(tw) choose your last words this is the last time 'cause you and i we were born to die ⤅ milo

choose your last words this is the last time
'cause you and i we were born to die

(TRIGGER WARNING)

Elle n'aurait jamais cru toucher à nouveau le fond ainsi. Pas de cette façon. Pourtant elle se retrouvait là, ce soir, maintenant. Plic. Plic. Comme si des semaines durant, sans doute des mois, cette décision inévitable s'était insinuée en elle comme un poison lent mais puissant, prenant possession d'elle, petit à petit, sans se faire remarquer. Invisible, silencieux, et surtout fatal. Plic. Plic. Une bombe à retardement. Elle avait toujours su qu'elle en était une. C'était pas la première fois qu'elle explosait. Comme un chat qui aurait neuf vies, sauf qu'elle n'en voulait même pas d'une. Plic. Plic. Elle avait laissé tout son temps à l'ecstasy de faire effet, le mélangeant à un fond de vodka, juste de quoi rester lucide, mais bien décidée. Elle avait perdu le compte des heures à passer comme ça, le regard vide, le visage fermé, mais surtout déterminé. Comme si elle faisait un dernier point, en prenant largement son temps, pour être certaine de ne rien oublier. Les effets de la drogue avaient même fini par se dissiper, ou c'était l'impression qu'elle avait eu. Encore une fois, elle avait perdu le fil du temps. Impossible de différencier les heures qui s'écoulaient, petits grains dans un sablier qu'elle voulait briser. Qu'elle allait briser. Qu'elle avait brisé. Plic. Plic. Elle s'était baladée sur les toits, comme un chat de goutière insaisissable qui se rit de tout, hautain, marchant tout au-dessus du monde. Inatteignable. S'était glissée dans les ruelles étroites et sombres, avait croisé quelques sans-abris. Avait grimpé quelques escaliers. Avait continué à marcher, sans un mot, sans un bruit. Son regard d'un bleu incomparable tranchant l'air devant elle sans le voir. Plic. Plic. Voilà, elle s'était arrêtée. Cet endroit était parfait. Un toit comme un autre, peut-être, mais elle sentait que c'était celui-là qu'elle voulait, et pas un autre. Elle s'était assise en tailleur, et était restée là, le regard dans le vague, survolant la ville éclairée dans la paix nocturne. Toujours sans aucune notion du temps. Elle avait longtemps joué avec la lame, entre ses doigts fins. Puis elle avait retiré ses bracelets, presque religieusement. Un par un. Aucune urgence dans ses gestes. Il fallait bien faire ça. Sans précipitation. La décision n'était pas celle d'un coup de tête. Elle avait grandi, mûri à l'intérieur de son esprit détraqué. Avec beaucoup de temps et de réflexion. Et finalement, elle avait fait ce pourquoi elle était venue ce soir. Quelques grimaces de douleur avaient traversé son visage. Plic. Plic. Quelques larmes avaient roulé, aussi. Elle les avait essuyées, calmement, sourcils froncés. Avait envoyé un message à Roxy, pour s'excuser. Répondu à Sacha, à qui elle n'avait pas donné de nouvelles depuis vingt-quatre heures après son dernier message. Et c'était bon comme ça. Elle ne souhaitait pas qu'on la retrouve. Elle n'avait nullement l'intention d'envoyer une longue explication, ou des adieux déchirants, en classant ses contacts par ordre d'importance. Non, elle voulait s'en aller, seule et en silence, discrètement, sans faire de vagues. Une feuille se posant à la surface de l'eau, avec quelques minuscules ondes à son actif, à peine perceptibles. Elle avait même attendu un certain temps avant d'appuyer sur envoyer. Un certain nombre de plic-plic. Désormais, elle n'entendait plus que ça. Ce son résonnait à ses oreilles. Elle avait fermé les yeux, les ouvrait parfois encore, pour découvrir un monde flou, déformé, qui ne fut bientôt plus que fait d'ombres. Le noir, qui la prenait dans ses bras doux et délicats. Et encore une infinité de temps plus tard, qu'elle ne pouvait définir, plus de plic-plic. Les bip-bip d'une machine, lointains, et les ombres doucement chassées par la lumière aveuglante d'un néon.

T'étais tranquillement à la maison, avec Ivy à faire n'importe quoi. Oui, c'était bien le propre d'un oncle d'apprendre à sa nièce de faire des bêtises. Beth allait rentrer sous peu, tu savais qu'elle ne serait pas longue. En attendant, tu t'amusais bien avec la petite. Puis tu reçu un appel de l'hôpital. Tu te demandais si c'était pour ton suivi de désintoxication. Depuis ta cure, on t'appelait une fois par mois pour savoir comment tu t'en sortais. Et ça te faisait du bien, parce que tu n'avais pas repris depuis ta sortie de l'hôpital, et ses entretiens téléphoniques te faisaient du bien. Alors tu décrochais, un grand sourire aux lèvres.

« Allo ?
- Monsieur Putkowski ?
- C'est bien moi.
- Vous êtes le contact d'urgence d'une jeune femme nommée Effy Shepperfield. Elle est arrivé ce matin, et...
- Et quoi ? Je... j'arrive »

Tu étais le contact d'urgence d'Effy ? Depuis quand ? Peu importe. Beth venait d'arriver, tu n'as eu le temps que de lui embrasser la joue et lui dire que tu allais revenir au plus vite. Tu attrapais ton skate et tu partais en toute vitesse vers l'hôpital. Qu'est-ce qu'elle avait bien pu faire ? Comment elle s'était retrouvé là bas ? Soi c'est l'hôpital qui t'appelait, c'est que c'était très mauvais signe. Alors tu te dépêchais pour avoir des réponses à toutes les questions qui se tramaient dans ta tête. Tu arrivais à l'hôpital en moins de 10 minutes. Arrivé à la réception, tu donnais le nom de la jeune britannique pour la trouver le plus rapidement possible. On te donnait le numéro de sa chambre. Tu t'empressais d'aller chercher la brune, arpentant les couloirs en courant. On te demandait de ralentir, de faire moins de bruit mais qu'importe. Tu arrivais enfin dans sa chambre. Elle était étendue là, sur ce lit d'hôpital, endormie. Elle était vivante, c'était le principal. Tu posais ton skate à côté de la porte et tu allais t'assoir près d'elle. « Bordel, Effy, qu'est-ce que t'as fais ? » demandas-tu dans le vent, parce que la jeune femme était endormie. Dans ton fauteuil près de son lit, tu te rapprochais de ce dernier et tu attrapais une de ses mains, attendant patiemment qu'elle se réveille.

L'image floue d'une chambre aux murs immaculés était apparue par intermittence, rythmée par les bip sonores de la machine qui lui était reliée. Les bras de Morphée l'avaient emportée à chaque fois avant qu'elle ne puisse se faire une idée trop précise de ce qui se déroulait, laissant planer un doute sur sa situation. Comme on se réveille d'un mauvais rêve, encore pâteux et pas bien ancré dans la réalité, Effy avait eu l'occasion de prendre note petit à petit de son environnement, avant d'enfin parvenir à une conclusion terrible : elle se retrouvait exactement au même endroit que lorsqu'elle avait dix-huit ans. Enfin, pas physiquement, étant donné qu'elle était désormais sur un autre continent. Mais elle était de retour à la case départ. On lui avait fait rater son coup, encore. Rien qu'en réalisant cela, des larmes lui étaient montées aux yeux. Alors qu'elle avait posé le regard sur ses bras emballés dans des bandages serrés. Elle était toujours là. C'était ce qu'elle se répétait en boucle dans sa tête, au désespoir, quand un médecin vint préciser l'état des choses. Des personnes de l'appartement d'en-dessous, qui étaient montées sur le toit fumer une cigarette, l'avaient retrouvée, inconsciente au sol. Elle avait eu le temps de perdre pas mal de sang. Pas suffisamment pour venir à bout de son existence inutile, cependant. Elle était actuellement tirée d'affaire, mais en observation, et il fallait laisser le temps à son corps de se remettre. L'anglaise était incapable de réfléchir clairement, l'esprit embrumé par les sédatifs et les calmants - pour la protéger, qu'on avait dit. La protéger de quoi ? Elle avait voulu le faire elle-même, se protéger, et protéger les autres, en libérant le monde de sa présence malsaine et dévastatrice. Ils l'en avaient empêché. Putain de merde. Elle était donc indestructible, avec tout ce qu'elle s'infligeait ? Comment est-ce que la vie pouvait décider de la laisser là, encore ? Pourquoi ces putains de gens n'avaient pas été sur un toit différent, n'étaient pas arrivés dix ou trente minutes plus tard ? Avant de pouvoir laisser la colère la submerger, les sédatifs l'avaient à nouveau emportée dans les eaux sombres d'un sommeil agité. Quand elle s'était à nouveau réveillée, clignant quelques fois des paupières, sourcils froncés et d'une humeur plus noire que les abysses, c'était pour affronter une nouvelle bataille. Milo était à côté d'elle.

Il ne la regardait pas, alors que le bleu de ses yeux était vrillé sur lui, tête penchée vers le bas. Sa main dans la sienne, caressant les bandes blanches qui recouvraient ses avant-bras. Une vague d'émotions la submergea, la renversa carrément. Cela faisait des mois qu'elle n'avait plus vu son meilleur ami. Qu'ils n'avaient pas été aussi proches l'un de l'autre, qu'ils s'étaient touchés. Qu'est-ce qu'il foutait là, bordel, mais qu'est-ce qu'il foutait là. Elle n'avait pas envie de ce qui allait suivre, elle voulait le fuir aussi loin que possible. Elle n'avait plus l'énergie de se battre, et elle ne voulait pas qu'il essaye de la raisonner, de l'apaiser, de la prendre par la main ou peu importe ce qu'il essaierait de faire pour la convaincre qu'elle devait rester en vie. Et dans le même temps, sa présence lui crevait le cœur. Elle avait évité de penser à lui. C'était bien l'une des seules choses qui aurait pu la convaincre de ne pas supprimer son existence. La seule chose qui aurait pu la tirer vers l'arrière. Voilà qu'il en avait tous les pouvoirs, qu'il pouvait se rappeler à elle sans qu'elle ne puisse lutter, cette fois. Il était la seule chose qui pouvait la maintenir en vie. Mais elle ne voulait pas qu'il le fasse. Elle l'aurait supplié à genoux pour qu'il ne le fasse pas. « Get out. » Sa voix était faible, mais son ton n'en avait pas perdu un gramme de détermination. Détachée, froide. Va-t-en, tu peux pas me sauver. Elle ne voulait pas de lui ici. Elle voulait qu'il lâche prise, qu'il la laisse partir. Sauf que c'était trop tard pour ça. Elle était toujours là. Ici et maintenant. Et lui aussi. Et elle n'avait d'autre choix que d'accepter, sauf qu'elle ne voulait pas. Elle aurait voulu le rejeter de toutes ses forces, pour ne pas lui infliger ça, pour ne pas qu'il lui inflige ça non plus. Et en même temps... En même temps elle avait envie de se laisser aller à ses bras rassurants, le retrouver après tant de temps séparé lui faisait tellement de bien que ça lui faisait mal. Elle crevait de mal, bien plus que ce que les coupures dans sa peau pouvaient lui faire mal.

Lors de ta convalescence, tu avais perdu Effy. Perdue ta meilleure amie, celle qui te comprenait et que tu pensais voir près de toi jusqu'à la fin de tes jours. Cette fille t'avait tellement apporté lorsque tu étais arrivé à Bowen, sans trop savoir comment, c'était surement ce qu'on appelait le coud de foudre amical. Mais elle n'avait pas compris, ta vie avait failli finir ce jour là, ce soir du bonfire. Et tu avais décidé de couper court à toutes tes addictions nocives. Mais la britannique n'avait pas été de cet avis là. Et t'avais perdue une amie, quelqu'un que tu portais énormément dans ton coeur. T'avais tourné dans la chambre pendant quelques temps avant de te poser sur le feuil près d'elle. La brune avait attenté à sa vie, tu balayais de tes doigts et d'un geste doux ces bandages qui couvraient ses poignets. Une larme roula sur ta joue, de tristesse. Comment tu aurais fais pour vivre sans elle ? Même si elle ne te parlait plus, tu pensais toujours à elle, sans cesse. Et tu ne cesserait de le faire. Elle s'était alors réveillé, tu avais balayé ta larme d'un coup de main hâtif. Mais c'est alors qu'elle te demanda de partir. « C'est de ta faute si j'suis là » dis-tu en fronçant les sourcils. Tu étais son contact en cas d'urgence, l'avait-elle déjà oublié ? Toi-même, tu avais été surpris de ça, tu ne pensais pas. Parce que la communication entre vous était très minime voir même inexistante maintenant. « Et j'partirais pas tant qu'on aura pas eu une discussion, Shepperfield » dis-tu d'un coup sec. Elle ne pourrait pas s'échapper vu qu'elle était dans un lit d'hôpital. Tu savais que cette discussion ne serait pas forcément agréable ni de toute gaieté mais il était enfin temps que vous vous parliez. « Pourquoi t'as fais ça ? » demandas-tu simplement. Ta question demandait deux réponses : pourquoi elle avait attenté à sa vie, encore une fois et surtout pourquoi t'étais son contact d'urgence. Ça, tu trouvais ça plus qu'étrange.

Effy fronça les sourcils, le regard fixé devant elle, dans le vide. Ah oui, c'était vrai, c'était lui sa personne à contacter en cas d'urgence. Ce qui expliquait la raison de sa présence ici. Elle l'avait décidé il y a longtemps, plutôt que de mettre un père ou un mère inutile qui résidait à l'autre bout du monde. Elle avait mis Milo, parce qu'il était sa personne. Elle avait oublié, qu'elle avait fait ça, sans même lui dire. Mais tout à coup, ça lui rappelait pourquoi le garçon était là même si elle ne voulait pas de lui ici. Parce qu'il était sa personne. Depuis toujours. Ce constat la percuta comme un train à pleine vitesse. Avec les mois, les pensées vagabondes, l'alcool et la dépression, elle en avait oublié qui il était. Qui ils étaient, tous les deux. Elle avait tenté de l'effacer de son existence comme s'il n'était rien, comme si ça n'avait pas d'importance, comme si elle avait réellement pensé un jour qu'elle pourrait se passer de lui. Il n'en était rien. Il était sa personne. Et il était là. Il avait tous les droits d'être là. La colère bouillonnait toujours dans les veines de la brunette, pourtant, elle la contenait. Parce que cette colère, cette déception et ce désespoir, ils étaient dirigés contre elle-même. Ça lui arrachait la gorge de le dire, mais c'était à elle qu'elle en voulait et à personne d'autre. Pas à la terre entière, comme elle avait voulu s'en convaincre, et encore moins à Milo. Effy braqua enfin son regard sur lui. Elle aurait voulu qu'il soit noir, ce regard, que ça suffise à dissuader son ancien ami d'emprunter cette voix. Mais d'un coup, elle avait baissé les armes, acceptant son affirmation sans protester, comme s'il s'était tout à coup retrouvé conféré d'une certaine autorité sur elle. Elle se sentait comme une petite fille perdue, qui a déconné, et qui accepte les conséquences. Elle aurait voulu hurler, tout casser, tout balancer à la figure de tout le monde. Le ton calme et sans réplique du musicien l'en dissuadait. Elle l'écoutait. Elle hocha doucement la tête pour marquer son accord, de mauvaise grâce, affrontant le regard du jeune homme sans ciller. Ils ne s'étaient quasiment plus parlés, depuis ce qui lui donnait l'impression d'être des millénaires. Aujourd'hui, elle l'écouterait. Sans sarcasme et sans barrières. « Parce que j'ai rien à faire ici. » souffla-t-elle sur un ton qui laissait entrevoir la fatalité de cette réponse. Elle ne voulait pas dire par là ici à l'hôpital, Milo l'avait très bien compris. Elle n'avait tout simplement rien à faire dans ce monde. Elle errait sans but dans la vie, sans joie et sans aucun sens. Elle n'appartenait pas à ce monde, elle en avait toujours été convaincue et ce n'était pas la première fois qu'elle essayait de remédier à cette erreur de calcul de la part d'une quelconque puissance divine. « J'ai rien à faire auprès de toi. » ajouta-t-elle, baissant cette fois ses iris azur qui avaient perdu de leur aplomb. Le déchirement dans sa voix était clairement audible. Parce qu'elle aurait voulu qu'il reste auprès d'elle, pour l'éternité, elle aurait voulu qu'il soit toujours là, qu'il ne l'abandonne jamais. Mais elle ne pouvait pas exiger ça de lui, elle s'en rendait compte maintenant. C'était bien trop égoïste. Il ne méritait pas de devoir porter un poids mort comme elle jusqu'à la fin de ses jours, peu importe combien elle avait besoin de lui.

T'étais un peu démunie par la situation, par le moment que vous partagiez enfin. Pendant des mois, t'avais rêvé de te retrouver dans la même pièce qu'elle mais ce n'était pas ainsi que tu voulais la retrouver. Pas dans cette chambre d'hôpital, comme lorsque tu étais tombé dans les vapes sur scène. Ça se reproduisait, encore une fois, sans que tu ne puisses faire quoi que ce soit. Tu aurais préféré la retrouver au Hendrix ou dans un diner lorsque tu t'enfilais des tonnes de frites et qu'elle te regardait en se moquant de toi. Non. Le destin avait fait que cette chambre blanche était votre point de rendez-vous, à chaque fois. Tu ne la laisserais pas s'échapper aussi facilement, tu ne partirais pas sans avoir une bonne discussion avec elle, sans savoir pourquoi elle était là. Alors tu lui avais demandé pourquoi. Pourquoi elle s'était infligé ça ? Pourquoi elle voulait à ce point mettre un terme à sa vie ? Pourquoi elle voulait quitter ce monde sans même te dire au revoir ? Tu te levais de ton siège, enlevant tes mains qui étaient sur les siennes et tu faisais les cent pas autour de son lit, ménageant ta peine qui te montait au fur et à mesure. « Mais tu dis n'importe quoi ! » dis-tu en levant les bras au ciel, d'énervement. C'était ça le sentiment en fait. T'étais énervé de son comportement, parce que sans elle, ta vie n'avait pas de sens. « Eff, t'as tellement de chose à faire et à découvrir avant d'en finir avec ta vie. Et si t'as des problèmes, tu peux m'en parler. J'ai essayé de te parler, j'ai voulu te faire aller mieux » dis-tu dans un souffle, soulé de ne pas te faire finalement comprendre. « J'ai fais de mon mieux » dis-tu dans un murmure. Puis, la révélation la plus importante venait d'être faite. Elle n'avait plus rien à faire près de toi. Non, non, non. C'était impossible de l'entendre dire ça. Tu ne le cautionnais pas. Tu te rapprochais de son lit finalement, après avoir marché des kilomètres autour de ce dernier. Elle était démunie, et tu ne la laisserais pas comme ça. Tu prenais ses mains dans les tiennes, fermement et tu embrassais son front. « J'ai besoin de toi dans ma vie, Effy. Je refuse de t'entendre dire ça » lui dis-tu avec un sourire bienveillant. La moindre des choses était de ne pas la brusquer, pas dans cet état là. Mais la vérité était de mise. Ce soir, tu voulais lui faire comprendre que même sans la drogue, même sans vos sorties remplies d'herbes et de cachets, que tu avais besoin d'elle éperdument.

hj:

Lèvres pincées, la jolie brune regarda Milo s'emporter, sans broncher. Elle savait bien que ce qu'elle disait faisait peu de sens pour la plupart des gens. Pour elle, c'était limpide. Le garçon arpentait fébrilement la pièce, l'air contrarié, et elle le suivait silencieusement du regard, les mains posées devant elle. Ce n'était pas n'importe quoi, mais elle n'aurait pas su lui expliquer comment. Ils avaient beau connaître tout l'un de l'autre, Effy avait parfois peur qu'il découvre ses plus profondes parts de noirceur, ses pensées les plus sombres. Il n'aurait pas compris. Ou tout du moins, elle avait peur qu'il ne comprenne pas. Que ça le fasse fuir. Parce qu'il aurait eu raison, de fuir. L'anglaise se mordit la lèvre, la gorge nouée, quand il lui souffla qu'il avait fait de son mieux. Elle n'allait pas argumenter avec lui à ce sujet. Elle ne le blâmait plus. Comment lui expliquer que rien n'était de sa faute, dans cette histoire ? Que c'était elle, la détraquée de service, et qu'il pouvait déplacer des montagnes et ouvrir des océans, ça ne serait jamais assez, parce qu'il ne pouvait pas la réparer. Personne ne le pouvait. Et plus d'un avait tourné les talons, découragé. Si elle avait tenté de les blâmer pour cette trahison, ce lâche abandon, comme elle avait tenté de le faire avec Milo, dans le fond elle savait qu'ils n'y étaient pour rien et qu'ils avaient eu raison. Pourtant, lui, il était toujours là, en tout cas pour le moment. Il tenait la longueur, bien plus que ce que la brunette n'aurait pu espérer. Mais ça n'enlèverait jamais ce doute aux tréfonds de son âme, ce doute qui s'insinuait perfidement dans ses pensées, en lui soufflant d'une petite voix malveillante que ce n'était pas parce qu'il était encore là maintenant, qu'il le serait toujours. Que toute sa vie elle passerait son temps à se demander si un jour il allait laisser tomber, parce qu'il aurait eu raison de le faire. Les mains dans celles du guitariste, ses lèvres posées sur son front, Effy ferma les yeux, laissant une larme cristalline rouler le long de sa joue. Les mots la traversaient comme un million de morceaux de verre brisé, comme des lames fleuries qui lui faisaient autant de mal que de bien. « Mais est-ce que tu voudras toujours de moi si je ne vais jamais mieux ? » Sa voix tremblante était aussi déchirante qu'un miaulement de chaton abandonné, et elle avait oublié son combat contre les larmes, laissant ses barrières s'effondrer, enfin. Son regard couleur océan s'était plongé dans celui du garçon, presque suppliant. Au désespoir. Parce que là était toute la question. Milo voulait l'aider, la réparer. Mais ce n'était pas possible. Elle n'irait jamais mieux, elle était née comme ça. Même si des choses pouvaient changer, il resterait toujours des ombres impossibles à éclairer dans son âme, des démons impossibles à chasser dans sa tête. Peu importe ce qu'elle ferait. Peu importe qui se brûlerait à essayer de l'aider. Elle n'était qu'une bombe à retardement et mieux valait s'en tenir loin quand elle exploserait à nouveau. Jamais elle n'aurait voulu blesser Milo avec ses morceaux brisés.

Ca montait en toi beaucoup trop rapidement, cet énervement. Effy s'imaginait une vie sans toi mais toi, tu ne pouvais pas t'imaginer une vie sans elle. Oh ça non, jamais. Et tu étais énervé au possible qu'elle pense ça, ça te rendait totalement fou. Pendant quelques minutes, tu avais fais le tour de son lit, pensant à chaque mot dix fois avant de les dire. T'en avais des choses à lui dire, mais tu ne savais pas comment les formuler. Comme si tu étais bloqué. Elle semblait si désarmée et si seule, et tu ne voulais pas la laisser ainsi. Alors tu t'étais rapproché d'elle, un mince sourire aux lèvres, embrassant son front comme si c'était la dernière fois que tu le faisais. Tu lui expliquas alors que c'était pas possible d'imaginer une vie sans elle. « Mais tu peux aller mieux, Effy » dis-tu en murmurant ses mots alors que tu étais très près de son visage. Tu voulais qu'elle aille mieux et tu pouvais l'aider à aller mieux, c'est ce que tu voulais le plus au monde. Tu souris, caressant ses mains avec les tiennes. « Et je voudrais toujours de toi, quoi qu'il arrive » dis-tu en prenant une mèche de ses cheveux pour la mettre derrière son oreille. « Laisse moi t'aider à aller mieux » finis-tu par dire en baissant les yeux. Effy et toi c'était une affaire qui marchait si bien. Aveuglé par la drogue dans le passé, maintenant tu savais qu'elle était vitale dans ta vie. Sans elle, c'était un peu comme si tu manquais d'air. Et pendant tous ces mois sans elle, tu avais eu du mal à respirer. Tu ne la laisserais pas filer si facilement, sans faire quelque chose pour elle, sans l'aider à régler ses problèmes. « Pourquoi tu m'as rejeté ? » demandas-tu dans un souffle, désespéré. Tu sais très bien que la drogue était un facteur important, mais sans ça, vous étiez des grands amis, voir même plus que des amis. Et tu pensais qu'Effy était la seule à te comprendre.

hj:

Le regard de Milo était un gouffre de douceur dans lequel elle aurait aimé se perdre, se lover pour l'éternité. Il valait tellement mieux qu'elle. Tellement plus qu'elle. Il avait réussi à s'en sortir, seul et comme un grand, alors qu'elle l'avait lâchement laissé derrière elle, trop aveuglée par la douleur de son égoïsme à elle. Elle était prête à l'avouer désormais, que c'était elle qui avait merdé, qui l'avait laissé tomber. Même si elle avait ses raisons, c'était un coup bas qu'elle lui avait fait, elle qui blâmait la terre entière de l'abandonner comme une merde, elle était la première à virer les gens de sa vie, sans un regard en arrière. Parce qu'elle avait peur, Effy. Elle avait toujours peur. Cette peur qui lui empoisonnait l'esprit, aveuglant sa lucidité. L'anglaise secoua frénétiquement la tête aux paroles de Milo. Il avait tellement d'espoir pour elle, mais en avait-il assez pour deux ? Non, il se brûlerait. Elle ne voulait pas ça pour lui, elle ne voulait pas qu'il consacre son énergie à les porter tous les deux. Une nouvelle larme roula sur sa joue pâle quand il lui affirma qu'il voudrait toujours d'elle. Elle aurait aimé y croire, sincèrement, et si elle s'en laissait le droit rien qu'une seconde, ça lui faisait l'effet d'une bombe libératrice explosant à l'intérieur de son cœur. Le contact de ses doigts contre sa peau la fit frissonner, alors que sa douleur s'était maintenant transformée en légers sanglots, elle qui ne les autorisait jamais à sortir. « Ah oui ? Tu voudras toujours de moi si je continue à prendre de la drogue, à me barricader dans mon monde et à me fermer à toi ? Tu voudras toujours de moi si je continue à vendre mon corps parce que ça m'fait autant de mal que de putain de bien ? Putain Milo, tu m'aimeras toujours alors que tu sais très bien que tout c'que j'fais c'est t'entraîner vers le bas, encore et encore, et que j'suis qu'un putain de poids mort qui va finir par te noyer ?! » s'emporta-t-elle à son tour, sa voix montant dans les aigus avant de se briser douloureusement, autant de rage que de détresse. Elle haletait, lâcha le regard du brun quand il lui demanda pourquoi elle l'avait rejeté. Si seulement il savait à quel point ça l'avait torturée, foutue à terre, totalement brisée, de faire ça. Ça lui tordait les entrailles. Mais c'était pour lui qu'elle le faisait. Tant pis si ça lui coûtait sa dernière raison de rester sur terre. « Parce que je veux pas t'abîmer, Milo. Je l'ai déjà trop fait. T'es beau et j'me supporte pas de t'infliger tout ça, tout ce que je suis. Parce que tu vaux mieux que moi et que tu devrais pas perdre ton temps à essayer de sauver quelqu'un qui veut pas l'être. » Cette fois, elle sanglotait, les mains tremblantes, déployant un effort monumental pour articuler, pour sortir tout ce qu'elle aurait dû lui dire depuis longtemps, ce qu'elle avait été incapable de faire jusqu'alors. Trop effrayée, trop perdue, trop fière et renfermée que pour l'avouer, même à elle-même. « Parce que je t'aime tellement que j'suis prête à te faire partir loin de moi, même si ça me tue. » Elle avait relevé ses iris azur vers lui, les plantant dans les siens, aussi déterminée que dévastée. Peu avaient conscience de l'altruisme de la jeune femme, parce qu'elle le cachait bien, tout au fond d'elle, préférant opérer dans l'ombre et enfiler le manteau de la salope sans cœur. Elle préférait mille fois protéger les gens qu'elle aimait plutôt que de leur montrer à quel point elle avait besoin d'eux. Elle aurait écrasé son cœur mille fois au sol plutôt que de laisser Milo en prendre soin. Parce qu'il était la seule personne au monde qu'elle désirait protéger par-dessus tout.

Tu ne savais pas comment lui faire comprendre que sans elle, tu ne pouvais pas vivre ta vie correctement. Effy était ton rayon de soleil, celle qui avait apporté du peps dans ta vie et qui avait réussit à te faire sortir de ta routine quotidienne. Même si vous étiez plus des enfants de la nuit. Tu savais qu'en arrêtant la drogue, tu terminerais une amitié qui représentait énormément pour toi. Mais tu avais essayé de rester dans sa vie, de rester près d'elle... en vain... Tu sentais qu'elle avait des choses à dire, des choses à te faire comprendre et elle ne tarda pas à le faire. Tu avais les yeux baissés vers le sol, te séparant de ses mains que tu trouvais réconfortante sur le coup. « Mais putin Effy, c'est pas une vie de faire ça ! J'ai toujours été là quoi qu'il arrive. T'es la personne que j'aime le plus au monde alors quoi que tu fasses, quoi que tu décides, oui, je serais toujours là. Tu comprends pas, j'ai l'impression, mais je serais toujours là ! Et je suis prêt à t'aider si tu veux tout arrêter, je suis prêt à tout » dis-tu à ton tour sur un ton un peu plus soutenu. Voilà, tu l'avais dis, tu lui avais fais comprendre. Enfin, tu avais du moins essayé de lui faire comprendre. Mais peut-être qu'elle ne comprendrait pas pourquoi tu étais dans tous tes états. Lorsqu'elle s'accusa elle-même de t'avoir fait tombé dans ses noirceurs tu secouais la tête négativement. « Ne dis pas ça, j'étais déjà abimé avant de te rencontrer. J'étais déjà mal en point quand toi et moi on a commencé à se droguer ensemble. Alors ne dis pas que c'est ta faute parce que c'est totalement faux » dis-tu dans un souffle avant de reprendre. « Pourquoi t'as pas envie d'être sauvé ? Ca t'apporte quoi de finir dans des états comme ça ? Je veux pas te perdre, j'ai trop peur de perdre et je refuserais que tu meurs à cause de ces putains de conneries » terminas-tu en la pointant du doigt comme pour l'accuser de te rendre malheureux. C'était maladroit de faire ça, mais tu le faisais inconsciemment tellement tu étais énervé que la britannique ne comprenne pas ce que tu essayais de lui dire. Tu ne mâchais plus tes mots, tu en avais assez fait pour aujourd'hui. « Mais tu comprends vraiment pas ? Si tu meurs, Effy, je meurs c'est aussi simple que ça » avouas-tu en baissant la voix pour une fois. Tu en étais convaincu, de ce que tu avançais. Et tu savais très bien que sans Effy, ta vie n'avait plus aucun sens. Lorsque vous étiez en froid, c'était déjà difficile mais alors là, ça serait encore pire.

C'était pas une vie. Il avait raison. Sauf que c'était exactement ça, l'existence d'Effy : pas une vie. Tout ce qu'elle faisait c'était tout foutre en l'air, y compris elle-même, alors autant y aller à fond. Parce qu'elle était pas capable de tenir, elle ne faisait que survivre, elle n'avait rien à quoi se raccrocher. Et elle ne voulait pas s'accrocher à quelque chose, pour la simple et bonne raison qu'elle ferait sombrer cette chose avec elle, comme un condamné à la noyade ficelé à une ancre. Les mots de Milo étaient comme des flèches dans son cœur, trempées dans un dans des illusions empoisonnées. T'es la personne que j'aime le plus au monde. Elle tressaillit, tremblant presque. Il lui promettait d'être toujours là, quoi qu'elle décide. Et elle, elle avait si peur de le croire, si peur de lui faire confiance, si peur d'ouvrir son cœur à nouveau, pour qu'il termine par se briser au sol, éclatant en un millier de morceaux tranchants. C'était tellement plus facile de se convaincre qu'elle ne voulait pas de lui, de le rejeter, de se barricader à l'intérieur de sa bulle de démons et de repousser tout ce qui pourrait lui faire du bien. Elle avait tellement d'amour à donner, dans le fond. Mais l'idée de laisser cet amour sortir, de montrer ses cartes, la terrorisait totalement. « Et si je ne veux pas arrêter ? Si je n'y arrive pas ? » souffla-t-elle après avoir laissé le garçon s'énerver à son tour. On pouvait lire toute son angoisse dans la magie de ses iris océan, ses peurs les plus profondes. La peur que Milo la rejette, si pas aujourd'hui, un jour. Elle rejetait le gens pour ne pas leur laisser l'occasion de lui faire la même chose. C'était sa façon de se protéger, aussi cruelle et froide soit-elle. Mais retrouver enfin le brun devant elle, bien présent, entendre tous les mots qui sortaient de sa bouche, suffisait à la faire hésiter. À lui faire baisser sa garde, tout doucement, comme un chat errant qui se méfie d'un humain mais qui est curieux de lui laisser une chance. Elle avait peur de saisir la main qu'il lui tendait. Peur de se brûler, et peur de le brûler, lui. Le musicien protesta en affirmant que c'était pas sa faute à elle, s'il avait sombré. Il n'avait peut-être pas tort, mais elle n'avait rien arrangé. Elle ne serait jamais celle qui sait réparer les gens, parce qu'elle était bien trop bancale pour ça. La jolie brune baissa les yeux vers ses mains, l'échine courbée, quand il lui demanda ce que ça lui apportait. Comment lui expliquer ? L'autodestruction était sa seule source de bien-être. Et elle n'avait pas le courage de s'autoriser à reprendre espoir. Elle n'avait pas le courage de se laisser aider, parce qu'elle avait trop peur de ce qui pourrait arriver. Et encore une fois les mots de son ami la touchèrent en plein cœur. La tête lui tournait, sans savoir si c'était sous le coup de l'émotion ou à cause des calmants qu'on lui avait administré. Sans doute les deux. « Parce que tout ce à quoi j'suis bonne, c'est détruire tout ce que j'touche. » souffla l'anglaise dans un murmure, le regard perdu dans le vide, fixé sur ses mains, avant de le relever doucement vers Milo, le coin de ses yeux encore humide. Voilà pourquoi elle ne voulait pas qu'il s'évertue à la sauver. Voilà pourquoi elle ne voulait pas s'accrocher à lui comme à une bouée de sauvetage. Parce qu'elle allait le noyer. Le détruire. Jamais elle ne se permettrait ça. Même si elle rêvait de saisir la main qu'il lui tendait, même si elle avait envie de croire qu'il serait la personne qui la ferait tenir, parce que lui seul en était capable. Lui seul constituait une raison suffisante pour qu'elle s'accroche à la vie. La réponse du jeune homme lui coupa le souffle, et elle garda les yeux plongés dans les siens sans savoir quoi répondre. Non, elle ne comprenait vraiment pas. Elle avait peur de comprendre. Peur de briser la carapace en béton armé derrière laquelle elle cachait sa sensibilité et sa vulnérabilité. « Je veux pas que tu meures. Je veux pas que tu t'en ailles, je veux pas que tu disparaisses. Ça m'angoisse à un point que t'imagines même pas. » Mais si tu restes avec moi, c'est ce qui va arriver. Cette fois elle avait gardé cette réflexion pour elle. Le souffle court, elle avait cherché à nouveau ses mains, s'y accrochant comme si elle avait peur que sans ça, il ne disparaisse effectivement, comme un mirage. Elle avait besoin de lui comme elle avait besoin d'air pour respirer. Mais si elle se laissait aller, si elle lui disait la vérité qu'elle cachait au fond d'elle depuis bien longtemps, elle redoutait les conséquences.

Tu n'arrivais plus à trouver les mots pour faire comprendre à Effy ce qu'elle représentait pour toi, ce que ta vie représenterait sans elle. Au fond de ton coeur, même tes sentiments étaient tourmentés et partagés, tu ne savais même pas quoi penser. Tu étais assis sur ton fauteuil près du lit de la jeune femme et tu t'enfonçais dans ce dernier comme pour réfléchir à ce que tu allais dire par la suite. « Pourquoi tu veux pas arrêter ? C'est ça que je comprends pas » demandas-tu en levant les yeux vers elle, toujours enfoncé dans ton fauteuil cherchant des réponses à tes questions. « Et si tu as ne serait-ce qu'un peu l'envie de guérir, alors tu y arrivera, et je t'aiderai » dis-tu en te rasseyant correctement posant tes coudes sur le lit de la britannique. Tu lui donnais un moyen d'aller mieux, tu lui proposais même de faire partir de ce moyen. Tu étais aussi impliqué parce que tu savais ce que ça faisait d'embrasser ses démons et de leur dire adieu. De ton côté, avant ta cure, c'est Elmo qui t'fait fait prendre conscience que ça y est, il était temps de faire la part des choses et d'arrêter de se faire du mal. C'est ce que tu voulais faire maintenant, lui prouver qu'elle pouvait aller mieux et que tu ferai tout ton possible pour. Tu reprenais le chemin vers ses mains, serrant les siennes dans les tiennes. Tu étais désemparé face à la situation, te revoyant sur ce lit d'hôpital dans la détresse la plus totale et perdu dans tes pensées. « C'est faux, Eff, t'es pas bonne qu'à ça. Tu as toujours réussis à me faire aller mieux, tu as toujours été une bonne amie quand j'allais pas bien. Alors arrête de penser que tu détruis toutes les relations que tu entreprends, tu m'as pas détruit et tu me tueras pas » dis-tu en serrant ses mains dans les tiennes. Tu ne savais pas quel langage tu devais prendre avec elle, tu ne savais plus comment parler et formuler tes phrases. Tes yeux se perdaient dans ses iris bleues azur comme si tu étais hypnotisé par ses derniers. Effy avait toujours eu le don de t'hypnotiser non seulement avec la drogue, mais surtout avec ses yeux. « Alors si tu veux pas que je m'en aille, si tu veux pas que je disparaisse, alors restes en vie et guéris. Ou du moins essaye. Effy, je t'aime et j'me verrais pas passer une vie sans toi maintenant alors tu peux pas me faire le coup d'arrêter de vivre » avouas-tu à la britannique toujours le regard plongé dans le sien. Tu essayais comme tu pouvais de lui faire comprendre. « J'ai besoin toi » dis-tu en murmurant tes mots.

Il n'aurait pas pu comprendre, rare étaient ceux qui en avaient le pouvoir. Généralement, des gens aussi toxiques qu'elle. Et au final, même elle n'était plus sûre de savoir pourquoi elle s'infligeait tout ça. Parce que ça lui faisait du bien, tout simplement. Parce que sa vie se résumait à se réveiller, survivre, et dormir. Pour recommencer le lendemain. L'idée de laisser la drogue et autres tendances autodestructrices derrière elle la terrifiait, elle avait le sentiment que c'était indispensable à sa survie dans ce monde sombre et dénué de sens. « C'est tout ce que j'ai. » souffla-t-elle d'une voix faible, comme si même elle n'y croyait qu'à moitié. Effy savait ce qu'il allait lui répondre, qu'elle l'avait lui. Sauf que la belle anglaise n'était pas certaine que ce soit suffisant, mais elle se refusait à le dire. Elle avait peur que ce soit vrai, mais elle était encore plus effrayée par le fait que cela puisse être faux. Tout comme elle n'était pas sûre d'arriver à aller mieux, même avec l'aide de Milo. Et même si elle y parvenait, et puis quoi ? Pour quoi faire ? C'était quoi, la suite ? C'était quoi, d'être heureux ? Les vaches sont heureuses et elles finissent en steak tartare. « Tu sais pas dans quoi tu t'engages. » répondit-elle à mi-voix, même si une once d'hésitation venait emmêler ses pensées. Comment pouvait-il être certain qu'il tiendrait le coup à ses côtés ? Ce serait difficile, voir impossible, elle allait tomber, chuter encore et encore, retomber dans ses travers, se laisser submerger par ses angoisses. Un marathon dans un champ de ronces, que personne n'aurait eu envie d'entreprendre. Effy secoua la tête négativement devant les affirmations du brun, refusant de les entendre. Elle n'était pas une bonne amie, elle n'était pas une bonne relation dans la vie de qui que ce soit. Elle avait peur. Peur d'elle-même. De ce qu'elle pourrait lui faire. Peu importe ce qu'il en disait. Il n'arriverait pas à la convaincre. Son regard plongé dans celui de Milo, ses traits marqués par la douleur, elle peinait à accepter ses paroles. Il lui demandait l'impossible, et elle voulait lui dire oui, elle voulait être une fille normalement constituée, saine et dénuée de tout comportement empoisonnée, elle voulait l'être pour lui. Mais elle n'était pas comme ça, et ne le serait probablement jamais. Elle aurait voulu être cette fille simple qui pouvait illuminer sa vie comme un rayon de soleil, mais ce n'était tout simplement pas qui elle était. Elle voulait essayer, pour lui, mais savait d'avance que ce serait un échec. « Moi aussi j'ai besoin de toi. » répondit-elle d'une petite voix, aussi sincère que brisée. « Mais c'est pas suffisant. » ajouta-t-elle dans un souffle à peine audible, une nouvelle larme caressant la peau de sa joue. Elle aurait voulu qu'il en soit autrement. Mais Milo ne lui appartenait pas, et ce n'était pas à lui de constituer sa seule raison de continuer à vivre.

Tu sentais que ce que tu disais ne suffisait pas, qu'elle n'en faisait qu'à sa tête. Tu n'avais pas les mots qu'il fallait pour l'aider, malheureusement. Et pourtant, tu donnais de ta personne et tu faisais de ton mieux. « C'est faux, tu m'as moi » dis-tu dans une voix brisée. Tu avais compris que tu n'arriverai pas à l'aider, et ça te brisait le coeur. Une larme roulait sur ta joue, que tu balayais d'un coup de main sec. Tu ne voulais pas qu'elle voit à quel point que tu étais blessé de ses paroles, ni que tu te sentais désemparé face à la situation. Ses mains dans les tiennes, tu faisais tout pour la rassurer mais les mots ne suffisaient pas et les gestes d'affection ne semblaient pas marcher non plus. Mais tu en avais marre de la voir sombrer dans cette pénombre que tu avais réussis à quitter il y a alors quelques mois. « Je sais dans quoi je m'engage, parce que j'ai surmonté cette épreuve moi aussi. Et j'serais là pour t'aider à la surmonter, si tu veux » répondis-tu dans une voix toujours aussi brisée. Tu avais l'impression de parler à un mur, d'être seul et que personne ne te comprenait. Elle ne voulait pas entendre ce que tu avais à dire et pourtant tu te donnais énormément de mal. Son regard dans le tien, tu y voyais pourtant la détresse qui se logeait dans ses yeux. Tu savais que c'était dur à entendre, dur à entreprendre mais qu'elle en était capable autant que toi tu l'avais été lors de ta cure. Mais si elle était buté, tu ne pouvais rien y faire. Mais tu te sentais désespéré, parce que tu te donnais du mal. Mais en vain... « C'est pas suffisant ? Tu veux dire que j'représente rien pour toi et que j'suis pas une bonne excuse pour aller mieux ? » demandas-tu un peu sur le coup d'énervement. Tu lâchais ses mains et tu te mettais à pleurer, silencieusement. T'avais l'impression de ne pas te sentir aimé ni d'être assez important pour elle qu'elle le disait. « J'fais de mon mieux, j'ai toujours fais de mon mieux même quand tu m'as rejeté, Effy. Je veux juste que t'aille bien, je veux juste être dans ta vie, je crois que tu comprends vraiment pas où je veux en venir » dis-tu en baissant les yeux au sol. Tu mettais les mains dans tes poches et tu te recroquevillais sur ton fauteuil, les pieds sur le fauteuil.

Elle continuait à tout faire de travers, irrémédiablement, comme si la vie avait décidé de la punir le jour de sa naissance, la condamnant à blesser les autres et à tout ravager sur son passage. La voix de Milo lui transperça le cœur comme une lame chauffée à blanc. Elle ne pouvait faire autrement que lui faire du mal, comme elle l'avait dit, et elle se détestait pour ça. Parce qu'elle l'aimait tellement qu'elle aurait préféré vivre malheureuse le reste de sa vie plutôt que de voir cette larme rouler sur sa joue par sa faute. L'air lui manquait, ses poumons étaient écrasés de chagrin et culpabilité, et elle garda le silence, le souffle court, incapable de faire comprendre au garçon tout ce qu'il représentait pour elle, l'attachement vital qui la liait à lui. Elle acquiesça lentement à ses paroles, terrorisée d'entrevoir la possibilité de laisser Milo l'aider, pétrifiée par la possibilité d'un espoir. Mais elle se faisait violence pour surmonter ces angoisses qui la tenaillaient, ainsi que son éternel pessimisme, parce que ces mots sortaient de la bouche de Milo. Elle essayait, pour lui. Et il avait raison, lui aussi avait réussi à tenir la tête hors de l'eau et à s'échapper des griffes des abysses sombres qui menaçaient de l'emporter. Il avait réussi, même si leurs situations n'étaient pas identiques, elle savait à quel point ça lui avait coûté, l'effort que ça lui avait demandé, même si elle n'avait pas été là pour lui. Aveuglée par sa peur et son égoïsme, incapable d'oublier ses mécanismes de défense. La réaction du musicien lui porta un nouveau coup, et elle sursauta presque quand il lâcha ses mains. Le voir ainsi, par sa faute, lui anéantissait le cœur, envoyant valser ses barrières du même coup. Elle se redressa d'un coup, aussi vive que son état le permettait, dégageant les draps fins pour tenter de sortir du lit, se précipitant pour réduire à nouveau la distance entre le garçon et elle, grimaçant en sentant l'aiguille plantée dans son bras tirer sur sa peau, mais l'ignorant totalement pour agripper de ses mains faibles les bras de Milo. « Non, non c'est pas ce que j'ai voulu dire ! » fit-elle d'une voix presque paniquée, cherchant son regard, cherchant frénétiquement des mots justes. Elle ouvrit la bouche pour tenter de s'expliquer, mais la porte de la chambre s'ouvrit à cet instant sur un médecin en blouse blanche. Il sembla mettre quelques secondes à saisir la situation, fronça les sourcils mais ne fit pas de commentaire, sans doute conscient qu'il débarquait au mauvais moment, mais fidèle à sa mission. "Mademoiselle Shepperfield, vos paramètres sont stables, mais une infirmière passera vous administrer un autre calmant. Vous restez en observation cette nuit, et nous aurons une petite discussion par la suite." L'anglaise fronça les sourcils, elle n'avait aucunement envie ni besoin d'un autre calmant, mais elle hocha cependant la tête. À ce stade, il pouvait bien lui dire ce qu'il voulait, elle n'aurait pu s'en préoccuper moins. Ce dont elle avait besoin maintenant, c'était Milo, c'était tout ce qui comptait à ses yeux. Il disparut ensuite et la jeune femme s'empressa de se tourner à nouveau vers le brun, après cette intervention inopportune. « Qu'est-ce que je comprends pas ? » demanda-t-elle doucement, baissant les armes. Elle n'avait plus la force de se battre avec lui, elle n'en avait pas envie non plus. Elle voulait juste qu'il la regarde, elle était prête à l'écouter, à faire de son mieux. Tout plutôt que de le perdre.