L'instant de danger ¤ Livio

La nuit s’était son domaine, c’est la période où il sentait lui-même. Ou il n’avait pas l’utiliser d’être un autre. D’être cette personne de bonne famille qu’on voulait qu’il soit, souriant et lisse. Qui ne pouvait pas penser par lui-même, car de toute façon, son jeune âge, et son inexpérience, étaient son tort. À vrai dire, à entendre toujours la même chanson, il avait pris lui-même son indépendance. Et après une absence d’un an, et son retour en ville. Il avait décidé de couper tous liens qui jugeaient nuisibles. Rarement chez lui, son monde, c’était la nuit, les sorties, quand comme ce soir, il ne parcourait pas l’asphalte, le bitume. Il traînait dans les bars, se mouvant sur la piste de danse, parier sans raison, l’alcool coulant dans ces veines, en proie à ces effets. Ce soir n’échappait pas à la règle. L’empressement d’une soirée en perceptive, désinhibition. Rien que d’entrer dans cette boite de nuit, de voir l’ambiance prometteuse qui s’y trouvait. Lui promettait pas mal de promesse. Il allait saluer quelques têtes qui reconnaissaient, la plupart des habituelles, leur point de rendez-vous. Qui dit connaissances, dit invitation à un verre, puis un autre. Ils se succédèrent, attendant les effets qui ne venaient pas. Plus tard peut-être… Pour l’instant, une compagnie féminine qui lui semblait pas connaître, et un peu trop proche, avenante, l’aguicher. Il n’était pas regardant, et c’était plutôt flatteur d’avoir de l’attention. L’ego quand tu nous tiens. Les conversations se succédèrent, les verres aussi, les danses collée/serrées par la même occasion. Cette perceptive de soirée, qui ne laissait peu de place à la suite. Proposition aguichante, dans le creux de l’oreille, qui faisait sourire Elio. Comme s’il sortait vainqueur d’un bras de fer. Il secoua la tête positive, avant de lui glissait la possibilité d’attendre deux secondes avant de partir. De quoi le laissait payer les verres au bar et de dire en revoir à deux ou trois personnes…

Après une journée de travail bien fournie, Livio avait décidé de s'octroyer une petite soirée détente. Aura passait sa soirée avec son frère jumeau. Il avait donc accepté l'invitation d'un pote pour un passage en boîte de nuit. La boîte de nuit, c'était son terrain préféré à Livio, celui où il libérait tous les excès qu'il contenait. Pourtant, ce soir-là, il se surprit à rester raisonnable face à l'alcool qui coulait habituellement à flots, il se surprit à apprécier rigoler avec son pote et ses amis, sans prise de tête. D'ordinaire, il buvait, draguait, séduisait jusqu'à quitter l'établissement en compagnie d'une femme qu'il aimera pour une nuit. Là, il n'y avait aucune envie de draguer, aucune envie de séduire, de plaire. Aura l'avait décidément métamorphosé. Ses yeux verts balayèrent l'établissement, s'amusant à regarder les plus jeunes qui cherchaient à dégoter quelques numéros précieux, s'amusant à regarder les tentatives de drague foireuse. Mais ce fut avec surprise que son regard s'arrêta sur cette déesse, sur cette femme élancée au regard ténébreux qu'il connaissait plutôt bien. Pour cause, il avait succombé à son charme, dès son arrivée à Bowen. Et il avait été vite refroidi quand, au petit matin, elle avait quitté les draps chauds du lit de Livio pour aller chercher ce qu'il se trouvait dans le porte-feuille de l'italien. Visiblement, ce soir, elle avait une nouvelle proie. Une proie que Livio retrouva au comptoir, prêt à payer les verres qu'il avait sûrement offert à sa belle. Tout sourire, Livio attendit que l'homme croise son regard, disant d'une voix forte pour couvrir le bruit de la musique : "On ne t'a jamais dit de faire attention au chant des sirènes ?" Voyant le regard surpris de l'homme, Livio montra la jeune femme d'un signe de la tête : "Elle est belle, pas vrai ? Mais, si j'étais toi, je la fuirai comme la peste."

Cette soirée aurait pu être mémorable. Sans laisser un petit goût inachevé à cette soirée. Elles finissaient la plupart du temps ainsi, ce goût amer. Et cette liberté qui brûlait les ailes. Celle-ci ou une autre, il n’y avait pas grande différence. Elles se ressemblaient toutes, il avait profiter des verres, de l’ambiance et tous qu’on pouvait lui offrir. Personne ne l’attendait chez lui, depuis bien longtemps. Partageant le lit de belles inconnues, sans demander son reste. Pas d’attache, cela lui avait semblé plus adapter après ces échecs personnels. Cela le rend peut-être aveugle. Que risquait-il ? Dans son esprit, rien. Un verre ou deux, une nuit avec la promesse de draps froissés… À cette idée, il avait du mal à cacher son enthousiasme. C’était toujours valorisant, de sentir qu’on plaît. Lui le premier, se laissait entraîné dans cette connerie. Le son d’une voix qui le fit redescendre sur terre, sa joie emportait dans une certaine incompréhension. Le chant des sirènes ? Fixant cet homme, pas plus âgé que lui. « Celles qui poussent des cris de complaintes que les marins interprètent comme un chant. Envoûter, ils sont poussés aux suicides... » Oui, il voyait très bien, mais qu’est-ce que cette vieille histoire foutait là. Son regard suivait le sien, vers cette jeune femme qui jusqu’à présent, partager ces instants. La connexion était dure à se faire. Un sourire espiègle sur le visage, il devait paraître totalement con ou accro à cet instant. « Oui, je dois dire qu’elle ne laisse pas insensible…Attends... » La fuir, à moins d’avoir une bonne raison, il n’avait pas de raison de le faire. Il ne connaissait pas plus cet homme que… « Tu la connais ? Si tu dis ça, ce n’est pas anodin » Ces sourcils se froissèrent légèrement. « Putain, bientôt, il va falloir demander un casier judiciaire pour sortir avec quelqu’un… Elle a quoi ? Elle est plus jeune, elle a menti, c’est une serrial Killeuse ? » Malgré ça, le ton de sa voix était serein. Comme si plus rien ne l’étonnait, plus basé que vraiment touché.

Cherchant à se détendre, Livio s'était octroyé un petit verre bien mérité après une journée éprouvante. Il avait rapidement accepté l'invitation d'un pote qu'il avait connu dès son arrivée à Bowen et qui voulait lui présenter sa bande d'amis. Mais durant la soirée, Livio s'était isolé, allant jusqu'au comptoir pour commander la prochaine tournée. En attendant que le barman se libère, il s'était amusé à regarder la foule, ses yeux bleus s'arrêtant sur cette bombe atomique qui avait attrapé quelqu'un dans ses filets. Qu'elle était maligne... Très vite, la 'proie' de la beauté fatale s'avança jusqu'au comptoir, juste à côté de Livio. L'italien profita d'ailleurs de ce moment pour lui lancer un message, utilisant le fameux chant des sirènes pour lui faire comprendre qu'il se mettait dans une belle galère. Il hocha la tête face aux mots du brun. "Oui, je parle bien de cet envoûtement." répondit-il en gardant le mystère, ses lèvres s'étirant en un sourire amusé. Et le brun semblait bel et bien envoûté, vu le sourire con et l'air benêt qu'il affichait. Mais très vite, Livio donna plus de détails, lui conseillant de fuir la belle au plus vite. Il haussa les épaules face à ces mots, secouant la tête : "La connaître est un bien grand mot. Disons plutôt que j'ai eu l'occasion de partager une nuit avec elle..." A son arrivée à Bowen, d'ailleurs. Et c'était là qu'il s'était rendu compte qu'il n'y avait pas que l'Australie qui était chaude, les australiennes l'étaient tout autant... Livio se mit à rire quand le jeune homme parla de casier judiciaire, enchaînant les questions sur le véritable travers de la jeune femme. "Non, elle n'est pas plus jeune et elle n'est pas une serial killeuse. Sinon, je ne serai pas là pour t'en parler." commença-t-il. "Par contre, si tu tiens à ton porte-feuille, à ta carte de crédit et à tes économies, tu ferais mieux de les mettre hors de sa portée... Je te dis ça parce que j'ai failli me faire avoir comme un bleu." Et Livio éclata de rire, prenant bien le fait qu'il s'était laissé totalement envoûter par une femme aux courbes délicieuses. C'était sa plus grosse faiblesse, disait-il, et cette nuit l'avait bien prouvé.

Cette soirée, à l’origine devait bien se terminer. Enfin, c’était un plan dès plus classique. Sauf qu'il était loin de s’imaginer qu’il était en train de se faire avoir du moins comme ça. Le jeu de la séduction, il doit l’avouer, il aimait ça, sauf que le but n’avait jamais été de tromper l’autre. Trouver un certain attrait à dépasser ce qu’on ne faisait jamais dans la vie de tous les jours. D’aimer plaire, de passer un moment, dans un plaisir de corps et d’échange, pour un soir ou deux. Il avait donné dans les sentiments, et cumuler les échecs. C’était une alternative enviable, et qu’il n’a pas peiné à envisager, sans la moindre contrainte ou tout le monde trouvait satisfaction. Est-ce qu’il aurait dû croire l'affirmation, d’un total inconnu, dans un endroit, comme ce bar. D’amusement. Il aurait pu croire, que la rivalité était en question. De lui laisser le champ libre, pour une drague improvisée. Mais il avait du mal à croire que la personne en face de lui était son but, quelque chose lui en dissuada. Son regard se posa sur cette femme aux formes provocantes, un instant. Visualisant ces gestes, son sourire minaude et pleins de promesses. D’un seul coup, il se rendait compte que ce jeu n’était pas que pour lui, que sa façon d’agir était un appel au monde vaste autour d’elle. Idiot qui y répondrait… Une main venait frottait son front, lâchant un soupir, dont le sentiment d’être idiot ne le lâchait pas. «  Oui... » Il venait peut-être de louper un sacrer coup, mais si c’était pour avoir les retombés derrière… Est-ce que ça valait vraiment le coup. «  Put... Fait chier. Quel idiot ! J'aoue que j'ai le désagréable sentiment d'être ce mec qui ne pense qu'avec ...» Pas la peine de faire un dessin. Au moins, visiblement, ce n’était pas le seul, bien que ça ne le réconfortait pas plus que ça. Avouant lui qu’il s’est fait tromper. Finalement, c’est certainement un merci qui devait lui rendre. Il aurait bien pu regarder, se moquer de son ignorance et le laisser se prendre au piège. Se délectant de sa faiblesse. «  Donc je te dois un merci et un verre, pour avoir échappé à mon dépouillage ! » Dit-il en souriant, bien que le cœur n’y était pas. « J’y crois pas… » Quel idiot, finalement l’homme était bien faible face à la luxure. Ce n’était pas un mythe. «  J’ai failli ? Tu l’as évité ? Comment ? » Il appela le barman d’un geste de la main, pour commander. « Prend ce que tu veux, j’invite ! » Il n’était plus à un verre près. « Hum… Personne jusqu’à maintenant, c’est vengé puisqu’elle recommence » Là à cet instant, il avait l’imagination très active.

Oui, sans doute le jeune homme aurait pu se moquer des mises en garde de Livio, ou pire, croire que l'italien tentait de mettre de côté un éventuel rival. Mais ce n'était pas du tout cela. Il voulait juste éviter un vrai désagrément à un autre homme. Et visiblement, la sincérité se lut sur le visage de Livio puisque le jeune homme sembla rapidement se rendre compte des agissements de la beauté fatale. Il remarqua son regard qui changea, comme s'il était désenvoûté, comme s'il remarquait enfin que la jeune femme avait déjà changé de cible, lançant des regards langoureux à ceux qui la croisaient. Livio lâcha un léger rire quand le jeune homme s'exclama, avouant qu'il avait le sentiment de ne penser qu'avec ce qu'il y avait dans son boxer. L'italien haussa les épaules et tenta de le rassurer : "Il faut dire qu'elle est très forte à ce jeu-là. N'importe qui tomberait dans son piège..." L'homme était faible, encore plus face à une femme de cette trempe-là, au fort caractère, à la répartie cinglante, aux courbes sublimes. Il était là, le problème, elle n'était pas qu'un corps, une paire de seins, une paire de fesses. Elle était maline, intelligente et charmait tout autant avec les mots. Un vrai danger public. Livio fit un signe de la main nonchalant quand le jeune homme lui dit qu'il lui devait un merci. "C'est juste de la pure solidarité masculine." Et parce qu'il s'était bien fait avoir, lui aussi. Livio se mit à rire quand justement il essaya d'en savoir plus. "Je ne l'ai pas vraiment évité dans le sens où j'ai quand même passé la nuit avec. Et quelle nuit d'ailleurs..." dit-il en riant. "Mais le matin, alors qu'elle croyait que je dormais encore, je l'ai prise la main dans le sac en train de fouiller dans mes affaires." Il leva les yeux au ciel. "Si j'avais eu le sommeil lourd, je me serais fait avoir." Le jeune homme fit appel au barman, mais Livio montra qu'il avait encore de quoi boire. "C'est gentil, merci." Ce furent surtout ses dernières paroles qui éveillèrent une lueur malicieuse dans le regard si bleu de Livio. "Tu as une idée pour qu'elle arrête son manège ?" demanda-t-il, intéressé.