétant qu'elle le laisserait trouver le chemin vers son lit d'invité, dès que les Santavenere trouveraient le sommeil. Selon les dires d'Elmo, ce soir, il s'agissait d'une épreuve facilement réalisable, l'alcool qui coulait déjà dans le jardin de la famille leur servirait de somnifère, laissant le champ libre aux amants de se retrouver comme bon leur semblait, dans les bras l'un de l'autre, éteinte qui aurait le goût exotique de Sorrento. En ce qui à trait aux autres soirs, il valait mieux ne pas y penser maintenant. Avec leur subtilité aiguisée, à force de se retrouver en secret à Bowen, ils trouveraient bien le moyen de se voir, en secret, malgré la maison remplie de sa famille. À cette affirmation, Bella étouffa un nouveau rire. Le champagne, il n'aura pas cet effet sur toi ? C'était plutôt à elle qu'il fallait poser la question, l'alcool elle le tenait, oui, mais la fatigue d'une journée de vol aurait sans doute raison d'elle. Ce soir, c'était peut-être elle, finalement, qui ronflerait comme un ogre, avant même qu'Elmo puisse trouver le chemin vers ses bras. Elle le décrit ensuite son intensité, trait de caractère qu'il avait, selon elle, aussi acquis de ses parents. Elle hocha la tête, gloussant quelque peu à la réaction de l'italien, surpris d'un tel aveu. Un peu quand même! Elmo poursuivit la visite de la maison, terminant leur tour rapide des lieux dans la chambre de ce dernier, là où toute sa vie, tout son passé se cachait. Tout ce que Bella ignorait encore de lui. Ces souvenirs qui donnaient à Bella une toute nouvelle ouverture sur celui qui lui faisait tourner la tête. Échange d'abord typique de leur relation, deux âmes encore trop immatures pour les grandes conversations, Bella tenta de détendre l'atmosphère par une plaisanterie à laquelle le brun répliqua sans attendre. Toi, t'aurais un rabais quand même, fit-elle avant de retrouver son sérieux. Son bonheur, au fond, c'était tout ce qui importait. L'avait-il trouvé, à Bowen ? Il haussa les épaules, lasse. Bella afficha une moue désolée. Et la pièce manquante à ton bonheur, tu l'as trouvé ? demanda-t-elle, sans même supposer qu'elle pouvait faire partie de l'équation. Elmo avait du chemin à faire, un travail personnel à accomplir pour trouver la clé de son bonheur. Et bien qu'il était sur le bon chemin, la décision d'arrêter ses études en soins infirmiers qui ne le rendait pas heureux, au final, il lui restait encore beaucoup de travail. Mais si Sorrento ne pouvait lui offrir ce qui lui manquait, peut-être que Bowen le pouvait. Et, en bonus, il y avait trouvé Bella. C'est peut-être par peur d'apprendre que finalement Bowen n'était toujours pas la solution au morceau manquant du puzzle de sa vie que l'étudiante se tourna vers les trophées exposés dans la chambre, commentant leur provenance. Elmo, exaspéré par son interlocutrice, envoya sa tête vers l'arrière dans un long gémissement. Mieux ?, osa-t-elle demander lors qu'il décrétait qu'elle, elle méritait mieux que ces endroits où il avait emmené des filles qui ne comptaient pas à ses yeux. Cette réponse, elle était bien mieux que les présumés prix qu'il avait remportés pour ses talents de séducteur. Pour éviter de faire attendre plus les Santavenere qui, rappelons-le, avait accueilli Bella comme une invitée royale, la brune regagna la chambre qu'on lui avait attitrée, trouvant dans ses valises quelque chose d'assez habillé pour l'évènement organiser par la famille d'Elmo. Proximité qui leur était inévitable, à la vue de la chair de Bella, Elmo ne résista pas bien longtemps à peindre sur sa peau de doux baisers qui firent hérisser ses poils, la respiration de la jeune femme qui s'accélérait au même rythme que les baisers de son amant migraient sur son corps. Elle cherchait ses lèvres, eut le temps de poser un timide baiser sur le bout de ces dernières avant que l'on vienne éteindre la magie de ces douces retrouvailles. L'attente de leur retour s'était montrée trop longue, voilà que les Santavenere s'impatientaient. Elmo soupira, laissant la belle enfiler sa tenue, refermer la fermeture éclaire de sa robe et se munir des chaussures plates qu'il avait sélectionnées. Je compte sur tout pour reprendre là où on en était rendu, une fois que le champagne aura assez coulé, fit la brune avant de se laisser guider vers la jardin par son hôte où ledit champagne les attendait déjà. Qui dit champagne, dit toast. Tous se tournèrent vers les propriétaires de la maison.

La brise de fin de journée faisait valser les longues mèches brunes des cheveux de Bella.